Citations

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« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
« Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. » (Vladimir Jankélévitch)
« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

samedi 3 août 2019

De Carmen à Mélisande. Drames à l’Opéra Comique


Organisée au Petit Palais par ce musée et par l’Opéra Comique (ou « salle Favart »), l’exposition De Carmen à Mélisande. Drames à l’Opéra Comique rendait hommage aux célèbres opéras intemporels - Carmen, Les Contes d’Hoffmann, Lakmé, Manon, Le Rêve, Louise, Pelléas et Mélisande -, créés à la charnière des XIXe et XXe siècles, de 1870 à 1914. Un hommage à un âge d’or auquel ont contribué des artistes, compositeurs et librettistes, Juifs français. L’Opéra Comique célébrait ses trois cents ans. Arte diffusera le 2 août 2019 "Carmen, Violetta, Mimi, romantiques et fatales" (Carmen, Violetta, Mimi, romantisch und fatal) par Cyril Leuthy. Arte diffusera le 4 août 2019 "Carmen", "Don Carlos" au Concours reine Élisabeth" (Carmen, Don Carlos beim Königin-Elisabeth-Wettbewerb) réalisé par Benoît Vlietinck. 


Pour son tricentenaire, le Théâtre national de l'Opéra-Comique, ou « salle Favart », et le Petit Palais évoquent sept chefs-d’œuvre créés de 1870 à 1914, âge d’or de l’institution qui était « en France le rendez-vous des arts, des disciplines, des techniques et des esthétiques ».

Sept chefs d’œuvre
Abordant les arts plastiques et la scène, l’exposition « se concentre sur la période la plus faste de l’institution », à la charnière des XIXe et XXe siècles. Entre 1870 et 1902 sont créés des chefs-d’œuvre, interprétés à ce jour dans le monde : Carmen, Les Contes d’Hoffmann, Lakmé, Manon, Le Rêve, Louise, Pelléas et Mélisande.

Créé en février 1715, à la fin du règne du roi Soleil Louis XIV, l’Opéra Comique s’avère, avec l’Opéra de Paris et la Comédie-Française, une des trois plus anciennes institutions théâtrales de France. L'"opéra-comique" est un genre musical. Alors que l'opéra est entièrement chanté, l'opéra-comique signifie que "les morceaux chantés s’intègrent à du théâtre parlé". Dès 1783, l’Opéra Comique "présente ses saisons dans un théâtre qui a pris le nom d’un fameux auteur de livrets, Charles-Simon Favart. Par deux fois, la Salle Favart brûle puis est reconstruite sur le même terrain. En 1898, la troisième salle du nom est attribuée à l’Opéra Comique".

« Après des décennies romantiques marquées par de grands succès mais également par un certain conformisme, l’Opéra Comique s’affirme sous la IIIe République comme l’une des scènes les plus inventives de la capitale. Compositeurs, écrivains, chanteurs, décorateurs, costumiers, metteurs en scènes, tous participent au renouveau du genre et du spectacle. La salle Favart où sont joués ces ouvrages impose également son caractère. L’étroitesse de la scène et la proximité avec le public font naître une interprétation tout en subtilité et en émotion qui ne vise pas le spectaculaire ».

Ce sont à sept opéras majeurs de la vie musicale française qu’est consacrée l’exposition au Petit Palais qui a réuni près de 200 œuvres : partitions originales, tableaux, costumes, photographies, affiches, sculptures, etc.

Elle débute par quatre créations majeures qui ont marqué la salle Favart avant l’effroyable incendie du 25 mai 1887 : Carmen de Bizet puis Les Contes d'Hoffmann d’Offenbach, Lakmé de Delibes et enfin Manon de Massenet » Après la césure représentée par l’incendie et la reconstruction de la salle, le parcours s’achève par trois opéras, Le Rêve d’Alfred Bruneau et d’Emile Zola, Louise de Charpentier et Pelléas et Mélisande de Debussy d’après la pièce de Maeterlinck.


La scénographie recrée la cage de scène et souligne la mobilité des décors. Le parcours est ponctué enregistrements historiques audibles grâce à des dispositifs audiovisuels tel le théâtrophone, qui permettait à la fin du XIXe siècle d’entendre l’Opéra Comique à son domicile. « Dans son endroit (la salle) et dans son envers (la scène), les documents choisis nous racontent les créations de Carmen à Pelléas et Mélisande, et nous plongent au cœur des représentations ».

Le « visiteur se retrouve après « le lever de rideau » sur la scène du théâtre. Des assemblages de châssis de décor, de hauteurs différentes, à l’endroit à l’envers, servent à l’accrochage des œuvres et semblent dans leur disposition, pouvoir se déplacer de la Cour au Jardin ». Chacun des sept opéras est caractérisé par une nuance chromatique forgeant une ambiance particulière : à Carmen le « rouge intense », aux Contes d’Hoffmann le « bleu encre », tandis qu’un « bleu lumineux » éclaire Manon… Des « costumes incarnent des personnages et semblent attendre leur entrée en scène, derrière des mousselines noires transparentes, qui les protègent. Les plafonds s’ouvrent sur des vues lumineuses du grill avec les projecteurs, des toiles enroulées sur perche ou des détails du plafond peint et des murs latéraux de la Salle Favart. La machinerie technique des coulisses apparaît de manière fantomâtique ».


Organisée par le Petit Palais et l’Opéra Comique, l’exposition a bénéficié du concours exceptionnel de la Bibliothèque nationale de France, du musée d’Orsay et du musée Carnavalet-Histoire de Paris. Les commissaires généraux en sont Jérôme Deschamps, directeur de l’Opéra Comique, et Christophe Leribault, directeur du Petit Palais, les commissaires scientifiques : Agnès Terrier, dramaturge de l’Opéra Comique, et Cécile Reynaud, conservateur en chef au département de la Musique de la BnF.


CARMEN
En 1872, l’Opéra-Comique commande une œuvre à Bizet. Celui-ci suggère aux librettistes Meilhac et Halévy la nouvelle de Prosper Mérimée, Carmen (éditée en 1847). Le « sujet, par sa charge érotique et sa violence meurtrière n’était pas familier de la Salle Favart. « La mort à l’opéra comique ! » s’indigne alors le directeur Adolphe de Leuven ; après lui, Camille du Locle tentera jusqu’au bout de faire modifier par Bizet l’issue tragique. Mais compositeur, librettistes, et bientôt interprètes – Célestine Galli-Marié en tête – se passionnent pour cette oeuvre qui renouvelle le genre ». Bizet collabore au livret avec ses deux auteurs. « Jusqu’à la première, le 3 mars 1875, profitant des répétitions, il retouche sa partition ; la première édition de l’œuvre pour chant et piano, chez Choudens, date de cette époque : elle témoigne, autant que le manuscrit autographe, de l’évolution de l’œuvre ». 

« L’échec public est donc une déception amère pour le compositeur qui mourut trop tôt pour assister à son succès mondial. La partition s’est révélée très complexe : les chœurs en particulier, auxquels Bizet demande à la fois chant et mouvement, avaient laissé présager une exécution médiocre ».

Certes des espagnolades comme l’air du toréador ont suscité l’enthousiasme, et la beauté des décors retient l’attention, mais plus que tout sans doute, le sujet, scabreux dans ce théâtre des familles, a dressé contre la Bohémienne, la « Manon des carrefours » une bonne partie du public ».

« L’avenir de l’œuvre démentira ces premiers pas, transformée il est vrai par Ernest Guiraud, qui écrivit notamment les récitatifs à la place des dialogues parlés. Reprise en 1883 dans une version d’abord expurgée, l’œuvre connut un grand succès non démenti depuis, qui en fait une des œuvres les plus prisées du répertoire lyrique ».

"Il faut méditerraniser la musique. C’est ce qu’écrivait Nietzsche – en français ! – ayant entendu Carmen, poème d'Henri Meilhac et Ludovic Halévy, tiré de la nouvelle de Prosper Mérimée, pour la vingtième fois. Il était reconnaissant à Bizet, dix ans après « Tristan », d’en avoir composé l’antithèse, et même l’antidote. Loin des vapeurs de l’idéal wagnérien, celui-ci avait mis sur la scène de l’Opéra- Comique une passion fatale, violemment éclairée et écrasée par le soleil de l’Espagne. Le philosophe y voyait une révélation et une délivrance. « L’oeuvre a gardé de Mérimée la logique dans la passion, la concision du trait, l’implacable rigueur ; elle a surtout ce qui est propre aux pays chauds, la sécheresse de l’air. Là parle une autre sensualité, une autre sensibilité, une autre gaîté sereine. Cette musique est gaie, mais pas d’une gaîté française ou allemande. Sa gaîté est africaine. L’aveugle destin pèse sur elle, son bonheur est bref, soudain, sans merci. Enfin l’amour, l’amour re-transposé dans la nature originelle ! L’amour conçu comme un fatum, une fatalité, l’amour cynique, innocent, cruel ! L’amour, dans ses moyens la guerre, dans son principe la haine mortelle des sexes. » Philippe Jordan dirige le chef-d’oeuvre de Bizet pour son retour attendu à l’Opéra de Paris."

Le 6 juillet 2017, Arte diffusa Carmen de Bizet, en direct d'Aix-en-Provence. "La brûlante "Carmen" mise en scène par l'iconoclaste Dmitri Tcherniakov s’annonce comme un événement de l’édition 2017 du Festival d’Aix-en-Provence. ARTE a retransmis "cette production attendue en direct du Grand Théâtre de Provence". 

"Carmen, l’envoûtante bohémienne, séduit le brigadier Don José qui change de vie pour elle : il abandonne sa fiancée Micaëla, déserte de l’armée, se fait contrebandier. L’histoire finira mal. Pour les êtres humains d’aujourd’hui, désillusionnés et frustrés, rejouer l’histoire de Carmen permet de renouer avec les émotions fortes, de vivre intensément. Cette confrontation avec la mythique séductrice pourrait constituer la meilleure des thérapies… 

"Soixante ans après l’unique production de Carmen au Festival international d’art lyrique d’Aix-en-Provence, Dmitri Tcherniakov, connu pour ses propositions dramaturgiques et sa direction d’acteurs iconoclastes, s’empare de cette œuvre emblématique avec le renfort de l’excellent chef d’orchestre espagnol Pablo Heras-Casado, à la tête d’une distribution alléchante réunissant la mezzo-soprano française Stéphanie d’Oustrac et le jeune ténor américain Michael Fabiano. Pour sa première mise en scène du sulfureux livret, Tcherniakov, qui a réécrit les dialogues et choisi un décor contemporain, adopte le point de vue de Don José, comme l’avait fait initialement Prosper Mérimée dans la nouvelle dont est tiré l’opéra. L’atmosphère déjà très sensuelle de l’œuvre de Bizet promet de l’être plus encore sous le regard du metteur en scène russe, artiste visionnaire".

Le 7 janvier 2018, le Teatro del Maggio Musicale de Florence a présenté Carmen, dans une mise en scène de Leo Muscato. Cette version a suscité une polémique. D'une part, la fin est changée : Carmen tue Don José. D'autre part, l'histoire se déroule dans un camp de Roms au "début des années 1980 : Leo Muscato "met en scène l’évacuation du campement, occupé illégalement, par les forces de l’ordre en tenue anti-émeutes". "Dans l’œuvre de Bizet, Carmen, une bohémienne séductrice et rebelle, est poignardée par le brigadier Don José, fou d’amour pour elle, qui la poursuit de sa jalousie".

Leo Muscato a expliqué à l'AFP avoir réécrit le final « parce qu’on ne peut pas applaudir le meurtre d’une femme. L’idée m’a été suggérée par le directeur du théâtre [Cristiano Chiarot] qui voulait que je trouve un moyen pour ne pas faire mourir Carmen. Il estime qu’à notre époque, marquée par le fléau des violences faites aux femmes, il est inconcevable qu’on applaudisse le meurtre de l’une d’elles ». Leo Muscato "admet avoir d’abord été « déconcerté » par la demande parce que le destin de mort de Carmen, constitue le moteur du chef-d’œuvre de Georges Bizet".


« Un mois après la proposition du directeur, je suis revenu avec ma solution où Carmen ne meurt pas mais se défend contre son agresseur d’une façon inattendue, comme n’importe qui le ferait à sa place », a déclaré Leo Muscato. "Sans dévoiler le ressort dramatique qu’il utilise, le metteur en scène laisse entendre que le crime est la seule issue possible pour une femme sur le point d’être tuée. Et il assure avoir respecté scrupuleusement la musique et le livret originaux". « Don José se rend compte que le fait d’avoir poussé Carmen à un geste aussi extrême revient à l’avoir tuée et ses dernières paroles » Vous pouvez m’arrêter. C’est moi qui l’ai tuée « prennent alors une dimension symbolique », a allégué Leo Muscato.


Et d'ajouter : « Bizet avait situé Carmen en 1830, soit quarante-cinq ans avant sa première représentation. J’ai donc mis la même distance entre ma version et le moment où elle est jouée, pour que les spectateurs soient placés dans les mêmes conditions temporelles vis-à-vis de l’œuvre ». Carmen, "qui travaille dans une manufacture de cigarettes voisine du camp, est soumise aux coups de matraque répétés de Don José, un policier irascible et violent. « Mais ce n’est pas une violence gratuite, car on pourrait facilement tomber dans une vision manichéenne des choses avec d’un côté les hommes affreux, sales et méchants et de l’autre les femmes gentilles », a souligné Leo Muscato. « Don José est un homme qui combat ses démons intérieurs, il a des moments de douceur et de générosité puis des accès de grande violence comme cela arrive dans les foyers où sévissent les violences conjugales », notait-il. Une "analyse que Leo Muscato dit avoir puisée à la source de l’œuvre. La nouvelle de Prosper Mérimée, qui inspira l’opéra, débute en épigraphe par une citation du poète grec Palladas : « Toute femme est amère comme le fiel, mais elle a deux bonnes heures, une au lit, l’autre à sa mort ».


Le 21 janvier 2018 à 23 h 40, Arte diffusa "Le mythe de Carmen" (Mythos Carmen), réalisé par Axel Brüggemann (Signed Media, 2017, 44 min.). "Femme fatale émancipée, rebelle et brimée… Qui serait Carmen aujourd’hui ? A travers les images de ses mises en scène les plus marquantes, mêlées à des séquences de fiction et aux commentaires avisés d’interprètes de renom (Elina Garanca, mais aussi, dans les rôles masculins, Roberto Alagna et Plácido Domingo), ce documentaire explore sous toutes ses facettes le mythique opéra de Bizet.


"Axel Brüggemann plonge dans la dramaturgie et les motifs musicaux de cette œuvre incontournable, riche d’une multiplicité de thématiques et d’interprétations. Il analyse les arias et les fils narratifs qui s’entremêlent, pour mieux illustrer la psychologie complexe de la fougueuse héroïne, immense figure lyrique. Une fascinante exploration du mythe littéraire et lyrique de Carmen, à travers ses mises en scène les plus mémorables".


Dans le cadre d'Opéra en plein air, les 31 août et 1er septembre 2018, à l'Hôtel national des Invalides, Radu Mihaileanu met en scène Carmen de Bizet.

Arte diffusera le 2 août 2019 "Carmen, Violetta, Mimi, romantiques et fatales" (Carmen, Violetta, Mimi, romantisch und fatal) par Cyril Leuthy. "Carmen ("Carmen" de Bizet), Violetta ("La traviata" de Verdi) et Mimi ("La bohème" de Puccini) : les trois héroïnes les plus célèbres de l'opéra ont bel et bien existé. Ce documentaire enlevé raconte leur histoire."

"Carmen, Violetta, Mimi : ces trois belles d'opéra, qui ont marqué l'imaginaire musical du XIXe siècle, sont encore perçues de nos jours comme des figures d’émancipation féminine. Toutes les trois ont en commun d'être nées de personnages littéraires inspirés par des femmes qui ont réellement existé". 


"La Violetta de La Traviata fut une courtisane dont Alexandre Dumas fils brossa le portrait dans La dame aux camélias. Henry Murger prit sa maîtresse comme modèle pour ses Scènes de la vie de bohème, reprises par Puccini dans La bohème. Quant à Carmen, c'est le fait divers d'une prostituée andalouse tuée par son souteneur qui donna son canevas à la nouvelle de Prosper Mérimée, à laquelle George Bizet apporta une dimension épique. Par l'entremise d'archives et d'une iconographie variée, ce documentaire retrace le moment de basculement où l'art du XIXe siècle, s'inspirant parfois d'une réalité sordide, est parvenu à sublimer la vie."


"Qui peut croire aujourd'hui que Carmen, l'un des opéras les plus joués dans le monde, fut une œuvre maudite à sa naissance ? En 1872, l'Opéra-Comique, qui a passé commande à Georges Bizet d'une œuvre légère, n'apprécie pas sa première version, trop sensuelle et violente. Cherchant la nouveauté, le compositeur demande aux choristes de danser et de "vivre" sur les planches, ce qui les indispose : la grève sera évitée de justesse. De son côté, la mezzo-soprano Célestine Galli-Marié trouve la musique de son entrée en scène peu à son goût : Bizet devra la retoucher… douze fois ! Pire encore, le père de Carmen ne connaîtra jamais la popularité exceptionnelle de sa création : terrassé par le fiasco et le scandale, il meurt à 36 ans, le 3 juin 1875, à l'issue de la 33e représentation."

Arte diffusera le 4 août 2019 "Carmen", "Don Carlos" au Concours reine Élisabeth" (Carmen, Don Carlos beim Königin-Elisabeth-Wettbewerb) réalisé par Benoît Vlietinck. "En 2018, le Concours reine Élisabeth était dédié au chant. Un florilège des plus beaux moments avec Samuel Hasselhorn (baryton) et Eva Zaïcik (mezzo-soprano), premier et deuxième du concours. Au programme notamment : des extraits de "Don Carlos" de Verdi et de "Carmen" de Bizet."

"Sélectionnés parmi soixante-quatre candidats de vingt-deux nationalités, douze jeunes chanteurs lyriques ont participé aux épreuves finales du prestigieux concours belge, qui se sont déroulées sur trois soirées en mai 2018. Chacun d'entre eux devait interpréter trois à six pièces de son choix, selon des critères déterminés par les organisateurs. Accompagnés par l’Orchestre symphonique de la Monnaie, dirigé par Alain Altinoglu, six lauréats ont été distingués par le jury, parmi lesquels Samuel Hasselhorn (baryton) et Eva Zaïcik (mezzo-soprano), premier et deuxième du concours. Au programme notamment : des extraits de Don Carlos de Verdi et de Carmen de Bizet."

Georges Bizet (1838-1875)
Alors que Bizet étudie auprès de Fromental Halévy, son professeur au Conservatoire, son opérette Le Docteur Miracle est distingué par un prix suggéré par Offenbach et est interprétée aux Bouffes Parisiens en 1856. Premier Grand Prix de Rome en 1857, il achève à la Villa Médicis un Opéra-Comique dans le style italien, Don Procopio (1859). S’ensuivent à Paris des projets pour la scène, « souvent soldés par des échecs, hormis le succès » de la Jolie fille de Perth au Théâtre Lyrique en 1867. « Avant Carmen, deux œuvres sont coup sur coup proposées à l’Opéra-Comique : Grisélidis, refusée, puis Djamileh, représentée en 1872 et boudée du public. Carmen, ouvrant la voie à un nouveau style dramatique », est l’ultime oeuvre de Bizet qui décède le 3 mars 1875, alors qu’il travaillait sur Don Rodrigue, envisagé pour l’Opéra au Palais Garnier, récemment ouvert.


LES CONTES D’HOFFMANN
Le 10 février 1881, la première représentation à l’Opéra-Comique des Contes d’Hoffmann est bien accueillie par le public. Son compositeur Jacques Offenbach est mort un an auparavant. Le 15 décembre 1881, cette salle parisienne célèbre la centième représentation.

Cette œuvre s’inspire du « drame fantastique » éponyme de Jules Barbier et Michel Carré. Le « sombre E. T. A. Hoffmann (1776-1822) en constitue le fil directeur : il raconte, pendant une représentation du Don Giovanni de Mozart où se produit la prima donna Stella, l’histoire de trois de ses amours malheureuses (la poupée Olympia, la cantatrice Antonia, la courtisane Giulietta), autant de facettes formant le caractère de sa dernière passion, Stella. À ces figures féminines font pendant quatre personnages néfastes (Lindorf, Coppélius, Dapertutto, le docteur Miracle). Lors de la création l’unité fut soulignée : les quatre personnages féminins étaient chantés par une seule cantatrice, Adèle Isaac, et les quatre rôles funestes par Taskin ». 

Modifiée à plusieurs reprises par Offenbach avant sa première représentation à l’Opéra-Comique sans que le compositeur puisse en diriger les répétitions, Les contes d’Hoffmann fait l’objet de « versions » variées. Un grand nombre d’archives précieuses sur cette œuvre ont disparu accidentellement : tout le matériel d’orchestre en décembre 1881, lors de l’incendie du Ringtheater de Vienne, la partition de la création lors de l’incendie de l’Opéra-Comique en 1887. Le recours au manuscrit autographe réapparu en 1970, ou à la copie utilisée lors des représentations ne permet pas de reconstituer une unique version. 

Jacques Offenbach (1819-1880)
Arrivé à Paris en novembre 1833, l’adolescent allemand doué étudie le violoncelle au Conservatoire, puis entre en 1834 à l’orchestre de l’Ambigu-Comique et de l’Opéra-Comique. Ce violoncelliste virtuose accède au poste de directeur musical du Théâtre français. En 1855, il crée son théâtre, les Bouffes-Parisiens. A partir de 1860, ses œuvres Barkouf, en 1867 Robinson Crusoé, Vert-Vert en 1869 et Fantasio en 1872 entrent au répertoire de scènes prestigieuses officielles : l’Opéra et l’Opéra-Comique. Présentée en 1864 aux Variétés, La belle Hélène inaugure une ère de succès et de collaborations avec Meilhac et Halévy.

La « défaite de 1870 apporte un climat nouveau pour celui qui fut considéré à tort comme le chantre du Second Empire, sa situation financière et bientôt sa santé se détériorent. Offenbach meurt sans avoir pu connaître le succès triomphal des Contes d’Hoffmann à l’Opéra-Comique ».


LAKMÉ
Lakmé est élaboré par Léo Delibes, alors à l’apogée de sa carrière, avec Léon Carvalho, directeur de l’Opéra Comique, et le duo de librettistes Edmond Gondinet et Philippe Gille.

« Jusqu’à début 1881, les auteurs projetaient un Jacques Callot. Mais le succès, dans le rôle-titre de Mignon, de Marie Van Zandt, une jeune Américaine de passage dans la troupe, leur inspire le personnage de Lakmé, mi poétesse mi déesse exotique. Deux sources sont conjuguées : Le Mariage de Loti du romancier à la mode Pierre Loti (1880) narre la passion malheureuse d’un officier et d’une Vahiné en plein Pacifique ; Les Babouches du Brahmane, de l’indianiste Théodore Pavie (1849) raconte la vengeance d’un brahmane humilié par un Anglais ».

Un opéra comique « ne pouvant interroger la légitimité de la colonisation » française, le « propos est détourné vers la couronne britannique alors que l’établissement d’un protectorat anglais en Égypte ravive en France une forte anglophobie ». 

Si Lakmé « développe avec audace une intrigue contemporaine située sous le règne » de la reine Victoria, le « déséquilibre de la relation coloniale passe derrière l’idylle nouée par deux figures familières du répertoire : la belle autochtone et le militaire étranger, déchirés entre loyauté et passion ».

Le 14 avril 1883, le « rideau se lève devant le tout Paris. Le duo Lakmé-Gérald de l’acte I et la cantilène de Gérald à l’acte I II sont bissés. L’énorme succès est communiqué par télégraphe aux théâtres du monde entier. Deux mois après la mort de Wagner, et alors que Carmen triomphe enfin à l’Opéra-Comique, le monde musical identifie en Delibes l’un des maîtres de l’école française ».

Léo Delibes (1836-1891)
Léo Delibes « étudie la composition au Conservatoire de Paris avec Adolphe Adam, l’auteur du Postillon de Longjumeau. Renonçant au concours du Prix de Rome, il entame une double carrière d’organiste et surtout de chef de chœur au Théâtre Lyrique. Il débute à 20 ans comme compositeur d’opérettes, genre qu’il abandonne en 1869 après la création de La Cour du roi Pétaud. Engagé à l’Opéra de Paris en qualité de chef de chœur, il y compose des ballets qui élèvent le genre à la dignité symphonique : La Source en 1866, Coppélia en 1870, Sylvia en 1876. À l’Opéra-Comique, il connaît des succès croissants avec Le Roi l’a dit en 1873, Jean de Nivelle en 1880 et Lakmé en 1883. Il est nommé professeur de composition au Conservatoire en 1881 puis membre de l’Académie des Beaux-Arts en 1884. Il meurt brutalement à 54 ans, quelques semaines avant la 100e de Lakmé. Massenet achève l’orchestration de son ultime opéra, Kassya, qui sera créé à l’Opéra-Comique en 1893 ».


MANON
Ses « débuts à l’Opéra-Comique ont fait naître en Jules Massenet un « véritable besoin d’écrire pour la scène ». Le centenaire d’Auber – auteur de la première adaptation lyrique de Manon Lescaut en 1856 – lui suggère en 1882 de reprendre le roman de l’abbé Prévost. Ses contemporains raffolent de la période Louis XV : les Goncourt en font le siècle de la volupté, Barbey d’Aurevilly et Sainte-Beuve révèlent ce que Carmen, la Dame aux camélias et Emma Bovary doivent à Manon, Maupassant voit en elle La Femme qui fait rimer charme et infâme ».

Or depuis Carmen, l’Opéra-Comique « tolère les pécheresses au prix de leur punition. En voulant sauvegarder la morale, l’institution a ouvert ses portes au drame. Massenet revisite le genre historique. S’il remplace l’alternance parler-chanter par l’usage du mélodrame, trame orchestrale continue vivifiant les dialogues et liant les numéros musicaux, il truffe sa partition de formes anciennes ».

Le 19 janvier 1884, la première représentation publique de Manon suscite des réactions mitigées. Il faudra plusieurs années pour que Manon s’impose, en et hors de France, « à la faveur d’un changement d’interprète. Sybil Sanderson remplace Marie Heilbronn, morte brutalement en 1885, et inspire au compositeur une version plus brillante du rôle-titre. Créée à La Haye, celle-ci motive en 1891 une nouvelle production à l’Opéra-Comique. Dès lors, Manon sera l’ouvrage de Massenet le plus joué à Paris et dans le monde ».

Jules Massenet (1842-1912)
Jules Massenet « étudie la composition avec Ambroise Thomas, l’auteur de Mignon. Lauréat du Prix de Rome à 21 ans, il débute à l’Opéra-Comique avec deux partitions qui disparaîtront dans l’incendie de 1887. L’Opéra programme en 1877 Le Roi de Lahore et à 36 ans, Massenet devient membre de l’Institut et professeur au Conservatoire. Il formera entre autres Alfred Bruneau et Gustave Charpentier. Les succès s’enchaînent : Hérodiade en 1881 à Bruxelles, Manon en 1884 à l’Opéra-Comique, Le Cid en 1885 à l’Opéra, Esclarmonde en 1889 à l’Opéra-Comique, Le Mage en 1891 à l’Opéra, Werther à Vienne en 1892. En 1894, Thaïs à Garnier et La Navarraise à Londres ».
« Suivent à la Salle Favart, Sapho en 1897, Cendrillon en 1899, Griselidis en 1901. Monte-Carlo crée Le Jongleur de Notre-Dame en 1902, Thérèse en 1907, Don Quichotte en 1910, Roma en 1912. L’Opéra crée Ariane en 1906 et Bacchus en 1909 ».


L’INCENDIE DE 1887
Édifiée en 1840, la deuxième salle Favart de 1 255 sièges « est éclairée au gaz. Les flammes sont partout présentes dans une cage de scène encombrée de rideaux et de toiles non ignifugés, dans un bâtiment où le bois domine sur le fer et la fonte ».

Le 12 mai 1887, le « ministre des Beaux-Arts répond à une interpellation à la Chambre des députés : « Il n’est aucun théâtre qui n’ait brûlé, et même plusieurs fois, dans l’espace d’un siècle. Par conséquent, nous pouvons considérer comme probable que l’Opéra-Comique brûlera [on rit]. J’espère toutefois que ce sera le plus tard possible ».

Le 25 mai 1887, à 21 heures, lors du premier acte de la 745e de Mignon d’Ambroise Thomas, une « flammèche s’échappe de la rampe vers le châssis d’avant-scène et embrase le décor ».

Les « chanteurs Mouliérat et Taskin improvisent l’évacuation du personnel scénique. Les portes de la salle, qui s’ouvrent vers l’intérieur, piègent les spectateurs. Le chef gazier coupe le jeu d’orgue. Ceux qui s’échappent des loges s’égarent dans l’obscurité. On tente de fuir par les fenêtres contre lesquelles se dressent les échelles des pompiers ».

Sur près de 2000 personnes dans le théâtre, on identifie 84 victimes sur un total vraisemblable de 200, « auxquelles s’ajoutent autant de blessés. On déplorera aussi la disparition d’instruments précieux et de tous les trésors musicaux de la bibliothèque ».

Léon Carvalho, directeur de l’Opéra-Comique, et les pompiers de garde sont poursuivis en justice. Acquitté par la Cour d’appel, Léon Carvalho dirige de nouveau cette salle dès 1891.

Mesures de sécurité adoptées à la suite de cet incendie : les théâtres et cafés-concerts doivent recourir à l’électricité et poser un rideau de fer.


LA TROISIÈME SALLE FAVART
En 1893, l’État « décide enfin de rebâtir la Salle Favart, après avoir renoncé à racheter l’immeuble mitoyen qui aurait permis d’agrandir l’édifice et de l’ouvrir sur le boulevard des Italiens. Le concours est remporté par Louis Bernier, Grand Prix de Rome et architecte en chef de l’École des Beaux-Arts ».

« Dernier théâtre construit avec une ossature métallique, l’Opéra-Comique conserve une orientation et une capacité d’accueil inchangées. Dans la salle, le rapport du public à la scène reste traditionnel. Le luxe décoratif, propice à la sociabilité, prime sur le confort ».

« Premier théâtre d’Europe à intégrer l’électricité dès sa conception, l’Opéra-Comique la met en scène dans la décoration, une démarche qui culmine avec les lustres du foyer signés Christofle ».

Le « programme décoratif illustre, à l’époque des expositions universelles, « tout ce qui constitue le genre opéra-comique dans les différents pays et aux différentes époques ». Il est confié à des lauréats du prix de Rome, professeurs à l’École des Beaux-Arts ou membres de l’Institut. Henri Gervex et Albert Maignan sont chargés du foyer, Joseph Blanc de l’avant-foyer, Luc-Olivier Merson et François Flameng des escaliers, Raphaël Collin et Edouard Toudouze des rotondes et Benjamin-Constant du plafond de la salle. Peintures, bustes et médaillons célèbrent l’Opéra-Comique dès le vestibule d’entrée, où deux héroïnes accueillent le public : Manon, sculptée par Antonin Mercié, et Carmen, sculptée par Maurice Guiraud-Rivière ».

Inaugurée le 7 décembre 1898 en présence de Félix Faure, Président de la République, la troisième Salle Favart peut accueillir 1 255 spectateurs. Les travaux de décoration du Foyer prennent fin en 1904.


LE RÊVE
En avril 1888, Emile Zola accorde à Alfred Bruneau l’autorisation « d’adapter à la scène lyrique son roman Le Rêve (qui paraît en octobre de la même année). Le romancier n’écrit pas le livret de cette première œuvre commune, le confiant à Louis Gallet, librettiste chevronné et directeur de l’hôpital Lariboisière. Le manuscrit original du livret montre cependant des corrections de Zola, signe de l’importance que le romancier pouvait accorder à cette première adaptation musicale ». 

Le Rêve, « dont l’action se déroule dans l’ombre d’une cathédrale, dont l’héroïne, l’orpheline Angélique, sujette aux visions mystiques, s’éprend de Félicien, fils de l’évêque, ne compte pas parmi les romans les plus purement naturalistes de Zola. L’expression de l’idéal, de la fantaisie et du symbole y trouvent un cadre de choix ». 

La « musique de Bruneau mêlant des réminiscences de chants populaires et de plain chant, utilisant les ressources d’un chœur et d’un orchestre invisibles pour les voix entendues par Angélique, déployant l’usage du leitmotive pour caractériser les sentiments des personnages, a pu évoquer celle des opéras de Richard Wagner  ». 

Le « réalisme de la mise en scène (les personnages étaient vêtus de costumes de ville), le langage quotidien du livret déconcerta la critique lors de la première à l’Opéra-Comique le 18 juin 1891, sans lui faire manquer l’originalité de la partition ».

Bruneau « dirigea son opéra en France et à l’étranger ; Gustav Mahler témoigna son admiration au compositeur et dirigea Le Rêve à Hambourg en 1892 ».

La dernière représentation du Rêve à l’Opéra-Comique date de 1947.

Alfred Bruneau (1857-1934)
Élève de Jules Massenet au Conservatoire de Paris, Alfred Bruneau est lauréat d’un 2e prix de Rome en 1881. L’essentiel de sa carrière de compositeur est consacré à la scène. La rencontre avec Emile Zola (1840-1902) en mars 1888 est déterminante : en faisant siennes les réflexions de Zola sur le théâtre, Bruneau ouvre la voie à un genre nouveau, l’opéra naturaliste. 

Neuf œuvres scéniques naissent de cette collaboration, depuis Le Rêve en 1891 à l’Opéra-Comique, jusqu’à la musique de scène pour La Faute de l’abbé Mouret en 1907 au théâtre de l’Odéon, en passant par Messidor (1897 à l’Opéra) ou L’Enfant roi (1905 à l’Opéra-Comique). Critique musical actif dans la presse, il occupe aussi la fonction de premier chef à l’Opéra-Comique en 1903-1904 et succède à Gabriel Fauré à l’Institut.


LOUISE
« Roman musical », Louise est représenté pour la première fois à l’Opéra-Comique le 2 février 1900. Gustave Charpentier est l’auteur de la musique. Pour le livret, il a collaboré avec le poète Saint-Pol Roux (1861-1940). Il a probablement débuté l’oeuvre lors de son séjour romain à la Villa Médicis (1888-1890) : il modifie largement le livret à Paris, « au contact des milieux littéraires naturalistes et symbolistes qu’il fréquente alors notamment au cabaret du Chat noir. »

Louise, dont « le livret, contre l’usage, est entièrement en prose, décrit avec réalisme le milieu des « petites gens » et des artistes bohèmes dans un Montmartre dangereux et fascinant. Le triomphe de l’union libre entre la jeune modiste, Louise, et le poète, Julien, la revendication de la liberté individuelle contre les valeurs morales de la famille, firent scandale lors de la première de l’oeuvre mais n’empêchèrent pas l’immense succès. L’opéra fut créé au moment où Charpentier tentait, avec l’oeuvre de Mimi Pinson, d’ouvrir les salles de concert aux femmes des milieux populaires : l’enthousiasme fut grand aussi auprès des jeunes ouvrières de Paris invitées aux représentations. La scène du Couronnement de la Muse (acte 3) en particulier fut régulièrement adaptée et jouée dans les villes de province pour accompagner la consécration de l’ouvrière la plus méritante. Le rayonnement de l’oeuvre est immense malgré son peu de présence à l’enregistrement : en 1956, elle avait atteint sa 1000e représentation à l’Opéra-Comique, et trouvé le meilleur accueil auprès des scènes étrangères ».

Gustave Charpentier ( 1860-1956)
Issu d’un milieu modeste, Charpentier étudie au Conservatoire de Lille, puis dès 1879 à Paris où il est l’élève de Massenet. Il est distingué par le prix de Rome en 1887. Ses « premières œuvres dramatiques écrites dans le cadre de cette institution (Didon, La vie du poète ou Impressions d’Italie) constituent, avec Louise, esquissée à la Villa Médicis, le noyau de ses principales compositions à venir, qu’il s’agisse du Couronnement de la Muse (1897), ou de Julien ou la vie du poète, créé avec succès à l’Opéra-Comique en 1913 comme une suite de Louise. En 1912, il succède à Massenet à l’Académie des Beaux-arts. Il collabore à la version filmée de Louise par Abel Gance en 1938 ».


PELLÉAS ET MÉLISANDE
« Intime des poètes de son temps, Claude Debussy est l’un des premiers lecteurs de Maurice Maeterlinck. Le 17 mai 1893, en pleine composition du Prélude à l’Après-midi d’un faune, il assiste avec Mallarmé à la création confidentielle de Pelléas et Mélisande, un texte que sa musique peut compléter sans redondance. Avec l’aval du poète belge, il écrit sa partition en deux ans et l’orchestre pour la troisième Salle Favart, aussitôt Albert Carré est convaincu de le programmer par son directeur musical André Messager. Musiciens et peintres sont mobilisés pour servir ce drame novateur, Debussy invitant chaque interprète « à oublier qu’il est chanteur. »

Un « article publié dans Le Figaro par Maeterlinck, pour venger l’éviction de sa compagne Georgette Leblanc au profit de Mary Garden dans le rôle de Mélisande, met en danger la première du 30 avril 1902. Mais la poésie du spectacle et l’engouement de la jeunesse – malgré l’interdiction édictée aux étudiants du Conservatoire par son directeur – imposent cette œuvre qui échappe à l’influence de Wagner, à la tradition qu’incarne Massenet et au naturalisme de Louise ».

La « 50e est donnée en 1906, la 100e en 1913. Proust l’écoute au Théâtrophone, abonnement téléphonique aux théâtres parisiens : « Tous les soirs où cela se donne, si malade que je sois, je me jette sur cet instrument. » Du vivant de Debussy, Pelléas est donné aussi bien dans les capitales européennes que dans les métropoles américaines. Jamais Debussy ne retrouvera un texte aussi favorable à son rêve musical ».

Claude Debussy (1862-1918)
Étudiant au Conservatoire, Debussy se forge un esprit indépendant qui ne l’empêche pas de remporter le Prix de Rome en 1884.

Cet amoureux de la peinture et de la poésie va appréhender l’art de Wagner à Bayreuth pour mieux s’en distinguer. Alors qu’il termine La Damoiselle élue, il découvre Pelléas et Mélisande, pièce de Maeterlinck qu’il transforme en opéra au moment où le Prélude à l’Après-midi d’un faune le révèle au public. Tandis que le piano devient le confident de ses rêveries, ses autres projets lyriques échouent. Mais son orchestre s’épanouit dans La Mer, puis dans Masques et bergamasques et Jeux, pour les Ballets russes. Le Martyre de saint Sébastien est écrit avec d’Annunzio, La Boîte à joujoux pour sa fille. Bouleversé par la guerre, Debussy compose ses ultimes Études avant de mourir dans la capitale bombardée ».


Auteurs Juifs
Curieusement, aucune conférence liée à cette exposition n’évoque le rôle des compositeurs et librettistes Juifs ou d’origine Juive – Ludovic Halévy s’est marié au temple de l’Oratoire - dans cet âge d’or. 

De 1828 aux années 1880, domine le « Grand opéra français » caractérisé par quatre ou cinq actes, une distribution, un orchestre, des décors et des effets de scène impressionnants, une intrigue inspirée d'un fait historique dramatique. Parmi les initiateurs du « Grand opéra français » figure le compositeur Giacomo Meyerbeer (1791-1864) qui associe brillamment des éléments des écoles musicales française, italienne et allemande dans ses œuvres.

Né à Cologne, fils d’un cantor de synagogue, Jacques Offenbach (1819-1880), compositeur dont l’un des élèves était Léo Delibes, a collaboré avec Ludovic Halévy (1833-1908) et Henri Meilhac. Il a créé l’opéra-bouffe français, l’opéra-bouffe-féérie » avec Le Roi Carotte. Un genre décliné sur un mode historique ou patriotique avec La Fille de madame Angot (1873) et sur un mode fantastique avec Les Contes d’Hoffmann (1881). 

Neveu de Jacques Fromental Halévy, Ludovic Halévy (1833-1908) et Henri Meilhac (1831-1897) ont signé les livrets des plus célèbres œuvres scéniques de Jacques Offenbach, en particulier La Belle Hélène (1864), La Vie parisienne (1866-1873), La Grande-duchesse de Gérolstein (1867) et La Périchole (1869). Ils sont les auteurs du livret de Carmen de Georges Bizet (1875).

Pour Offenbach, Jonathan-Hector Crémieux (1828-1892) a écrit le livret, avec Ludovic Halévy, d’Orphée aux Enfers.

La Juive est un opéra en cinq actes par Jacques-Fromental Halévy (1799-1862), d'après un livret original d'Eugène Scribe créé à l'Académie royale de musique de Paris (salle Le Peletier) le 23 février 1835 sous la direction de François-Antoine Habeneck. C'est La Juive qui a inauguré les représentations publiques du Palais Garnier, le 8 janvier 1875.

300 ans
« Pour célébrer ses trois cents ans, l’Opéra Comique remonte le temps. Julie Fuchs, Patricia Petibon, Sabine Devieilhe, Anna Caterina Antonacci, Stéphane Degout, Frédéric Antoun et Vincent Le Texier interprètent des extraits d'œuvres mythiques qui ont fait la gloire de la maison du « parlé-chanté ». Une soirée de gala jubilatoire, à la manière d’une revue à la Guitry ».

« Carmen » de Bizet, « Manon » de Massenet, « Lakmé » de Delibes, « La fille du régiment » de Donizetti, « Les contes d’Hoffmann » d’Offenbach, « Pelléas et Mélisande » de Debussy… : sous la direction du chef d’orchestre François-Xavier Roth, des stars de l’opéra – Julie Fuchs, Patricia Petibon, Sabine Devieilhe, Anna Caterina Antonacci, Stéphane Degout, Frédéric Antoun, Vincent Le Texier – se succèdent sur scène pour interpréter des extraits des œuvres célèbres ».

« Entre leurs prestations, des saynètes réunissant Michel Fau, travesti en Carmen ou Mélisande, le comédien Julien Lubek, en Arlequin, mais aussi Jérôme Deschamps, alors directeur de l’institution dans le rôle de ses prédécesseurs, et Christian Hecq, sociétaire de la Comédie-Française interprétant Wagner ou Offenbach, évoquent la trajectoire singulière de ce théâtre, apparu dans les foires au début du XVIIIe siècle ».


« Conçu spécialement pour ARTE, ce spectacle recrée les plus belles pages de l’histoire tricentenaire de la salle Favart, en mobilisant aussi des fragments de décors, des peintures et des affiches d’anciennes productions ».

Un « moment de pur plaisir mis en scène avec humour et raffinement par Michel Fau – qui a monté Ciboulette de Reynaldo Hahn pour l’Opéra Comique – et le réalisateur François Roussillon ».

Puis, « zoom sur une grande maison parisienne toujours alerte, en compagnie de l’académie de jeunes chanteurs lyriques qu’elle accueille pour la première fois cette année ».

« Juste derrière les grands boulevards à Paris, il est un lieu où l’esprit des grands compositeurs et écrivains du XIXe imprègne les talents en devenir. Bizet, Offenbach, Massenet, Debussy et bien d’autres y ont créé leurs plus grands succès ».

« En 2012, l’Opéra Comique a créé l'Académie. Cette « école » accueille chaque année dix jeunes chanteurs lyriques triés sur le volet. Ils ont ainsi l’opportunité de se spécialiser dans le répertoire unique de l'Opéra Comique qui mêle le parlé et le chanté ».

« Pendant une saison, ce documentaire suit une promotion dans son travail quotidien, des ateliers – animés par des chefs de chant, des professeurs de diction, d'illustres coaches… – aux créations d'opéras et de récitals ».

« Entre les répétitions, le travail en atelier et les spectacles, ces jeunes chanteurs nous font partager avec spontanéité leur passion pour cet art exigeant, dont ils ont décidé de faire leur métier. Patrick, ex-ingénieur en électronique d'origine gabonaise, a quitté l’Afrique pour les scènes d’opéra européennes. Ronan, ex-rocker breton devenu baryton, livre dans le film une interprétation mémorable du père de Cendrillon. Sandrine émeut le public lors d’un inoubliable récital Poulenc. En l’espace de six mois, ils auront tous beaucoup travaillé, beaucoup appris, et fait entendre leur belle voix, avant de la faire résonner sur de grandes scènes internationales ».

ADDENDUM
Arte diffusa le 17 janvier 2017 « Si l’Opéra Comique m’était conté. Soirée du Tricentenaire » (Die Geschichte der  Pariser Opéra Comique), par François Roussillon, puis « Opéra Comique, naissance d'une académie » (Opéra Comique Paris, Geburt einer Opernschule) par Rémi Lainé.


REPÈRES CHRONOLOGIQUES

1875 : Création de Carmen de Georges Bizet
La Juive (1835) de Jacques-Fromental Halévy  inaugure les représentations publiques du Palais Garnier.
1876 : Nouveau directeur de l’Opéra-Comique, Léon Carvalho y amène le répertoire du Théâtre-Lyrique qu’il avait dirigé sous le Second Empire et assure l’essor de la direction d’acteur. Son directeur musical est Charles Lamoureux.
1881 : Création des Contes d’Hoffmann de Jacques Offenbach
1883 : Création de Lakmé de Léo Delibes
1884 : Création de Manon de Jules Massenet
1887 : Création du Roi malgré lui d’Emmanuel Chabrier
1887 : Dans la nuit du 25 au 26 mai, la deuxième Salle Favart est détruite par un incendie lors d’une représentation de Mignon d’Ambroise Thomas. L’Opéra-Comique se fixe place du Châtelet, dans l’ancien Théâtre Lyrique (actuel Théâtre de la Ville).
1888 : Création du Roi d’Ys d’Édouard Lalo
1890 : Création de La Basoche d’André Messager
1891 : Création du Rêve d’Alfred Bruneau
1893 : L’État décide de reconstruire une salle pour l’Opéra-Comique sur le même lieu.
1898 : La troisième Salle Favart, « oeuvre de l’architecte Louis Bernier, est inaugurée par le Président de la République Félix Faure. Son directeur Albert Carré et son directeur musical André Messager poursuivent l’élargissement du répertoire et la modernisation des pratiques scéniques ».
1899 : « Pour les créations d’oeuvres nouvelles, André Messager impose la disposition symphonique de l’orchestre, orienté vers la salle par le recul du pupitre de direction contre la balustrade de la fosse. Il appliquera cette formule à l’Opéra en 1908 ».
1899 : Création de Cendrillon de Jules Massenet
1900 : Création de Louise de Gustave Charpentier
1902 : Création de Pelléas et Mélisande de Claude Debussy.



France, Belgique, 2018, 44 min
Avec  Samuel Hasselhorn (Baryton), Eva Zaïcik (Mezzo-soprano), 
Direction musicale : Alain Altinoglu
Orchestre : Orchestre symphonique de la Monnaie
Sur Arte le 4 août 2019 à 18 h 25
Visuels :
La finaliste Eva Zaïcik
Le finaliste Samuel Hasselhorn

© CMIREB

"Carmen, Violetta, Mimi, romantiques et fatales" par Cyril Leuthy
France, 2017, 53 min
Sur Arte le 2 août 2019 à 5 h
Visuels :
Les trois héroïnes du documentaire " Carmen, Violetta, Mimi, romantiques et fatales" (2017) de Cyril Leuthy
Les compositeurs Giacomo Puccini (La Bohème), Georges Bizet (Carmen) et Giuseppe Verdi (la traviata)
Les trois héroines des trois opéras les plus joués dans le monde: Mimi, Carmen et Violetta
© Telmondis

"Le mythe de Carmen" (Mythos Carmen), réalisé par Axel Brüggemann 
Signed Media, 2017, 44 min.
Sur Arte le 21 janvier 2018 à 23 h 40
Visuels :
L'héroïne d'opéra Carmen de Georges Bizet (représentée ici par Béatrice Uria-Monzon) est une femme mortelle et émancipée à la fois
Béatrice Uria-Monzon dans le rôle de Carmen et Roberto Alagna comme Don José dans la production moderne du réalisateur espagnol Calixto Bieito.
© Antoni Bofill

Carmen de Bizet, en direct d'Aix-en-Provence
Mise en scène par Dmitri Tcherniakov 
Direction musicale : Pablo Heras-Casado
Costumes  :Elena Zaitseva
Choeur : Chœur Aedes, Maîtrise des Bouches-du-Rhône
Composition : Georges Bizet
Livret : Henri Meilhac & Ludovic Halévy
Lumière : Gleb Filshtinsky
Mise en scène : Dmitri Tcherniakov
Orchestre : Orchestre de Paris
Présentation : Edouard Fouré Caul-Futy
Réalisation : Andy Sommer
Avec : Stéphanie d'Oustrac (Carmen), Michael Fabiano (Don José), Elsa Dreisig (Micaëla), Michael Todd Simpson (Escamillo), Gabrielle Philiponet (Frasquita), Virginie Verrez (Mercédès), Christian Helmer (Zuniga), Pierre Doyen (Moralès), Guillaume Andrieux (Le Dancaïre), Mathias Vidal (Le Remendado).

Sur Arte le 6 juillet 2017 
Visuels :
Carmen de Georges Bizet mis en scène par Dmitri Tcherniakov au Festival d' Aix-en-Provence en 2017, réalisé par Andy Sommer

© Patrick Berger/ ArtComPress

« Si l’Opéra Comique m’était conté. Soirée du Tricentenaire » par François Roussillon
France, 2014, 93 min
Direction musicale : François-Xavier Roth
Chœur : Chœur de chambre Accentus
Composition : Hector Berlioz, Jacques Offenbach, Claude Debussy, Maurice Ravel, Francis Poulenc, Georges Bizet
Mise en scène : Michel Fau
Orchestre : Les Siècles
Avec Jérôme Deschamps (Pelléas), Anna Caterina Antonacci (soprano), Patricia Petibon (soprano), Sabine Devieilhe (soprano), Stéphane Degout (bariton)
Sur Arte le 17 janvier 2017 à 1 h 30

« Opéra Comique, naissance d'une académie » par Rémi Lainé
France, 2014, 53 min
Sur Arte le 17 janvier 2017 à 3 h 05
Visuels : 
Façade de l’Opéra comique
© Sabine Harrtl & Olaf-Daniel
Salle Favart
© DR

Jusqu’au 28 juin 2015
Avenue Winston-Churchill - 75008 Paris
Tel: 01 53 43 40 00
Du mardi au dimanche de 10 h à 18 h. Nocturne le vendredi jusqu’à 21h
Visuels :
Affiche
Lucien Doucet, Célestine Galli Marié, cantatrice dans le rôle de Carmen, huile sur toile, 1884 © BnF
et Studio Reutlinger, Mlle Garden dans Pelléas et Mélisande, photographie, vers 1904 © BnF

L’Opéra Comique
© Opéra Comique

Jean Béraud
Les coulisses de l’Opéra, 1889
Huile sur bois, 38 x54 cm
© Musée Carnavalet / Roger-Viollet

La salle Favart de l’Opéra Comique
© Sabine Hartl et Olaf-Daniel Meyer / Citadelles et Mazenod

La salle Favart de l’Opéra Comique
© Sabine Hartl et Olaf-Daniel Meyer / Citadelles et Mazenod

L’Opéra Comique
© Opéra Comique

Henri Lucien Doucet, Célestine
Galli Marié, dans le rôle de
Carmen, huile sur toile, 1884, Paris, bibliothèque-musée de l’Opéra
© BnF

Charles Giron, Taskin dans le rôle du Docteur
Miracle des Contes d’Hoffmann, huile sur toile.
150 x 92 cm, Couilly-Pont-aux-Dames, Mutuelle des artistes
© Hugo Rémusat

Antonin-Marie Chatinière
Affiche : Théâtre National de l’Opéra-Comique,
Lakmé, opéra en trois actes, 1883
Lithographie, 80 x 60 cm, Paris, bibliothèque-musée de l’Opéra © BnF

Gustave Moreau, Une femme poète
Huile sur toile, 98 x 97 cm, Paris, Musée Gustave
Moreau, © RMN-Grand Palais / René-Gabriel Ojéda

Antonin-Marie Chatinière, Affiche de Manon,
1884. Lithographie, 85 x 58 cm, Paris, Bibliothèque-musée de l’Opéra, © Bnf

Paul Thiriat, Incendie de l’Opéra Comique, vue depuis les toits, 1887, Paris, musée Carnavalet.
Gouache, 51,5 x 39,5 cm
© Musée Carnavalet / Roger-Viollet

L’Opéra Comique
© Opéra Comique

La salle Favart de l’Opéra Comique
© Sabine Hartl et Olaf-Daniel Meyer / Citadelles et Mazenod

Lithographie tirage en noir, 77 x 56 cm, Paris, Bibliothèque-musée de l’Opéra.
© BnF

Georges Rochegrosse, Affiche : Louise, 1900
Lithographie en couleurs, 89 x 63 cm, paris, Bibliothèque-musée de l’Opéra © BnF

Studio Reutlinger, Mlle Garden dans Pelléas et Mélisande, vers 1904, photographie, Paris, Bibliothèque-
musée de l’Opéra © BnF

Marianne Stokes, Mélisande, vers 1895
Huile sur toile, 87 x 52 cm, Cologne, Wallraf-Richartzuseum & Foundation Corbound
© Rheinisches Bildarchiv Köln, Meier, Wolfgang F.

Costume d'après Charles Bianchini pour le rôle de Mélisande dans Pelléas et Mélisande en 1952 à l'Opéra Comique. © CNCS/Pascal François

Articles sur ce blog concernant :
Les citations et les repères chronologiques proviennent des dossiers de presse. Cet article a été publié le 28 juin 2015, puis les 29 juillet 2016, 16 janvier et 4 juillet 2017 - le 6 juillet 2017, Arte diffusera Carmen de Bizet,  en direct d'Aix-en-Provence -, 22 janvier et 30 août 2018.

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