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vendredi 12 mai 2023

« Créer. Dessiner pour les arts décoratifs 1500–1900 » et « Cabinet de dessins néerlandais. Le XVIIIe siècle »

La Fondation Custodia / Collection Frits Lugt propose simultanément deux expositions « Créer. Dessiner pour les arts décoratifs 1500–1900. Collection du Rijksmuseum, Amsterdam » et « Cabinet de dessins néerlandais. Le XVIIIe siècle. Collection des Musées royaux des Beaux-arts de Belgique ». Les 
dessins jouent un rôle majeur de la conception à la commercialisation, via la fabrication d'un objet : pièces d’orfèvrerie et de mobilier, dont une salière hollandaise en argent du XVIIe ou un secrétaire marqueté... Ils révèlent l'inventivité, le souci du détail et du concret de leurs auteurs en permettant notamment le dialogue entre les différents artisans impliqués dans la production d'une oeuvre.

L’histoire sous les pieds. 3000 ans de chaussures 
« Créer. Dessiner pour les arts décoratifs 1500–1900 »
La Fondation Custodia accueille l’exposition « Créer. Dessiner pour les arts décoratifs 1500–1900. Collection du Rijksmuseum, Amsterdam », o
rganisée en collaboration avec le Rijksmuseum, Amsterdam, et présentée auparavant au Design Museum Den Bosch de Bois-le-Duc.

« Cette exposition propose au public de découvrir un nouvel aspect des fonctions du dessin et de son rôle central dans le processus de création d’une oeuvre d’art. Elle s’inscrit ainsi dans la volonté de la Fondation Custodia d’explorer les arts graphiques de toutes les époques et de toutes les écoles, et de transmettre au plus grand nombre tant leurs qualités d’usage que leur beauté intrinsèque. »

« Un livret d’exposition rédigé par Maud Guichané et Marie-Liesse Choueiry est également disponible pour les visiteurs. »

« Sélectionnés, étudiés et explorés par Reinier Baarsen, conservateur des arts décoratifs du Rijksmuseum, près de 200 dessins d’arts décoratifs du XVIe au XIXe siècle issus du musée amstellodamois sont présentés pour la première fois au public français. »

« Depuis une dizaine d’années, le Rijksmuseum d’Amsterdam mène une intensive politique d’acquisitions pour rassembler un important ensemble de dessins d’arts décoratifs. Ce groupe très spécifique entend faire le lien entre son immense fonds d’estampes d’ornement et sa fameuse collection d’objets d’art et de pièces de mobilier, dont l’origine remonte quant à elle à la fondation du musée. Ces objets – et les dessins qui les illustrent – accompagnaient le quotidien des dignitaires qui les avaient commandés, ornaient leur demeure ou des édifices religieux. Ils sont aujourd’hui le témoignage du mode de vie en Europe, entre la Renaissance et l’orée du XXe siècle. »

« Si ces feuilles restent en grande partie anonymes, elles révèlent parfois la main d’un artiste connu – ébéniste, orfèvre, sculpteur ou peintre – ou peuvent être rattachées à son atelier. Erasmus Quellinus I (1584-1640), Baldassare Franceschini (1611-1690), Daniel Marot (1661-1752), Gilles-Marie Oppenord (1672-1742), Luigi Valadier (1726-1785), Jean-Démosthène Dugourc (1749-1825), Albert-Ernest Carrier-Belleuse (1824-1887), Eugène-Emmanuel Viollet-le-Duc (1814-1879) ou René Lalique (1860-1945) comptent parmi les grands noms représentés dans cette exposition. »

« Classés en douze chapitres thématiques, les dessins sont interrogés sur leur relation avec les oeuvres d’art qu’ils représentent. Ils sont un élément clé de leur conception, de leur fabrication ou encore de leur commercialisation. Les différentes étapes de la création et de l’existence d’un objet impliquaient de nombreuses personnes : artistes concepteurs, artisans et exécutants spécialisés, mais aussi potentiels acquéreurs ou commanditaires. Ces protagonistes trouvèrent dans les dessins un support de communication visuelle nécessaire à leurs échanges ou leurs négociations. L’exposition permet ainsi de découvrir les différentes fonctions de ces projets d’arts décoratifs, de cerner le rôle de chacun de ces acteurs et l’usage qu’ils faisaient de ces oeuvres d’art. Pour renforcer le propos, des pièces d’orfèvrerie et de mobilier, parmi lesquelles une exceptionnelle salière hollandaise en argent du XVIIe ou un secrétaire marqueté parisien du XVIIIe siècle (prêt du Petit Palais, Paris), sont présentées auprès des dessins qui leurs sont liés. »

De l’esquisse à l’objet
« Acte premier de mise en image d’une idée en train de naître, les dessins de conception ouvrent le parcours de l’exposition. À ce stade, l’artiste imagine, se corrige, explore différentes solutions et variantes afin de préciser son projet sur le papier. L’esquisse pour un petit cadre, peut-être destiné à un bénitier en argent, montre un dessinateur au travail. Encore insatisfait, celui-ci tente de clarifier certains détails, les repassant à la plume ou les répétant sur la feuille. Le dessin est son outil de création. Le Projet de plat à condiment en argent révèle l’inventivité géniale de son auteur, probablement Johannes Lutma (1584- 1669), le plus fameux orfèvre du XVIIe siècle à Amsterdam. »

« Déformant la perspective, il inclina le plateau vers l’avant pour montrer les petits compartiments qui le composent. Il offrait ainsi des informations utiles à l’exécution de la pièce. » 

« Un grand nombre de dessins pouvaient être réalisés au cours du processus de création d’une oeuvre d’art. Les artistes annotaient les feuilles, indiquaient les échelles, les dimensions, détaillaient certains éléments. »

« Important architecte d’origine française, actif aux Pays-Bas, Daniel Marot (1661-1752) conçut également des décors pour des intérieurs. Il inscrivit sur son Projet pour une table console, un trumeau et une torchère [fig. 4] de nombreuses instructions pour sa réalisation. Huit mois plus tard, il précisa, à l’aide d’une encre différente, les changements qui avaient été opérés lors de son installation. »

Se former au dessin d’arts décoratifs
« L’ébéniste autrichien du XIXe siècle, Joseph Nussbaumer indiquait quant à lui de nombreux détails utiles et techniques dans ses feuilles, comme la dimension des meubles, les éléments d’assemblage ou même le sens du fil du bois [fig. 5]. Par sa composition très structurée, présentant le secrétaire comme une véritable architecture (plan, coupe, élévation), son dessin s’inscrit dans la tradition allemande des Meisterrisse. Ce terme désigne le projet dessiné du chef-d’œuvre qu’un aspirant ébéniste se devait de soumettre pour rejoindre une guilde. » « L’exposition s’arrête sur cette pratique qui n’était par ailleurs pas l’apanage des seuls artisans allemands : dans de nombreuses villes en Europe, plusieurs corps de métiers étaient soumis à cette même règle. Maîtriser l’exécution de tels dessins constituait dès lors une part importante de la formation de tout artiste. »

L’atelier Valadier et les commandes ecclésiastiques
« L’utilisation de ces feuilles, véritables outils de l’artiste et de l’artisan, impliquait souvent leur destruction quand elles n’étaient pas préservées et transmises avec les fonds de l’atelier. Celles qui furent conservées constituent des témoignages précieux pour notre compréhension des procédés de fabrication et d’organisation du travail au sein d’un atelier. Une section entière est consacrée aux Valadier, éminente dynastie d’orfèvres romains au XVIIIe et XIXe siècles, dont le Rijksmuseum conserve désormais un fonds conséquent de feuilles. Véritable cas d’étude, il permet de saisir toute l’importance de ces dessins et la diversité de leurs rôles au sein d’un atelier. »

« Les Valadier répondaient à de nombreuses commandes pour les grandes familles de l’aristocratie romaine, pour la papauté et pour des projets ecclésiastiques. Luigi Valadier (1726-1785) réalisa ainsi deux lustres monumentaux pour la cathédrale de Saint-Jacques de Compostelle. Le projet pour l’un d’eux est exposé à la Fondation Custodia. Définie avec clarté et assurance, cette pièce est l’expression d’un style rococo majestueux. Dans toute l’Europe, jusqu’au XVIIIe siècle, l’Église fut en effet un mécène de premier plan pour la création d’oeuvres d’art. Les dessins pour des objets ecclésiastiques occupent ainsi une place importante tout au long de l’exposition, et un chapitre en particulier leur est dédié. »

Des dessins collectionnés
« Malgré l’aspect très pratique lié à leur usage, les dessins d’arts décoratifs peuvent et doivent aussi être considérés comme de véritables oeuvres d’art. En raison de leurs qualités esthétiques, de leur exécution parfois virtuose et de l’image idéale qu’ils pouvaient incarner, ils furent collectionnés par les amateurs autant que par les artistes qui y trouvèrent des modèles d’inspiration. Certaines feuilles étaient aussi produites sans lien avec la création d’un objet particulier, mais pour elles-mêmes, destinées à séduire des amateurs cultivés, et vouées à leurs collections. Elles se caractérisent par un grand raffinement. Le dessin de Giovanni Battista Foggini (1651-1725) est la représentation d’un coffret idéal, orné de panneaux en pierre dure et d’éléments sculptés en bronze doré, dans la plus pure tradition florentine du début du XVIIIe siècle ».

« Acquise par un collectionneur anglais, la feuille servit sans doute de substitut à un véritable coffret dans sa collection. Si le dessin est dépourvu du caractère précieux de ses matériaux, il le surpasse sans doute dans sa conception. »

Dessiner pour diffuser et vendre les œuvres d’arts décoratifs
« Le très réputé Gilles-Marie Oppenord (1672-1742), architecte et ornemaniste du style rocaille créa des oeuvres pour les plus grands princes et dignitaires français et étrangers. Sa virtuosité de dessinateur se déploie dans plusieurs feuilles présentées à la Fondation Custodia, telles que le splendide Projet pour une applique ou encore le Projet pour un boîtier d’horloge. Ce dernier dessin fut gravé en contrepartie par Gabriel Huquier (1695-1772) pour une série de livres illustrés rassemblant des modèles d’objets d’arts conçus par Oppenord. Il est présenté dans une section consacrée à ces feuilles préparatoires aux modèles gravés qui permirent une large diffusion des innovations développées dans le domaine des arts décoratifs. »

« Les modèles ou les projets d’orfèvrerie, d’objets d’art ou de mobilier étaient souvent réalisés dans le but de persuader les clients d’acheter ou de commander de telles oeuvres. Ces dessins étaient présentés directement dans l’atelier ou envoyés, accompagnés d’une lettre contenant des indications complémentaires, aux potentiels acquéreurs. Ils montraient les objets de la plus attrayante des manières. »

« En effet, ceux-ci n’étaient bien souvent fabriqués que sur commande. Au XIXe siècle, ce sont de vrais petits catalogues commerciaux illustrés de dessins qui se développèrent. Deux sont d’ailleurs présentés dans l’exposition. »

Le renouveau des arts décoratifs
« Le parcours accompagne le visiteur jusqu’aux dernières décennies du XIXe siècle. Dans toute l’Europe, les arts décoratifs connurent alors un véritable renouveau. Des objets du quotidien étaient signés par de jeunes artistes désireux de s’éloigner d’une production de masse, née de la révolution industrielle, et de renouer avec l’ambition d’excellence. Leurs dessins montrent leur volonté de mettre leur style individuel au service d’innovations décoratives. L’un des représentants les plus connus de l’Art nouveau en France fut sans doute René Lalique (1860-1945) dont deux feuilles préparatoires à des bijoux sont exposées. D’Anatole-Alexis Fournier (1864-1926) est présenté un ravissant Projet de décor pour un vase en porcelaine [fig. 9], destiné à la manufacture de Sèvres. Son caractère presque évanescent, ses formes linéaires et pures évoquent pleinement la production de cette époque. »

« Cabinet de dessins néerlandais. Le XVIIIe siècle »
La Fondation Custodia accueille l’exposition « Cabinet de dessins néerlandais. Le XVIIIe siècle. Collection des Musées royaux des Beaux-arts de Belgique ». Une collaboration avec les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, où elle fut montrée en 2019. Elle a ensuite été visible au Rijksmuseum Twenthe à Enschede en 2020. »

« Quelque quatre-vingts pépites – scènes de genre, paysages, marines, natures mortes typiques de l’art de cette école – sont présentées. »

« Ger Luijten, directeur de la Fondation Custodia depuis 2010 et disparu soudainement le 19 décembre 2022, était à l’initiative de la venue à Paris de cette exposition, véritable immersion dans un cabinet de dessins néerlandais du XVIIIe siècle. »

« Entre le Siècle d’or hollandais et le XIX e siècle s’étend une longue période où les artistes peignaient et dessinaient dans ces régions. Cependant, leur production sur papier est moins connue du grand public car, à l’inverse du XVIIe siècle, on ne peut pas égrener une liste des grands noms qui en sont les auteurs. Et même au XVIIe siècle, tous les peintres ne pratiquaient pas le dessin. Certes, Rembrandt a réalisé des dessins magistraux, mais on ne connaît presque aucune oeuvre sur papier de Vermeer, Frans Hals et Jan Steen ». 

« En 2016, la Fondation Custodia a organisé en collaboration avec la National Gallery of Art de Washington l’exposition Du dessin au tableau au siècle de Rembrandt, pour montrer aux visiteurs le rôle essentiel du dessin dans la réalisation de tableaux en tous genres. Quantité de feuilles du XVIIe siècle sont en effet des études préparatoires à des tableaux. Mais d’autres étaient des dessins achevés et vendus comme des oeuvres en soi, bien que sur papier. Ils présupposaient un public de collectionneurs qui conservaient les feuilles dans des cartons à dessin et des albums et les regardaient et les admiraient entre connaisseurs ou en famille ». 

« Le phénomène s’est largement répandu au XVIIIe siècle et les artistes ont capitalisé sur ce marché en produisant, de manière bien plus systématique qu’auparavant, des dessins d’un fini parfait qui étaient appréciés des collectionneurs avertis. Cornelis Ploos van Amstel, qui était lui-même dessinateur, définissait une collection d’art sur papier comme un « Cabinet des plus merveilleux dessins et estampes », c’est-à-dire comme une alternative peu encombrante à une collection de peintures à l’huile. »

Le « Cabinet » que « la Fondation Custodia ouvre à ses visiteurs, à travers un choix de 80 dessins, a été constitué durant plusieurs générations dans la ville de Breda, située dans l’actuelle province de Noord-Brabant (Pays-Bas), à partir d’un ensemble de 4 250 feuilles, dont près de 1 200 datent du XVIIIe siècle néerlandais. Son noyau a été formé par Arnoldus Josephus Ingen Housz (1766-1859), qui était le contemporain de plusieurs des artistes exposés – un Collectionneur d’art moderne ! Sa collection a été léguée à son neveu le chevalier Josephus de Grez (1807-1902) qui l’a enrichie d’innombrables feuilles. À la mort de celui-ci, son propre neveu Jean de Grez (né en 1837) en hérita. Il décéda à Bruxelles en 1910, confiant à son épouse le soin de faire don de la totalité de la collection à l’État belge. Quand ce fut chose faite en 1911, les oeuvres ont été déposées aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique ». 

« Après le Rijksmuseum d’Amsterdam, il s’agit de la plus riche collection de dessins néerlandais du XVIIIe siècle. Plus de 30 ans après avoir exposé un choix de dessins de cette époque provenant de la collection amstellodamoise, la Fondation Custodia est heureuse de présenter la collection De Grez, dont Frits Lugt, son fondateur, disait qu’elle était « la plus importante qui soit en Belgique ». Lugt s’étant surtout attaché à collectionner des dessins datant des siècles antérieurs, c’est une magnifique occasion de montrer des oeuvres rarement vues à Paris. »

L’exposition « s’ouvre sur quelques feuilles de la fin du XVIIe siècle signées Gérard de Lairesse (1640-1711), qui abandonna Liège pour Amsterdam, et Willem van Mieris (1662-1744), dans lesquelles on retrouve respectivement l’influence du classicisme de Poussin et de la peinture de genre typiquement hollandaise : un cadre parfait pour les développements du XVIIIe siècle. Simon van der Does (1653-après 1718) incarne par excellence ce mélange de réalisme et de rites empruntés à l’Antiquité, qu’il étudiait dans les estampes d’après Poussin ».

« On trouvera une variante plus pure du classicisme dans le travail d’Isaac de Moucheron (1667-1744) et le groupe d’oeuvres d’Abraham Rademaker (1677-1735). Des études de figures sont signées du peintre-biographe Arnold Houbraken (1660-1719) et du graveur et dessinateur parisien Bernard Picart (1673-1733), installé à Amsterdam ».

« Des maîtres plus célèbres tels que Jacob de Wit (1695-1754) et Cornelis Troost (1696-1750) sont présents avec des oeuvres importantes, le second avec la scène nocturne Le Retour, après une joyeuse fête dans une maison bourgeoise sur les canaux ».

« Le peintre de Dordrecht Aert Schouman (1710-1792), qui s’était fait une spécialité des oiseaux, est l’auteur d’une splendide aquarelle représentant deux passereaux indigènes de plumage différent : en bas, un gorgebleue à miroir, de la sous-famille des saxicolidés, en haut, non pas la femelle du gorgebleue, mais un mâle rougequeue à front blanc, un passereau de la famille des gobemouches. La feuille, datée de 1759, provient de la collection de 375 dessins d’oiseaux qui appartenait à Schouman.

Maints dessins du XVIIIe siècle néerlandais représentent un paysage. Intéressés par les questions de topographies, les artistes se plaisaient à rendre la physionomie de leur pays et de régions lointaines. Les atlas contenant des cartes imprimées et les séries avec des vues du pays et de l’étranger étaient constamment réimprimés ; les dessinateurs s’employaient à mettre en images un environnement proche et facile à visiter. Le résultat est parfois un peu aride et descriptif, mais il est aussi souvent plein d’atmosphère, telle cette Vue sur l’Amstel, depuis l’ouest, près du portail d’entrée du manoir Ruijschenstein, un endroit bien connu que Rembrandt, Jacob van Ruisdael et Meindert Hobbema avaient déjà dessiné un siècle auparavant. Son auteur, Johannes Schouten (1716-1792), réussit à capter la lumière diaphane du paysage et à transporter le spectateur jusqu’au rivage parsemé çà et là de maisons de campagne. »

« La luxuriance de la verdure est plus exubérante dans un remarquable dessin de 1802 d’Egbert van Drielst (1745-1818) représentant les douves et les ruines de la maison De Haar près de Haarzuilens en été : l’exécution de cette feuille justifie pleinement le surnom de « Hobbema de la Drenthe » donné à l’artiste ».

« Un autre grand maître du paysage, qui a parfois collaboré avec Van Drielst, est Jacob Cats (1741-1799). Il savait évoquer l’atmosphère hivernale de la Hollande comme nul autre, notamment dans une grande feuille réalisée un an avant sa mort. La richesse de la représentation et le soin attentif du détail, caractéristiques de son travail, ne sacrifient jamais à l’anecdote ; les personnages sont aquarellés avec justesse dans leurs occupations saisonnières. La scène a une ampleur panoramique, contrairement à l’aquarelle de Jacob van Strij (1756-1815), peinte d’une main rapide et libre, qui nous offre une vue rapprochée de patineurs sur une rivière gelée. Bien qu’elle soit signée, elle s’apparente davantage à une esquisse. La lumière d’hiver est magnifiquement rendue. »

« Les commentaires du collectionneur Cornelis Ploos van Amstel nous apprennent qu’il appréciait énormément les études et esquisses sommaires, même s’il s’en tenait à l’agencement hiérarchique des collections en les rangeant tout à la fin d’un album. »

« L’impression de chaleur que Jean Grandjean (1752-1781), mort prématurément, réussit à traduire dans un imposant dessin exécuté à Tivoli en 1779 est aux antipodes de l’ambiance hivernale de Van Strij. Après les Italianisants du XVIIe siècle, Grandjean fut l’un des premiers artistes à parcourir de nouveau l’Italie à la fin du XVIIIe siècle et à y produire de brillants dessins. Dans cette Vue de la Via Tiburtina sous la Villa [dite] de Mécène à Tivoli, sa maîtrise est éclatante : du premier plan ensoleillé à la pénombre de la voûte en forme de tunnel. »

« Les scènes de genre ont continué de séduire artistes et collectionneurs tout au long du XVIIIe siècle. La Leçon de dessin d’Abraham van Strij (1753-1826), qui représente un jeune dessinateur se voyant instruire sur la façon de reproduire un moulage d’une sculpture classique, est une étude préparatoire à un panonceau à l’huile conservé au Rijksmuseum : elle témoigne de la popularité du dessin vers 1800. L’un des sommets de l’exposition est la Femme à son miroir de Nicolaas Muys (1740-1808) : avec le peintre, nous regardons par-dessus l’épaule d’une femme son reflet dans le miroir, un instant d’intimité rare [fig. 12]. Le papier bleu sur lequel le dessin a été tracé au pinceau sur une esquisse à la pierre noire n’est absolument pas décoloré, ce qui donne à la feuille une fraîcheur prodigieuse. »

« Deux dessins datant d’environ 1800 ont une immédiateté et une originalité similaires : Une petite grange effondrée avec toit de chaume, près d’une maison de Simon Andreas Krausz et Le Popelingsgat à Haarlem, vu en direction de la Korte Annastraat [fig. 14] de Hermanus van Brussel. La modernité dans le choix des sujets et la technique dont font preuve Krausz (1760-1825) et Van Brussel (1763-1815) annonce l’art plus informel du XIXe siècle. »

« Un livret d’exposition rédigé par Marie-Liesse Choueiry est également disponible pour les visiteurs. »


Du 25 février au 14 mai 2023
Hôtel Lévis-Mirepoix
121, rue de Lille - 75007 Paris
Tél : +33 (0)1 47 05 75 19
Tous les jours sauf le lundi, de 12h à 18h


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