Citations

« Le goût de la vérité n’empêche pas la prise de parti. » (Albert Camus)
« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
« Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. » (Vladimir Jankélévitch)
« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

vendredi 30 octobre 2020

Charles Aznavour (1924-2018)


Né dans une famille d'émigrés arméniens, Charles Aznavour (1924-2018) était un artiste talentueux, intelligent, curieux, maîtrisant la comédie, le drame, la photographie, la composition de musiques et l'écriture de chansons narratives, généreux à l'égard des jeunes artistes, un amoureux de la langue française, et osant aborder des sujets sensibles. Le 26 octobre 2017, en Israël, il a reçu la médaille Raoul Wallenberg pour l’aide apporté par sa famille aux Juifs et Arméniens. Une distinction remise par le président israélien Reuven Rivlin. Le 23 octobre 2020, le quotidien israélien de gauche Haaretz a publié la lettre ouverte de Nicolas Aznavour, fils de l'artiste, cofondateur et président du conseil d’administration de la Fondation Aznavour, adressée au président d’Israël Reuven Rivlin afin qu'il intervienne "pour assurer un moratoire sur la vente de ces armes à l’Azerbaïdjan". 


Quatre-vingts ans de carrière, plus de mille chansons composées – Jezebel, Plus bleu que tes yeux, Le feutre taupé (1948), Sur ma vie (1956), Je m’voyais déjà (1960), Tu t’laisses aller (1960), Il faut savoir (1961), Les comédiens (1962), La mamma (1963), Et pourtant (1963), Hier encore (1964), For Me Formidable (1964), Que c'est triste Venise (1964), La Bohème (1965), Emmenez-moi (1967), Désormais (1969), Comme ils disent (1972), La Marguerite  -, concerts dans le monde en six langues différentes, plus de 180 millions de disques vendus, une filmographie de plus de 70 longs métrages, ambassadeur d’Arménie en Suisse... 

Exceptionnel palmarès d’un artiste, Charles Aznavour, né en 1924 lors du séjour de ses parents, survivants du génocide commis à l’égard des Arméniens dans l’empire ottoman et artistes amateurs, à Paris dans l’attente de leurs visas pour les Etats-Unis. Pour la terre de ses ancêtres, il crée une Fondation Aznavour pour l’Arménie, crée Pour toi Arménie chantée par 80 artistes émus par le séisme ayant frappé ce pays (1989).

Avec sa sœur Aïda qui a l’oreille absolue, cet enfant de la balle apprend son métier à l’Ecole des enfants du spectacle, et débute une carrière d’acteur et de chanteur, notamment dans la compagnie de Jean Dasté. Ses parents cachent  des Juifs et des résistants, dont des membres du groupe Manouchian.
Grâce à Raoul Breton, éditeur de Charles Trénet, Charles Aznavour est présenté aux artistes qui comptent dans la variété française.

A la Libération, il forme un duo avec le pianiste Pierre Roche et fait une tournée au Canada - le duo dure huit ans. Remarqué par Edith Piaf, il rentre en France, et sert d’homme à tout faire - secrétaire, chauffeur, etc. - pour la chanteuse qui le persuade de subir une rhinoplastie en 1950. 

S’il peine à s’imposer auprès du public comme interprète – « Mes handicaps ? Ma voix, ma taille, mes gestes, mon manque de culture et d'instruction, ma franchise, mon manque de personnalité. Ma voix ? Impossible de la changer. Les professeurs que j'ai consultés sont catégoriques : ils m'ont déconseillé de chanter. Je chanterai pourtant, quitte à m'en déchirer la glotte. D'une petite dixième, je peux obtenir une étendue de près de trois octaves. Je peux avoir les possibilités d'un chanteur classique, malgré le brouillard qui voile mon timbre. De la ténacité j'en ai eu, et elle a payé » -, il co-écrit notamment avec Gilbert Bécaud et son beau-frère Georges Garvarentz, des standards interprétés par les plus célèbres chanteurs : Edith Piaf (C'est un gars, Plus bleu que tes yeux, Jezebel) - Piaf reconnaissait en Aznavour la même manière de "croquer dans les mots" -, Juliette Gréco (Je hais les dimanches), Eddie Constantine (Et bâiller et dormir), Marcel Amont (Le Mexicain), Gilbert Bécaud (Mé-qué, mé-qué)…

Ses premiers succès de chanteur surviennent vers 1956 auprès des publics difficiles de Marseille et de Casablanc (Maroc). Et notamment auprès des spectateurs juifs.

Charles Aznavour comparait son métier d'auteur à celui d'écrivain, plutôt que de poète. Un "écrivain de la chanson".

"Tirez sur le pianiste"
Le Cercle Bernard Lazare a projeté le 28 février 2019 à 15 h "Tirez sur le pianiste" (Schießen Sie auf den Pianisten) réalisé par François Truffaut, avec Charles Aznavour, Marie Dubois, Michèle Mercier, Nicole Berger, Daniel Boulanger, Claude Heymann, Alex Joffé et le chanteur Boby Lapointe. "Hommage à Charles Aznavour le comédien, avec ce deuxième long métrage de François Truffaut, une parodie de série noire américaine et une bouleversante histoire d'amour et de mort."

"Qui est Charlie Kohler, le pianiste secret, distrait et triste du bistrot de Plyne ? Un soir, son frère Chico, poursuivi par des truands, se réfugie dans le bar. Amoureuse de Charlie, la serveuse Léna sait qu'il se nomme Édouard Saroyan, qu'il est un grand pianiste, qu'il a été marié. Un jour, sa femme Thérésa lui a avoué qu'elle avait acheté sa célébrité en couchant avec son imprésario, puis elle s'est jetée par la fenêtre. Depuis, Édouard a troqué son instrument de concert contre un piano de bastringue. Maintenant, Léna veut aider Charlie à redevenir Édouard. Ensemble, ils vont annoncer leur démission à Plyne. Mais celui-ci cherche la bagarre et Charlie le tue. Le couple se réfugie avec Chico dans son chalet à la montagne où, armés jusqu'aux dents, ils attendent l'assaut des gangsters qui ont retrouvé leur trace…"

"Dans cette adaptation du roman de Goodis, le genre policier est joyeusement parodié : depuis les gangsters peu effrayants, dont la conversation provoque le rire général, jusqu'à la prestation de Boby Lapointe, dont la célèbre chanson "Avanie et Framboise" est sous-titrée, Truffaut s'amuse avec le public, multiplie les surprises et les digressions. Le thème de l'amour, qui domine comme dans la plupart de ses films, prend ici trois aspects, trois visages de femmes clairement différenciés par les mouvements de caméra et le cadrage. La caméra se contente d'observer de loin Michèle Mercier, qui représente l'amour physique, détaché. L'isolement tragique de Nicole Berger s'exprime par un cadrage en gros plan sur son visage, sur fond blanc. Fondus enchaînés et images superposées créent un rythme plein de beauté, mais révèlent aussi la fragilité de l'amour de Marie Dubois, ici jeune débutante. Trois aspects de l'amour, tous trois voués à l'échec."

"Un Taxi pour Tobrouk"
Arte rediffusa le 25 juillet 2018 à 15 h 10 "Un taxi pour Tobrouk" (Taxi nach Tobruk) réalisé par Denys de La Patellière, avec Lino Ventura, Charles Aznavour, Maurice Biraud, Hardy Krüger, Germán Cobos.

"En 1942, le périple de quatre résistants et de leur prisonnier allemand dans le désert libyen... Un film drôle et touchant, porté par les dialogues de Michel Audiard, avec Lino Ventura et Charles Aznavour. Engagés dans la Résistance pour des motifs plus ou moins louables, quatre soldats des Forces françaises libres se retrouvent à Tobrouk, en Libye. Livrés à eux-mêmes après la mort de leur chef, ils s'enfuient dans le désert en direction d'El-Alamein, où les combats font rage. Leader par défaut de ce commando, le brigadier Théo Dumas peine à tenir ses hommes, plus doués pour la parlote que pour la guerre. Quand leur pick-up est détruit par l'aviation ennemie, à 700 kilomètres des lignes alliées, la mort leur semble promise. Mais par un hasard miraculeux, ils tombent sur un convoi allemand, abattent les soldats et font un prisonnier : le capitaine Ludwig von Stegel, francophone et redoutablement malin. Le début d'un périple aux multiples rebondissements".

"Denys de La Patellière a voulu évoquer dans ce film l'absurdité d'une guerre qui a coûté la vie à plusieurs membres de sa famille. Grâce au génie de Michel Audiard, son plaidoyer pacifiste se double d'une ironie féroce et désopilante, superbement maniée par Lino Ventura et Charles Aznavour, étonnant en médecin juif dont le père, vichyste, "a la légalité dans le sang". Le périple de ce "commando d'orateurs" égarés dans les sables se déguste sans modération".

La vague yé-yé
Las ! L’arrivée des chanteurs yé-yé représente un défi qu’il relève en nouant une amitié avec Johnny Hallyday et Sylvie Vartan pour lesquels il écrit des standards : respectivement Retiens la nuit (1961), et La plus belle pour aller danser (1963). Une expérience qu’il renouvellera avec les chanteurs apparus dans les années 1980-1990.

Un répertoire qui a enrichi le patrimoine musical français et qui est repris par la jeune génération, en particulier par Joana Mendil.

Filmographie
Parallèlement, Charles Aznavour trouve au cinéma des rôles intéressants, de la comédie au drame : La Tête contre les murs de Georges Franju, avec Pierre Brasseur, Jean-Pierre Mocky (1958), Le Passage du Rhin d’André Cayatte, Tirez sur le pianiste de François Truffaut et Un taxi pour Tobrouk de Denys de La Patellière avec Lino Ventura en 1960,  Le Rat d'Amérique de Jean-Gabriel Albicocco (1962), La Métamorphose des cloportes de Pierre Granier-Deferre (1965),  Le Tambour de Volker Schlöndorff avec David Bennent et Mario Adorf (1979),  Qu'est-ce qui fait courir David ? d'Élie Chouraqui avec Francis Huster, Nicole Garcia (1981), Les Fantômes du chapelier de Claude Chabrol avec Michel Serrault (1982),  Ararat de Atom Egoyan avec Marie-Josée Croze (2002)…

Mari et père comblé, il souffre de la mort de son fils Patrick (1951-1976), décédé d'une overdose.

Grand lecteur aux goûts éclectiques, il entame une carrière d’écrivain.

Concert 2015
Arte rediffusa le 7 octobre 2018 « Aznavour en concert. Paris 2015 » (Aznavour in Concert - Paris 2015), réalisé par Marc di Domenico (2015). En septembre 2015, au Palais des sports de Paris, Aznavour « interprète ses éternels succès devant un public ravi. À 91 ans, cet immense artiste démontre une nouvelle fois son talent d'écriture, de composition et d'interprétation sur la scène du Palais des sports. Son répertoire, qu'il a chanté dans le monde entier, de New York à Tokyo, de Moscou à Montréal, raconte toutes les facettes de l'existence humaine ».

Une « captation au plus près de l'artiste et de son immense talent. Privilégiant les plans serrés, la réalisation fait la part belle au visage et à la gestuelle du chanteur, adaptée à chaque titre".

"Un hommage chaleureux à l'un des grands de la chanson française ».

Israël
Le 26 octobre 2017, en Israël, Charles Aznavour a reçu la médaille Raoul Wallenberg pour l’aide apportée par la famille Aznavourian, dont les parents Knar et Mischa, proches du résistant Missak Manouchian, aux Juifs et Arméniens pendant la Deuxième Guerre mondiale, sous le régime de Vichy.

Une distinction remise par le président israélien Reuven Rivlin qui a déclaré : « On peut lire dans le Talmud que quiconque sauve une seule vie sauve tout un monde ».


« Nous avons tant de choses en commun, les Juifs et les Arméniens, dans le malheur, dans le bonheur, dans le travail, dans la musique, dans les arts », a affirmé Charles Aznavour. Et d’ajouter « J’ai un petit peu l’impression que je viens dans un coin de ma famille à moi parce que nous avons la même manière, aussi, de vivre et de manger et de boire. [J'ai des] "relations fortes avec le pays et avec le peuple juif ».

Charles Aznavour a demandé à Reuven Rivlin : « Pourquoi Israël n’a-t-il pas reconnu le génocide des Arméniens ? Je ne vous pose pas une question secrète et je n’attends pas une réponse, mais il est important de la poser. Pourquoi vous ne reconnaissez pas le génocide des Arméniens alors que vous-mêmes avez souffert du régime nazi ? ».

Reuven Rivlin "a répondu que c’était une question politique et que chaque année la question est posée à la Knesset et que lui-même en 2015 à la tribune de l’ONU, il avait évoqué clairement le génocide des Arméniens de 1915. « Nous étions présents à la Knesset lors de la cérémonie sur ces terribles événements. Malheureusement le gouvernement israélien n’a pas réussi à reconnaître les faits comme un génocide (...) et moi en tant que président d’Israël, je me dois de respecter les décisions du gouvernement israélien. Les massacres ou le génocide sont terribles. En 1915, le peuple arménien a été victime de choses terribles » dit Reuven Rivlin. Pourtant, le président israélien a pris position sur des sujets politiques, telle la Cour suprême israélienne accusée de politisation.

Le 1er août 2016, la "commission Knesset pour l’Education, la Culture et le Sport a reconnu le génocide arménien". Elle "a exhorté le gouvernement israélien à reconnaître officiellement l’extermination de masse de 1915 d’1,5 Arméniens en tant que génocide".

 « Notre obligation morale est de reconnaître le génocide arménien », a déclaré Yakov Margi, président de la commission et député  Shas, lors d’une réunion. Il a regretté que l’Etat d’Israël n'ait pas reconnu le génocide perpétré par les Turcs en 1915-1916.

La "députée de Meretz Zehava Gal-on, les députés de l’Union sioniste Zouheir Bahloul et Nahman Shai et le député de la Liste arabe unie, Dov Khenin", ont soutenu "la mesure".

Le 5 juillet 2016, des membres de la communauté arménienne de Jérusalem avaient manifesté devant la Knesset après l'accord diplomatique entre le gouvernement israélien et la Turquie, afin que l’Etat d’Israël reconnaisse le génocide. Le 23 avril 2015, ils avaient défilé avec des drapeaux et des torches dans la Vieille Ville de Jérusalem, à la veille du centenaire du génocide. Reuven Rivlin, qui "était l’un des défenseurs les plus virulents de la reconnaissance du génocide pendant son mandat en tant que président à la Knesset, a évité d’utiliser le terme de génocide" lors de cette commémoration ; ce qui avait déçu les dirigeants arméniens. Il "l’a utilisé, cependant, quelques semaines plus tôt lors d’un événement différent".

En juillet 2016, Yuli Edelstein, député membre du Likud, a souhaité qu'Israël reconnaisse ce génocide malgré les tensions que cette reconnaissance pourrait causer entre l'Etat juif et la Turquie. « Nous ne devons pas ignorer, minimiser ou nier ce terrible génocide. Nous devons déconnecter les intérêts actuels, liés à cette époque et à ce lieu, du passé difficile, dont ce sombre chapitre en fait partie », avait déclaré Edelstein lors de la commémoration par la Knesset du génocide.

Le "refus d’Israël de reconnaître officiellement le massacre des Arméniens comme étant un génocide repose sur des considérations géopolitiques et stratégiques et l’on retrouve en tête de ses considérations ses relations avec la Turquie, qui nie avec véhémence que les Turcs ottomans aient commis un génocide. Israël et la Turquie ont signé un accord de rapprochement au mois de juin, améliorant ainsi la qualité de leurs relations diplomatiques après des années de relations glaciales qui ont été aggravées par" les violences commises contre les soldats de Tsahal par des terroristes turcs lors de l'arraisonnement du navire qui voulait rompre en 2010 le blocus naval de la bande de Gaza dirigée par le mouvement islamiste Hamas.

"Je ne dis pas ça parce que je suis ici, mais il y a des villes dans le monde que je préfère, et je dois avouer que ma ville préférée est Tel-Aviv parce que ça bouge beaucoup. Ici, c'est Tel-Aviv, Barcelone en Espagne, New-York et Milan, j'ai toujours une ville où je me sens le plus à l'aise et où je me sens le plus en osmose avec le public", a confié Charles Aznavour lors d'une conférence de presse à Tel-Aviv le 26 octobre 2017.

"Je préfère qu'on traduise mes textes en hébreu et que les artistes locaux les chantent", a observé le chanteur en citant Avi Toledano en 1978 avec "la Bohême". Il estime que ses rencontres les plus importantes ont été Edith Piaf, Charles Trénet, Maurice Chevalier et Jean Cocteau : "Ce sont des artistes qui m'ont vraiment apporté et appris quelque chose".

Le 27 octobre 2017, il s'est rendu dans le village israélo-arabe Neve shalom (Oasis de paix, en hébreu)/Wahat as-Salam (Oasis de paix en arabe) dont les habitants sont citoyens israéliens. Il a visité l'Ecole pour la Paix

Le 28 octobre 2017, il a donné un concert au Heichal Menorah Mivtahim (ex Nokia) sur Ygal Alon à Tel-Aviv dans le cadre de sa tournée mondiale One Night Only!

"Personne ne bouge !"
Arte TV diffuse "Personne ne bouge ! Charles Aznavour" (2017). "De ses débuts comme auteur-compositeur à son incroyable succès aux États-Unis, voyage en compagnie d'un monument de la chanson française. Avec une perle rare de 1980 : invité de la BBC, Charles Aznavour évoque sans ciller les frasques de sa jeunesse dans la langue de Shakespeare... Pour commencer, révision des fondamentaux : devant le sacre de l'autodidacte, on oublie à quel point Aznavour fut à ses débuts un artiste à la voix et au style décriés. Retour sur la revanche artistique d'un auteur-compositeur hors du commun, avec Laurent Balandras, écrivain, et Bertrand Dicale, journaliste ; gros plan sur le deuxième long métrage de François Truffaut, Tirez sur le pianiste, sorti en 1960, dans lequel le grand Charles incarne le musicien taciturne du roman noir de David Goodis ; petite histoire d’"Aznavour l'Américain" avec Robert Belleret, son biographe, et Gérard Davoust, son producteur et éditeur ; et une perle rare de 1980, quand l’artiste, invité de Sir Michael Parkinson, l'étoile de la BBC, évoque sans ciller les frasques de sa jeunesse dans la langue de Shakespeare".

"Pour toi, Aznavour"
La chanteuse française Joana Mendil rendra hommage avec d'autres artistes, le 1er juillet 2019, de 20 h à 23 h, à Charles Aznavour par un concert au Gymnase à Paris "Pour toi Aznavour", placé sous le haut patronage de l'Ambassade de la République d'Arménie en France. Un "concert en hommage à Charles Aznavour élu par CNN et The Times : “L’artiste de variété du XXe siècle” ! Avec la participation exceptionnelle de Seda Aznavour et Erik Berchot, ainsi que de nombreux artistes". Une soirée au profit de la Fondation Aznavour. "Le 1er juillet, cela fera exactement 9 mois que Charles nous aura quittés, mais c’est le 95e anniversaire de sa naissance que nous allons célébrer avec la participation de nombreux artistes : Essaï Altounian / Seda Aznavour / Erik Berchot / Romain Berrodier (piano) / Agnès Bihl / Ermonia (Finaliste The Voice Kids 2019) / Hakob Ghasabian (Lauréat Prodiges 2015) / Hary Gofin (contrebasse) / Benjamin Legrand / Joana Mendil / Jean Musy / Artyom Minasyan (doudouk) / Nara Noïan / Fred Perrot (batterie) / Vartan Petrossian / Shushana (violon) / Vicken Tarpinian / Frédéric Turyan / Frédéric Zeitoun..."

Nicola Aznavour
Le Haut-Karabagh, Haut-Karabakh ou Artsakh est une république autoproclamée de Transcaucasie et d'une superficie de 11 430 km² pour 148 917 habitants, majoritairement arméniens chrétiens, en 2015. Sa capitale :  Stepanakert.

Depuis la fin de l'Union soviétique dont il formait une des républiques socialistes soviétiques, le Haut-Karabagh a œuvré  pour son indépendance ou son rattachement à l'Arménie, tandis que l'Azerbaïdjan, Etat à la population majoritairement musulmane (chiite), considérait le Haut-Karabagh comme terre azérie.  

Le 2 septembre 1991, l'assemblée nationale du Haut-Karabagh a déclaré son indépendance. Celle-ci est reconnue seulement par l'Abkhazie, l'Ossétie du Sud-Alanie et la Transnistrie. 

Le 12 mai 1994, la trêve négociée par la Russie met un terme aux combats entre les Arméniens et les Azerbaïdjanais. Cependant, des heurts armés sporadiques ont lieu, en particulier en avril 2016.

Le 27 septembre 2020, l'armée azérie bombarde Stepanakert. Président de la République azerbaïdjanaise, Ilham Aliyev signe un décret sur la déclaration de l’état de guerre. Les dirigeants de l'Artsakh déclarent la loi martiale et la mobilisation générale. Quant au gouvernement arménien, il annonce la mobilisation générale et la mise en vigueur de la loi martiale. Premier ministre, Nikol Pachinian prévient que les deux pays sont proches d'une «  guerre d’envergure ». Président turc islamiste et proche des Frères musulmans, Recep Tayyip Erdoğan, affirme son soutien « avec tous nos moyens » à l'Azerbaïdjan. La guerre se déroule de nouveau au Haut-Karabagh.

Début octobre 2020, l'Arménie accuse la Turquie d'amener des mercenaires syriens dans la région contestée. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, environ 850 combattants pro-Ankara y auraient été envoyés.

Le 1er octobre 2020, l’Arménie rappelle son ambassadeur en Israël, en signe de protestation contre les ventes d’armes israéliennes à l'Azerbaïdjan.

Le 23 octobre 2020, le quotidien israélien de gauche Haaretz a publié la lettre ouverte de Nicolas Aznavour, fils de l'artiste, cofondateur et président du conseil d’administration de la Fondation Aznavour, adressée au président d’Israël Reuven Rivlin afin qu'il intervienne "pour assurer un moratoire sur la vente de ces armes à l’Azerbaïdjan" :
"Monsieur le Président,
En 2017, avec mon père Charles Aznavour, j’ai eu le plaisir de me rendre en Israël où la Fondation Internationale Raoul Wallenberg (IRWF) a décerné la « Médaille Raoul Wallenberg » à Aïda et Charles Aznavour en votre présence.
Ce prix prestigieux est un gage de reconnaissance à la famille Aznavour, à la mère Knar, au père Misha et à leur fille et fils susmentionnés, qui, pendant les jours sombres de l’occupation nazie en France, ont tendu la main à ceux qui étaient persécutés. Je me souviens que mon père se rappelait comment il avait grandi dans le quartier du Marais à Paris où de nombreux immigrants s’étaient installés côte à côte, dont des réfugiés juifs et arméniens. C’étaient des voisins et des amis proches.
Lorsque la Gestapo a commencé à arrêter des Juifs pour les expulser, l’appartement de mes grands-parents est devenu un abri pour qu’ils se cachent et trouvent un passage sûr. Mes grands-parents savaient qu’ils couraient un danger énorme tous les jours, mais mon père et sa sœur ne l’ont compris que plus tard.
Mes grands-parents avaient fui en France pour échapper au Génocide des Arméniens par l’Empire ottoman dans les années 1920. Leur vie n’a pas toujours été facile à cause de leur pauvreté, de leur méconnaissance du français et de la douleur qu’ils portaient en eux. Lorsque la Seconde Guerre mondiale a éclaté, ils ont réalisé avec consternation que l’Histoire se répétait et ils ont pris de grands risques pour sauver autant de vies que possible.
La médaille que mon père a reçue au nom de notre famille fait partie des objets que nous prévoyons d’exposer prochainement au musée Charles Aznavour à Erevan et d’informer nos visiteurs des horreurs de la Shoah.
Monsieur Reuven Rivlin, depuis le 27 septembre, l’agression militaire de l’Azerbaïdjan s’est déjà transformée en guerre et en tragédie entraînant la mort de centaines, voire de milliers de jeunes hommes, journalistes, civils et enfants. L’armée azerbaïdjanaise utilise de nombreuses armes fabriquées en Israël, notamment des bombes à fragmentation interdites par le droit international, et des drones militaires.
En réponse aux photos publiées par les autorités arméniennes, Amnesty International a publié son rapport en notant en particulier : « Les experts d’Amnesty International Crisis Response ont pu retracer l’emplacement des images dans les quartiers résidentiels de Stépanakert et ont identifié des armes à sous-munitions M095 DPICM de fabrication israélienne tirées par les forces azerbaïdjanaises vers Stepanakert, Shushi, Martakert et d’autres villes. « L’utilisation de bombes à fragmentation en toutes circonstances est interdite par le droit international humanitaire, de sorte que leur utilisation pour attaquer des zones civiles est particulièrement dangereuse et ne fera qu’entraîner de nouveaux morts et blessés », a déclaré Denis Krivosheev, chef par intérim d’Amnesty International pour l’Europe de l’Est et le Centre-Asie. « Les bombes à fragmentation sont par nature des armes aveugles, et leur déploiement dans les zones résidentielles est absolument épouvantable et inacceptable. Alors que les combats continuent de s’intensifier, les civils doivent être protégés et non délibérément ciblés ou mis en danger de manière imprudente. »
En souvenir de mes grands-parents et de mon père, je vous invite, Monsieur le Président, à intervenir pour assurer un moratoire sur la vente de ces armes à l’Azerbaïdjan. Israël, établi par les survivants et descendants de la Shoah, ne peut fermer les yeux ni participer au génocide que l’Azerbaïdjan, avec l’aide du gouvernement turc, se prépare à commettre en Arménie. Ce serait un affront à la mémoire de mes ancêtres qui ont sauvé de nombreuses vies juives pendant la Seconde Guerre mondiale, mais plus encore, donc ce serait un terrible affront à la mémoire des victimes de la Shoah.. Je vous demande de nous aider dans l’intérêt de l’humanité et de la longue amitié entre les Juifs et les Arméniens, de vous tenir debout à nos côtés contre les horreurs de la guerre et de la destruction.
Dans l’annexe de cette lettre, veuillez trouver quelques preuves documentées de l’utilisation des munitions internationalement interdites par les forces armées azerbaïdjanaises.
Je tiens à vous assurer, Monsieur le Président, de ma très haute considération."
Interviewé sur i24News, Nicolas Aznavour a déclaré : "Je ne pense pas qu'armer une dictature à long terme serve les intérêts d'Israël".

Il semble un peu maladroit de la part de Nicolas Aznavour d'avoir adressé sa lettre au Président israélien dont la fonction est honorifique conformément aux lois fondamentales d'Israël. Cependant, depuis quelques décennies, les titulaires de cette fonction sont parfois sortis de leur réserve pour intervenir de manière partiale dans la vie politique, essentiellement lors de la désignation du Premier ministre. Ce qui leur a été reproché par des politiciens ou journalistes.

En outre, l'Etat Juif n'a pas été rétabli uniquement "par les survivants et descendants de la Shoah". Des Juifs autochtones ou ayant du fuir des pays majoritairement musulmans, ont contribué à ce rétablissement.

Par ailleurs, on peut regretter que Nicolas Aznavour ait omis d'évoquer un autre point commun entre Juifs et Arméniens chrétiens : la Bible hébraïque. Il a également occulté le caractère religieux, civilisationnel de ce conflit initié par l'Azerbaïdjan, ainsi que l'aide militaire - drones, mercenaires syriens - fournie par la Turquie dirigée par Recep Tayyip Erdoğan.

Dans cette région, les alliances diplomatiques ou militaires sont particulièrement complexes, et des ONG partiales. Ainsi, depuis le 6 octobre 2020, le régime des ayatollahs iraniens, qui développe un programme militaire iranien visant la destruction de l'Etat Juif, "soutient désormais, de manière indéfectible, Bakou dans le conflit qui l’oppose à Erevan. Un soutien paradoxal, car l’Azerbaïdjan reste un allié proche d’Israël, l’un des plus féroces adversaires de la République islamique d’Iran. Cette dernière a, en revanche, toujours entretenu d’intenses échanges avec l’Arménie, Téhéran lui fournissant du gaz et Erevan de l’électricité".

Enfin, des Français d'origine arménienne se plaignent depuis des années que leurs rassemblements en hommage aux victimes du génocide effectué par les Ottomans et leurs complices (1915-1916) soient troublés par des agressions verbales de Turcs musulmans.

Le 28 octobre 2020 au matin, "la circulation sur l’autoroute A7 était bloquée dans les deux sens au niveau du péage de Vienne (Isère) par une manifestation de soutien à l’Arménie. Vers 7 h 30, des bouchons étaient en formation tant en direction de Lyon que de Marseille, a indiqué le service d’information routière Bison Futé. Un manifestant, se présentant sous le seul prénom d’Arthur, a expliqué que ce rassemblement était motivé par la crainte qu’un « deuxième génocide » soit en train de se reproduire en Arménie. Il a chiffré entre 300 et 400 personnes le nombre de manifestants sur place". "Des militants turcs avaient perturbé le rassemblement et des heurts avaient rapidement éclatés. Des « coups de couteaux » se seraient même échangés selon la police nationale. Au total, 300 à 400 personnes étaient présentes sur place d’après les informations de LyonMag. Quatre personnes auraient été très légèrement blessées. Une enquête a été ouverte et un appel à témoins a été lancé par les CRS autoroutières Auvergne-Rhône-Alpes."
 
"En réponse au blocage de l’A7 mercredi matin, une centaine d’extrémistes turcs", vraisemblablement membres du mouvement Loups Gris, "ont mené une expédition punitive à la recherche d’Arméniens dans l’agglomération lyonnaise. Le conflit s’intensifie du côté de Lyon. Dans la soirée du mercredi 28 octobre, des membres du groupuscule ultranationaliste turc, les Loups gris, ont envahi les rues de Vienne, puis de Décines. Ces extrémistes défilaient pour interpeller la communauté arménienne. Ils n’ont pas hésité à scander des menaces envers leurs rivaux : « Allah Akbar » ou encore « Vous êtes où les Arméniens ?! », « Ici, c’est la Turquie » et « Nique l’Arménie, on va vous baiser », pouvait-on entendre. 

"D’après les informations de Lyon Mag, de nombreux policiers étaient présents dans l’Est lyonnais afin d’éviter tout débordement. Une centaine de véhicules de police a aussi tourné en centre-ville. Le groupe de Turcs était composé d’environ 150 individus « surexcités » selon la Syndicat indépendant des commissaires de police (SICP), qui a d’ailleurs rapporté qu’un équipage de la police nationale avait été agressé. Les Turcs ont finalement quitté les lieux avant 23 heures. Aucun blessé n'est à déplorer d’après les pompiers". 

"Pour éviter un match retour entre les deux communautés, un important dispositif policier avait été mis en place à Décines avec 101 fonctionnaires déployés sur zone "dans le but de rétablir l’ordre républicain" selon la préfecture du Rhône. Au total, 19 véhicules ainsi que "l’intégralité des protagonistes ont été contrôlés" selon les services de l’Etat. De plus, 65 personnes ont écopé d’une amende pour non-respect du couvre-feu. Le calme est finalement revenu vers 23 h".Les tentatives d’intimidation et les actions communautaires hostiles n’ont pas leur place dans la République" a réagi dans la nuit le préfet du Rhône Pascal Mailhos après cette soirée sous tension".

Le 29 octobre 2020, la LICRA (Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme) a twitté : "Les Loups gris, organisation turque ultranationaliste violente, ont organisé hier à Vienne et à Décines de véritables « pogroms » contre des membres de la communauté arménienne. La @_LICRA_ saisit la justice de ces agressions racistes. Ces mouvements doivent être dissous !"



Le 1er juillet 2019 à 20 h
Le 14 janvier 2019 à 20 h
Au Théâtre du Gymnase-Marie Bell
Tél. : 01 42 46 79 79

"Tirez sur le pianiste" par François Truffaut
France, 1960, 1 h 30
Image : Raoul Coutard
Montage : Claudine Bouché, Cécile Decugis
Musique : Georges Delerue, Boby Lapointe et Félix Leclerc
Production : Les Films de la Pléiade
Producteur/-trice : Pierre Braunberger
Avec Charles Aznavour, Marie Dubois, Michèle Mercier, Nicole Berger, Serge Davri, Claude Mansard, Richard Kanayan, Albert Rémy, Jean-Jacques Aslanian, Daniel Boulanger, Claude Heymann, Alex Joffé, Boby Lapointe, Catherine Lutz, Alice Sapritch
Auteur : François Truffaut
Marcel Moussy nach David Goodis' Roman "Down There"
Distributeur : Roissy Films
Son : Jacques Gallois
Sur Arte le 7 octobre 2018 à 22 h 30
Au Cercle Bernard Lazare le 28 février 2019 à 15 h

"Un taxi pour Tobrouk" réalisé par Denys de La Patellière
France, Espagne, 1960, 90 minutes
Image : Marcel Grignon
Montage : Jacqueline Thiédot
Musique : Georges Garvarentz
Production : Franco London Films, S.N.E. Gaumont, Procusa, Continental Film
Réalisation : Denys de La Patellière
Scénario : Michel Audiard, Denys de La Patellière, René Havard
Acteurs : Lino Ventura, Charles Aznavour, Maurice Biraud, Hardy Krüger
Germán Cobos

« Aznavour en concert. Paris 2015  », par Marc di Domenico
86 min
Sur Arte les 3 janvier 2015 à 17 h 45 et 6 janvier 2015 à 3 h 15, 11 décembre 2017 à 0 h 00, 7 octobre 2018 à 17 h 45
Visuels : © Marc di Domenico

A lire sur ce blog :
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Les citations sur le concert viennent d'Arte. Cet article a été publié le 2 janvier 2016, puis les 1er novembre et 11 décembre 2017, 22 mars et 2 octobre 2018, 28 février 2019.

jeudi 29 octobre 2020

Toni Morrison (1931-2019)


Chloe Ardelia Wofford Morrison, célèbre sous son nom d’auteure, Toni Morrison (1931-2019), est une romancière, essayiste, critique littéraire, dramaturge, librettiste, professeure de littérature et éditrice afro-américaine. Lauréate du Prix Pulitzer (1988) et du Prix Nobel de littérature (1993), elle a stigmatisé à tort l’Etat d’Israël. Arte diffusera le 4 novembre 2020 « Toni Morrison et les fantômes de l'Amérique » (Toni Morrison - Amerikas Gewissen) de Claire Laborey.

Raymond Aron (1905-1983) 
« ENS : L'école de l’engagement à Paris » par Antoine de Gaudemar et Mathilde Damoisel
Archives de la vie littéraire sous l'Occupation
Hélène Berr (1921-1945) 
Bertolt Brecht (1898-1956)

Chloe Ardelia Wofford Morrison, célèbre sous son nom d’auteure, Toni Morrison (1931-2019), est une romancière, essayiste - Playing in the Dark: Whiteness and the Literary Imagination, The Origin of Others, •The Source of Self-Regard: Selected Essays, Speeches, and Meditations -, critique littéraire, dramaturge -Desdemona, Dreaming Emmett -, librettiste - Margaret Garner sur une musique composée par Richard Danielpour -, professeure de littérature et éditrice afro-américaine. 

Parmi ses oeuvres : The Bluest Eye (1970), Sula (1973), Song of Solomon (2004), Tar Baby (1981).

En 1987, "Beloved", premier tome d'une trilogie comprenant Jazz puis Paradis, est bien reçu par la critique. Ce roman best-seller relate la vie d’une esclave afro-américaine qui commet un infanticide. En 1998, la réalisateur Jonathan Demme adapte le livre pour le cinéma en dirigeant Oprah Winfrey, Danny Glover et Thandie Newton.

Lauréate du Prix Pulitzer (1988) et du Prix Nobel de littérature en 1993 - année où le magazine Time la choisit pour sa couverture -, elle reçoit la Médaille présidentielle de la Liberté en 2012 des mains de Barack Hussein Obama, alors Président démocrate qu'elle avait soutenu.

Elle demeure la huitième femme et le second auteur afro-américain après Derek Walcott à avoir reçu cette distinction.

Au travers d'une grille de pensée racialiste, Toni Morrison a déclaré : "Beaucoup de Noirs croient que les Juifs de ce pays sont devenus blancs. Ils se comportent comme des Blancs plutôt que comme des Juifs". Car, pour cette intellectuelle progressiste, les Blancs vilipendés sont assimilés aux oppresseurs.

En 2015, Quand un éditeur lui a proposé de rédiger l'introduction d'une collection des œuvres complètes de Primo Levi - un écrivain et chimiste juif italien qui a écrit sur sa déportation dans un camp nazi et la Shoah - ce choix a suscité une controverse, notamment en raison du refus de Toni Morrison de mentionner le mot "Juif" dans son introduction et de ses positions hostiles à l'Etat Juif.

"Dans sa façon typique de dresser les groupes ethniques et les races les uns contre les autres - une industrie dont elle a tiré des millions - elle a utilisé "Beloved", la longue dissertation surestimée pour laquelle elle est la plus connue, afin d'insinuer que la Shoah a reçu trop d'attention par rapport à l'esclavage des Noirs en Amérique. La dédicace de "Beloved" parle de "60 millions et plus", suggérant que l'esclavage était dix fois pire que la Shoah. Mais personne (à l'exception de certains tenants de la suprématie blanche) n'a jamais dit que l'esclavage n'était pas une tragédie géante dans l'histoire américaine... Soyons honnête, elle n'était pas une grande femme de lettres. Toute sa carrière est la preuve d'une discrimination positive... Malgré la haine de Toni Morrison envers les Juifs, c'est grâce aux Juifs de l'industrie de l'édition, des cercles intellectuels et du showbiz qu'elle est devenue une multimillionnaire au-delà de ses rêves les plus fous, malgré son talent moyen... Ils n'ont pas seulement consenti à son ascension. Avec leurs collègues Gentils, ils ont contribué à promouvoir et à faire de Toni Morrison une star. Et ils n'ont pas eu un mot de protestation quand elle les a remerciés avec ses commentaires et ses déclarations ignobles", a déploré Debbie Schlussel (Toni Morrison: Jew-Hating, Anti-Israel, Overrated Writer Dead, 6 août 2019). 

Toni Morrison a exprimé son opposition à la politique de gouvernements israéliens. En 2006, après le kidnapping du soldat Guilad Shalit par un mouvement terroriste palestinien, vraisemblablement le Hamas, au sud d'Israël, des journaux importants, en particulier The Nation (18 août 2006), publient une lettre signée notamment par 18 écrivains dont Toni Morrison, John Berger, Noam Chomsky, Harold Pinter, José Saramago, Arundhati Roy, Naomi Klein, Howard Zinn, Charles Glass, Richard Falk, Gore Vidal, Russell Banks et Thomas Keneally. Ces auteurs critiquaient l'indignation suscitée par ce rapt alors qu'il y avait "environ 10 000 [Palestiniens] dans les prisons israéliennes... Cet "enlèvement" est considéré comme un scandale, alors que l'occupation militaire illégale de la Cisjordanie et l'appropriation systématique de ses ressources naturelles - plus particulièrement de l'eau - par les forces de défense israéliennes ( !) est considérée comme une réalité regrettable mais réaliste, et est typique de la politique de deux poids deux mesures appliquée par l'Occident face à ce qui est arrivé aux Palestiniens, sur les terres qui leur ont été attribuées par les accords internationaux, au cours des 70 dernières années". Et les auteurs d'alléguer que l'Etat d'Israël viserait L'objectif politique d'Israël n'est rien de moins que la "liquidation de la nation palestinienne". La lettre se terminait pas un post scriptum nazifiant Israël : "Comme Juliano Mer Khamis, réalisateur du documentaire "Les enfants d'Arna" a interrogé : “Qui va peindre le ‘Guernica’ du Liban ?”

Après le décès de Toni Morrison dans la nuit du 5 au 6 août 2019, Muriel Pénicaud, alors ministre du Travail, a souhaité lui rendre hommage en twittant : « Hommage à une très grande dame, écrivaine, poète et militante, Toni Morrison. Grâce à elle, les noirs ont enfin pu rentrer par la grande porte dans la littérature. Les mots réveillent les consciences et les cœurs, ils font reculer le racisme et la haine. Les mots ont un pouvoir ».

Des Internautes ont rappelé les noms d'auteurs afro-américains ou français importants dans l'histoire de la littérature : James Baldwin, Chester Himes, Richard Wright, Ralph Ellison, Gwendolyn Brooks, Maya Angleou. Muriel Pénicaud a alors supprimé son twitt, et en a republié la teneur sans la phrase ayant suscité indignation en raison de ce qui était jugé un signe d'inculture ou de racisme..

« Toni Morrison et les fantômes de l'Amérique »

Arte diffusera le 4 novembre 2020 « Toni Morrison et les fantômes de l'Amérique » (Toni Morrison - Amerikas Gewissen) de Claire Laborey.

« En 1987, six ans avant son prix Nobel, Toni Morrison donnait corps et voix à la mémoire de l'esclavage avec "Beloved". Retour sur le chef-d'œuvre plus que jamais brûlant d'une grande dame des lettres disparue en 2019 ». 

« Pas un jour ne passe sans que les fractures de l'Amérique ne fassent la une des médias du monde entier. Jamais l’œuvre de Toni Morrison, figure de proue de la littérature afro-américaine contemporaine et grande dame des lettres, n’a autant résonné avec l’actualité, à l’heure où Donald Trump fait campagne pour un second mandat et où son pays s’embrase à nouveau dans une lutte contre les violences racistes ». 

« Première femme noire lauréate du prix Nobel de littérature en 1993 pour avoir, selon l’Académie, "rendu morceau par morceau leur histoire aux Africains-Américains", Toni Morrison n’a eu de cesse pendant cinquante ans de mettre en mots l'indicible : l’emprise de la "color line" sur la société américaine, de l'esclavage au racisme ordinaire en passant par la ségrégation ». 

« Apparu comme une déflagration dans le paysage littéraire de 1987, son roman Beloved explore le grand tabou de l'esclavage et sa férocité imprimée au plus profond de ceux qui l'ont subi pendant quatre siècles. "Au début, je ne voulais tout simplement pas y aller, résume Toni Morrison dans un entretien d'archive. C'était trop douloureux. Et puis j'ai pensé que si eux l'avaient vécu, je pouvais passer quelques années à l'écrire."

« Soixante millions et davantage. J'appellerai mon peuple / Celui qui n'était pas mon peuple / Et bien-aimée / Celle qui n'était pas bien-aimée." Ainsi commence l'histoire de Sethe, une esclave en fuite qui, sur le point d'être reprise, égorge sa fillette afin de lui épargner ce qu'elle a vécu elle-même, puis accueille son fantôme, des années plus tard ». 

« Inspiré de l'histoire véridique, mais réinventée, d'une esclave nommée Margaret Garner, Beloved épouse l'intériorité de Sethe pour dérouler, toujours plus profondément, le récit de ses souffrances physiques et psychiques, traumas enfouis et transmis en silence de génération en génération ». 

« Tissé d'extraits d'entretiens avec Toni Morrison, de ses archives personnelles, de fervents témoignages de lecteurs (l'activiste Mona Jenkins, la poétesse Nikki Giovanni, l'écrivaine Yiyun Li, le metteur en scène Peter Sellars…) et des images des luttes menées depuis plus d'un siècle par l'Amérique noire pour conquérir ses droits, ce documentaire nous immerge dans la genèse et les pages d'un chef-d'œuvre à la puissance intacte ». 


« Toni Morrison et les fantômes de l'Amérique » de Claire Laborey

France, 2020, 53 min

Sur Arte le 4 novembre 2020 à 22 h 35

Disponible du 28/10/2020 au 01/02/2021

Visuels :

Toni Morrison

© Bert Andrews

Toni Morrison tenant une orchidée à la cathédrale de St. John the Divine à New York, le 5 avril 1994

© AP Photo - Kathy Willens

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Les citations sur le film sont d'Arte.