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lundi 6 juin 2022

« Histoire populaire des impôts » de Xavier Villetard

Arte diffusera le 7 juin 2022 à 20 h 55 « Histoire populaire des impôts » (Der Staat und sein Geld. Die Geschichte der Steuern) de Xavier Villetard. « Du Moyen Âge aux révoltes populaires qui agitent aujourd’hui la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, une passionnante histoire comparée de l’impôt, reflet des transformations de l’État et de la relation des citoyens à ceux qui les gouvernent. »

"Gilets jaunes", partisans du Brexit, perdants de la réunification : avec pour point de départ ces colères qui traduisent, souvent sur fond de contestation de l’impôt, la crise de nos démocraties, ce documentaire de Xavier Villetard (André Malraux, l’épreuve du pouvoir), coécrit avec l’historien Gérard Noiriel, remonte le cours des luttes qui ont opposé, depuis le Moyen Âge, les peuples français, allemand et britannique à leurs gouvernants en matière fiscale. »

« Entre privilège des puissants et ambitions redistributives, entre consentement et évitement, ces deux chapitres mêlent archives et éclairages (d’anciens ministres, comme George Osborne, Éric Woerth ou Wolfgang Schäuble, de députés, d’inspecteurs des finances, d’économistes…) pour décrypter la tumultueuse histoire d’un outil qui est le miroir des métamorphoses de l’État et de la société. »

Impôts, taxes... Quelles que soient les dénominations, la fiscalité est scrupuleusement surveillée par les libéraux qui se méfient d'un interventionnisme étatique au-delà de ses privilèges régaliens, de la faiblesse ou de l'absence de contrôle des actions étatiques,  d'une pression fiscale qui réduit le pouvoir d'achat, jugule les initiatives privées, nourrit une bureaucratie souvent irresponsable de facto, inspire des législations, règlements ou normes créant une instabilité juridique et une complexité inutile, crée des "paradis fiscaux" attirant ceux exaspérés par les "enfers fiscaux", etc.

Pratiqué sous les mandats de Ronald Reagan et de Donald Trump, le libéralisme économique fondé sur une politique de l'offre a boosté la croissance américaine.

Et maintenant, la "fiscalité écologique " ! C'est "pour la bonne cause", vous dit-on...


« Après plusieurs siècles de soulèvements populaires réguliers contre les taxes royales, la Révolution française consacre le principe de l’égalité devant l’impôt et transfère le pouvoir fiscal à une chambre élue ». 

« Au XIXe siècle, les nations européennes empruntent massivement pour financer la révolution industrielle ». 

« Mais comment rembourser la dette ? »

« À côté des taxes sur la propriété et sur la consommation qui étouffent ouvriers et paysans, le Royaume-Uni adopte l’impôt sur le revenu en 1848. L’Allemagne suit vingt ans plus tard, la France, en 1914 ». 

« Ces dernières entérinent sa progressivité – que les plus fortunés s’empressent de contourner en transférant leurs capitaux en Suisse – au lendemain de la Grande Guerre, tandis que la "hache de Geddes" (du nom du ministre conservateur Eric Geddes) s’abat sur les dépenses publiques britanniques ». 

« Après l’horreur de la Seconde Guerre mondiale, l’État-providence s’impose : France, Allemagne et Royaume-Uni se dotent de systèmes de protection sociale ». 

« La création du marché économique européen entraîne la généralisation progressive de la TVA, initialement française ». 

« En 1982, sous Mitterrand, l’instauration de l’impôt sur les grandes fortunes relance l’évasion fiscale ». 

« Partout ailleurs, le tournant néolibéral se prépare… »

« Arrivée au pouvoir en 1979, Margaret Thatcher applique les théories économiques de Hayek : privatisations, retour à l’"État minimum", baisse des impôts sur les revenus les plus élevés et les entreprises. »

« Si les mineurs en grève échouent à la faire plier, c’est sur la "poll tax", une taxe d’habitation identique pour tous, que la Dame de fer finira par trébucher ». 

« Dans l’Allemagne réunifiée, les citoyens de l’Est, soumis à la fois à l’impôt et aux conséquences du démantèlement de leur système social, souffrent du passage à l’économie de marché ». 

« Dans une France elle aussi submergée par la vague néolibérale et le creusement des inégalités, la CSG (contribution sociale généralisée), vouée à financer la Sécurité sociale, entaille le principe de la progressivité ». 

« La construction européenne, avec la libre circulation des capitaux et la monnaie unique, met en concurrence les systèmes fiscaux nationaux ». 

« C’est le boom des niches – et de l’optimisation – fiscales ». 

« Victimes des délocalisations, puis des politiques d’austérité nées de la crise de 2008, de nombreux Européens basculent dans la précarité et, pour certains, dans le populisme. »


« Depuis la vague néolibérale des années Thatcher-Reagan, les États ont peu à peu perdu la souveraineté de leur fiscalité. Coauteur du documentaire Histoire populaire des impôts, l'historien Gérard Noiriel revient sur les causes et conséquences d'une telle situation, potentiellement explosive. Par Raphaël Badache.
 
À quel point l'impôt est-il lié aux démocraties ?
Gérard Noiriel : Il est fondamental dans la construction de nos sociétés. L'une des règles de la démocratie étant : pas d'impôt sans souveraineté du peuple, qui, à travers ses représentants, a la main sur la fiscalité. Cette souveraineté implique l'usage de la force pour obliger les récalcitrants à y consentir. Or, depuis l'alliance néolibérale entre Thatcher et Reagan, qui a fait basculer l'économie de tous les pays occidentaux, et a gagné jusqu’à la gauche française, les peuples se retrouvent implicitement dépossédés de la première de leurs souverainetés avec la libéralisation des capitaux, les dérégulations, l'anonymat des grandes fortunes…

Comment expliquer cette facilité grandissante, depuis la vague néolibérale, à éviter l'impôt ?
Alors que le capitalisme s'est mondialisé, les forces de résistance au capitalisme sont restées atomisées. Nous vivons donc une situation dramatique où les grandes fortunes peuvent aisément échapper à l'impôt, notamment à travers l'optimisation ou les paradis fiscaux. Les États-nations, même s'ils souhaitaient mettre en place des mesures coercitives, se retrouvent face à une mondialisation qui les dépossède. D'où l'importance d'agir a minima au niveau européen. Ce n'est toutefois pas un fait nouveau : l'une des raisons de l'échec du Front populaire avait été la fuite des capitaux. La situation est tout simplement plus marquée aujourd'hui.

Le refus de certaines élites de payer l'impôt menace-t-il les démocraties ?
L'inégalité sociale n'est pas incompatible avec la démocratie. Le XIXe siècle en témoigne, et nous retournons actuellement vers cette époque sans que les régimes démocratiques s'effondrent pour autant. Toutefois, l'actualité nous montre qu'à force de laisser les puissants échapper à l'impôt, aux règles communes, des révoltes de plus en plus grandes se font jour.

Vous pensez aux "gilets jaunes" ?
Par exemple. Cette révolte a touché deux éléments fondamentaux de l'histoire politique : la question de la citoyenneté et, donc, celle de l'impôt. L'histoire nous enseigne que les luttes sociales, même lorsqu'elles sont perdantes, contribuent à faire évoluer une société. Elle nous apprend également que les élites peuvent prendre des mesures qu'elles ne souhaitent pas lorsqu'elles comprennent que leur propre intérêt est menacé par le contexte ambiant. Je prends souvent l'exemple de l'épidémie du choléra de 1832, qui a provoqué la mort de dizaines de milliers de personnes, dont celle de Casimir Perier, alors président du Conseil. Toute une réflexion se développe alors chez les dirigeants, qui mettent en place une politique d'hygiène pour les pauvres, portée notamment par cette idée : si nous ne faisons rien, nous serons nous-mêmes contaminés par les maladies. En France, ces dernières années, trois crises bien distinctes, aussi imprévisibles qu’essentielles, ont redonné de la force à l'État-nation : les "gilets jaunes", le coronavirus et la guerre en Ukraine. Nous voyons alors des libéraux comme Emmanuel Macron redécouvrir la nécessité du rôle protecteur de l'État. »


« Histoire populaire des impôts » de Xavier Villetard
France, 2022, 2 x 52 min
Coproduction : ARTE France, Point du Jour, Les Films du Balibari 
Auteurs : Xavier Villetard, Gérard Noiriel 
Sur Arte les 
1ère partie : 7 juin 2022 à 20 h 55, 15 juin 2022 à 10 h 15, 1er juillet 2022 à 1 h 25
2e partie : 7 juin 2022  à 21 h 45
Disponible du 31/05/2022 au 05/08/2022

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