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mercredi 22 février 2023

Douglas Sirk (1897-1987)

Douglas Sirk (1897-1987), né Hans Detlef Sierck était un metteur en scène, réalisateur - La Neuvième Symphonie (Schlußakkord, 1936), Paramatta, bagne de femmes (Zu neuen Ufern, 1937), La Habanera (1937) -, scénariste allemand d'origine danoise qui a effectué la deuxième partie de sa carrière artistique à Hollywood : Hitler's Madman (1943), L'Aveu (Summer Storm, 1944). Il est renommé pour ses mélodrames flamboyants - Tout ce que le ciel permet, Écrit sur du vent, Mirage de la vie, Le Secret magnifique - , et empreints d'une grande finesse psychologique. Arte diffusera le 27 février 2023, dans le cadre d'un hommage à ce réalisateur, à 20 h 50 « Écrit sur du vent » (In den Wind geschrieben) de Douglas Sirk avec Rock Hudson, Lauren Bacall, Robert Stack et Dorothy Malone, puis, à 22 h 30 « Douglas Sirk - Le cinéaste du mélodrame » (Douglas Sirk – Meister des Melodrams), documentaire de Roman Hüben.


« Les angles de prise de vue sont les pensées du cinéaste. Les éclairages sont sa philosophie. Bien avant Wittgenstein, j'ai appris à me méfier du langage comme interprète fidèle de la réalité. J'ai appris à me fier davantage à mes yeux qu'au souffle des mots… y a une chose que les Cahiers du cinéma ont dite qui m'a fait très plaisir, sur le fait que ma caméra "devenait les gens". J'ai toujours travaillé avec une caméra très mobile… Ce qui est intéressant dans un miroir, c'est qu'il ne montre pas l'individu tel qu'il est, mais son opposé », a déclaré Douglas Sirk.

« Douglas Sirk - Le cinéaste du mélodrame »
Arte diffusera le 27 février 2023 à 22 h 30 « Douglas Sirk - Le cinéaste du mélodrame » (Douglas Sirk – Meister des Melodrams ; Douglas Sirk, Hope as in Despair), documentaire de Roman Hüben.

« Auteur des plus beaux mélodrames du cinéma hollywoodien, le réalisateur de "Mirage de la vie", né en Allemagne, cachait une tragédie intime qui a hanté son oeuvre. À l’image de ses films, une déchirante plongée dans le secret de Douglas Sirk. » 

« Retiré à Lugano, en Suisse, le discret Douglas Sirk (1897-1987) avait exigé de son biographe, Jon Halliday, qu’il ne dévoile son drame intime qu’après sa mort ». 

« Né Hans Detlef Sierck en Allemagne de parents danois, le maître du mélodrame hollywoodien des années 1950, dont les films déchirants, d’Écrit sur du vent au Secret magnifique, composent la subtile partition d'un mystère étranger au cinéma de l’époque, débute sa carrière au théâtre ».

« Metteur en scène remarié avec la comédienne juive Hilde Jary, il est poussé, après l’accession de Hitler au pouvoir, vers les studios de la UFA, que Goebbels n’a pas encore mis sous sa coupe ». 

« Surtout, son fils unique Klaus, né en 1925 de sa première union avec l’actrice Lydia Brincken, devenue nazie, lui est arraché. Le réalisateur ne reverra plus jamais, sinon à l’écran, cet enfant comédien, dont on exploite la beauté cinégénique pour des films de propagande ».

« Dans la nuit de Noël 1937, Douglas Sirk et Hilde Jary, brisés, abandonnent tout derrière eux pour s’exiler aux États-Unis. Mobilisé, Klaus, lui, tombera sur le front russe à 19 ans. Une tragédie indicible, qui inspirera à Sirk le scénario du poignant Le temps d’aimer et le temps de mourir et, au-delà, infusera tout son cinéma, comme ses héros ordinaires, d’un lancinant désespoir ». Douglas Sirk a confié n'être pas parvenu à connaître la date et le lieu du décès de son fils unique.

« Touché par l’infinie tendresse de Sirk pour ses personnages, Rainer Werner Fassbinder disait de ses somptueux mélos : "Même si ce sont des films faits de manière artificielle et travaillée, ils sont incroyablement vivants." 

« Avec Jon Halliday et le réalisateur Todd Haynes – dont le film Loin du paradis est le remake d'un autre opus de Sirk, Tout ce que le ciel permet –, mais aussi grâce aux élégants carnets de son épouse Hilde Jary, ce documentaire (2021) explore l’œuvre du cinéaste exilé à la lumière de la blessure secrète qui le hantait ». 

« Cette douleur silencieuse éclaire aussi l’attachement profond qui le liait à son acteur fétiche, Rock Hudson, né la même année que son fils disparu », en 1925. 

« Tournant le dos aux passages obligés du biopic, le portrait sensible d’un artiste aussi tourmenté qu’animé d’une bouleversante humanité. »

Suisse abrite les archives abondantes de Douglas Sirk - il a continué jusqu'à sa mort à écrire notamment des pièces de théâtres - et de son épouse. Dès ses premières œuvres, apparaissent les thèmes développés au théâtre et au cinéma par Douglas Sirk.


"Un père sans enfant"
En 2019, Allary Editions ont publié "Un père sans enfant" de Denis Rossano. Ce livre a été un des trois lauréats du prix Révélation 2019 de la Société des Gens de Lettres. 

"Le père est un des plus grands cinéastes d’Hollywood. Le fils est un jeune premier du cinéma nazi. Le roman vrai de leur déchirure. Un père sans enfant est un roman vrai, digne des plus grands mélodrames."

"Le père est Douglas Sirk, metteur en scène de théâtre dans les années 20 et réalisateur apprécié de Goebbels dans les années 30. Marié à une juive, il doit fuir l’Allemagne pour les États-Unis où, grâce à ses mélodrames, il conquiert Hollywood."

"L’enfant est Klaus Detlef Sierck, le fils que Douglas a eu avec sa première femme, une actrice ratée devenue une nazie fanatique. Quand ils divorcent en 1928, elle lui interdit de voir son fils de quatre ans dont elle fera un enfant star du cinéma sous le Troisième Reich."

"Le père ne reverra jamais son fils, sauf à l’écran."

"Au soir de sa vie, dans les années 80, Douglas Sirk s’entretient avec Denis Rossano, un jeune étudiant en cinéma. Le réalisateur fait revivre Berlin, la propagande, son second mariage, l’exil, les grands studios après guerre, mais ne dit rien ou presque sur Klaus. Toute la vie, toute l’œuvre de cet homme furent pourtant la quête désespérée de son fils adoré."

"Pour mettre des mots sur cette histoire que Douglas Sirk n’a jamais racontée, Denis Rossano mène l’enquête, jusqu’à découvrir ce que le cinéaste lui-même ignorait."

Cinémathèque française
Du 31 août au 26 octobre 2022, la Cinémathèque française a rendu hommage à Douglas Sirk, « l'un des cinéastes les plus importants de l'âge d'or d'Hollywood, adulé par Godard, vénéré par Fassbinder, qui louèrent sa liberté formelle et son sentimentalisme raffiné. Né Hans Detlef Sierck en 1897 à Hambourg, de parents danois, il figure parmi les meilleurs metteurs en scène de théâtre dans l'Allemagne de Weimar, avant d'exercer son talent dans des films produits par la UFA, une dizaine de longs métrages aux personnages ambigus et déchirés. Paramatta, bagne de femme et La Habanera font éclore une vedette, l'actrice et chanteuse suédoise Zarah Leander, alors même que le cinéaste trouve son genre de prédilection, le mélodrame. Fuyant le nazisme, exilé aux États-Unis, celui qu'on appelle désormais Douglas Sirk s'essaye au biopic en costumes (Scandale à Paris), au thriller (Des filles disparaissent), au film d'espionnage (Le Sous-marin mystérieux) ou d'aventure (Capitaine Mystère). Mais c'est avec son retour au mélo et sa rencontre avec l'acteur Rock Hudson qu'il révèle tout son génie. Caractérisées par des personnages féminins forts, une utilisation exacerbée de la couleur et un sens profond des émotions humaines, des œuvres majeures comme Tout ce que le ciel permet, Écrit sur du vent ou Mirage de la vie – pourtant méprisées à leur sortie – ont imprimé à jamais l'histoire du cinéma et demeurent source d'inspiration pour nombre de réalisateurs, fascinés, aujourd'hui encore, par ces mélodrames flamboyants. »

« Douglas Sirk n'est plus l'inconnu de l'histoire du cinéma qu'il est resté pendant toute son activité. On a reconnu en lui depuis longtemps le maître du mélodrame américain ; son point de vue critique sur les États-Unis, sa sensibilité féministe, ont été analysés. Avec le recul, on découvre une productivité et une diversité étonnantes : quarante films en vingt-cinq ans, avec au milieu une interruption de quatre ans due à l'exil », a écrit Bernard Eisenschitz, traducteur et historien du cinéma, auteur notamment de Douglas Sirk, né Detlef Sierck (Les éditions de l’Oeil), dans son article « Douglas Sirk, du mélodrame au cinéma total » (1 juin 2022).

Et Bernard Eisenschitz d’analyser la période allemande du réalisateur : « Douglas Sirk s'appelle encore Detlef Sierck quand il commence à mettre en scène au théâtre, juste après la Première Guerre mondiale. À vingt-cinq ans à peine, ce surdoué prend la direction du théâtre de Chemnitz, puis de Brême et de Leipzig, où il dirige la programmation et met en scène lui-même : certaines années, plus d'une pièce par mois. Alors que la république de Weimar va vers sa fin, ses spectacles abordent des sujets brûlants, l'occupation de la Ruhr, la condamnation des anarchistes Sacco et Vanzetti aux États-Unis, la femme dans le mariage, l'industrie... Au début de 1933, sa création à Leipzig du Lac d'argent, opéra de Kurt Weill, fait scandale et est attaquée par la presse nazie et menacée par les SA une semaine avant l'incendie du Reichstag. Ses jours au théâtre sont comptés. La UFA, le plus grand studio européen, a gardé le souvenir du meilleur cinéma allemand. Sirk décide avec le cinéma de se débarrasser de la culture « élitaire » du théâtre, dont il reste profondément marqué. Mais son travail scénique va irriguer tout son art. Il va transposer au cinéma le meilleur de son expérience, et n'oubliera jamais que la mise en scène est au cœur du spectacle. Comme Cukor, Visconti, Bergman, Ophuls, c'est à partir de, et avec, son bagage de théâtre que Sirk sera cinéaste. Il se plonge dans le cinéma avec une fureur de travail : sept longs métrages en trois ans. Le meilleur, Schlussakkord (La Neuvième symphonie), est un mélodrame qui appose déjà sa signature sur le genre : la lutte autour d'un enfant, une épouse infidèle, et la fascination de l'Amérique, le spectacle dans le spectacle, la présence de la musique à travers un héros chef d'orchestre. Enfin, il crée la star internationale qui manque à l'Allemagne après 1933 : Zarah Leander, chanteuse androgyne à la voix grave, dans les deux films qui définissent son image, Paramatta, bagne de femmes et La Habanera. Ce sont d'immenses succès. Mais en cette année 1937, Goebbels met la main sur la UFA, qui sera désormais au service de l'État nazi. Sierck est attaqué à cause de sa femme juive. Plutôt que d'être contraint aux compromis, il décide de partir avec elle. Dans des circonstances aventureuses, et sans perspective concrète dans l'exil, ils fuient l'Allemagne dans les derniers jours de 1937. »

« Sierck émigre à quarante ans. Il a mis en scène une bonne centaine de pièces dans quatre villes, traduit Shakespeare et d'autres auteurs, formé des comédiens de théâtre et de cinéma, réalisé sept films à succès, lancé une star. Mais sa réputation ne l'aidera pas à la mesure de ces accomplissements. Le couple a un but, l'Amérique. Après une errance de deux ans à travers l'Europe, une fois arrivés à destination, en Californie, Douglas Sirk (son nouveau nom) et sa femme tiennent une ferme et vivent à l'écart du cinéma. Il découvre et apprend à aimer profondément – et sans illusions – le pays et ses habitants », écrit Bernard Eisenschitz sur les débuts de la période américaine de Douglas Sirk.

Et Bernard Eisenschitz de poursuivre : « Un groupe d'exilés fait appel à lui pour diriger Hitler's Madman, sur l'attentat contre le « bourreau » de la Tchécoslovaquie, le Reichsprotektor Heydrich (parallèlement aux Bourreaux meurent aussi de Fritz Lang). Son activité de cinéaste reprend. Le temps de trois films, il croise son acteur idéal, George Sanders. L'élégance désabusée et l'ambiguïté de ce dandy européen donnent à des films comme Scandale à Paris une forme de mélancolie légère qu'il qualifie lui-même à l'occasion de « mozartienne ». Dans un second mouvement, il s'intéresse à la réversibilité des relations humaines avec Jenny, femme marquée (d'après un scénario de Samuel Fuller) ou à la mince frontière entre le visible et l'invisible dans le grand film méconnu qu'est La Première Légion. »

« Après l'échec d'une tentative de retour en Allemagne en 1949, nouveau tournant. Au lieu de l'indépendance, Sirk cherche la discipline d'un studio pour se construire un espace de liberté. Il le trouve dans la plus petite des majors, Universal. Il y devient une sorte de « réalisateur maison », travaillant à la commande un peu de la manière dont, en Allemagne, il pouvait monter une quinzaine de pièces dans la saison : six films en un an et demi (1951-1953), vingt et un en huit ans. Il affine son attitude envers le matériel ingrat qui lui est fourni, se glisse dans les conventions des genres. Il ébauche une petite comédie humaine, un tableau ironique de l'Amérique des petites villes vue d'en bas. On est frappé dans ces films par le soin, la précision de la facture, par une volonté d'épuiser les ressources du décor et bientôt de la couleur (Qui donc a vu ma belle ?), qualités rares dans les studios californiens. Parti de ce travail « à la chaîne », Sirk métamorphose les commandes pour aborder enfin la grande forme, répondant à l'étymologie (qu'il a souvent rappelée) du mot « mélodrame » : drame avec musique. Grand directeur d'acteurs, il éveille le talent de Rock Hudson et bientôt de Robert Stack et Dorothy Malone, offre à James Dean l'occasion de faire sa première apparition à l'écran. Sous sa direction, Charles Boyer, Barbara Stanwyck, Charles Coburn, Jack Palance, Lana Turner se surpassent », a précisé Bernard Eisenschitz.

Et Bernard Eisenschitz de conclure : « De film en film, cet immigrant capture comme peu l'ont fait l'esprit et l'autoreprésentation du pays, jusque dans ses tares : bigoterie, misogynie, culte de l'argent, mépris de classe, racisme... Ses plus beaux personnages sont des marginaux : Rock Hudson dans Tout ce que le ciel permet, les aviateurs dans La Ronde de l'aube, la métisse Susan Kohner dans Mirage de la vie... Si on ajoute Écrit sur du vent et Le Temps d'aimer et le temps de mourir, on a le sommet de son parcours hollywoodien, au terme duquel il tient à retrouver l'Europe. Encore quelques mises en scène de théâtre, trois courts métrages avec les étudiants de Munich et, en manière de testament, un des plus beaux livres sur le cinéma : Conversations avec Douglas Sirk de Jon Halliday. »

« La habanera »
Arte diffuse sur son site Internet « La habanera » de Detlef Sierck. "C’est d’abord un mélo avec son histoire d’étrangère sublime, mal mariée, qui se languit en chantant, alors qu’une épidémie fait des ravages aux alentours. Interprétée par Zarah Leander, ce personnage de femme maltraitée par un époux très puissant, n’en finit de jouer l’attente dans sa riche demeure stylée."

« Maltraitée par son mari, un puissant propriétaire terrien portoricain, Astrée veut fuir en Suède avec son fils... Entre mélodrame et satire sociale, le dernier film allemand de Douglas Sirk, porté par l’émouvante Zarah Leander. » 

« En voyage à Porto Rico avec sa tante Ana, Astrée, une jeune Suédoise, est tombée sous le charme des coutumes, de la gaieté ensoleillée et de l’homme le plus influent de l’île, don Pedro de Avila. Sur le pont du paquebot devant la ramener à Stockholm, elle n’a pu résister à l’appel de "La habanera", une chanson populaire jouée par des musiciens ambulants. Dix ans plus tard, mariée à don Pedro et mère d’un petit garçon, Astrée ne supporte plus cette mélodie. Écrasée par la froideur et la jalousie maladive de son époux, elle n’aspire qu’à une chose : retourner en Suède avec son fils. Au même moment, le docteur Sven Nagel, autrefois fou amoureux d’elle, débarque sur l’île en compagnie d’un collègue brésilien, pour tenter d’éradiquer une fièvre dont les autorités nient la dangerosité… » 

« Dernier film allemand de Douglas Sirk, qui s’appelait encore Hans Detlef Sierck, La habanera a été tourné à Tenerife, en pleine guerre civile espagnole ». 

« Le réalisateur, qui sera bientôt contraint de fuir l’Allemagne nazie, y déploie une douloureuse histoire d’amour et d’exil, sur fond de critique anticapitaliste ». 

« Tandis que Don Pedro et le gouverneur américain de l’île se liguent, au mépris des vies humaines, pour dissimuler une épidémie qui menace les échanges commerciaux, Astrée dépérit, victime de la cruauté d’un homme prêt à lui enlever son fils ». 

Face à Ferdinand Marian (qui incarnera par la suite Le juif Süss, sous la pression de Goebbels), Zarah Leander se révèle particulièrement émouvante en épouse désenchantée, diluant sa nostalgie dans le chant et les sourires de son enfant – jusqu’à l’arrivée des deux médecins, synonyme d’espoir ». 

« Une œuvre à (re)découvrir, qui se distingue par l’élégance de sa mise en scène et le jeu expressif de ses interprètes, dans la lignée du cinéma muet. »

« Écrit sur du vent »
Arte diffusera le 27 février 2023 à 20 h 50 « Écrit sur du vent » (In den Wind geschrieben) de Douglas Sirk avec Rock Hudson, Lauren Bacall, Robert Stack, Dorothy Malone.

« Alcoolique, Kyle soupçonne sa femme d’avoir une liaison avec son ami d’enfance... Un mélodrame flamboyant issu de la fructueuse collaboration entre le cinéaste Douglas Sirk et Rock Hudson, son acteur fétiche - entouré ici de Lauren Bacall, Robert Stack et Dorothy Malone. »

« Fils névrosé d’un magnat du pétrole, Kyle abuse de l’alcool, quand sa sœur Marylee, nymphomane, lui voue une haine tenace. Avec Mitch, son ami d’enfance, il rencontre Lucy, dont il tombe follement amoureux. Celle-ci accepte de l’épouser, avec l’espoir de le guérir de son penchant pour la bouteille, au grand dam de Mitch, lui aussi épris de la belle. Un jour, Kyle apprend qu’il sera très difficile pour lui d’avoir un enfant. Comme Lucy est enceinte, il est bientôt rongé de soupçons envers son ami... » 

« Dans un déluge chromatique façon Technicolor, Douglas Sirk, le roi du mélodrame flamboyant, signe l’un de ses opus les plus remarquables, porté par un puissant quatuor d’acteurs – Lauren Bacall, Robert Stack, Dorothy Malone et Rock Hudson, son interprète fétiche, ici dans l’un de ses plus beaux rôles. Pétrole, argent, alcool et névroses… »

« Dénonçant la perversité et les illusions d’une société capitaliste gangrenée par un matérialisme ostentatoire, Écrit sur du vent confronte ses protagonistes à leurs zones d’ombre, plongeant dans les méandres secrets de leur âme pour les précipiter, avec un extraordinaire lyrisme, vers leur inéluctable destin ». 

« Une tragédie où le rêve américain se teinte d’une profonde noirceur et où, au détour de l’outrance, pointent tout à la fois la désespérance et la discrète ironie sirkiennes ». 

Meilleure actrice dans un second rôle (Dorothy Malone), Oscars 1957 


« Le temps d'aimer et le temps de mourir »
En 1958, Douglas Sirk a réalisé « Le temps d'aimer et le temps de mourir » (A Time to Love and a Time to Die).

« L’éphémère et intense parenthèse de vie, au milieu des ruines, d’un soldat allemand en permission. Un chef-d’œuvre à l'image de son titre sublime, signé du maître Douglas Sirk, au sommet de sa carrière. »

« En 1944, Ernst Graeber, un soldat allemand plongé dans l’enfer du front germano-soviétique, revient chez lui le temps d’une permission. Il trouve sa ville à moitié détruite par les bombardements, alors que sa famille a disparu. Errant dans les ruines, le jeune homme rencontre Elizabeth, une amie d’enfance, dont le père, médecin résistant, est interné dans un camp de concentration. Tous deux vont vivre une courte idylle, avant de décider de se marier. Son titre résume à lui seul l’urgente intensité qui le traverse... »

« Considéré par certains, dont Godard, comme l’un des plus beaux films du monde, ce mélo flamboyant met en évidence la cruauté dévastatrice de la guerre et la splendide fragilité de l’amour qui lui résiste et tente de lui échapper ». 

« Car la douce mais résolue Elizabeth (magnifique Liselotte Pulver) emmène avec une dignité sans faille son soldat perdu et en sursis du régime nazi vers le meilleur au milieu du pire. »

« Beauté des images en Technicolor, rigueur du cadre, délicate retenue des dialogues... : en adaptant l’œuvre d’Erich Maria Remarque, inlassable pacifiste et chroniqueur inspiré du vertigineux désarroi des soldats sur le front, Douglas Sirk peint avec une élégance inégalée l’horreur et l’espoir, l’aliénation et la liberté de choix, la vie et la mort ». 

« Exilé à Hollywood, le cinéaste d’origine danoise qui a grandi en Allemagne, auteur, entre autres chefs-d’œuvre, du Secret magnifique, insuffle une fois encore à cette fresque intimiste le romantisme déchirant qui reste sa marque de fabrique. Car à travers les couleurs vacillantes des saisons miroitent celles, incandescentes, des grandeurs de l’âme, à l’image de cet arbre en fleurs somptueux dans la neige. »

« Je n’ai jamais cru autant à l’Allemagne en guerre qu’en voyant ce film américain tourné en temps de paix » écrivit le jeune critique Jean-Luc Godard dans un article devenu célèbre publié dans les Cahiers du Cinéma au moment de la sortie française du film. On ne peut que lui donner raison tant le chef-d’œuvre de Sirk, loin des clichés de la reconstitution guerrière selon les studios hollywoodiens, atteint une forme de vérité et de tragique pas si éloignée de Allemagne année zéro de Roberto Rossellini qui racontait, déjà, le lent chemin d’un enfant vers la mort, à travers les ruines de l’Allemagne. Avant-dernier long métrage américain du cinéaste allemand, prince du mélodrame exilé aux Etats-Unis dès le début des années 40, Le Temps d’aimer et le temps de mourir est une adaptation d’un roman de Erich Maria Remarque, écrivain très prisé par Hollywood depuis le triomphe de A l’ouest rien de nouveau", a écrit Olivier Père pour Arte.

Et Olivier Père de relater l'intrigue du film : "Pendant la Seconde Guerre mondiale, lors de la terrible retraite de Russie, un jeune officier allemand (John Gavin, pâle substitut à Paul Newman initialement pressenti, Rock Hudson du pauvre, mais qu’importe) bénéficie d’une permission, la première depuis deux années de combats. Il arrive à Berlin dévastée par les bombardements, découvre que la maison familiale a été détruite, et tombe amoureux de son amie d’enfance (Liselotte Pulver). Avec un incroyable sens de l’épure Sirk parvient à montrer l’horreur de la guerre en quelques plans lors du prologue : une main gelée jaillissant de la neige, une goutte d’eau en forme de larme sur l’œil d’un cadavre en train de dégeler, un amas de terre sous lequel gisent des otages fusillés, autant d’images poétiques inoubliables dans un film aux accents intimes longtemps cachés par le cinéaste. Le Temps d’aimer et le Temps de mourir est le film le plus secrètement autobiographique de Douglas Sirk, et pas seulement parce que le cinéaste déambulera lui aussi au milieu des ruines de son pays".

"En effet Sirk était hanté par le sort tragique de son fils, né d’un premier mariage. Sa première femme était une militante nazie et avait embrigadé son fils en partie par vengeance envers Sirk dont la seconde femme était d’origine juive. Le fils endoctriné de Sirk a probablement été tué sur le front russe au printemps 1944. Sirk malgré ses nombreuses démarches ne parviendra pas à le sauver ni à le retrouver, vivant ou mort. L’adaptation d’un roman de Erich Maria Remarque – qui ne tarira pas d’éloges ni sur le film ni sur Sirk – devient alors pour le cinéaste un prétexte lui permettant d’évoquer le destin de son fils unique disparu sans laisser de trace. Le film est hanté par l’image manquante d’un fils dont le cinéaste rêve ce que furent les dernières semaines, allant jusqu’à mettre en scène sa mort cinématographique qui vient se substituer à sa véritable disparition, demeurée hors champs. Jamais une superproduction hollywoodienne n’aura été aussi proche d’une lettre d’amour d’un père écrite à son enfant mort", a conclu Olivier Père.


Suisse, Allemagne, France, 2021, 52 mn
Production : ZDF, Berlin Producers, Pic-Film
Producteur : Nicola Genni
Musique : Martin Perret 
Sur Arte le 27 février 2023 à 22 h 30
Sur arte.tv du 27/02/2023 au 27/05/2023
Visuels :  © Mathieu Gaudet

Denis Rossano, "Un père sans enfant". Allary Editions, 2019. 368 pages. ISBN: 9782370732880. 20,90 € 

« La habanera » de Detlef Sierck
Allemagne, 1937, 98 min
Production : UFA
Scénario : Gerhard Menzel
Avec : Zarah Leander, Julia Serda, Ferdinand Marian, Karl Martell, Boris Alekin
Disponible du 01/02/2023 au 30/07/2023

« Écrit sur du vent » de Douglas Sirk
Etats-Unis, 1956, 1 h 35
Auteur : Robert Wilder
Scénario : George Zuckerman
Production : Universal International Pictures
Producteur : Albert Zugsmith
Image : Russell Metty
Montage : Russell F. Schoengarth
Musique : Frank Skinner
Avec Rock Hudson (Mitch Wayne), Lauren Bacall (Lucy Moore Hadley), Robert Stack (Kyle Hadley), Dorothy Malone (Marylee Hadley), Robert Keith (Jasper Hadley)
Sur Arte les 27 février 2023 à 20 h 50, 28 février 2023 à 13 h 35
Visuels : © 2022 ARD/Degeto

États-Unis/Allemagne, 1958, 2 h 06 mn, VF/VOSTF
Production : Universal International Pictures
Scénario : Orin Jannings, d’après le roman d’Erich Maria Remarque
Image : Russell Metty
Montage : Ted J. Kent – 
Musique : Miklós Rózsa
Avec John Gavin (Ernst Graeber), Liselotte Pulver (Elizabeth Kruse Graeber), Jock Mahonney (Immerman), Don DeFore (Hermann Boettcher), Keenan Wynn (Reuter), Erich Maria Remarque (le professeur Pohlmann), Klaus Kinski (le lieutenant de la Gestapo)

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