Le Centre des monuments nationaux (CMN) a présenté à la Conciergerie l’exposition éponyme : près de 50 œuvres, souvent inédites, de 23 artistes issues de la collection de François Pinault et sélectionnées autour de la thématique de l’enfermement de l’être humain. Une exposition ambitieuse, mais problématique, politique, fourre-tout, ennuyante, gênante, sinistre, déprimante, et souvent absconse. La Bourse du Commerce aux Halles accueillera une partie de la collection d’œuvres d'art de François Pinault.
« On sait de manière définitive depuis Michel Foucault… que parler de l'enfermement, c'est aussi parler du pouvoir et, surtout, parler de la liberté. La question de l'enfermement dépasse de beaucoup la seule question, déjà considérable et ô combien actuelle sous bien des latitudes, de la prison et de la condition pénitentiaire. Elle interroge aussi toutes les situations d'ordre politique, économique, social, ou même intellectuel, sanitaire ou technologique qui peuvent produire une aliénation et se révéler privatives de liberté. D’où ce regard dépourvu de complaisance, mais plein d'humanité et parfois même d'espoir, voire d'humour, jeté sur des formes d'enfermement aussi diverses que la prison, bien sûr, mais aussi la maladie, la dictature ou la vieillesse », écrit Philippe Bélaval, président du CMN.
Près de 50 œuvres de la collection de l’homme d’affaires François Pinault, majoritairement inédites, de 23 artistes, « proposent des points de vue variés et singuliers » sur l’enfermement dans son acception la plus large. Un triste thème qui « entre en résonnance avec le cadre de la Conciergerie » du Palais de la Cité, longtemps une prison.
Et d’ajouter : « De même, l’an passé quand Décor d’Adel Abdessemed a été présenté devant le retable d’Issenheim, installé, au cœur de la chapelle du musée d’Unterlinden, j’ai pu, une fois encore, mesurer à quel point l’art de notre temps entrait en résonnance avec les créations des siècles passés… Ce serait nier le principe même de la liberté de la création qui permet à un artiste, même dans un contexte atroce, de ne se livrer qu’à des recherches formelles. En revanche, quand un artiste fait le choix d’ouvrir les yeux sur le monde qui l’entoure et de s’engager, on est toujours impressionné par la ferveur de sa prise de position et par l’efficacité de sa protestation contre les maux qu’il dénonce ».
Peu didactique, l’exposition « s’articule autour de deux axes principaux : l’enfermement comme résultant des facteurs exogènes (crises politiques, écologiques, violences urbaines…), et l’enfermement personnel conséquence du rapport de l’homme à lui-même ».
Elle débute par « l’œuvre historique de Michelangelo Pistoletto, La Gabbia (La Cage), une installation faite de miroirs qui brouille la perception : le visiteur a l’impression presque réelle d’être enfermé sans pour autant être privé de sa liberté. Le ton est ainsi donné ».
La première partie évoque des grands bouleversements visant les sociétés : « les dangers écologiques (Diana Thater), l’impossibilité de communiquer (Bill Viola), les prisons dans tous leurs états (Boris Mikhaïlov, Mohammed Bourouissa, Ahmed Alsoudani), la guerre civile (Mona Hatoum), le terrorisme (Raphaëlle Ricol), les débordements urbains (Julie Mehretu) et enfin l’idée de résistance (Bertille Bak et Allora & Calzadilla) ».


Née en 1973 à Lyon, Raphaëlle Ricol est « une artiste autodidacte qui peint avec l’énergie de la rue et de la vie. Elle évolue vers une maîtrise toujours plus grande de la peinture, et ses images, presque caricaturales, corps pleins d’empâtements de couleurs, révèlent un monde grinçant et son goût pour une certaine crudité. Si l’humour reste omniprésent dans ses œuvres, toujours empreintes d’une légère distance critique, elle travaille la figuration autour de sujets forts comme l’enfermement ». Elle présente le tableau Malgré la différence (2009) : le vêtement blanc ressemble à celui du Ku Klux Klan, et celui en noir est le niqab imposé par les salafistes. Le titre semble susciter cette suite : « Malgré la différence... des points communs ». Mais lesquels ? Ce parallèle n'est pas pertinent : au-delà de la dissimulation du corps de la femme méprisée, le salafisme vie à soumettre le monde à l'islam.
La deuxième partie est focalisée « sur l'individu confronté à lui-même et à ses démons : l’angoisse de la vieillesse (Sun Yuan et Peng Yu), la phobie de la maladie et de la décadence (Damien Hirst), la folie (Javier Tellez, Maria Marshall), la peur de la solitude (Llyn Foulkes), la culpabilité (Kristian Burford), le verrouillage mental (Friedrich Kunath, Tetsumi Kudo), ou corporel (Justin Matherly, Alina Szapocznikow) ».


Trois œuvres de Chen Zhen « dans un même élan embrassent toutes les formes d’enfermement : depuis l’exil jusqu’à la maladie ».
Enfin ! La visite se termine « avec une œuvre spécifiquement réalisée pour l’exposition par les deux artistes belges Jos de Gruyter et Harald Thys, qui proposent une conclusion teintée d’humour ».
Comment et pourquoi un collectionneur d'art a-t-il pu acquérir la plupart de ces œuvres lugubres, absconses, morbides ? Ces œuvres - photos, tableaux, sculptures, installation, etc. - constitueraient la "crème" de la création artistique contemporaine ?! Un best !?
L’été 2014, la collection Pinault a été exposée au Grimaldi Forum Monaco. Une autre sélection d’œuvres de cette collection ?
La Bourse du Commerce aux Halles accueillera une partie de la collection d’œuvres d'art de François Pinault. "Propriété de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Paris-Ile-de-France avec laquelle la Ville a procédé à un échange foncier, la Bourse du Commerce va être concédée pour 50 ans à la Fondation Pinault moyennant une redevance. La fondation financera les travaux nécessaires à la transformation de l'édifice et assurera les dépenses de fonctionnement du nouveau musée". Ce musée ouvrira ses portes au public à l'automne 2018.

Jusqu’au 6 janvier 2014
A la Conciergerie
2, boulevard du Palais. 75001 Paris
Tous les jours de 9 h 30 à 18 h
A la Conciergerie
2, boulevard du Palais. 75001 Paris
Tous les jours de 9 h 30 à 18 h
Visuels :
Michelangelo Pistoletto (1933- )
La Gabbia, 1962-1974
Sérigraphie sur acier inoxydable poli
9 éléments,
230 x 1080 cm (dimensions totales)
© Michelangelo Pistoletto
Courtesy Galleria Christian Stein, Milano
Photo : Maniscalco Milano
Mona Hatoum (1952- )
Bourj II, 2011
Série : « Bunker »
Tuyaux en acier doux
180 x 50 x 75 cm
Michelangelo Pistoletto (1933- )
La Gabbia, 1962-1974
Sérigraphie sur acier inoxydable poli
9 éléments,
230 x 1080 cm (dimensions totales)
© Michelangelo Pistoletto
Courtesy Galleria Christian Stein, Milano
Photo : Maniscalco Milano
Mona Hatoum (1952- )
Bourj II, 2011
Série : « Bunker »
Tuyaux en acier doux
180 x 50 x 75 cm
Raphaëlle Ricol (1974- )
Malgré la différence, 2009
Acrylique sur toile
97 x 130 cm
Sans titre (gaz et téléphone), 2013
Acrylique sur toile
147 x 114 cm
Malgré la différence, 2009
Acrylique sur toile
97 x 130 cm
Sans titre (gaz et téléphone), 2013
Acrylique sur toile
147 x 114 cm
Sun Yuan (1972- ) & Peng Yu (1974- )
Old Persons Home, 2007
13 sculptures grandeur nature et 13 fauteuils roulant dynamo-électriques
Dimensions variables
Old Persons Home, 2007
13 sculptures grandeur nature et 13 fauteuils roulant dynamo-électriques
Dimensions variables
Kristian Burford
Last night you brought a man up to your room after having a late drink at the hotel bar. Knowing that you are HIV positive you had sex which caused him to bleed. After a day of meetings you now return to your room, 2011
Plaques de fibre de verre et technique mixte
986,2 x 734,1 x 304,8 cm
Courtesy Kristian Burford and Nye + Brown, Los Angeles
© Robert Wedemeyer
Last night you brought a man up to your room after having a late drink at the hotel bar. Knowing that you are HIV positive you had sex which caused him to bleed. After a day of meetings you now return to your room, 2011
Plaques de fibre de verre et technique mixte
986,2 x 734,1 x 304,8 cm
Courtesy Kristian Burford and Nye + Brown, Los Angeles
© Robert Wedemeyer
A lire sur ce blog :
Articles in English
Les citations proviennent du dossier de presse.
Cet article a été publié le 2 janvier 2014.
Les citations proviennent du dossier de presse.
Cet article a été publié le 2 janvier 2014.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire