Citations

« Le goût de la vérité n’empêche pas la prise de parti. » (Albert Camus)
« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
« Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. » (Vladimir Jankélévitch)
« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

lundi 12 décembre 2022

Joann Sfar, dessinateur et réalisateur


Joann Sfar est un dessinateur, romancier, illustrateur, musicien, producteur et cinéaste français juif né en 1971 à Nice. Ses albums de bande dessinée (BD) de la série Le Chat du rabbin l'ont rendu célèbre. Cet auteur talentueux a aussi réalisé Gainsbourg, vie héroïque. Son oeuvre prolifique aborde des questions religieuses, philosophiques et spirituelles. Joann Sfar a créé des dessins ironiques dans lesquels il exprime notamment son indignation face à l'antisémitisme. En 2022, Dargaud a publié "La Synagogue" de Joann Sfar. Arte diffusera le 13 décembre 2022 à 17 h 25, dans le cadre d'"Invitation au voyage" (Stadt Land Kunst), "Joann Sfar à Nice" (Joann Sfars Nizza) de Fabrice Michelin. 
   
Astérix
« Walt Disney - L'enchanteur », par Sarah Colt
Will Eisner. Génie de la bande dessinée américaine
« Du Panthéon à Buenos Aires » de René Goscinny
« René Goscinny, notre oncle d'Armorique » par Guillaume Podrovnik
Jul, dessinateur et auteur de BD
« La Planète sauvage » par René Laloux
« Lucky Luke - La fabrique du western européen » par Guillaume Podrovnik

Joann Sfar est né en 1971 à Nice dans une famille juive :  son père André, né en Algérie, alors française, était avocat et avait lutté contre la résurgence du néo-nazisme, et sa mère Lilou, d'origine ukrainienne, est chanteuse pop.  Orphelin de mère à l'âge de quatre ans, Joann Sfar grandit sou l'autorité bienveillante de son père et son grand-père, ancien résistant, médecin dans la brigade Alsace-Lorraine puis rabbin.  "mon grand-père maternel et mon père, qui avaient une vision opposée de l'existence. Toute la famille juive ukrainienne de grand-père a été déportée. Pendant la guerre, il était le médecin de la brigade Alsace-Lorraine. Son titre de gloire, c'est d'avoir sauvé la main droite d'André Malraux, qui, pour le remercier, lui a accordé la nationalité française. C'était un type très cultivé, très caustique, qui, dans son enfance, avait fait des études pour être rabbin mais était d'un anticléricalisme total. Les seules choses qui l'intéressaient dans l'existence étaient l'amour, la science et la littérature. Quand j'étais petit, il disait une phrase que j'aimais beaucoup : « Quand on voit ce qui s'est passé, soit Dieu n'existe pas, soit c'est un sale con. » Mon côté fouteur de merde, je le tiens de lui", a relaté Joann Sfar à Télérama (3 juin 2011).

Joann Sfar est scolarisé en école juive.

"Papa est né l'année où tonton Adolf est devenu chancelier : 1933. C'est l'année où pour la première fois on a découvert le monstre du Loch Ness. C'est l'année, enfin, où sortait King Kong sur les écrans. Mon père, c'est pas rien. ", écrit Joann Sfar dans Comment tu parles de ton père. "Tout le monde n'a pas eu la chance d'avoir et un père comme André Sfar. Ce livre pudique, émouvant et très personnel, est le Kaddish de Joann Sfar pour son père disparu. Entre rire et larmes". "c'est un juif méditerranéen, très beau, excellent pianiste, champion de ski nautique, brillant avocat niçois, aujourd'hui à la retraite. Un séducteur, mais en même temps un homme très traditionaliste, très attaché à la religion. Son exploit à lui est d'avoir été le premier à faire mettre en prison des néonazis, dans les années 1970. Ce qui m'a valu pendant mon année de CM2 d'aller à l'école entre deux gendarmes, parce que ma classe avait été saccagée par les gens qui voulaient l'intimider. On avait des coups de fil la nuit, on recevait des cercueils... Ça ne l'impressionnait pas, au contraire. A 13 ans, le jour de ma bar-mitsva, je me suis fait attaquer et voler dans la rue. Mon père m'a engueulé parce que je n'avais pas été capable de frapper mes agresseurs, et mon grand-père m'a félicité de ne pas avoir pris de risques. Ça résume beaucoup de choses sur mon enfance. Je les aimais tout autant tous les deux, mais je n'ai jamais choisi entre l'ironie et le coup de poing dans la figure. Je suis capable des deux", a dit Joann Sfar à Joann Sfar à Télérama (3 juin 2011).

"Ma République idéale, c'est Nice où j'ai grandi : on était toujours fourrés ensemble, Blancs, Noirs, juifs, musulmans, on se sortait les pires vannes racistes du monde, mais il ne nous serait pas venu à l'idée de ne pas se fréquenter !", a déclaré Joann Sfar à Télérama (3 juin 2011).

Joann Sfar aspire à une carrière dans la bande dessinée. Il suit des études de philosophie à Nice, puis à l'École nationale supérieure des Beaux-arts de Paris, dans l'atelier de Pierre Carron.

En 1994, l'Association, jeune maison d'édition fondée par Jean-Christophe Menu, Lewis Trondheim, David B., Mattt Konture, Patrice Killoffer, Stanislas et Mokeït, publie les premières planches de Joann Sfar. Une nouvelle génération s'épanouit en se distinguant de l'école classique franco-belge.

Cet auteur travaille au sein de l'atelier Nawak, puis de l'atelier des Vosges à Paris. Et y initie des collaborations artistiques. "Il y a un effet de génération avec l'arrivée de Christophe Blain, Marjane Satrapi, Lewis Trondheim, David B., qu'on travaillait dans le même atelier, qu'on a amené un style, un goût un peu neuf. Mais ça ne correspond pas à une « école » artistique ! On est tous trop individualistes, trop différents. Même quand on a collaboré pour des albums, c'était pour le plaisir, pas pour rédiger des manifestes. On n'a jamais prétendu être « alternatifs ». Moi pas, en tout cas. J'ai juste demandé autant de sérieux pour la bande dessinée que pour la littérature. C'est réussi, puisqu'on a maintenant les mêmes maladies que la littérature : surproduction, critique indigente... En ce moment, la BD ne va pas très bien, les gros éditeurs ont perdu une partie de leur identité, l'édition indépendante s'est tuée elle-même en coupant les branches qui poussaient le mieux...", s'est souvenu Joann Sfar à Télérama (3 juin 2011).

Il crée des séries pour adultes et jeune public : Petit Vampire, Sardine de l'espace, Le Chat du rabbin, Donjon, Klezmer, Carnets...

Il adapte au cinéma Le Chat du rabbin et réalise le long métrage éponyme.

Il écrit aussi des romans, dont Le Plus Grand Philosophe de France. qui relate les aventures du pirate juif hollandais Pietr Cohen, de la comtesse française Éponyme, et du Prince noir Pinoquillio au Siècle des Lumières.

"La synagogue"
En 2022, Dargaud a publié "La Synagogue" de Joann Sfar. "Joann Sfar cherche depuis trente ans à inviter son lecteur dans le monde juif. Tous ses récits sont des appels désespérés à la fraternité. "La Synagogue" marque sans doute le début de son épopée la plus intime. Cette fois, il va moins loin que l'Algérie du chat ou que l'Ukraine de "Klezmer". Il a fallu qu'il se trouve sur un lit d'hôpital en 2021 pour que le dessinateur ose enfin raconter ses vraies aventures d'adolescence. C'est une génération qui se sent coupable d'être née après Hitler et de ne pouvoir le combattre. Des gosses poings serrés qui se disent que les fils de bourgeois déguisés en skinheads qui croisent leur route ne seront pas des ennemis à la hauteur de leur chagrin. C'est l'histoire des Juifs de France qui rêvent d'être comme tout le monde mais qui ne savent pas comment se rendre utiles lorsque des bombes commencent à exploser dans les synagogues."

"Derrière le plaisir du dessin et des bagarres, un récit salutaire pour rappeler aux jeunes ce que fut le Front National quand il ne faisait pas semblant d'être un parti comme les autres. "La Synagogue" est un récit qui rappelle la permanence des extrémismes politiques et la nécessité de les combattre, même si cette lutte doit être recommencée à chaque génération."

Arte diffusera le 13 décembre 2022 à 17 h 25, dans le cadre d'"Invitation au voyage" (Stadt Land Kunst), "Joann Sfar à Nice" (Joann Sfars Nizza) de Fabrice Michelin. "Linda Lorin nous emmène à la découverte de notre patrimoine artistique, culturel et naturel", notamment "Nice, la synagogue de Joann Sfar". "Romancier, cinéaste et surtout auteur de bande dessinée, Joann Sfar, la cinquantaine passée n’a perdu ni la sensibilité ni le regard transgressif hérités de son enfance. Il revient dans ce Nice qui a hanté ses récits pour lever le voile sur sa toute dernière œuvre, La synagogue. Des pages inquiètes, qui concentrent l’héritage de son père : son obsession de se battre contre l’extrême droite, contre l’antisémitisme, contre toutes les discriminations."

En 2002, Dargaud a publié le premier tome de la série Le Chat du rabbin, mise en couleurs par Brigitte Findakly. Ce chat est inspiré de celui de Joann Sfar qui l'a appelé "Imhotep, comme l'architecte des pyramides".

"Le chat du rabbin adore se blottir dans les bras de sa maîtresse, Zlabya. Après avoir dévoré le perroquet de la maison, il se met soudainement à parler. Mais le rabbin lui interdit alors de voir sa maîtresse car il ne dit que des mensonges.Le rabbin commence à enseigner à son chat la Torah afin de le remettre dans le droit chemin. Ce dernier demande donc naturellement à faire sa Bar-Mitsva. Mais un chat parlant a-t-il vraiment le droit de faire sa Bar-Mitsva ?"

La série comprend les albums suivants, traduits en  allemand, anglais, arabe, espagnol, hébreu, italien, polonais, portugais, russe, suédois ou/et tchèque :
- La Bar-Mitsva (2002), préfacé par Éliette Abécassis. Joann Sfar le dédie « en hommage à tous les peintres d’Alger au xxe siècle » ;
- Le Malka des lions (2002), préfacé par Mohamed Fellag ;
- L’Exode (2003), préfacé par Georges Moustaki.
- Le Paradis terrestre (2005), préfacé par Jean Giraud.
- Jérusalem d'Afrique (2006), préfacé par Philippe Val. Joann Sfar y a indiqué que cet album vise à lutter contre le racisme. "Si j'étais en Israël, je serais sans doute d'extrême gauche. En revanche, j'ai du mal à comprendre la manière dont ce pays est décrié ici. La création de l'Etat d'Israël après la Seconde Guerre mondiale, c'est le constat que l'Europe n'arrivait pas à protéger les Juifs. Je déborde d'amour pour les populations qui habitent là-bas, j'y vais souvent. C'est inextricable comme dans beaucoup d'autres coins du globe. Mais la quête que mènent mes personnages est surtout une réflexion sur les racines, sur l'illusion que tout était mieux avant. La Terre promise pour le futur ou l'âge d'or pour le passé, ça m'emmerde. Seul le présent m'intéresse", a expliqué Joann Sfar à Télérama (3 juin 2011) ;
- Tu n'auras pas d'autre Dieu que moi (2015) ;
- La Tour de Bab-El-Oued (2017).

Élise McLeod et Sei Shiomi mettent en scène La Bar-mitsva du Chat du Rabbin, avec Rémy Darcy, Shiran Azoulay, et Camille Nahum, adaptatrice, au théâtre Michel Galabru en 2004, puis au Théâtre Le Temple en 2005.

Joann Sfar co-fonde le studio de production Autochenille Production.

En 2011, Joann Sfar a adapté au cinéma les tomes 1, 2 et 5 du Chat du rabbin, "critique acidulée des religions, au travers des aventures d'un chat parlant". "Alger, années 1920. Le rabbin Sfar vit avec sa fille Zlabya, un perroquet bruyant et un chat espiègle qui dévore le perroquet et se met à parler pour ne dire que des mensonges. Le rabbin veut l'éloigner. Mais le chat, fou amoureux de sa petite maîtresse, est prêt à tout pour rester auprès d'elle... même à faire sa bar mitsva ! Le rabbin devra enseigner à son chat les rudiments de loi mosaïque ! Une lettre apprend au rabbin que pour garder son poste, il doit se soumettre à une dictée en français. Pour l'aider, son chat commet le sacrilège d'invoquer l'Eternel. Le rabbin réussit mais le chat ne parle plus. On le traite de nouveau comme un animal ordinaire. Son seul ami sera bientôt un peintre russe en quête d'une Jérusalem imaginaire où vivraient des Juifs noirs. Il parvient à convaincre le rabbin, un ancien soldat du Tsar, un chanteur et le chat de faire avec lui la route coloniale..." Ce film en 3D reçoit le César du meilleur film d'animation.

"Pendant la préparation du dessin animé, on a filmé [mon chat] pendant des heures, avec son air de se foutre de tout, de ne penser qu'à sa gueule... C'était vraiment le Candide de Voltaire que je voulais pour mon histoire. Au départ du projet, j'étais très angoissé. Ce sont les comédiens qui m'ont rassuré. Avec eux, les ressorts narratifs m'ont tout à coup paru très simples : dès qu'ils sont arrivés, maquillés et costumés, j'ai eu des souvenirs de mes lectures enfantines de Molière : Hafsia Herzi, qui joue Zlabya, la maîtresse du chat, c'est la jeune fille à marier du théâtre classique. Son père le rabbin, Maurice Bénichou, on pourrait le trouver dans Tartuffe, en plus tendre. Quant à François Morel, on s'est rencontrés pendant une lecture du Petit Prince. Il faisait toutes les voix, et en particulier celle du renard : ultra séduisant, un peu salaud, égoïste... Personne, mieux que lui, n'aurait pu donner sa voix au chat, en faire un vrai valet de Molière, un Scapin ou un Sganarelle. Après, j'ai choisi de faire un film d'animation, et non un « live », parce que je voulais qu'il y ait une homogénéité entre le chat et les autres personnages, je ne voulais pas le faire tout seul en animation, donc il fallait que tout soit dessiné", a confié Joann Sfar à Télérama (3 juin 2011).

Et d'ajouter : "depuis, dix ans ont passé, pendant lesquels j'ai tourné en ZEP, dans les collèges et les lycées, avec la BD. Ça m'a permis de mesurer les effets du livre. Un jour, une gamine est venue me dire : « Ton bouquin, on voulait pas l'ouvrir, mais ça nous a plu, finalement, parce qu'on a vu que les Juifs et les Arabes sont aussi cons les uns que les autres. » C'est exactement ce que je voulais : dédramatiser la relation entre les musulmans, les juifs, les chrétiens... Quand j'ai commencé la préparation du dessin animé, j'étais devenu très conscient de cette dimension pédagogique. Ça m'angoissait, parce que les « messages » peuvent alourdir un film, voire le foutre en l'air. Par exemple, lorsque le vieil imam regarde le spectateur droit dans les yeux et dit : « Notre Dieu n'est pas haineux, il aime la science. » C'est trop direct, mais je ne pouvais pas laisser la moindre ambiguïté, risquer, sur un tel sujet, de ne pas être compris. Il y a quelques jours, en pleine tournée de promo du film, j'ai laissé échapper : « Il faudrait arrêter de faire comme si la religion c'était sacré. » Brassens disait qu'il faut critiquer les uniformes, mais pas les gens qui les portent. J'adore les Arabes, les Juifs, mais par contre, la religion, ça m'emmerde."

Et de conclure : "Mon film "est plein de défauts ! Comme la BD, comme Gainsbourg (vie héroïque)... Mais j'aime essayer des choses inédites, que je ne maîtrise pas forcément. C'est la maladresse qui est émouvante. Le point faible de mes récits, c'est leur structure. Ils ont quelque chose d'organique, de dilaté... Autant j'ai l'impression qu'avec mes livres j'ai ouvert une petite blessure qui me ressemble, autant je ne sais absolument pas si mes films sont intéressants. Je n'ai aucun recul. J'ai presque hâte d'en avoir quatre ou cinq derrière moi pour y voir un peu plus clair..."

Le 8 novembre 2018 de 10 h à 12 h, le musée d'art et d'histoire du Judaïsme (mahJ) proposera la projection, pour les élèves à partir de 10 ans, du film "Le chat du rabbin" réalisé par de Joann Sfar et Antoine Delesvaux (France, 2011, VF, 1 h 40), suivie d’une rencontre avec Dominique Lurcel, metteur en scène et traducteur de Nathan le Sage (1779) de G. E. Lessing, véritable plaidoyer en faveur de la tolérance religieuse, directeur artistique de la compagnie Passeurs de Mémoires. "À Alger dans les années 1920, un chat vit avec Zlabya, la fille du rabbin Sfar. Un jour, il commence à raconter des histoires ! Inquiet, le rabbin décide de l’éloigner de sa fille. Prêt à tout pour rester auprès de sa maîtresse, le chat prie le rabbin de le préparer à sa bar mitsva ! Il se met alors à questionner les croyances des hommes, causant bien du tracas au rabbin". Projection pour les classes participant au dispositif « Classes croisées » ou au parcours d’éducation artistique et culturelle « Regards croisés autour de la Méditerranée ».

Oeuvre variée
L'oeuvre de Joann Sfar rencontre un succès croissant critique et populaire et critique, distinguée notamment lors du Festival de bandes dessinées à Angoulême, et par le Prix René Goscinny pour La Fille du professeur (1997 ).

Cet auteur conçoit des billets dessinés dans la presse généraliste (Mon cahier d'éveil dans Charlie Hebdo, Télérama, Le Huffington Post).

Il illustre des livres classiques - Candide de Voltaire, Le Banquet de Platon -, et écrit des romans, dont L’homme arbre.

Joann Sfar a dirigé des collections chez Bréal Jeunesse et chez Gallimard ( « Bayou »).

En 2003, sa série Petit Vampire fait l'objet d'une adaptation télévisuelle.

En 2010, Joann Sfar se lance dans le cinéma avec le film Gainsbourg, vie héroïque, avec Éric Elmosnino, Lucy Gordon, Lætitia Casta. Ce long métrage obtient le César du meilleur premier film.

En 2011, il conçoit une exposition sur Georges Brassens. "C'était très amusant à faire, d'autant que si Gainsbourg est un poète qui me fascine, Brassens est une sorte de maître. Sa vision de la vie me convient", a déclaré Joann Sfar.

Dès 2013, sur France Inter, il tient dans l’émission Downtown la chronique « Vous voyez le tableau ».

En 2016-2017, l'Espace Dali à Montmartre proposait l'exposition Joann Sfar - Salvador Dali : Une seconde avant l’éveil. "1939, Dalí publie une Déclaration d'indépendance de l'imagination des droits de l'homme à sa propre folie, en réponse aux censeurs. Il emploie dès lors cette liberté d'expression en favorisant les associations d'idées et d'images spontanées qui donnent à ses œuvres une incomparable puissance imaginative. C'est à Joann Sfar, l'un des conteurs contemporains les plus talentueux, connu du grand public pour sa bande dessinée Le Chat du Rabbin et son film Gainsbourg Vie Héroïque, que l'Espace Dalí a donné carte blanche pour imaginer le scénario d'une rencontre artistique avec celui que Brassaï appelait « l'explorateur aussi hardi que lucide de l'irrationnel ».

"Artiste formé aux Beaux-Arts de Paris, Joann Sfar, nous propose un chemin dessiné dans ce qu'il s'imagine être le cerveau de Dalí. Il encourage la perdition et l'égarement parmi les figures monstrueuses. Ce qui lui importe, c'est que l'exposition soit aussi excitante qu'un conte de fées. L'exposition est une invitation au « voyage immobile » d'un peintre et de ses modèles évoluant entre rêve et réalité, au fil de l'écriture en dessin de Joann Sfar. Dans un décor enchanté par les sculptures et objets surréalistes de Dalí et les créations Haute Couture de Schiaparelli qui ont inspiré l'artiste, plus de 200 dessins originaux, croquis, esquisses sont à découvrir. Parallèlement à l'exposition, Joann Sfar publie aux éditions Rue de Sèvres un récit en bande dessinée en hommage à Dalí, Fin de la parenthèse, dont les dessins originaux sont présentés dans l'exposition.

Joann Sfar joue notamment du ukulélé. Il a accompagné sur scène Mathias Malzieu, chanteur du groupe Dionysos. Il a élaboré des pochettes du groupe et le clip de la chanson Tes lacets sont des fées. Il a aussi co-réalisé avec Kerascoët le clip Hyacinthe pour Thomas Fersen.

Juifs, judaïsme, antisémitisme
Dans son oeuvre prolifique, Joann Sfar aborde des questions religieuses, philosophiques et spirituelles. Joann Sfar s'est fait le chantre d'un judaïsme sépharade, souvent méconnu.

Il a créé des dessins ironiques dans lesquels il exprime notamment son indignation face à l'antisémitisme.

En janvier 2016, Joann Sfar a publié sur les réseaux sociaux ses dessins moquant le qualificatif "déséquilibré" adopté hâtivement et notamment par les autorités politiques et l'AFP (Agence France Presse), et repris par l'ensemble des médias, dès qu'un Juif est victime d'une agression antisémite par un individu doté de toute sa conscience, responsable de ses actes jusqu'à preuve du contraire. GÉNIAL.

En juin 2016, une "adaptation de la BD "Le Chat du rabbin" a été dégradée dans la médiathèque de Lannion, ciblée par des actes antisémites à répétition. Joann Sfar s'est insurgé contre des dégradations antisémites commises sur une adaptation de son oeuvre "Le Chat du rabbin" dans une médiathèque de Lannion".

"Livres et DVD sur la Seconde Guerre mondiale et la Shoah dégradés, commentaires injurieux dans les WC… Depuis un an, la médiathèque de Lannion (Côtes-d'Armor) est la cible d'actes antisémites et racistes, comme en fait état Ouest-France. La dernière provocation en date a visé une adaptation vidéo de la bande dessinée Le Chat du rabbin. En réaction, son auteur, Joann Sfar, a poussé un coup de gueule sur Facebook. Après avoir partagé l'article de Ouest-France qui rapporte la nouvelle dégradation commise dans la médiathèque bretonne, le célèbre dessinateur s'est fendu d'un long message sur son profil Facebook, sur un ton mêlé de tristesse et de lassitude. « On m'a élevé avec des phrases du genre ils commencent par brûler des livres et après ils s'en prennent aux hommes ».

Et d'ajouter : « Depuis Mohamed Merah, le coup d'envoi du grand massacre d'hommes et de femmes a démarré en France. Dans ce monde où chaque semaine annonce une nouvelle tuerie, la première pensée qui me vient, c'est en plus on défonce des livres. Pardon pour mon apathie. J'arrive face à vous après quinze ans d'interventions en Zep durant lesquelles j'ai vu comme enseigner la Seconde Guerre mondiale devenait un acte périlleux. Vraiment, au point où on en est, je devrais ne même pas être ému, de découvrir que mes livres qui ne parlent que de vivre-ensemble et de rapprochement entre les hommes sont l'objet de déprédations. »

Le "dessinateur profite de ce message pour expliquer ses difficultés à vendre son œuvre Le Chat du rabbin dans certains pays.  « Je ne veux pas nommer les acheteurs, mais sans exception les représentants d'innombrables territoires m'ont dit : "à titre personnel, ça nous plairait, mais il y a rabbin dans le titre, alors ce n'est pas pour nous". La bonne nouvelle que retient Joann Sfar consiste au fait que « pour la première fois un journal parle » des attaques dont son œuvre est la cible. Il termine son message sur Facebook, « liké » et partagé plusieurs milliers de fois, par une forme d'avertissement : « Les juifs sont un baromètre : quand on commence à cogner dessus, c'est que les libertés ne sont plus là pour longtemps. »

Le 3 octobre 2017, dans sa page Facebook, Joann Sfar a publié son avis sur un plan gouvernemental de lutte contre l'antisémitisme :
"Pourquoi je ne parviens pas à me réjouir de l’annonce d’un « nouveau plan de lutte contre l’antisémitisme » ?
 Parce que nos gouvernants font chaque jour de petites caresses à chacune des minorités qui subit de plein fouet le retour du fanatisme religieux. Un jour on va faire un câlin aux femmes agressées, un autre aux juifs, comme si ça allait changer quoi que ce soit.
Nos gouvernants refusent depuis des années de s’attaquer au soft power qui encourage de tous les côtés la partition du pays et le retour de catégories religieuses qui tiendraient lieu d’identité principale des citoyens. On me demande depuis son élection pourquoi je ne parviens pas à m’enthousiasmer pour Macron ou son équipe ; ça tient à cette lâcheté, dont l’histoire le tiendra comptable : il refuse absolument de se déterminer face à l’entrisme des fanatiques. Il copie l’attitude de Trudeau et considère que critiquer ce repli sur soi n’est pas la mission d’un gouvernement. La France n’est ni l’Angleterre ni le Canada. On ne peut pas regarder ailleurs lorsque des citoyens s’extraient de notre pacte social.
En France, on attend d’une équipe gouvernementale qu’elle ait un projet de société. L’angle mort du projet Macron, c’est le religieux. Les représentants de ce gouvernement me semblent agir comme jadis le Cadi pour nos ancêtres colonisés : on va faire des compliments à chaque petite communauté pour acheter un ersatz de paix civile. C’est lâche. C’est humiliant. Et ça ne satisfait que ceux qui regardent ailleurs que dans le vrai monde.
Les grands opérateurs de télévision continuent de faire la retape pour des chaînes du câble qui diffusent la parole de Tariq Ramadan et de ses copains. Les dictatures du Golfe inondent depuis plusieurs décennies nos chaînes de télés, nos compétitions sportives, et notre espace public d’une vision du monde incompatible avec une démocratie. À ma connaissance, aucun des trois gouvernants qui se sont succédé depuis une dizaine d’années n’a fait un seul geste face à ces tentatives de convertir notre jeunesse au fanatisme.
La jeunesse française a été abandonnée. Je parle des représentants les plus vulnérables de notre corps social. Un jeune a besoin qu’on lui propose des choses. Des rêves. Des motifs de fierté. Qu’on lui dise simplement « viens, on va trouver une place pour toi ». En Algérie au temps du GIA, les islamistes étaient très forts pour proposer un repas ou de l’aide, ou des soins aux déshérités. En Algérie, au début, on se moquait des barbus et ensuite il y a eu trois cent mille morts.
Comme beaucoup, je suis convaincu que le rejet de la partition religieuse est une mission de la gauche. Je suis également certain qu’abandonner la jeunesse soit à un vide culturel, soit à une influence totalitaire, puisqu’il n’est question de rien d’autre, je suis convaincu que c’est une faute politique et historique. La noblesse et la mission d’un gouvernement se situe avant tout dans cet endroit : la jeunesse, les faibles. Et oui, l’État a pour mission de proposer un projet de vie.
Notre jeunesse a été abandonnée. Puis, dans les prisons, dans les clubs de sports, sur les chaînes de télés et dans les quartiers, on a acheté la paix en laissant des fanatiques s’occuper des jeunes à la place des pouvoirs publics. C’est trop tard, bien entendu. Mais je ne parviens pas à feindre l’enthousiasme lorsque nos dirigeants font semblant de s’attaquer au problème.
Quand Merah a tué, on n’a pas montré les victimes. On s’est laissés hypnotiser par le tueur. On a montré ses photos sur lesquelles il souriait au volant de sa bagnole. On a provoqué une identification immédiate entre le tueur et notre jeunesse.
Rien ne va changer. Le système du sport de haut niveau et de la télévision par câble va continuer d’accepter les pétrodollars. Nos journaux vont persister à faire passer pour de la ferveur religieuse ce qui relève depuis longtemps de l’envie de partition. Et Macron va continuer de dire sa détermination sans que quiconque comprenne ce qu’elle signifie.
Je crois qu’aujourd’hui j’aurais presque plus d’enthousiasme pour un président qui oserait dire : « nous sommes inutiles et nous le savons. Oui il y a un retour de la haine et du fanatisme et de la pensée tribale. C’est un phénomène mondial et notre pays, comme les autres, est marqué par cette résurgence de la Guerre du Feu. »
Ou bien je crois que je pourrais m’enthousiasmer pour un vrai homme de gauche, qui se rappellerait que notre pays a été unifié par l’école, et par la séparation inflexible de l’Église et de l’État. Quelle honte de voir que les organismes d’État censés veiller à la laïcité passent leur temps à défendre les bigots. Lorsque Macron a laissé en place les dirigeants de l’Observatoire de la laïcité, il a eu un geste politique d’une lâcheté rare. On mesure sur le terrain la compromission constante de cette officine avec les défenseurs du fanatisme. Puisqu’ils sont encore en place, nous avons le droit de penser qu’ils représentent l’idée que se fait notre gouvernement de la façon d’agir face aux extrémistes. Ou bien ils considèrent comme modérés ou acceptables les promoteurs d’un mode de vie semblable à celui des saoudiens, ce qui est très inquiétant.
Oui, les tueries de Mohamed Merah ont marqué le début d’un bain de sang dont on ne voit pas la fin. Et à l’époque, la réprobation n’avait pas eu la force qu’elle aurait dû. Des années avant, quand on avait profané une tombe juive à Carpentras, il y avait eu un million de français dans les rues. Pour Merah, on n’a pas vu les victimes. Il y a deux jours, deux jeunes femmes ont été égorgées au nom de guerres préhistoriques à la gare de Marseille. C’était il y a deux jours et on n’en parle déjà presque plus.
On a compris. Ça va être comme ça. Pour longtemps. La gauche est si bas en ce moment. Et caresser les fanatiques dans le sens de la barbe n’a jamais apporté de victoire électorale. Je ne suis pas con au point de terminer cette lettre en disant que je rêve que quelqu’un à gauche se rappelle de la force qu’on peut avoir quand on ne se trompe pas de combat. Je sais que personne ne viendra et que ça n’arrivera pas.
Comme beaucoup je n’attends rien. Bien entendu qu’un politique ne peut pas faire le discours que j’évoquais, en proclamant la certitude de son inutilité. Mais pour ma part, la force d’applaudir m’a quitté pour longtemps.
Bien entendu c’est un calcul économique qui a amené nos dirigeants à accepter les pétrodollars. Évidemment, c’est un calcul électoral qui encourage cette tolérance indigne face aux promoteurs du fanatisme et de la partition. Dans les deux cas c’est indigne. Dans un climat où le danger des politiques extrêmes est si fort, Sarkozy, Hollande puis à présent Macron ont failli à leur mission. Ils font le lit de tous ceux à l’extrême-droite comme à l’extrême-gauche, qui diraient « nous avons des méthodes expéditives, nous allons faire quelque chose ». Quel dommage ! Je crois que ça serait la noblesse d’un gouvernement modéré et responsable, comme prétend l’être l’équipe actuelle, que d’initier un changement total d’attitude.
Notre pays n’est respirable que par son refus de la partition. Notre espace public n’a rien à faire des superstitions des uns et des autres. Notre pays est très atypique, par son goût rageur de la démocratie, mais aussi par sa tradition d’union nationale, de ferveur révolutionnaire, d’envie d’unité et souvent de promiscuité parmi les citoyens. Nous sommes un des seuls pays au monde dans lequel un président pourrait sans risquer d’être ridicule dire « c’est ainsi qu’on doit vivre en France ». Car nos musées, nos théâtres et nos universités ont été construits dans une envie d’universel, et dans le projet de voler le sacré au religieux pour le donner…pardon, j’allais dire pour le donner à Rome.
 Pardon, je me suis juste fait plaisir en écrivant quelques lignes. Je sais qu’il ne va rien se passer et que chaque massacre donnera lieu à davantage de haine et de partition. Bonne journée à tous. Je ne suis pas très provocateur, je n’ose pas dire bonne nuit."

Le 2 novembre 2017, Joann Sfar a partagé sur sa page Facebook l'article du Monde En France, l'antisémitisme au quotidien en le précédant de ce commentaire :
"Je ne sais pas si on se le raconte aussi clairement mais les tueries de Merah on marqué un tournant dont la façon dont la communauté juive parle des agressions. Avant ce drame, chacun avait à coeur de faire connaître les agressions lorsqu'elles avaient lieu. Depuis, c'est l'inverse. Pour une raison simple: On a découvert que chaque attaque suscitait des vocations. Je voudrais qu'on rappelle les messages anonymes infects qu'a reçue l'école Ozar Hatorah après les massacres. Je me souviens que le carré juif du cimetière de Nice, celui où repose ma mère, a été profané quelques jours après. On se souvient, tous, enfin, que ces tueries ont été le point de départ d'une recrudescence de ces violences antijuives. Donc oui, de plus en plus, lorsqu'ils rentrent chez eux le pardessus recouvert de crachats, les juifs religieux ferment leurs gueules. Et les juifs qui n'ont pas l'air juifs ne savent plus comment se planquer. On leur a dit que les écoles publiques n'étaient plus pour eux. On ne compte plus ces réunions honteuses durant lesquelles des chefs d'établissements annoncent officieusement aux familles qu'il vaudrait mieux scolariser les enfants ailleurs. Puis il y a eu Merah et les écoles privées sont devenues elles aussi un lieu de danger. Depuis deux ans ce sont les agressions aux domiciles, qui se multiplient. Pourquoi mes mots? Pour insister sur le fait que contrairement à ce que croient trop de gens, les juifs ne passent pas leur temps à dénoncer, ou à pleurnicher. Au contraire. Sur ces affaires, la plupart des victimes ferment leurs gueules, se font le plus petites possibles, en espérant que l'orage passe, pour ne pas donner des idées à d'autres salopards. Il ne va pas passer, l'orage. Tout le monde a très bien compris. Qu'est-ce qu'on doit faire? Chaque réponse qui me vient me donne envie de me cogner la tête contre un mur. Je n'ose plus dire aux victimes que je croise que "la solution est l'éducation". Si je dis ça je prends une baffe. Ce n'est pas aux victimes de faire quelque chose ou de trouver des solutions."

Lors de “Vivre ensemble, les Assises Nationales de la Citoyenneté”, premières assises nationales de la citoyenneté organisées à Rennes par Ouest France (19-20 janvier 2018), Joann Sfar a déclaré à ce quotidien : « On se bat depuis des décennies pour que les jeunes gens de ce pays s'entendent bien et s'aiment. Malheureusement on est rattrapé par un retour du religieux, du fanatisme, du racisme. » Une situation qu'il impute en partie aux pouvoirs publics, « qui ne nous ont pas assez aidés ». Et d'ajouter : « Je fais partie des gens qui se sentent très cocus du vivre ensemble, parce qu'on a connu du vivre côte à côte, mais aujourd'hui il y a du vivre contre. »

En avril 2018, Joann Sfar a signé le Manifeste contre le nouvel antisémitisme publié par Le Parisien le 22 avril 2018 et dénonçant l'antisémitisme musulman, une "épuration ethnique à bas bruit". Ce Manifeste a été rédigé par Philippe Val, ancien directeur de Charlie hebdo. Il a été signé par 300 politiciens, intellectuels, artistes, etc. Au 29 avril 2018, il a reçu 33 137 signatures.

« Au cœur de la nuit - Joann Sfar et Javier Mariscal »
« Au cœur de la nuit - Joann Sfar et Javier Mariscal » (Durch die Nacht mit... Joann Sfar und Javier Mariscal) est un documentaire réalisé par Ilka Franzmann. « À Barcelone, le dessinateur et cinéaste Joann Sfar rencontre le graphiste Javier Mariscal pour une promenade très animée. Les deux dessinateurs échangent sur l’univers de Miró, se délectent de design rétro, se laissent inspirer par la voix d’une chanteuse de musique klezmer et admirent le lever du soleil depuis le port ».

« Aux côtés du Français Joann Sfar et de l’Espagnol Javier Mariscal, les rues de la capitale catalane se muent en un « comic-strip » un peu fou ». 

« Il y est question de littérature fantastique et de vampires, de lampes parlantes ou encore de la poésie d’un banc public ». 

« Les deux dessinateurs échangent sur l’univers de Miró, se délectent de design rétro, se laissent inspirer par la voix d’une chanteuse de musique klezmer et admirent le lever du soleil depuis le port ». 

Ils « débattent avec passion de « Chico et Rita », le film d’animation de l’artiste espagnol, traitant des amours contrariées d’un couple de musiciens cubains, mais aussi de l’œuvre surréaliste de Joann Sfar consacrée à Gainsbourg ». 

Ils « retrouvent dans un bar le réalisateur Fernando Trueba, qui leur fait revivre l’époque du jazz à Cuba ». 

« Si le dessin est pour Joann Sfar un moyen de se confronter à la réalité et d’arrêter le temps, c’est avant tout un jeu pour Javier Mariscal ». 

Les « deux artistes confrontent leurs deux approches en enrichissant de leurs traits de crayon la nuit ibérique ».

Politique
Lors de l'élection municipale de 2014 à Paris, Joann Sfar se rend dans les QG de campagne de candidates - Anne Hidalgo (socialiste) et Nathalie Kosciusko-Morizet (UMP) - pour y dessiner des scènes drolatiques.

« Attention, ne t'en prends jamais aux Insoumis car ça déclenche des torrents de messages et ça rend ta page Web inutilisable, c'est un matraquage comme même l'extrême droite n'a jamais osé », avaient prévenu les camarades journalistes de Joann Sfar.

Le 20 avril 2017, lors de la campagne pour l'élection présidentielle, Le Monde a publié la tribune de Joann Sfar « Les méthodes des partisans de Mélenchon sont dégueulasses ». Il y a dénoncé "les attaques dont il a été victime après la publication de ses dessins sur le candidat à la présidentielle". Dans l'un deux, il écrivait dans la bulle : « En ce qui concerne les relations avec la Russie et la Syrie, je vais continuer à aligner mes positions sur celles de Front National ». "L’auteur de bande dessinée Joann Sfar, également réalisateur et romancier, avait prévu de voter Jean-Luc Mélenchon [candidat de La France insoumise (LFI), mouvement d'extrême-gauche] au premier tour de l’élection présidentielle. Il n’en fera rien après la campagne « d’intimidation » dont il dit avoir été victime, sur les réseaux sociaux, de la part de cybermilitants du candidat de La France insoumise. Les comptes Facebook, Instagram et Twitter du créateur du Chat du rabbin ont été l’objet de centaines de commentaires hostiles. Tout est parti de plusieurs dessins de Joann Sfar mis en ligne après le meeting à Marseille, le 9 avril, de M. Mélenchon. Le dessinateur a subi un nouveau déferlement de commentaires virulents après la publication sur Facebook, le 13 avril, d’un texte dans lequel il critiquait la proposition de M. Mélenchon de rejoindre l’Alliance bolivarienne pour les Amériques [ALBA], mais aussi l’étonnement de l’une de ses soutiens, Clémentine Autain, qui, dans une interview à Franceinfo, semblait découvrir le programme de politique étrangère de son candidat] :
"Je ne suis pas dessinateur de presse professionnel. Je suis auteur de fiction. Je pratique le commentaire politique sur mes comptes Facebook, Instagram et Twitter. Il arrive que des journaux en ligne reprennent ces dessins, mais cela reste pour moi une activité récréative, et peut-être aussi une façon de partager mes interrogations sur notre monde.
Depuis des mois, comme le savent les visiteurs de mes pages, j’ai tapé très fort sur Fillon, beaucoup sur Hollande, et j’ai attaqué quand cela m’a semblé nécessaire Marine Le Pen, que je dessine peu, car je crois que ça lui fait de la pub, mais personne ne peut douter de mon engagement contre l’extrême droite.
Torrents de messages
Au sujet de Mélenchon, beaucoup de camarades journalistes et de community managers [« animateur de communauté », sur le Web], ­m’avaient mis en garde : « Attention, ne t’en prends jamais aux Insoumis car ça déclenche des torrents de messages et ça rend ta page Web inutilisable, c’est un matraquage comme même l’extrême droite n’a jamais osé. »
C’est, semble-t-il, un fait avéré parmi les community managers, et même dans les pages Facebook personnelles. Et je crois qu’il y a beaucoup d’autocensure pour éviter ces matraquages.
J’ai fait trois ou quatre dessins sur Mélenchon le jour de son meeting à Marseille. L’un d’eux ironisait sur son prétendu refus du culte de la personnalité ; d’autres, plus sérieux, s’alarmaient de l’alignement de sa politique étrangère avec celle de l’extrême droite, en particulier en ce qui concerne la Syrie. Ce sont ces dessins qui ont mis le feu aux poudres. J’ai vu débarquer sur Facebook, Instagram et Twitter des centaines de pseudos dont je n’avais jamais entendu parler et qui venaient me « désintoxiquer ».
Cela m’a tellement énervé que je me suis documenté sur le programme de Mélenchon, pour qui je m’apprêtais à voter, malgré le mauvais goût que m’a laissé son ancienne campagne de « bruit et de fureur », car je pensais qu’il avait changé.
J’ai alors été un des milliers d’internautes à partager cet extrait vidéo hallucinant où Clémentine Autain – la porte-parole du mouvement Ensemble !, qui soutient le candidat de La France insoumise – découvre en direct le contenu du programme de politique étrangère qu’elle est censée défendre. Ce n’est pas le partage de cette vidéo qui a attiré les trolls, ce sont mes dessins sur la Syrie, publiés trois jours plus tôt.
Le site Arrêt sur images a qualifié de « fact checking » la campagne dont j’ai été victime. Je récuse ce terme. Voici, en effet, en quoi elle a consisté :
– des centaines de profils ont fondu soudainement sur mes pages perso ;
– des tweets personnels vieux de trois ans, auxquels la date a été retirée pour les faire croire actuels, ont été réutilisés. Dès que le pot aux roses a été découvert s’en est suivie une campagne de calomnies pour expliquer que ces tweets sont la preuve que j’ai toujours été un ennemi du camp de Mélenchon, ce qui est faux ;
– des articles et des argumentaires tous semblables ont été publiés sur mes pages pour m’expliquer en quoi l’ALBA n’est qu’une alliance commerciale (certes, mais mon sentiment reste inchangé, cet article du programme s’inscrit dans un mouvement global de rapprochement avec des dictatures) ;
– quelle que soit l’heure du jour ou de la nuit où l’on poste quoi que ce soit sur Mélenchon, des commentaires sont arrivés immédiatement sur mes pages ;
Rien ne sert à argumenter face à de pareilles attaques concertées.
Depuis, j’ai pu recueillir des explications auprès de journalistes spécialisés au sujet des méthodes des Insoumis. Celles-ci se résument à :
– la création de centaines de faux comptes Twitter ;
– l’utilisation de la plate-forme Discord [prisée des gamers] pour planifier des attaques de « désintoxication » sur les pages professionnelles et personnelles de quiconque critique les Insoumis ;
– la distribution aux militants de fascicules sur lesquels est écrit : « Si on vous dit ça, répondez ça » ;
– la mise en cause personnelle et morale de la personne qui a critiqué la ligne des Insoumis.
Depuis le déclenchement de cette histoire, je reçois des centaines de messages de personnes qui n’ont pas ma célébrité et qui disent avoir été blessées par ce type d’attaque. On me dit qu’aucune de ces méthodes n’est illégale, c’est possible. Mais je les trouve dégueulasses. Et aucun des autres candidats ne les utilise avec cette intensité.
La question que pose cette histoire, c’est la marge de manœuvre de voix individuelles face au rouleau compresseur d’une campagne très manipulée et très au fait des méthodes de harcèlement informatique.
Chaque article publié sur cette affaire m’a valu l’accusation de « vouloir faire ma promo » ou de « pleurnicher dans les jupes de mes amis journalistes ». C’est particulièrement injuste.
Résultat : l’autocensure va continuer, car personne n’a envie de vivre ce genre de truc. Même s’ils ne le diront jamais publiquement, je sais que la plupart des dessinateurs politiques y réfléchissent à deux fois avant de dire un seul mot sur Mélenchon.
Tiens, le pompon : quand j’ai commencé à recevoir des injures antijuives, certains soutiens des Insoumis m’ont attaqué en me reprochant d’en faire état et, en cela, de ternir l’image de leur mouvement. Comme si on ne se doutait pas qu’à s’acharner pendant trois jours sur la page personnelle d’un auteur, on finit par attirer de vrais désaxés.
C’est là que je souhaite en venir : même « célèbre », un auteur reste un individu, sans community manager, sans modérateur, sans appareil de campagne, sans faux comptes, sans collectif sur Discord. On voit bien qu’aujourd’hui, une voix seule ne peut plus dire son désaccord face à une telle organisation.
Rouleau compresseur
Dans un contexte où de plus en plus de sujets sont interdits aux humoristes, il me semble que c’est grave. Le style d’une formation politique ne tient pas seulement dans le contenu de son programme, mais aussi dans les méthodes qu’elle emploie.
L’idée que les dirigeants des Insoumis ne cautionneraient pas ce type d’attaque est un conte de fées. Depuis le déclenchement de tout ça, je n’ai pas lu un mot de leur part pour se désolidariser ou pour calmer le jeu. Le but, c’est qu’on se taise. Un parti qui autorise à cette échelle ce type de comportements risque d’avoir un exercice du pouvoir inquiétant.
Je suis désolé pour les militants sincères qui se sont sentis blessés par mes prises de position. Le rouleau compresseur mis en œuvre par les activistes et divers trolls m’a rendu incapable de répondre individuellement à tous ceux qui auraient souhaité avoir avec moi une discussion apaisée".
Terrorisme islamiste
Le 7 janvier 2015, au siège de l'hebdomadaire Charlie Hebdo, Chérif et Saïd Kouachi, deux frères terroristes islamistes ont assassiné onze personnes — dont huit collaborateurs du journal — et en blessent onze autres avant de tuer durant leur fuite, un policier déjà blessé et à terre. L'un d'eux crie : « On a vengé le prophète Mohammed, on a tué Charlie Hebdo ». L'attentat est revendiqué par Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA), basé au Yémen. Ces djihadistes sont finalement abattus le 9 janvier 2015  par le GIGN à Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne), au nord de Paris.

Le 8 janvier 2015, à Montrouge, Amedy Coulibaly, en coordination avec les frères Kouachi, tue une policière municipale et blesse grièvement une autre personne. Le 9 janvier 20158, il prend en otage les clients d’une supérette casher à la porte de Vincennes à Paris et en tue quatre. Il est finalement tué lors d'un assaut du RAID et de la BRI. Il revendiquait agir au nom de l'État islamique.

Le 5 février 2015, Joann Sfar a ouvert son blog en publiant le texte "Si Dieu existe" illustré de dessins ainsi que le dessin Où est le courage ?

"Il paraît que ça a été notre 11-Septembre. Je me souviens très bien où j'étais le 11 septembre 2001. C'était deux jours avant mon mariage. Le 7 janvier, j'étais chez moi. Le 11 janvier était l'anniversaire du décès de ma mère. Ce 11 janvier, on s'est senti très entourés. Nous? Les dessinateurs? Les citoyens français? Les juifs qui se disent que ne pas manger casher est excellent pour la santé parce que ça évite de prendre une balle? Les Français musulmans qui mesurent comme tout ça va encore leur retomber sur le coin de la figure ?"

"Je n'ai rien pu écrire ni dessiner à mesure qu'on nous annonçait les assassinats. Et puis sur le coup de 17 heures j'ai écrit quelques mots. Les noms des dessinateurs morts. Une phrase "ils croyaient s'en prendre à des dessinateurs, ils ont aussi tiré sur l'islam". Et comme tout le monde j'ai fait un dessin idiot avec un crayon contre une kalachnikov. Lors de très grands événements, on a le devoir de faire un dessin idiot. Ce sont des moments où être malin peut paraître obscène. Les catastrophes de cette ampleur sont les seuls instants de la vie d'un dessinateur où il a le droit d'être comme la lune, comme Plantu, de tout résumer en un dessin. C'est moche. Le dessin, ça ne sert pas à ça. Cette époque où l'on vous disait "tu as vu son dessin, tu as tout compris à l'actualité", c'est tout ce que je combats. Je crois que le dessin et les mots sont un ruban sans fin. Ils se déroulent et on passe toute la vie à en chercher le sens. Un dessin qui résume, qui simplifie, qui donne le sentiment qu'on a compris de quoi il est question, c'est un dessin que je n'aime pas. S'il me complique la vie, s'il lance une discussion sans fin, alors j'aime le dessin."

"Je n'ai rien à dire. Je n'ai pas de message à transmettre, pas plus que de vision définitive du monde. Je ne me sens aucune mission d'informer. Je suis certain de ne pas être plus intelligent que mon lecteur. Simplement, pardon de parler de mes fesses mais mon nombrilisme atavique m'a souvent incité à les confondre avec le pays, leur amplitude sans doute... oui, je disais que tout ça est en vrac, et que j'ai commencé d'écrire beaucoup. On ne décide pas le moment où l'on a un besoin vital et de son lecteur et de son papier. A chaque fois que j'ai recommencé des carnets, c'est parce que j'étais en travaux. Il y avait des brisures à colmater."

"Aujourd'hui, un mois après, j'intègre Le Huffington Post. J'ai besoin d'amis. J'ai besoin de faire partie d'un journal. J'ai besoin qu'on m'envoie au contact du monde. La foule qui s'est levée pour fêter l'anniversaire du décès de ma maman, je veux dire le 11 janvier, je veux dire, tous ces invités qui étaient là, j'ai besoin qu'ils me racontent une histoire. J'écoute, je note. Si vous voulez, je suis là pour longtemps."

"Dès aujourd'hui, on va prépublier ici les pages de mon carnet. Je suis déjà en page 140. Je n'écrirai pas régulièrement, je ne suis pas régulier. Mais je suis très reconnaissant qu'on me laisse cet espace pour partager mes questions et mes images. Parfois mes préoccupations entreront en résonance avec l'actualité, sans vraiment que je le fasse exprès."

"Je dois aussi vous demander pardon pour l'étalage d'histoires intimes qui émaillent ces pages. En vrai, je ne raconte guère de secrets sur moi. J'ai l'impression de me borner à partager des choses que tout le monde vit. Je ne fais pas la leçon. Je suis en vrac et paumé, comme vous j'imagine. J'ai mesuré, le 11 janvier, comme quatre millions de paumés, dès qu'ils se rassemblent, se sentent mieux. Ces pages servent sans doute à ça: se sentir mieux ensemble. Et aussi, garder la certitude que même si on ne porte pas un grand programme politique, on a le droit de ne pas croire les pessimistes. Le futur n'est pas écrit. S'il est pourri, ça sera de notre faute !"

"Merci à l'équipe du HuffPost de m'accueillir. Le carnet s'appelle "Si Dieu Existe". Je me suis dit qu'avec un titre aussi con, j'allais attirer du monde."

Après les attentats terroristes islamistes du 13 novembre 2015  à Paris - salle de spectacles le Bataclan, terrasses de cafés - et à Saint-Denis - grand stade de France -, Joann Sfar a publié douze dessins sur son compte Instagram.

Les Fables de La Fontaine
Le ministère de l'Education nationale va donner un livre à lire pendant les vacances d'été 2018 à 800 000 écoliers de CM2 quittant l'école primaire pour le collège. Ce "livre pour les vacances" est un recueil de Fables de La Fontaine, illustrées par Joann Sfar.

"Avec "Un livre pour les vacances", l'objectif est de renforcer le goût et la pratique de la lecture chez ces élèves qui vont entrer au collège, en leur donnant l'occasion de découvrir durant leur temps de loisir une œuvre du patrimoine littéraire et de partager le plaisir de sa lecture avec leur famille, leurs camarades et leurs professeurs. L'opération "Un livre pour les vacances" a été expérimentée en 2017 dans les académies d'Aix-Marseille, Nantes et Lille. Elle est généralisée à toutes les académies en 2018. Chaque année, il sera demandé à un artiste contemporain de grand talent d'illustrer une sélection des Fables de la Fontaine. Cette année, Joann Sfar a accepté de les illustrer, s'inscrivant dans le sillage d'illustrateurs de renom qui ont fait dialoguer ces fables avec des œuvres plastiques depuis le XVIIe siècle, et faisant ainsi de ce recueil un véritable livre d'art". Combien d'enfants comprendront cette langue française si belle ?

Réforme du statut
"En France, les livres sont très bien protégés grâce au prix unique, mais les auteurs sont en danger", a déclaré Joann Sfar sur France Inter, le 22 juin 2018, "relayant un mouvement plus vaste réuni sous la bannière #auteursencolère sur les réseaux sociaux. Les auteurs s'inquiètent notamment de la hausse de la CSG (passée de 7,5 % à 9,2 % depuis le 1er janvier), qui a entraîné une perte de leur pouvoir d'achat (même si cette hausse de la CSG a été en partie compensée par la suppression de la cotisation d'assurance-maladie), et de la réforme à venir du régime social des auteurs qui prévoit notamment une refonte de leur système de retraite".

"L'histoire se rappellera que c'est une ministre éditrice qui a massacré les écrivains", a affirmé M. Sfar, signataire d'une tribune dans Le Parisien (17 juin 2018) alors que 41 % des auteurs professionnels gagnent moins que le SMIC, selon les données avancées par les défenseurs du monde du livre. Ancienne directrice des éditions Actes Sud, la ministre de la Culture Françoise Nyssen et Agnès Buzyn, son homologue en charge des Solidarités, ont réaffirmé dans un communiqué "l'importance que les artistes auteurs bénéficient d'une couverture sociale de qualité". Les deux ministres avaient dépêché en avril une mission sur ce dossier, qui rendra "dans quinze jours" des préconisations et se poursuivra jusqu'en d'octobre".

Alexandre Benalla
Le 18 juillet 2018, Le Monde publiait une vidéo montrant Alexandre Benalla, chargé de mission et garde-du-corps du Président Emmanuel Macron, filmé lors de la manifestation du 1er mai 2018 place de la Contrescarpe, à Paris. Il frappait un manifestant à terre et portait un brassard de la police ainsi qu'un casque spécifique aux forces de l'ordre. Une enquête préliminaire ouverte a été ouverte à son endroit pour "violences en réunion par personne chargée d'une mission de service public, usurpation de fonctions, port illégal d'insignes réservées à l'autorité publique, complicité de détournement d'images issues d'un système de vidéo-protection".

Des révélations successives par les médias sur cet individu et le projet présidentiel de contrôler le Groupe de sécurité de la Présidence de la République (GSPR) ont induit une grave crise politique nationale. Ce qui a inspiré à Joann Sfar des dessins drôles notamment sur le casse-tête pour les communicants de l'Elysée chargés de trouver des parades à ce scandale d'Etat.

Macron et Pétain
En novembre 2018, Joann Sfar a réagi à la volonté du Président Emmanuel Macron de rendre hommage à l'ex-maréchal Pétain lors de son "itinérance mémorielle" pour le centième anniversaire de la fin de la Première Guerre mondiale. Devant l'indignation suscitée, exprimée par des politiciens et le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France), le président français a décidé de ne rendre hommage qu'aux maréchaux.

Sur son compte Instagram, Joann Sfar a publié une série de dessins sur ces faits. Il persiflait sur les visées électoralistes ayant inspiré la décision de rendre hommage à l'ex-maréchal devenu chef de l'Etat français durant la Deuxième Guerre mondiale et l'Occupation nazie allemande.

Bagelstein

Une des enseignes les plus célèbres de bagel est Bagelstein, co-fondée par Gilles Abecassis en 2011 à Strasbourg.

Le samedi 9 février 2019 au matin, a été découvert, sur la vitrine d'un restaurant Bagelstein aux allures de boutique, le graffiti "JUDEN !" (JUIF, en allemand). Le restaurant est situé sur l'île Saint-Louis, un quartier calme, touristique et résidentiel, dans le centre de Paris.

« La plainte a été déposée samedi [par les gérants du restaurant]. La police est venue sur place », a ajouté le responsable de l'enseigne. "Une source judiciaire a indiqué à l'AFP, dimanche, que le parquet de Paris avait ouvert une enquête pour dégradations volontaires aggravées et provocation à la haine raciale, confiée à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP).

Ce graffiti antisémite a suscité l'indignation de membres du gouvernement dirigé par le Premier ministre Edouard Philippe, des partis de droite et de gauche, d'acteurs, du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) et de Joann Sfar.

Le 12 février 2019, sur son compte Twitter, Bagelstein a répondu à l'agression antisémite par une photographie de la devanture surmontée par "SALUT L'ARTISTE : ON A FINI LE TRAVAIL POUR TOI". Sur la vitre, le "JUDEN" a été modifié ironiquement en GUTEN  TAG".

Le 9 février 2019 après-midi, le dessinateur et réalisateur français juif Joann Sfar a posté sur Facebook un long texte sur ce graffiti antisémite :
"Je garde un silence de tombe depuis cette histoire de gilets jaunes. Car je sais ce qu'on va me répondre. C'est bizarre ce moment où l'on se dit qu'il est inutile de parler. On ne parvient même pas à se souvenir du nombre de banderoles ou cris ou graffitis antijuifs qui ont explosé depuis le début du mouvement. Jamais une formation ou un syndicat n'a aussi unanimement refusé de réprouver de tels débordements. Il y aurait eu de tels graffitis antisémites à un défilé de n'importe quel grand parti ou syndicat, ça aurait fait un scandale justifié. Même à un défilé du Front National, ils auraient eu trois procès et Marine Le Pen aurait exclu du monde!!! Ici, non. Ici, personne n'a rien vu, n'y est pour rien, n'en pense rien. Jamais la culture de l'excuse ne s'est aussi bien portée. Personne n'est représentant ni responsable ni comptable de rien. Je suis davantage inquiet par la multitude qui se satisfait de telles explications que par les quelques ordures qui tiennent effectivement la bombe de peinture. Et cette légende qui a cours en ce moment, selon laquelle la colère de la foule serait un moment sacré qui ne débouche que sur du vrai, du bien et du beau! La foule a accompagné sans coup férir tous les changements de régimes, des plus bénéfiques aux pires. Le peuple, oui, c'est une notion que je comprends et que je respecte. Le peuple français, ce sont soixante millions de personnes. La foule, c'est autre chose, c'est une occasion, aussi, de montrer ce qu'on a de plus laid. Cette idée que l'on est légitime dès lors qu'on est violent, et qu'on a raison puisqu'on souffre, ce fut le combustible des pires meurtres du siècle passé. On se dit sans doute que les garde-fous ont sauté, une génération plus jeune est là, qui a oublié, ou qu'on manipule plus facilement. Soyez certains que ceux qui jouent avec votre haine et votre désespoir n'ont rien oublié. Celui qui a choisi d'écrire "JUIF" en allemand sur cette boutique sait très bien qu'il pense aux vitrines de la nuit de cristal. Il faut se taire, je crois, parce que plus personne n'a envie d'entendre.N'importe quelle alerte grave ne débouche aujourd'hui que sur une controverse twitter. La culpabilité sociale est telle sur nos chaines de télé et chez les commentateurs que n'importe quelle réaction sensée face à ces dérives passe pour un soutien au gouvernement Macron. Oui, on a le droit d'être en opposition totale avec de nombreuses décisions du gouvernement actuel tout en ne trouvant aucune excuse à ceux et celles qui utilisent le désespoir des gens pour attiser, une fois encore, la haine raciale, le fantasme sur le juif, sur le franc-maçon, prétendument tous riches et puissants bien entendu, ou la haine de l'immigré. Tout ça, c'est inacceptable. Je ne comprends pas ceux qui participent à ces manifestations et choisissent depuis le début de ce mouvement de minimiser son contenu raciste et antisémite. ce n'est pas un ou dix, ce sont des centaines de graffitis ou de tweets anti-juifs depuis le début de cette histoire. Et il faut encore subir les durs d'oreille qui m'expliquent que ce n'est pas représentatif. Pas représentatif? C'est une constante depuis les origines de ce mouvement. Ce qui est représentatif, c'est la lâcheté de ceux qui regardent ailleurs, y compris parmi les commentateurs, trop contents de s'acheter une caution peuple. L'écrivain installé, le comique ou le comédien qui en fait des caisses sur "nous le peuple", en général il fait silence radio sur ces graffitis. Vous en avez pas marre de cette constante du "ces éléments ne sont pas représentatifs du mouvement"? ce qui est représentatif, ce sont tous ces gens qui regardent ailleurs quand on écrit "JUDEN" sur une vitrine. A croire que le connard qui taguait a fait ça à quatre heures du matin et pas pendant une manif noire de monde. Moi je ne pourrais pas faire UN PAS dans la rue aux côtés d'une clique qui ne loupe jamais une occasion de s'en prendre un coup aux migrants, un coup aux juifs, un coup aux francs maçons. Tous ceux que "ça ne dérange pas", ou qui "considèrent que le peuple a des choses à dire et tant pis si ça fait pas plaisir", vous avez un sacré mépris pour le peuple! Si vous croyez que le peuple, ce sont ces ordures, vous avez une bien basse idée du peuple français".
Le 10 février 2019, Joann Sfar, auteur du Chat du rabbin, postait un deuxième texte sur sa page Facebook :
"Je dois vraiment répondre aux "fact-checkers" qui annoncent l'heure et le lieu où a été trouvé le tag "JUDEN" sur une vitrine? A savoir la nuit précédent la manifestation hebdomadaire des gilets jaunes, et sur l'ïle Saint louis? Et donc, m'écrit-on, "nul ne peut incriminer les gilets-jaunes". On peut d'autant moins les incriminer qu'ils n'ont ni représentants, ni parti, ni ligne idéologique, ni horaires ni parcours de manifestation. On fait vraiment semblant de ne pas comprendre de quoi je parle? Depuis le mois de Novembre, le lâchage est total dans les attaques contre les migrants, les francs-maçons, les juifs. L'obsession Rothschild à longueur de tweets, les quenelles, l'extrème droite au grand complet qui se mèle aux cortèges sans que grand monde y trouve à redire. Et comment pourrait-on les faire taire dans un mouvement sans service d'ordre ni représentants légitimes? les gilets-jaunes, c'est tout le monde et c'est personne, c'est l'inauguration d'un mouvement où personne n'est responsable de rien, puisque le seul ciment de ceux et celles qui participent au mouvement, c'est leur colère, sans doute légitime, et leur rage, dont les manipulateurs de tous poils savent bien quoi faire. Et on ose me dire que dans ce climat un tag "JUDEN" sur une vitrine n'a rien à voir avec le mouvement? Je ne crois pas qu'un tel tag aurait été possible en France avant le mois de Novembre. J'aurais pu écrire le même message sept jours plus tôt, tandis que les fidèles de la synagogue de Strasbourg subissaient des injures antijuives au sortir de leur prière. Ou chaque samedi depuis le début de ce mouvement à l'occasion des innombrables saillies contre ces catégories qu'il est convenu d'accabler en temps de colère: les migrants, les juifs, les francs maçons. Je n'ai rien écrit car ainsi que je le disais dans mon texte d'hier, "je sais ce qu'on va me répondre". "Ca n'est pas représentatif". "ce ne sont pas les gilets jaunes". Ca ne peut jamais être les gilets jaunes puisque les gilets jaunes c'est personne en particulier. Je regrette de n'avoir pas inclus dans mon message précédent l'heure et le lieu où l'on a écrit "JUDEN" sur la vitrine d'une enseigne de nourriture. Et je laisse les fact-checkers à leur certitude qu'on ne peut incriminer personne. J'incrimine pour ma part ceux et celles qui depuis le mois de Novembre se taisent, par peur sans doute, mais aussi par culpabilité sociale, ou par démagogie. Et puisqu'il faut répéter des évidences, je n'ai JAMAIS dit que les gilets jaunes étaient antisémites. J'ai dit qu'un mouvement qui a pour seul ciment l'addition des colères et refuse de se doter de représentants prête le flanc à toutes les récupérations. La constance avec laquelle les divers gilets-jaunes refusent de dénoncer les extrémistes qui marchent avec eux fait le lit de tous les débordements. Merci aux fact-checkers de m'avoir expliqué que ce que nous vivons depuis le mois de Novembre n'a en rien ouvert la porte à des "JUDEN" sur les vitrines. Sans doute souhaitez-vous attendre que les actions ressemblent davantage à la nuit de cristal pour mesurer ce que depuis des semaines vous tolérez avec un relativisme effarant."
"La Reine de shabbat"
Le 25 octobre 2019, a été publié par Dargaud le tome 9 de la série "Le Chat du rabbin" intitulé "La Reine de shabbat" par Joann Sfar.

"Le rabbin revient sur un élément ancien, fondateur du principe de départ de la série mythique de Joann Sfar. Le jour de l'enterrement de sa femme, il décide de garder un chat. Le chat. Pour Zlabya. Pour ne pas « être deux ». Des années plus tard, le chat se mit à parler. Un événement hors du commun qui questionna le rabbin sur sa foi, ses croyances, autant qu'il joua un rôle dans le désir de liberté et d'indépendance de la jeune Zlabya. Nous suivons Zlabya dans une aventure située entre le tome 1 et 2."

Lieutenant Blueberry
Le 6 décembre 2019, Dargaud a publié Amertume Apachenouvel album du lieutenant Blueberry - personnage créé en 1963 par le scénariste Jean-Michel Charlier et le dessinateur Jean Giraud pour le magazine Pilote - signé par Joann Sfar (scénario) et Christophe Blain (scénario et dessin). Retenu dans la sélection officielle du Festival d'Angoulême 2020. Le c'est le premier volet d'un diptyque dont le second tome, aura pour titre Les Hommes de non-justice.

"Alors qu'il patrouille aux abords d'une réserve indienne, le lieutenant Blueberry assiste au meurtre de deux femmes de la tribu apache tuées par trois jeunes Blancs. Les deux victimes sont la femme et la fille d'un guerrier, Amertume : un double meurtre qui risque d'embraser la région en déclenchant une nouvelle guerre... Un récit à la fois fascinant et crépusculaire, une forme d' hommage à ce western culte."

Le 15 novembre 2019, Joann Sfar a confié à Ligne claire :
"Il y a déjà longtemps que le projet était en marche. On a eu, tous les deux, avec Christophe Blain, un rapport très particulier à Jean Giraud. Il a été un maître pour nous à des moments divers de nos vies. Giraud a été un peu le parrain du Chat du Rabbin dont il a fait une des préfaces. Lors d’une visite à son atelier, il avait proposé à Christophe de dessiner un Blueberry que lui aurait écrit. Ce projet n’a jamais abouti. Parallèlement, moi qui avait une passion pour Pratt, j’avais travaillé sur un projet de Corto Maltese. Qui ne s’est jamais fait. Il y avait une porte ouverte pour que nous fassions ensemble quelque chose sur une icône de la BD. C’est Dargaud qui nous a contacté en la personne de Philippe Ostermann. Il nous a proposé de réfléchir à ce qu’on aurait à dire sur Blueberry.
C’était délicat pour de multiples raisons. La première c’est que Jean Giraud venait de disparaitre. La seconde, à tort ou à raison, c’est que Blueberry passe pour la grande BD réaliste. Je dis à tort ou à raison, parce que je fais partie des gens qui pensent que réaliste ne veut rien dire. Blueberry se trouve dans un lieu névralgique pour tous les amoureux de BD.
Moi j’ai amené les personnages, les situations, la dramaturgie. Il les a repris pour développer les scènes de façon western. Il a développé le tout et des choses qui chez moi n’y étaient pas, le jeu de piste, la poursuite des Indiens entre autres. J’ai l’impression d’avoir apporté une dramaturgie presque théâtrale que lui a rendu plus cinématographique.
Chacun a ses goûts mais le western est devenu un genre presque expérimental où le grand public ne va plus. C’est peut-être aussi que dans l’album un des personnages s’appelle Amertume. Le deuil est omniprésent dans ces deux albums. Il y a la joie de retrouver nos plaisirs d’enfants dans le western. J’espère qu’on sent le deuil et les interrogations d’un homme debout. C’est d’autant plus flagrant que c’est un western militaire. Blueberry est un gradé qui n’est pas le chef. Ses rapports avec les hommes du rang ou son supérieur sont au centre du récit. Si son métier c’est soldat, ce doit être le sujet du récit.
Vous verrez mieux dans le deuxième album mais dans tous mes récits le sacré est présent. Il nous raconte une histoire. Il y a le dogmatique, le méchant en quelque sorte, et celui qui raconte des histoires, pas obligatoirement le gentil mais celui qui nous rend du souffle. Dans ce récit en deux parties, il y a un pasteur assez abominable et ce montreur de marionnettes qui ment en apportant du rêve. A aucun moment il ne fait autre chose que de distraire. C’est Arlequin, le Théâtre. Je souffre beaucoup en ce moment de tous ces artistes qui se prennent pour des justiciers. Or pour moi l’artiste qui oublie qu’il est un Arlequin est un traître. L’artiste qui se prend pour un tribun, un politique, c’est un traître. Le vrai artiste, c’est Arlequin, celui qui fait semblant de s’en foutre."
"Le Dernier Juif d'Europe"
Le 26 février 2020, Albin Michel a publié "Le Dernier Juif d'Europe" de Joann Sfar. « Je ne me doutais pas que l’histoire de mon père me mènerait à faire équipe avec Ionas, un vampire centenaire et amoureux, Rebecka, sa copine psy divorcée d’un fantôme, et une rabbine. Mais quand c’est arrivé, j’ai trouvé ça normal. Presque. Ces pages racontent aussi comment mon père a tenté de ne plus être juif, et comment, avec tout ce que l’on me mettait sur le dos, j’ai eu le sentiment d’être le dernier juif d’Europe. » Joann Sfar ressuscite le fantastique et l’humour désespérés de Kafka ou de Malamud dans cette fable où les monstres offrent un miroir hyperréaliste à la singerie moderne."

"Ce qui est nouveau, ce n’est pas la colère, c’est de la laisser sortir comme ça. Et ce n’est guère facile, parce que je ne supporte pas les écrivains écorchés, qui arrivent tout en sueur à la télé. Mais l’Europe se vautre à nouveau dans la haine antisémite et j’ai le sentiment qu’elle n’en a pas le droit. Jusqu’à aujourd’hui, j’avais toujours essayé de répondre par l’apaisement, par la tendresse mais, au fil des années, à l’occasion de rencontres publiques ou d’interventions dans les écoles, j’ai vu les digues sauter les unes après les autres. J’ai aussi vu tant d’alliés politiques, littéraires et intellectuels abdiquer… Mon sentiment, aujourd’hui, c’est que nos contemporains nous disent : « Désolé, on a fait ce qu’on a pu », a déclaré Joann Sfar au Monde (27 février 2020).

Et l'auteur d'ajouter : "C’est un monde où chaque jour une nouvelle aberration prouve que nos repères ne fonctionnent plus. Un monde où on est devenu incapable de distinguer le bien du mal ou de hiérarchiser quoi que ce soit. J’ai vu l’autre jour à la télévision un monsieur fondre en larmes parce qu’il n’arrivait pas à mobiliser les gens pour les enfants syriens. C’est ça le « Monster World » : plutôt que d’écouter cet homme, tu vas préférer lire l’article où on te fait croire que le plus grave, c’est les nominations aux Césars. Il y a quinze ans, Sacha Baron Cohen m’a fait rire avec son film Borat (2006). Je ne pouvais pas imaginer que je reverrais les mêmes caricatures, aujourd’hui, dans un carnaval belge [le 23 février à Alost]. Ce qui m’a le plus frappé, sur les photos de ce festival, c’est le sourire des gens qui portent ces tenues antijuives. Ce sourire est celui du pogrom, celui que les moujiks avaient jadis quand ils clouaient un rabbin sur une porte. Le « Monster World », c’est celui où notre quotidien ressemble à des scènes de Borat. Un monde où les gens ne veulent plus faire la différence entre les croyances et les personnes, et où il devient impossible de faire comprendre cette idée simple : tu as le droit de critiquer une religion, pas d’appeler au meurtre de personnes. Pour affronter ce monde-là, j’ai besoin des monstres".

Et Joann Sfar de "rappeler que les juifs, ce n’est pas une idée, c’est d’abord des corps. Or, aujourd’hui, quand on parle de l’antisémitisme, c’est toujours un débat abstrait. Mais la question est très concrète, et c’est celle-ci : qu’est-ce qu’on va faire de tous ces juifs qui sont en Europe ? Pour les juifs de France, les meurtres commis par Mohamed Merah ont représenté un tournant. Ils avaient déjà vécu la difficulté de scolariser leurs enfants dans l’école publique, et alors ils se sont aperçus que le privé n’était pas non plus une solution. Le jour où tu ne sais plus où mettre tes gosses, tu te sens pas bien. Et beaucoup ont même renoncé à en parler."

Et cet auteur de souligner : "A chaque fois que les juifs dénoncent l’antisémitisme, il y a un regain d’antisémitisme. D’ailleurs, juste après les assassinats de Merah, le carré juif du cimetière où ma mère est enterrée a subi des déprédations. Aujourd’hui, dès que la souffrance des juifs apparaît, on ressent une hostilité sourde et omniprésente. On ne peut plus pointer la source de l’antisémitisme dans tel ou tel secteur de la société, on n’en est plus là, c’est un vecteur de haine consensuel, une jouissance qui rassemble des gens très différents, qui sinon ne s’adresseraient pas la parole. Quand je vais sur les réseaux sociaux, j’ai l’impression d’assister au retour non du nazisme, mais du Moyen Age, des prurits de la Grande Peste. On est dans une sorte de magie haineuse, très puissante, et ce n’est pas la logique qui va nous sauver. Alors, avec ce roman, je réponds à la magie par de la magie.

Et Joann Sfar de poursuivre : "Je rencontre souvent de vieux juifs qui ont vraiment été trop emmerdés, et qui ne voient plus d’avenir pour la culture juive en Europe. Mais pour moi, la question du départ ne se pose pas. Je suis quelqu’un de très sensuel, très près du sol, je ne pourrais pas vivre hors de France, sans boire du vin français, loin de la table française, hors de ce rapport si particulier à l’amitié, au sexe, à la lecture, à tout ce qui fait que la France est ce qu’elle est. Je n’envisage pas ma vie hors de la sensualité française. Et puis je ne voudrais pas être une personne qui met son identité juive avant son identité française."

Et l'auteur conclut : "C’est une colère un peu punk qui consiste à dire : « Vous ne me ferez pas chanter la petite musique de l’espoir, ou que mon livre va être utile contre l’antisémitisme ». Je fais partie des gens qui attendent un sursaut, même s’ils savent qu’il ne viendra pas. Les gens qui ressentent les choses comme moi, mon livre leur fera du bien. J’irai même plus loin : rencontrer des lecteurs qui pensent comme moi me ferait du bien, je ne me place pas au-dessus de mon lecteur mais au-dessous, j’ai l’impression d’être dans une cour d’immeuble et d’appeler à l’aide. Quand j’appelle au secours, si les seuls qui répondent sont des juifs, c’est un échec absolu. Heureusement ce n’est pas le cas".


"Joann Sfar à Nice" de Fabrice Michelin
France, 2022, 46 min
Coproduction : ARTE France, Éléphant Doc
Sur Arte les 13 décembre 2022 à 17 h 25, 14 décembre 2022 à 8 h 10
Disponible du 06/12/2022 au 13/03/2023

"Le Chat du rabbin" réalisé par Joann Sfar et Antoine Delesvaux
France, 2011, 1 h 26
avec François Morel (Le chat du rabbin (voice)), Maurice Bénichou (Le rabbin (voice)), Hafsia Herzi (La fille du rabbin (voice)), François Damiens (Le reporter (voice)), Mathieu Amalric (Le prince (voice))
Sur OCS Choc le 2 mai 2018 à 18 h 50

Allemagne, 2014, 52 min
Sur Arte le 10 novembre 2017 à 3 h 10

A lire sur ce blog :
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Les citations sont d'Arte. Cet article a été publié le 8 novembre 2017, puis les 1er mai et 8 novembre 2018, 19 décembre 2019.

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