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jeudi 20 mai 2021

« Le pillage des appartements juifs, l'Opération Meuble » de Cyril Denvers

France 5 diffusera le 23 mai 2021, dans le cadre de « La case du siècle », « Le pillage des appartements juifs, l'Opération Meuble » de Cyril Denvers. Casseroles, cuillères, jouets, fauteuils, matelas... Durant le régime de Vichy, tous ces objets modestes de la vie quotidienne sont volés dans 
40 000 appartements parisiens où vivaient des Juifs, triés par des Juifs, et envoyés en Allemagne pour des notables du régime nazi, des entreprises d'Etat ou des Allemands vivant dans une économie de pénurie.

Rose Valland (1898-1980) 
Des galeries d’art sous l’Occupation, une histoire de l’histoire de l’art 
« Le marché de l’art sous l’Occupation 1940-1944 »
« Main basse sur l’art. La méthode nazie » d’Oliver Halmburger et de Thomas Staehler 
« Le maquis des Juifs » par Ariel Nathan
« Les Juifs ont résisté en France 1940-1945 »
« Des « terroristes » à la retraite », de Mosco Boucault
« Les Juifs d'Afrique du Nord pendant la Seconde Guerre mondiale » de Claude Santiago et Antoine Casubolo 
Tableaux, porcelaines, bibliothèques, instruments de musiques, vignoble... Depuis quelques années, les travaux d'historiens ont révélé l'ampleur et la diversité des biens spoliés aux Juifs durant la Deuxième Guerre mondiale, sous le régime de Vichy dirigé par le maréchal Pétain. 

Les vols opérés par les Nazis en France ont aussi concerné, et c'est moins connu, des objets de faible valeur financière, mais d'une utilité quotidienne.  

Sur les 69 619 appartements pillés à leurs occupants Juifs, « 40 000 appartements à Paris sont dépouillés du sol au plafond, de leurs petites cuillères, ampoules, petites cuillères, verroterie, assiettes, lingerie, jouets et même ampoules ». Des objets banals, mais indispensables, achetés grâce à des économies, et attestant de la situation humble de leurs propriétaires Juifs laborieux spoliés.

« Hiver 1943. Au cœur même de Paris, dans les 10e, 13e et 15e arrondissements, les nazis ont créé des annexes du camp de Drancy : Lévitan, Austerlitz et Bassano » - dans la rue Bassano se trouvait l’hôtel particulier de la famille juive Cahen d’Anvers. Cruauté de l'Histoire : c'est notamment dans le grand magasin de meuble appartenant à Wolff Lévitan, situé aux 85-87, rue du Faubourg-Saint-Martin, dans le Xe arrondissement de Paris et près de la gare de l'Est, que 800 Juifs du camp de Drancy sont contraints à un travail forcé. 

« Dans ces trois camps d'enfermement, 800 internés dit "demi-juifs" sont forcés à faire le tri quotidien des objets volés aux familles juives de Paris, déportées dans les camps de la mort ». Outre le tri, des travailleurs/internés, souvent Juifs, doivent réparer et empaqueter les objets. Cent-soixante quatre d'entre eux subiront la déportation vers les camps nazis d'Auschwitz et de Bergen-Belsen. Pour assurer l’alimentation et les vêtements de ces travailleurs/internés, l’ERR (Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg) recourt à l’UGIF (Union générale des Israélites de France).

"Aussi arriva-t-il que des internés reconnaissent dans le bric-à-brac qu'ils triaient quelque chose qui leur avait été volé ou comprennent qu'un des leurs avait été arrêté en reconnaissant un objet de son intérieur : tel fut, par exemple, le cas de Robert Fabius qui sut que son beau-père avait été interpellé en manipulant des photos encadrées représentant sa propre fille." 

« Des spoliations baptisées cyniquement par les nazis "Opération meuble"  (Möbel Aktion). Ce projet "s’applique en France, en Belgique et aux Pays-Bas. Mais s’il a pu atteindre des proportions aussi énormes à Paris, c’est grâce à la coopération des autorités françaises de Vichy... Un comité avait été créé qui faisait le lien entre les services de transport français et le bureau du dignitaire nazi en charge des opérations. Pendant plus de deux ans, des camions ont parcouru les rues de Paris pour transporter l’ensemble des biens volés dans des maisons juives. Ces véhicules, leurs chauffeurs et les ouvriers mobilisés, tous étaient français. Les fonctionnaires nazis se rendaient sur place, procédaient à un inventaire, le signaient, puis mettaient les appartements sous scellés." 

« Trié, nettoyé, ce butin était expédié en Allemagne et en guise de compensation offert aux familles du Reich frappées par les bombardements alliés ou alors détourné au profit des dignitaires nazis... »

En 2003, Fayard publiait "Des camps dans Paris Austerlitz, Lévitan, Bassano Juillet 1943-août 1944" de Jean-Marc Dreyfus et Sarah Gensburger. "L'existence de trois camps d'internement au cœur de Paris durant l'Occupation n'est ni connue ni reconnue. Il s'agit pourtant d'un épisode central de la persécution des Juifs de France, puisqu'il touche le statut des personnes considérées comme juives, les conditions de la déportation et surtout l'un des volets de la spoliation, l'Opération Meuble, jamais décrite auparavant".

"Placée sous l'égide d'un service coiffé par Rosenberg, celle-ci visait à vider tous les appartements juifs inoccupés et à expédier en Allemagne leur contenu, des meubles les plus massifs aux objets quotidiens les plus anodins. Cette vaste opération de pillage mobilisa les entreprises de déménagement françaises et pas moins de 627 trains."

"Ces camps, annexes de Drancy, virent passer au moins 800 détenus juifs. Austerlitz, non loin de la gare, était installé dans un entrepôt des Magasins généraux et compta jusqu'à 600 prisonniers. Lévitan occupait un magasin de meubles, rue du Faubourg-Saint-Martin. Quant à Bassano, il bénéficiait du décor raffiné de l'ex-hôtel particulier des Cahen d'Anvers, au coin de l'avenue d'Iéna. Les prisonniers étaient soumis à un véritable travail forcé pour trier, classer, réparer et emballer meubles et objets. Certains manipulèrent le contenu de leur propre appartement ou celui de leurs proches. Ils vivaient sous la menace d'être envoyés « à l'est » et beaucoup furent bel et bien déportés dont, en juillet 1944, les femmes de prisonniers, vers Bergen-Belsen".

"Il est indispensable de s'interroger sur les silences de la mémoire autour des camps parisiens et de l'Opération Meuble. Certains anciens détenus se sont constitués en amicale, demandant que leur histoire soit enfin écrite. Une série d'entretiens avec eux, avec d'autres survivants et avec des témoins a été menée. Une recherche intensive dans une dizaine de centres d'archives a permis de trouver des dossiers jamais consultés sur les camps parisiens. Ce travail, résultat et d'une longue enquête et d'une réflexion sur ce qui constitue la mémoire d'une période, apporte une pierre nouvelle à l'historiographie de Vichy. D'autres lieux ont été utilisés pour le stockage des biens juifs pillés par les nazis comme le Musée du Louvre, le Palais de Tokyo, la Gare du Nord,  les Magasins Généraux d’Aubervilliers".

Au printemps 2007,  l'exposition bouleversante “Retour sur les lieux : la spoliation des Juifs à Paris” offrait, grâce à des photographies découvertes en 2004 dans les archives fédérales allemandes et une carte de Paris, dans ce magasin devenu durant treize mois un entrepôt de biens volés et actuellement le siège d'une importante agence de publicité, un panorama de ce pillage.

En 2010, paraissait le livre "Images d’un pillage. Album de la spoliation des Juifs à Paris, 1943-1944" de Sarah Gensburger (Textuel avec le soutien de la Fondation pour la mémoire de la Shoah). "À travers les 85 photographies d’un album conservé aux Archives fédérales de Coblence, Sarah Gensburger revient sur l’histoire de la spoliation des Juifs à Paris pendant la Seconde Guerre mondiale. Si plusieurs images donnent à voir le séquestre du Louvre et le pillage des collections artistiques, la plupart concernent le travail de tri effectué par des détenus juifs du camp de Drancy. Matelas, postes de TSF, batteries de cuisine, jouets d’enfants, linge de maison… : ces clichés montrent avec force la pauvreté et la banalité des possessions de l’écrasante majorité des familles juives, ainsi que la normalisation et la nature absolue du pillage."

Eclairé par l'historien Jean-Marc Dreyfus et la sociologue de la mémoire Sarah Gensburger, « entre archives photos, témoignages de survivants, dont Michel et Bernard Behr, et reconstitution fictionnée, ce documentaire « Le pillage des appartements juifs, l'Opération Meuble » de Cyril Denvers s'appuie sur des mémoires écrites inédites, pour nous plonger en 1943 à Paris, dans les camps d'internements cachés de l'Opération Meuble (Möbel Aktion) : une face méconnue des persécutions antisémites, le pillage par les nazis de tous les biens sans valeur laissés par les familles juives promises à la solution finale ». 

Sélectionné au Figra 2021 en section "Terre(s) d'Histoire".

« France Télévisions est un partenaire fidèle du musée du Mémorial de la Shoah depuis plusieurs années. L’exposition « La voix des témoins » a été inaugurée quelques semaines avant le premier confinement début février 2020. Il sera encore possible de découvrir cette exposition jusqu'à fin août 2021 au Mémorial à Paris, pour la partager avec le plus grand nombre, il est apparu essentiel de sauvegarder l’exposition et de la faire découvrir comme une visite privée, à tous les Français sur la plateforme france.tv à l’occasion de la diffusion du documentaire "Le pillage des appartements juifs, l'Opération Meuble".



France, 2020, 52’
Coproduction LSDfilms / Les films du huitième jour, avec la participation de France Télévisions et du Centre National du Cinéma et de l’image animée, de la PROCIREP et de la Ville de Paris département mémoire et culture
Auteur-réalisateur image et narration : Cyril Denvers
Conseiller historique : Jean-Marc Dreyfus
Musique originale : Charlie Nguyen
Sur France 5 le 23 mai 2021 à 22 h 35
Visuels : © LSDfilms / Les films du huitième jour
 

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