Citations

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vendredi 19 juillet 2013

Condamné pour diffamation à payer 11 002 €, Philippe Karsenty s'est pourvu en cassation


Le 26 juin 2013, la Chambre 7 du Pôle 2 de la Cour d’appel de Paris a confirmé le jugement de la XVIIe chambre du tribunal correctionnel de Paris ayant condamné le 19 octobre 2006 Philippe Karsenty, directeur de Media-Ratings et maire-adjoint de Neuilly, pour avoir diffamé France Télévisions et Charles Enderlin, correspondant de France 2 à Jérusalem, en qualifiant, en novembre 2004, notamment d’« imposture médiatique » le reportage controversé sur « la mort de Mohamed al-Dura » diffusé au JT de France 2 le 30 septembre 2000. Philippe Karsenty a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt. En mars 2015, la Cour de cassation a rejeté son pourvoi."L’arrêt tient en une ligne : le pourvoi a été rejeté car il a été déposé trop tard. Selon l’étrange jurisprudence de la Cour de cassation française, j’aurais dû déposer mon pourvoi avant même d’avoir pris connaissance de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris qui refusait de me donner accès au contenu de l’arrêt du 26 juin 2013", a déclaré Philippe Karsenty le 8 mars 2016.


La Cour d’appel de Paris va-t-elle rendre son délibéré ou le reporter de nouveau ? Va-t-elle confirmer ou infirmer le jugement de la XVIIe chambre du Tribunal correctionnel de Paris en date du 19 octobre 2006 et condamnant Philippe Karsenty à une amende de 1 000 euros, à verser un euro de dommages intérêts à chaque partie civile, et à la chaîne publique et à son journaliste ensemble 3 000 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale (frais de justice) ? Telles étaient les questions qui taraudent les parties à ce procès et les journalistes venus assister à l’audience devant la Cour en ce 26 juin 2013 ensoleillé.

Philippe Karsenty condamné
Vers 13 h 48, les trois magistrats composant cette Cour d’appel de Paris entrent dans une salle emplie de justiciables et de journalistes.

Président de la Cour, Jacques Laylavoix semble métamorphosé. On peine à le reconnaître. Finis le regard fuyant et la gestuelle dénotant une certaine gêne. Le ton assuré, légèrement pressé, Jacques Laylavoix ouvre des chemises cartonnées correspondant à des affaires. Annonce les parties au procès. Oublie une fois de lire le délibéré de la Cour d'appel. Enchaine sur d’autres dossiers dont il livre l’arrêt de la Cour.

Rapidement, Jacques Laylavoix arrive au dossier Charles Enderlin et France Télévisions contre Philippe Karsenty.

Lentement, observant de brefs silences entre chaque élément de la décision judiciaire, il livre l’arrêt de la Cour qui « confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, déclare irrecevable la demande des parties civiles tendant à voir ordonner la publication d’un communiqué judiciaire », condamne le prévenu à payer à ces dernières 7 000 € au titre de l’article 475-1 du Code de procédure pénale, et rejette toutes les autres demandes.

Outre les deux euros correspondant à l'indemnisation au titre de la diffamation, Philippe Karsenty devra donc verser aux plaignants 10 000 € au titre de leurs frais judiciaires : 3 000 € correspondant à la condamnation du TGI plus 7 000 € ordonnés par la Cour d’appel. Quand on sait la faiblesse des sommes allouées par la justice au titre des frais judiciaires de justiciables lambda - 0 €-1 500 € -, surtout quand ils sont pauvres, qu'ils ont consacré beaucoup de temps à leurs dossiers et que leurs droits ont été gravement bafoués, et compte tenu que la plaidoirie des plaignants devant la Cour d'appel en 2013 était quasi-identique à celle devant la Cour d'appel en 2008, on peut raisonnablement en déduire que la Cour a voulu "assommer" financièrement, punir durement et décourager moralement Philippe Karsenty, ainsi qu'intimider et dissuader tous les impudents qui oseraient affirmer la mise en scène du reportage controversé.

Satisfaite, Me Bénédicte Amblard, avocate de France Télévisions et de Charles Enderlin, s’éloigne pour téléphoner vraisemblablement à ses clients. Elle déclinera ma demande d’un commentaire.

Calme, Philippe Karsenty sort de la salle d’audience. Ignorant la motivation de la Cour faute de copie de l’arrêt de la Cour, il déclare aux journalistes, français (AFP) et étrangers (Jewish News One, al-Jazeera) : « Deux reports de délibéré pour me condamner. La Cour a beaucoup réfléchi. Je sais que la vérité est en marche. Mon objectif n'est pas de continuer le combat sur le terrain judiciaire : après ma relaxe par la Cour d’appel de Paris le 21 mai 2008[4], Le Nouvel Observateur a publié le 4 juin 2008 la pétition Pour Charles Enderlin. Et de nombreuses personnalités ont refusé d’intervenir dans cette affaire en prétextant cette procédure judiciaire… Ce reportage a été bidonné du début jusqu'à la fin. On le sait, tout le monde le sait. Mon seul combat, c'est la vérité », notamment celle véhiculée par les « livres d’histoire ».

Commentaires des parties
Interviewé le soir-même sur Radio Shalom, une des quatre radios de la fréquence Juive francilienne, par Bernard Abouaf, directeur de l’information de cette station, Philippe Karsenty a explicité sa position : « La procédure judiciaire était un outil pour contraindre France 2 à présenter ses preuves. France 2 n’en a pas. La vérité est en marche. Elle a fait une pause-étape avec cet arrêt de la Cour me condamnant. Rien ne pourra l’arrêter. Nous continuerons le combat. La logique voudrait que je ne me pourvois pas en cassation, mais ma logique à moi, non ».

Quelques jours plus tard, après avoir pris connaissance de l’arrêt de la Cour d’appel, Philippe Karsenty s’est pourvu en cassation. Selon divers avocats, les moyens à l’appui de son pourvoi sont sérieux.

Et Philippe Karsenty d’ajouter sur Radio Shalom : « Je suis déçu, inquiet pour la démocratie française. C’est un jour sombre pour l’affaire al-Dura, pour la démocratie et pour la liberté d’expression… Rien ne peut contraindre [France Télévisions et Charles Enderlin] à reconnaître la vérité par la justice. Tous les corps intermédiaires – les échelons politique, médiatique, judiciaire - couvrent ce mensonge. Si le Président de la République est sincère dans sa volonté de lutter contre l’antisémitisme et contre l’islamisme radical, il faut révéler la vérité ».

Favorable à « une commission d’enquête honnête et transparente, à l’examen des cicatrices sur le corps de Jamal al-Dura à l’hôpital Percy où a été hospitalisé Arafat », Philippe Karsenty a estimé non probante la proposition de Jamal al-Dura visant l’« exhumation d’un enfant » enterré dans la bande de Gaza..

Sur RCJ, radio francilienne du FSJU (Fonds social juif unifié), il a affirmé songer à quitter la France pour poursuivre ailleurs son combat.

Dans un communiqué du 26 juin 2013, « Charles Enderlin et France Télévisions se félicitent de cette décision qui après des années de procès vient sanctionner une atteinte grave à l'honneur d'un journaliste ». Une atteinte indemnisée, certes par une amende de 1 000 euros, mais par un seul euro de dommages et intérêts à chaque partie civile ! Et ces parties civiles d’ajouter : « Par-delà la reconnaissance apportée à un journaliste et à une entreprise, c'est aussi celle de tous ceux qui font le métier d'informer avec professionnalisme ». Or, l’arrêt de la Cour ne dit rien de tout cela. Ce que prédisait dès le 28 mai 2013, le groupe télévisuel public rappelant que le futur arrêt « ne portera pas sur la véracité des accusations… mais uniquement sur la question de [la] bonne foi [de Philippe Karsenty] au jour où il a prononcé ces propos ».

Selon Charles Enderlin, « la cour d'appel (...) a contredit l'intégralité [des] affirmations [de M. Karsenty]. Contrairement à ce qu'il déclare, sa vérité n'a pas été établie. En outre, il n'a pas été considéré de bonne foi ». Mais, comment Charles Enderlin pouvait-il affirmer tout cela le 26 juin 2013, alors que l’arrêt n’avait pas été rendu public et portait uniquement sur la question juridique de la diffamation ? Quelle est cette justice française qui reporte son délibéré à deux reprises, met cinq mois à livrer oralement sa décision, mais ne communique pas son arrêt à la partie condamnée et occulte ainsi sa motivation ? Philippe Karsenty a évoqué le contenu de cet arrêt le… 5 juillet 2013.

Le 28 juin 2013, Charles Enderlin a publié sur son blog Les tenants de la théorie... [du complot]. Il répondait à Luc Rosenzweig, auteur de l’article Trop de droit peut-il tuer le droit ? dans lequel il fait remonter les cicatrices de Jamal al-Dura non à l’incident du 30 septembre 2000, mais à une « rixe à Gaza en 1992 ». Charles Enderlin s'est lancé dans une « démonstration » non convaincante malgré ses citations de médecins et de certificats médicaux jordaniens : au printemps 2011, j’ai relevé les contradictions et incohérences relatives à ces cicatrices et textes médicaux présentés devant le TGI de Paris. Reductio ad Hitlerum ? Charles Enderlin a évoqué l’interdiction d’entrée en Grande-Bretagne de Pamela Geller, « l’activiste anti-islamique » et « « un des grands soutiens de Philippe Karsenty », par la Grande-Bretagne. Cette interdiction est choquante. D’autant que ce pays démocratique accepte l’entrée de son territoire à des extrémistes : Aleida Guevara, le saoudien antisémite Muhammad al-Arifi, etc.

Le 2 juillet 2013, Charles Enderlin a affirmé à TV Magazine : « Entre le fantasme et la réalité, seule la réalité compte ». Où est la réalité dans ce reportage qui suscite tant de questionnements, et a fait l'objet de déclarations contradictoires du cameraman palestinien de France 2, Talal Abu Rahma ? La version la plus récente de celui-ci différant de celles de Charles Enderlin et d'Arlette Chabot, alors directrice de l'information de France 2.

Attentisme
La condamnation de Philippe Karsenty a reçu un large écho à l’international et en France.

La couverture par les médias Juifs français  ? Radio J a interviewé Stéphane Juffa, rédacteur en chef de la Métula News Agency (Ména), qui a mené l’enquête après Nahum Shahaf les menant tous deux à la conclusion de la mise en scène des faits allégués par ce reportage. Dans sa tribune radiophonique du 27 juin 2013 sur Judaïques FM, Me Théo Klein, ancien président du CRIF, a évoqué cette affaire, en commettant des erreurs factuelles, et sans prononcer les noms de Philippe Karsenty et de Charles Enderlin. A noter l’incompréhension grave initiale d’Actualité juive, hebdomadaire incontournable de la communauté Juive française, sur la décision de la Cour. On ne peut que regretter qu’Ilana Cicurel n’ait pas interrogé sur RCJ Olivier Schrameck, président du CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel) sur l’affaire al-Dura. Ce Conseil est pourtant chargé d’« assurer le respect des obligations des chaines" notamment dans le domaine de l'"honnêteté de l'information », et a refusé d'intervenir dans cette affaire ainsi que dans l'affaire liée au refus jusqu'en juin 2011 de France Télévisions d'inclure Guilad Shalit dans son décompte des otages français dans le monde. Deux refus du CSA qui contrastent avec ses interventions sévères et rapides lorsque le journaliste Eric Zemmour, en juin 2010, a évoqué la part des "Noirs et des Arabes" dans le nombre de trafiquants ou lorsque le journaliste Christophe Hondelatte s'est interrogé le 17 février 2013, sur la chaine Numéro 203 : L'islam est-il soluble dans la république ?

Curieusement, alors que les sites Internet en français et en anglais d'I24News, nouvelle chaine israélienne d'informations, ont publié le 17 juillet 2013 l'article d'Adi Schwartz Finissons-en avec le syndrome al-Dura, le site en arabe de cette chaine ne l'a pas mis en ligne. Pourtant, Frank Melloul, PDG d'I24News, a écrit le 18 juillet 2013 :
"La mission d’i24news est de couvrir l’actualité internationale avec un nouveau regard celui de la société israélienne dans toutes ses composantes... En anglais, en français et en arabe, i24news a vocation à faire entendre une autre voix qui émane du Moyen-Orient avec pour fil conducteur : indépendance, ouverture sur le monde et proximité. Dans une unique newsroom, près de 150 journalistes de nationalités et de confessions différentes produisent ensemble le même contenu”.  
Alors que la série arabe antisémite Khaybar est diffusée par les chaines arabes lors de ce Ramadan 2013, alors que le public arabophone est un cœur de cible essentiel d'I24News, on ne comprend  pas l'absence de traduction en arabe de cet article d'Adi Schwartz soulignant le rôle du reportage controversé dans la propagande anti-israélienne. Sujet tabou pour les Arabophones ? Absence ou insuffisance de contrôle de la direction de la chaine sur son site en arabe ? Erreur de casting dans le choix du responsable de ce site dont le nom n'est pas indiqué par I24News ? Taqiya de celui-ci ?

Le 28 juillet 2013, Frank Melloul m'a indiqué que cet article avait été publié en arabe sur i24News. Effectivement, cet article a été mis en ligne le 27 juillet 2013. Mieux vaut tard que jamais. J'ai demandé à Frank Melloul les "raisons de ce retard ? Si je n'avais pas relevé cet "oubli", cet article aurait-il été traduit ? Pourquoi certains articles sont-ils immédiatement traduits en arabe, et d'autres non ?" Je lui ai aussi signalé d'autres articles non traduits en arabe : "La libération des terroristes, un sujet à haut risque", un des deux articles d'Emmanuel Navon, etc." Et j'ai conclus : "Ce qui est gênant, c'est que les articles non "politiquement corrects" ne sont généralement pas traduits en arabe, et que c'est moi, et non quelqu'un de la rédaction qui le relève. Pourquoi ?"

Le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) n’a pas réagi à cet arrêt par un communiqué. Le 26 juin 2013, il a publié sur son site Internet Affaire Al-Dura : le temps de la vérité. France Télévisions doit enfin réagir avec responsabilité, de Richard Prasquier, président d’honneur de cette institution. Celui-ci concluait :
« Compte tenu de son impact mondial et persistant, le dossier Al-Dura doit être rouvert et traité de façon transparente. Si France 2 ne s’y résignait pas, ce serait alors à l’échelon politique, à l’Etat français, de prendre ses responsabilités : on ne peut affirmer vouloir lutter contre l’antisémitisme en France et contre l’islam radical dans le monde si on ne l’attaque pas à la racine, la propagande de haine nourrie par des images meurtrières, probablement mensongères ».
 Le n°1261 (4 juillet 2013) d'Actualité Juive a publié un article sur la rencontre peu avant l'assemblée générale du CRIF du 30 juin 2013, de Roger Cukierman, élu le 26 mai 2013 président de cette organisation française Juive, avec la presse juive. Auteur de cet article, Pierre Assouline ne mentionne pas l'affaire al-Dura. Pourquoi ? Roger Cukierman aurait éludé ce sujet ? Ou aucun représentant de la presse juive ne l'aurait questionné sur cette affaire ? Le communiqué du 28 juillet 2013 sur la rencontre entre Roger Cukierman et le Président de la République François Hollande, n’évoque pas cette affaire. Or, dans son autobiographie Ni fiers ni dominateurs (2008), Roger Cukierman a écrit :
« A propos de France 2, je m’en veux aujourd’hui de ne pas être intervenu plus activement dans l’affaire du petit Mohamed… J’aurais du persister car les conséquences de cette affaire ont été lourdes… Cette affaire n’est pas terminée. Vu la gravité des accusations portées contre le journaliste Charles Enderlin, il importe que toute la vérité soit établie ».
Quant à l’American Jewish Committe-France, il est resté silencieux sur cette affaire. Comme d'habitude...

Par contre, la condamnation de Philippe Karsenty a été saluée par le Hamas, le site Altermonde-sans-frontiere et Ouri Wesoly du belge CCLJ (Centre communautaire laïc Juif). Celui-ci a écrit le 28 juin 2013 : « Le jugement est lapidaire : oui, Philippe Karsenty a diffamé Charles Enderlin en prétendant que son reportage de septembre 2000 était une « supercherie ». Et non, Karsenty n’a pas « agi de bonne foi ». Moyennant quoi, il est condamné à 7.000 € de dommages-intérêts. Tel est le verdict qu’a rendu ce 26 juin, la Cour d’appel de Paris et qui clôture le procès en diffamation ». Qu’en sait Ouri Wesoly ? Comment peut-il, deux jours après le délibéré, citer entre guillemets un arrêt non communiqué à Philippe Karsenty, pourtant partie au procès ?

A ceux qui allèguent qu’une procédure judiciaire empêche toute intervention politique dans une affaire, l’affaire Cahuzac apporte un démenti cinglant : ancien ministre socialiste du Budget et ancien député, détenteur d’un compte bancaire non déclaré notamment en Suisse, Jérôme Cahuzac a été et sera auditionné par la commission d'enquête de l’Assemblée nationale sur la gestion par le gouvernement Ayrault de l'affaire Cahuzac, et parallèlement, il est entendu par les juges Roger Le Loire et Renaud Van Ruymbeke qui mènent « les investigations dans le cadre de l'information judiciaire ouverte par le parquet de Paris dans le dossier de Jérôme Cahuzac, notamment pour blanchiment de fraude fiscale ». Dans l’affaire al-Dura, la procédure judiciaire vise la diffamation, et une commission d’enquête concernerait l’authenticité des faits allégués par le reportage de France 2.

Au soir de ce 26 juin 2013, quelques heures après le prononcé de la condamnation de Philippe Karsenty, lors du « débat » à l’Ecole des Beaux-arts de Paris sur la liberté de création suscité par la polémique autour de l'exposition d'Ahlam Shibli au Jeu de Paume, Marie-José Mondzain, philosophe et spécialiste de l’art et des images, a nié que les images tuent. Pourtant, n’est-ce pas pour « venger les enfants palestiniens » que Mohamed Merah a assassiné quatre Juifs franco-israéliens à Toulouse le 19 mars 2012 ? N’est-ce pas l’image des « al-Dura » qui figure sur la vidéo de l’égorgement du journaliste américain Juif Daniel Pearl ?

Extraits de la tribune de Affaire Al-Dura : le temps de la vérité. France Télévisions doit enfin réagir avec responsabilité de Richard Prasquier publiée par Causeur

 « Il y a une affaire Al-Dura, controverse sur l’authenticité des images présentées le 30 septembre 2000. Il y a un silence Al-Dura, une sorte d’omerta condamnant à l’ostracisme médiatique ceux qui pensaient mal et mettaient en doute la version officielle de France 2, tout en les attaquant ad hominem et les qualifiant de conspirationnistes extrémistes ultra sionistes. En France, le débat est ainsi verrouillé. Mais dans la presse américaine, le terme de « hoax » (montage) est communément utilisé. Il y a aussi une mythologie Al-Dura, génératrice de haine. Plusieurs contre-enquêtes ont déjà été effectuées. D’autres sont encore possibles grâce aux images détenues, aux experts mobilisables en balistique, chirurgie de guerre et analyse des images. Que ces enquêtes techniques soient neutres et internationales pour leur donner plus de poids. Compte tenu de son impact mondial et persistant, le dossier Al-Dura doit être rouvert et traité de façon transparente. Si France 2 ne s’y résignait pas, ce serait alors à l’échelon politique, à l’Etat français, de prendre ses responsabilités : on ne peut affirmer vouloir lutter contre l’antisémitisme en France et contre l’islam radical dans le monde si on ne l’attaque pas à la racine, la propagande de haine nourrie par des images meurtrières, probablement mensongères ».


Extraits de la tribune de Me Théo Klein, ancien président du CRIF, le 27 juin 2013 sur Judaïques FM

Le 27 juin 2013, sur Judaïques FM, radio de la fréquence juive francilienne, Me Théo Klein, ancien président du CRIF, a évoqué, sans prononcer le nom de Philippe Karsenty, « une affaire qui date… du premier soir de la deuxième Intifada ; il y a eu dans la bande de Gaza des confrontations… Quelques années après… il y a eu une contestation… qui met en cause un journaliste de la radio... dans des conditions qui sont parfaitement stupides à mes yeux parce que personne, et notamment pas les personnes qui le contestent, n’a pu à cette époque-là contrôler mieux qu’il ne pouvait le faire lui-même les évènements qui se sont spontanément dérouler sans qu’il y ait eu auparavant quoi que ce soit qui pouvait les annoncer ou même les faire comprendre. Il y a comme cela dans la vie de notre société… des évènements… qui prennent des tournures inattendues, et qui sont nourris par une certaine mauvaise volonté, ou peut-être pour eux une bonne volonté de faire apparaître une vérité qui leur échappe et qui nous échappera d’ailleurs forcément puisque nous n’avons pas les éléments pour la reconstituer... Il faut dans la vie parfois faire confiance à ceux qui exercent une tache difficile… généralement dans une improvisation nécessaire puisqu’ils sont appelés à parler des évènements au moment même où ils se provoquent, et donc peuvent éventuellement, et je ne crois pas que cela ait été le cas en l’occurrence, mais cela peut être le cas pour n’importe quel journaliste… provoquer une réflexion qui historiquement pourrait paraitre ne pas avoir été totalement exacte. Mais qui peut critiquer celui qui confronté à l’évènement réagit à cet évènement au moment où il se produit ? Il est plus facile quelques années plus tard, lorsque l’histoire a été écrite, qu’elle a été vérifiée, qu’elle a été authentifiée. On peut évidemment toujours critiquer celui qui sur le champ a réagi, a pensé que l’évènement avait un certain retentissement, et a pu éventuellement de très bonne foi se tromper. Je regrette qu’il y ait dans cette communauté juive, en France en particulier, des personnalités… qui ne sont justement pas de bonnes personnalités, qui essaient de nourrir leurs propos et de nourrir leur propagande en vue d’élections, qu’ils gagnent ou qu’ils ne gagnent pas, et qui de ce fait, maltraitent d’autres personnes, leur cause des difficultés, des désagréments qui sont à la fois inutiles, stupides et malsains ».


A lire sur ce blog :

Publié le 19 juillet 2013, cet article a été modifié le 28 juillet 2013.

Les inquiets. Yael Bartana, Omer Fast, Rabih Mroué, Ahlam Shibli, Akram Zaatari. 5 artistes sous la pression de la guerre

En 2008, le Centre Pompidou a présenté l’exposition éponyme assortie d’un catalogue et d'un dépliant gracieusement mis à la disposition du public, tous trois partiaux et problématiques notamment par leur terminologie biaisée, le mélange de fiction et de réalité, etc. Les œuvres – vidéos, installation et photographies - de cinq jeunes artistes – les Israéliens Yael Bartana, Omer Fast et Ahlam Shibli, les libanais Rabih Mroué et Akram Zaatari – portent sur les « questions liées à la guerre au Moyen-Orient ».
Cette exposition  au Centre Pompidou (13 février-19 mai 2008), dont la directrice générale était alors Agnès Saal, son catalogue et le document distribué gratuitement au public partiaux suscitent souvent l’ennui, choquent par des vocables choquants, génère un malaise persistant et des questionnements en raison notamment du décalage entre les affirmations, les réalisations et leur perception, entre les œuvres choisies ou commandées et les textes les décrivant.

Cinq jeunes artistes, vidéastes et photographes, « ont en commun un sentiment d'implication personnelle face aux questions liées à la guerre au Moyen-Orient [Nda : laquelle ?]. Ils sont capables de traduire l’oppression du conflit à l’aide d’un langage alternatif, en analysant ses causes et ses origines, dans une réflexion sur les méthodes de sa représentation ». On cherche vainement ces analyses…

Certains de ces artistes israéliens vivent hors d’Israël : Yael Bartana est née en Israël et habite à Amsterdam, Omar Fast a vu le jour à Jérusalem, a grandi à New York et réside à Berlin.

« Toutes les généralisations et les tentatives de relier les partis opposés dans le conflit du Moyen-Orient manquant de légitimité, une appréhension subjective semble la plus à même de relever le défi de cette représentation. De cette situation découle le titre – Les inquiets –, celui d'un roman de l'écrivain israélien d'origine polonaise Leo Lipski, Niespokojni (Les Inquiets), dans lequel l'auteur décrit la situation d'artistes qui, grâce à leur hypersensibilité ont pressenti, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, l'horreur imminente ». Ne doit-on pas se garder des amalgames ?

Née en 1970, Yael Bartana « montre Low Relief (2004), une quadruple projection vidéo en longueur formant un bas-relief d'images mobiles. Ces images trafiquées digitalement donnent l'impression que les personnages appartiennent à une formation militaire. Le spectateur est invité à observer cette démonstration militaire mais on ne peut dire s'il s'agit d'un discours pour la paix, pour l'environnement ou pour autre chose encore. Cette œuvre peut être interprétée comme une métaphore de la vie en Israël où il est difficile d'éviter les références politiques et la réalité militaire ». Quelles références ? Mystère.

Dans son installation Casting (2007), Omer Fast né en 1972 filme un acteur contant des faits pénibles. Il « étudie l'impact du spectacle télévisé de la guerre. « Casting fictif ou réel pour un documentaire, Fast mène des entretiens avec des soldats américains ayant participé aux opérations en Irak. Les visages de l'artiste et du participant sont en permanence à l'écran. Nous ne saurons jamais si les différents intervenants évoquent des événements réels ou si nous sommes dans le domaine de la fiction ».

Né en 1967, Rabih Mroué « propose une vidéo Three Posters (2003) dans laquelle il questionne la possibilité de représenter un événement aussi dramatique que le suicide d'un martyr. À partir de bandes vidéo trouvées dans les années 80 au sein des bureaux du Parti Communiste Libanais, Mroué reconstitue le témoignage d'un martyr. Le visionnage de cette reconstitution entraine de nombreuses questions à propos de la transformation graduelle de l'idéologie sous-jacente des combattants d'abord de gauche puis Islamistes, à propos des politiques qui envoient les martyrs à la mort et enfin, à propos de l'influence de tout cela sur la vie d'un artiste et sa capacité à le représenter ». Il s’agit en fait d’un terroriste communiste qui s’est fait exploser parmi des soldats israéliens au sud-Liban. Qualifier un terroriste de « martyr » est pour le moins choquant, et n’est pas neutre, tout comme l’indifférence de l’artiste pour les victimes israéliennes.

A tort, le Centre Pompidou présente Ahlam Shibli comme « palestinienne », alors qu'elle est une Bédouine israélienne. Née en 1970, Ahlam Shibli présente des « photographies récentes prises dans le village d'Al-Shibli. Capturant tous les détails topographiques, les vestiges historiques et les détails caractéristiques du quotidien de son village natal, Ahlam Shibli tente de reconstituer l'impact de l'histoire sur notre présent. La plupart des habitants sont enfuis durant la guerre de 1948, ils ont tout quitté pour une vie d'insécurité, incertains de leur nouveau rôle et de leur futur ». Ahlam Shibli  a déclaré : « Avant la création d'Israël, les villages portaient leur nom d'origine, des noms de lieu et non de famille. Certains ont dû changer de nom au moment de la création de l'Etat d'Israël. Mon village est devenu Arab al-Shibli. Quand le village juif voisin a commencé à se développer, l'Etat juif a donné des terres du village palestinien à l'implantation juive. Ces changements - le déplacement vers la montage loin de ses terres et le changement de nom - ont encore une influence sur le village aujourd'hui ». Et d'ajouter : « Dans mon village, les gens craignent de parler de peur que l'Etat israélien ne les punisse en ne délivrant pas un permis de construire ou en ne donnant pas de travail à leurs enfants. A cause de la peur, ils refusent de raconter ce qui s'est passé. Pour moi, on a le choix entre deux options : se battre pour la liberté avec un fusil ou avec son cerveau ». Selon le Centre Pompidou alors présidé par Alain Seban, ces photographies « n'évoquent pas tant la violence que la faiblesse et la complexité des relations humaines ». Des clichés de faible intérêt, sans explication sur la cause de la fuite de ces villageois : incitation de leurs frères arabes ? Quid des réfugiés juifs des pays arabes; de Turquie et d'Iran ? Avec perspicacité, Laurent Boudier (Télérama, 15 mars 2008) écrit : « Ahlam Shibli a choisi les images pour armes. Ses clichés de paysages vides et de nature à la végétation rase peuvent paraître bien communs à bon nombre d'artistes contemporains ». Et de poursuivre : « Mais cette recherche à la limite du sentiment déprimant et du constat documentaire est plutôt une tentative pour raconter l'histoire de son village natal, Al-Shibli, du déplacement de ses habitants de la vallée vers la montagne, et pour approcher, par là, la complexité des relations humaines dans le chaudron du Moyen-Orient ».

Enfin, Akram Zaatari, né en 1966 à Sidon (Liban), a co-fondé la Fondation arabe pour l'image (FAI). Pour l'exposition il a filmé un abscons plan séquence deux hommes dont l’un coud, et l’autre semble préparer un engin explosif. Un texte indique : « un vieux résistant libanais se trouve de nouveau face à son uniforme qu'il prend lentement en mains, nettoie méticuleusement et essaie. En se réappropriant son uniforme l'homme reprend son identité de soldat. Le travail d'Akram Zaatari aborde la question fondamentale de ce qui fait l'histoire et comment les différentes vérités sont divulguées et déguisées à travers la production et la circulation d'images. Dans ce sens, Zaatari reflète les différentes représentations de la guerre, soulignant les dimensions émotionnelles et esthétiques, cherchant une place dans la société comme une personne hypersensible ». Ce « vieux résistant libanais » résistait à quoi ?

Finalement, cette exposition, dont la commissaire est Joanna Mytkowska, conservatrice au Musée national d’art moderne (MNAM) assistée de Anna Hiddleston, attachée de conservation, révèle la faible différence entre la bombe humaine communiste et celle islamiste, l’indifférence d’artistes à l’égard des Israéliens Juifs. Pire : ceux-ci sont absents de ces « œuvres ». La guerre, c’est aussi l’angoisse, la peur, les larmes, le courage, l’encadrement politique, etc. Des sentiments et faits qui n’affleurent dans aucune de ces œuvres.

Ces inquiets ? Ils m’ont semblé parfois des nombrilistes, souvent des mabouls pédants et inhumains.

Lors de ma visite au Centre Pompidou, peu de visiteurs parcouraient l’espace alloué à cette exposition. Peut-être en raison du tarif d’entrée élevé.

Le 3 avril 2008, sur RCJ, radio Juive francilienne liée au FSJU (Fonds social juif unifié), Francine Lutenberg, responsable des projets culturels à l'ambassade d’Israël en France, a recommandé cette exposition…

A lire sur ce blog :

Cet article a été publié en une version plus concise par L'Arche. Les citations sont extraites du dossier de presse.