Citations

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« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
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« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

mardi 6 juillet 2021

Génocide au Cambodge par les Khmers rouges


Les Khmers rouges, communistes maoïstes, ont commis de 1975 à 1979 un génocide au Cambodge, en tuant environ 1,7 million de Cambodgiens, soit un cinquième de la population. Rithy Panh a réalisé des documentaires sur ce génocide commis par des communistes loués par de nombreux journalistes occidentaux. Arte diffusera le 10 juillet 2021, dans le cadre de Mystères d'archives (Verschollene Filmschätze), "1980. Marche pour la survie du Cambodge" (1980. Marsch für das Überleben Kambodschas), de Serge Viallet.


Le Cambodge fut un protectorat français (1863-1953) dans l'Asie du Sud-Est, à l'époque où l'Indochine française comprenait le Tonkin, l'Annam, la Cochinchine (colonie), le Laos, le Cambodge et  Kouang-Tchéou-Wan (concession).

De 1975 à 1979, la dictature des Khmers rouges a imposé une autarcie et voulu créer une société communiste.

Le Programme d'Étude sur le génocide cambodgien de l'université Yale considère que ce régime totalitaire a assassiné environ 1,7 million de Cambodgiens, soit plus de 20 % de la population du Cambodge.

En 1979, l'invasion du Cambodge par le Vietnam met fin à ce pouvoir. Les Khmers rouges mènent une guérilla, et disparaissent vers la fin des années 1990.

« 1978. Les images retrouvées des Khmers rouges » 
Arte diffusa « 1978. Les images retrouvées des Khmers rouges » (1978. Die wiederaufgefundenen Bilder der Roten Khmer), documentaire de Pierre Catalan et Serge Viallet, le 10 juin 2016. Dans le cadre de Mystères d’archives (Verschollene Filmschätze), les documentaristes révèlent des images inédites terrifiantes sur le génocide des Cambodgiens par les Khmers rouges.

Le 18 avril 1975, le quotidien français Libération titrait « Phnom Penh : sept jours de fête pour une libération ». Plus de deux millions d'habitants de la capitale du Cambodge ont été contraints de la quitter en trois jours. Les Khmers rouges ont fait table rase du passé. Ils sombrent dans une "folie meurtrière". Ses frontières avec le Laos et le Vietnam sont fermées.

De 1975 à 1979, année de l’invasion du Cambodge par le Vietnam, les Khmers rouges, proches de la Chine communiste de Mao, ont commis un génocide d’inspiration communiste dans le Kampuchéa démocratique. L’un des fomenteurs de ce génocide qui a fait environ 1,7 million de Cambodgiens sur sept millions d'habitants, soit plus d’un cinquième de la population, a été Pol Pot. Les causes de mortalité : assassinats, famine, épuisement.

« Tombé aux mains des Khmers rouges en avril 1975, le Cambodge a été totalement isolé du monde pendant quatre ans. À Phnom Penh comme ailleurs dans le pays, il n'y avait plus de cinémas. Pourtant, les Khmers rouges ont tourné de nombreux films de propagande. À quel public étaient destinées ces « mises en scène » ?

Un film en noir et blanc a été tourné dans le nord ouest du pays où hommes et femmes, ainsi qu'enfants sont contraints à construire un barrage. Interdit de parler sur ces chantiers de travaux forcés de l'aube à la nuit, à la lumière des néons. "Trahir l'Ankar conduit à la mort". Le "peuple ancien" a "droit à quelques privilèges" : porter des vestes à boutons, fumer, etc. Le "peuple nouveau" était urbain : certains portent encore des tongs aux pieds. Le film date donc du début du régime. La "famine fait des ravages sous ce régime de terreur". Les mots "papa" et "maman" sont interdits. Les enfants sont particulièrement craints car ils détiennent droit de vie et de mort sur les adultes. La production de riz s'effondre, et une grande partie est exportée vers la Chine.

Des images en couleurs du stade olympique montrent des réunions du nouveau régime. Y accourent des membres du "peuple ancien", souvent analphabètes. Aucun spectateur ne porte de lunettes ou de montres, car celles-ci révéleraient une éventuelle trahison. Les formes de politesse sont abolies. Le "nous" est substitué au "je". L'écharpe à carreaux signale le "peuple ancien". Cette réunion vise à montrer l'unanimité et l'organisation au sein du parti. Un défilé militaire se déroule sans grand public. Les combattantes arborent des Kalachnikofs, armes soviétiques. Les chars semblent américains. Plusieurs cameramen filment l’événement au cœur de la ville, jadis animée. En 1966, le prince Sihanouk y avait reçu le président français, Charles de Gaulle. Quelques années après, le Cambodge était impliqué dans la guerre du Vietnam. Les Khmers rouges recrutaient leurs soldats dans ces régions bombardées. Les ruraux avaient fui pour rejoindre la capitale.

Dans un centre de formation, des adolescents suivent attentivement des cours pour "défendre la patrie". Certains ont été des enfants-soldats. Un matériel fourni par la Chine filme ces scènes, notamment chez un médecin.

En 1978, à l'initiative de Pol Pot, un film retrace la victoire de ses troupes, avec l'aide de tribus, sur celles de Lon Nol. Pol Pot avait donné des directives cinématographiques précises. C'est l'année de la seule interview de Pol Pot. Son choix : un média yougoslave. Une opération de communication

"Culte du secret et obsession de la trahison" caractérisent le régime des Khmers rouges et de son chef. En 1976, lors d'une réunion, la caméra filme l'évitement d'un serrement de mains entre dirigeants du parti. Signe annonciateur d'une prochaine élimination physique du dirigeant et de sa famille.

Peu de dirigeants étrangers se rendent au Cambodge sous les Khmers rouges. Pol Pot veut la guerre contre le Vietnam. La médiation du Laos s'avère inutile.

Presse française aveuglée
"Trois jours à peine après la chute de Phnom Penh, les gendarmes français livraient aux Khmers rouges, qui le tueront, le président de l'Assemblée nationale du Cambodge. Et il ne fut pas un cas unique. Sur ce point, le discours lénifiant de la France giscardienne rejoignait celui du Monde et de la plupart des organes de presse, y compris Le Nouvel Observateur. Cette complaisance explique aussi l'étrange amnésie qui va suivre. Alors que, dès les 24-25 octobre 1975, dans La Croix, puis les 17-18 février 1976, dans Le Monde, le père François Ponchaud évoquait les exactions du régime (évacuation des villes, exécutions systématiques, travaux forcés et, déjà, famine), son témoignage demeurait largement inaudible. Un Jean Lacouture refusait toujours d'y croire, confiera-t-il encore en 2001, parce que deux articles en avaient parlé dans Le Figaro. Sans doute ne lisait-il pas non plus Ouest France, qui, en février-mars de la même année, sortait aussi des témoignages accablants. Ni l'écrivain cambodgien Soth Polin et le reporter de l'agence Reuters Bernard Hamel, qui, en juillet-août 1976, publiaient les premiers témoignages sur le génocide en cours. La vérité devenant irréfutable, et bravant l'ire de Georges Marchais, Lionel Jospin sauvera l'honneur en donnant au Monde "Les socialistes et le Cambodge", tribune appelant à croire les réfugiés et demandant : "Où les camps de concentration ont-ils jamais créé un homme nouveau ?" Lacouture publiera Survive le peuple cambodgien ! et avouera en 1978 à Valeurs actuelles sa honte d'avoir été complice de loin, d'avoir "péché par ignorance et naïveté". Mais, le premier aussi, il emploiera le vocable douteux d'"autogénocide" (repris par le linguiste américain Chomsky !) et se risquera à parler de "national-socialisme de rizière" plutôt que, tout simplement, de maoïsme ou de communisme". (L'Express, 10 janvier 2012)

Des aveuglements récurrents d'intellectuels et de politiciens de la gauche française.

"La Déchirure"
En 1984, La Déchirure (The Killing Fields), film britannique oscarisé de Roland Joffé, avait montré les horreurs de ce régime, son mode de fonctionnement inhumain.

Interprété par Sam Waterston (Sydney Schanberg), Haing S. Ngor (Dith Pran), John Malkovich (Al Rockoff) et Julian Sands (Jon Swain), il s’inspirait de l’histoire du journaliste Sydney Schanberg, distingué par le Prix Pulitzer en 1976, et s’attachait à Dith Pran, en montrant le fonctionnement destructeur du régime génocidaire : embrigadement des enfants séparés de leurs parents, destruction de la famille, extermination d'un peuple contraint de quitter les villes pour survivre dans des campagnes pour sa « rééducation ».

"L'enfer khmer rouge: une enfance au Cambodge"
En 1997, les éditions L'Harmattan ont publié "L'enfer khmer rouge : une enfance au Cambodge" de Malay Phcar et Yves Guiheneuf, avec une préface e de François Ponchaud.

"Brutalement un orage éclata accompagné d'un vent violent. En quelques minutes, l'air devint glacial. Etant le seul enfant, je m'accroupis dans l'eau de la rizière pour avoir moins froid et être un peu à l'abri du vent. Aussitôt le garde me vit. Il accourut une lanière à la main en criant que j'étais un paresseux et qu'il allait me fouetter. Je hurlai de peur en lui expliquant que je me remettais tout de suite au travail, et en le suppliant de ne pas me frapper. Mais le Khmer rouge paraissait décidé à faire usage de sa lanière. C'est alors que Môm, ma belle-sœur, s'interposa entre le garde et moi. Elle le saisit par le poignet et, le regardant droit dans les yeux, elle le défia, semblant dire : "Si tu le touches, je te tue". 

"A travers le récit de son enfance, Malay Phcar, nous entraîne dans l'univers khmer rouge ou plutôt dans " L'Enfer khmer rouge ". Tout commence le 17 avril 1975, alors que Malay a 8 ans. Ce jour-là, les Khmers rouges prennent Phnom Penh, la capitale du Cambodge, où jusqu'ici Malay menait une enfance heureuse. Brutalement c'est le drame. Les Khmers rouges donnent l'ordre insensé d'évacuer les trois millions d'habitants de la ville en quelques heures. Pendant quatre années, 1360 jours exactement, les soldats de l'Angkar vont faire régner la terreur." 

"Ce livre est le témoignage poignant d'un enfant pris dans la tourmente et, comme le souligne le Père François Ponchaud, il dénonce " ce régime kafkaïen dans lequel tout sentiment humain semblait avoir déserté les responsables ".

"Les larmes interdites" 
En 2011, Plon a publié "Les larmes interdites" de Sophie Ansel et Navy Soth. "Le témoignage bouleversant d'une enfant ayant survécu à l'enfer des Khmers rouges: un récit qu'on ne pourra oublier." Prix "Ile aux Livres" 2011.

"Sophie Ansel est journaliste, scénariste, écrivain et réalisatrice. Elle a vécu plusieurs années en Asie. Navy Soth, La Noireaude, parcourt le monde depuis 30 ans. Elle a débuté sa vie au milieu de l'enfer, a perdu des êtres chers et est arrivée en France au début des années 80. Elle a laissé son passé derrière elle et est maman d'une petite fille."

Extraits :
"En 1973, je suis venue au monde, quelque part dans une jungle féerique du Cambodge. J'étais une petite fille prête à dévorer la vie, amoureuse de son papa.
Cette histoire aurait pu être celle d'un conte de fées. Mais les adultes n'aiment pas les contes de fées, et Pol Pot avait de grands desseins pour un Cambodge nouveau. Haute comme trois pommes, c'est ainsi que j'entrai par la force, la peur et la violence dans l'univers des grands.
La révolution était en marche et les enfants devaient devenir des adultes. 
J'avais deux ans, un nouveau père et une nouvelle mère uniques : l'Angkar. J'apprenais un jeu qui me dépassait où, pour ne pas perdre, il fallait survivre. Où, pour survivre, il fallait résister à une mort qui offrait pourtant plus de douceur que la vie. Dans ce jeu, le rire était criminel mais les larmes étaient interdites.
Le génocide était en route."

"La fourmi
«Mais je n'ai nulle envie d'aller chez les fous, fit remarquer Alice.
- Oh ! vous ne sauriez faire autrement, dit le Chat : Ici, tout le monde est fou. Je suis fou. Vous êtes folle.
- Comment savez-vous que je suis folle ? demanda Alice.
- Il faut croire que vous l'êtes, répondit le Chat; sinon, vous ne seriez pas venue ici.»
Lewis Carroll, Les Aventures d'Alice au pays des merveilles.

Entre 1976 et 1978, un jour comme un autre, dans un village cambodgien comme un autre...
- Traître ! Lâche !
Ces paroles grondent. Un éclair d'effroi me traverse le corps. Mes fesses efflanquées se serrent sur la souche de bois où je me repose, à l'extérieur de notre cabane. Je cesse de gratter mes croûtes, une dernière plaque de terre mêlée au pus de mes plaies tombe sur le sol.
- Voleur !
La menace se rapproche. Tout se fige. Le rugissement terrifiant a anéanti la vie qui frémissait autour de moi il y a quelques instants. Je voudrais m'enfuir mais je suis pétrifiée.
- Raarggggghhh ! Traître ! Espion !
La sueur perle sur mon front. Mon coeur se met à palpiter. Tous mes sens sont à vif. Dois-je courir à la hutte ou plonger à terre ? Me cacher derrière les arbustes qui longent le chemin ? Surtout ne pas crier.
Des pas lourds s'approchent. Ce sont eux. Les soldats de l'Angkar. Les Pyjamas Noirs. Eux seuls ont le pouvoir de gronder aussi fort, eux seuls ont le droit d'exprimer leur colère... Ils le sont, en colère ! Et ils foncent vers ma maison...
- Tu as trahi ! hurlent-ils.
La colère de l'Angkar est fatale. Trahir, c'est disparaître."

Rithy Panh
Rescapé de ce régime totalitaire criminel, Rithy Panh a réalisé des documentaires - S21, la machine de mort Khmère rouge (2003), Duch, le Maître des forges de l'enfer (2011), L'Image manquante (2013) - sur ce génocide perpétré par un régime ayant imposé l’autarcie, et sur les survivants.

Il a aussi co-écrit avec Christophe Bataille "L'Elimination". "A douze ans, je perds toute ma famille en quelques semaines. Mon grand frère, parti seul à pied vers notre maison de Phnom Penh. Mon beau-frère médecin, exécuté au bord de la route. Mon père, qui décide de ne plus s'alimenter. Ma mère, qui s'allonge à l'hôpital de Mong, dans le lit où vient de mourir une de ses filles. Mes nièces et mes neveux. Tous emportés par la cruauté et la folie khmère rouge. J'étais sans famille. J'étais sans nom. J'étais sans visage. Ainsi je suis resté vivant, car je n'étais plus rien." Trente ans après la fin du régime de Pol Pot, qui fit 1.7 millions de morts, l'enfant est devenu un cinéaste réputé. Il décide de questionner un des grands responsables de ce génocide : Duch, qui n'est ni un homme banal ni un démon, mais un organisateur éduqué, un bourreau qui parle, oublie, ment, explique, travaille sa légende. L'élimination est le récit de cette confrontation hors du commun. Un grand livre sur notre histoire, sur la question du mal, dans la lignée de Si c'est un homme de Primo Levi, et de La nuit d'Elie Wiesel."

« Exil » est un documentaire de Rithy Panh. « Après « L’image manquante », déchirante et lumineuse traversée d'une enfance brisée par la sanguinaire révolution de Pol Pot, le cinéaste franco-cambodgien Rithy Panh fouille à nouveau ses souvenirs du génocide khmer rouge dans ce film qui vogue à la frontière du rêve et de la réalité, de l’écriture documentaire et poétique ».

« Un très jeune homme vêtu de noir dans une maisonnette aux parois de bambou. Passent près de lui, comme en rêve, des images d'archives du Cambodge des années 1960 et du régime des Khmers rouges, une nuée de corbeaux de papier, la lune et les planètes, des photographies anciennes, une série d'objets. Parfois, la caresse d'une main féminine se pose sur la joue de cet homme enfant désespérément solitaire, tenaillé par la faim et à demi prostré. Il figure le cinéaste lui-même. Jeté à 11 ans sur les routes avec les siens et l'ensemble des habitants de Phnom Penh, lorsque les Khmers rouges s’emparent de la capitale en 1975, Rithy Panh a survécu, contrairement à une grande partie de sa famille, parvenant à fuir pour gagner un camp de réfugiés en 1979, d'où il part pour la France l'année suivante ».

« Rithy Panh continue d'explorer sa propre mémoire à vif d'un génocide qui a fait quelque 2 millions de victimes, auxquelles il n'a cessé de chercher à rendre justice dans son œuvre. Au-delà du pays natal à jamais perdu, l'exil qu'il évoque dans ce film poème, c'est à la fois la douleur du rescapé, « mort et vif », amputé d'une partie de lui-même, la nostalgie et l'impossible deuil d'un passé anéanti, l'absence au monde qui en découle. Mais par la magie de ses mots et de ses images, le cinéma devient un langage assez puissant pour renouer le lien avec le réel, les êtres et les choses aimés. On ne cesse de creuser la terre dans Exil, des perpétuels chantiers des Khmers rouges filmés quarante ans plus tôt aux trésors exhumés un à un par le personnage principal, comme la métaphore d'un douloureux retour vers la lumière. « Tu vois, ma mère, je t'attendais… » Citant Mao Zedong, Robespierre ou Alain Badiou, mais aussi René Char, Baudelaire et Apollinaire, la voix off, écrite une fois encore par Christophe Bataille, qui a cosigné avec Rithy Panh son livre autobiographique L'élimination (Grasset), mêle avec lyrisme une réflexion sur la révolution qui dévore les vies humaines (« La pureté, c'est la terreur… ») et une méditation intime où passent les souvenirs, les sensations, les sentiments ».

"Du 23 au 27 juin 2019, ARTE bouscule sa grille pour accueillir la quatrième édition du festival du documentaire, entièrement dédié aux grands documentaires : onze coproductions ARTE signées par des réalisateurs de renom, pour la plupart sorties en salles ou primées dans les grands festivals internationaux. Le documentaire, dans toute sa diversité formelle, son foisonnement de sujets, son inventivité, fait partie de l’essence d’ARTE. C’est le genre emblématique de l’ouverture au monde, qui est en même temps agrandissement de l’univers de chacun. À la fois en prise avec le réel tout en le transfigurant, à travers un regard esthétique et singulier, il donne à voir l’invisible, l’autre, le différent, l’inédit. C’est l’ambition de ce festival que de valoriser toute la palette de ce genre puissant auquel ARTE est particulièrement attachée. ARTE présente à l’antenne des films particulièrement marquants qui, chacun à leur façon, nous dévoilent ce que l’on ne voit pas d’ordinaire ou plus. De Visages Villages d’Agnès Varda et JR primé à Cannes en 2017 et dans de nombreux festivals, à Les tombeaux sans noms de Rithy Panh, sélectionné entre autres à la Mostra de Venise en 2018, en passant par Wrong Elements de Jonathan Littel sélectionné à Cannes en 2016, ou bien encore" « Gaza, la vie » par Garry Keane.

Arte diffusa "Les tombeaux sans noms" (Gräber ohne Namen) de Rithy Panh. "Sur les lieux où il fut déporté, enfant, par les Khmers rouges et où neuf des siens ont péri, Rithy Panh invoque les morts par les images, les mots, les rites. Une méditation bouleversante sur le deuil impossible engendré par le génocide."

"J’ai fait ce voyage pour m’asseoir avec les morts. Et pour parler avec eux dans les pagodes, au bord des routes et des fleuves […] Je suis retourné régulièrement dans ces lieux. Je n'ai pas trouvé de trace des tombes de mon père et de mes neveux. Ni des fosses communes où furent ensevelies ma mère et mes sœurs." En 1975, Rithy Panh, alors âgé de 11 ans, fut déporté par les Khmers rouges avec les siens dans une plaine agricole de la province de Battambang, dans le nord-ouest du Cambodge. La plupart ont succombé aux travaux forcés, à la famine et aux exactions de tous ordres infligés au "peuple nouveau", comme le régime de Pol Pot désignait les habitants des villes et des régions conquises."

"Continuant à sonder l'histoire d'un génocide qui a fait quelque 2 millions de morts, et le deuil impossible que ces quatre années de terreur ont légué aux rescapés, le cinéaste approfondit avec Les tombeaux sans noms une exploration autobiographique entreprise avec L'image manquante, puis Exil. Ce nouveau chemin qu'il essaie de tracer vers les disparus passe par des cérémonies bouddhiques, destinées à communiquer avec les âmes errantes qui n'ont pu être incinérées selon les rites."

"Vay Tchol" ("frappé et jeté") : telle était la sanction promise à tous, rappelle un paysan, aussi chenu que les bonzes et les nonnes qui accompagnent Rithy Panh dans sa quête. Pour invoquer les êtres aimés et le manque lancinant par lequel ils survivent en lui, le réalisateur interroge la "plaine linceul", entre rizières et forêts, où la violence et la douleur restent enfouies au pied des arbres, dans la terre et les fondrières".

"Entre les mains parcheminées des officiants, un fil de coton, une figurine modelée dans une feuille de bananier, un œuf, une calebasse de fer, un cierge ou des bannières flottant dans le vent suggèrent aussi puissamment que les photos de famille le lien ténu qui peut se tisser entre morts et vivants. En écho aux incantations qui cherchent et qui consolent, les réminiscences imagées des vieux témoins rappellent ce qu'il s'est passé en ces lieux. Si ce film en forme de méditation bouleverse une fois encore, c'est aussi par la manière dont il tente de capter l'âme d'un pays meurtri, pour offrir au travers des rites, de la nature, de la parole, sinon l'apaisement, au moins l'acceptation de ce qui fut."

"1980. Marche pour la survie du Cambodge
Arte diffusera le 10 juillet 2021, dans le cadre de Mystères d'archives (Verschollene Filmschätze), "1980. Marche pour la survie du Cambodge" (1980. Marsch für das Überleben Kambodschas), de Serge Viallet.

"En 1980, un an après avoir occupé le Cambodge, le Viêtnam est accusé d'y organiser une famine à grande échelle".

"Près de sa frontière avec la Thaïlande, les ONG Médecins sans frontières et International Rescue Committee organisent une marche à laquelle participent de nombreuses personnalités".


"Les tombeaux sans noms" de Rithy Panh
France, 2018, 116 min
Sur Arte le 27 juin 2019 à 23 h 10

Visuels :
Dans le documentaire "Les tombeaux sans noms" de Rithy Panh, le réalisateur part sur les traces des victimes des khmers rouges au Cambodge
Credit : © Cdp/ D.R.
Photos de membres de la famille de Rithy Panh, victimes des khmers rouges au Cambodge, dans son documentaire "Les tombeaux sans noms"
Credit : © Cdp/ D.R.

Sur Arte les 16 décembre 2017 à 17 h 55 et 10 juillet 2021 à 16 h 50
Visuels :
Mercredi 6 février 1980. Thaïlande. Province de Aranyaprathet. A la frontière entre la Thaïlande et le Cambodge. Une des banderoles des participants à la Marche pour la survie du Cambodge
© INA

6 Février 1980. Claude Malhuret,president de MSF France de 1978 a 1979, Xavier Emmanuelli, president de 1979 a 1980, et Rony Brauman, president de 1982 a 1994, pendant la "Marche pour la survie du Cambodge", a la frontiere entre le Cambodge et la Thailande, pres d'Aranya-Prathet. En tête de la marche, une banderole en 3 langues : "Cambodge, marche pour la survie. Permettez-nous d'aider le peuple khmer."
Claude Malhuret, president of MSF France from 1978 to 1979, Xavier Emmanuelli, president from 1979 to 1980, and Rony Brauman, president from 1982 to 1994 during the 'march for the survival of Cambodia', on the Thai border in 1980.
© MSF

« Exil » par Rithy Panh
2015, 77 min
Sur Arte les 6 juin 2017 à 22 h 20 et 2 juillet 2019 à 2 h 20
Visuels : © Film Distribution
Le réalisateur Rithy Panh
L’exil est un abandon, une solitude terrifiante. Dans l’exil, on se perd, on souffre, on s’efface. Mais on peut retrouver les siens, aussi. Au pays des mots, des images, dans la rêverie qui n’est pas seulement enfantine. Tout commence par l’exil et rien ne vaut que par lui. Le film "Exil"est une méditation sur l’absence ; sur la solitude intérieure, géographique, politique.

« 1978. Les images retrouvées des Khmers rouges  », de Pierre Catalan et Serge Viallet
2010, 26 min
Sur Arte le 10 juin 2016 à 12 h 50
Visuels :
Frontière entre le Cambodge et la Thaïlande. Réfugiés khmers

Articles sur ce blog concernant :
Les citations non sourcées proviennent d'Arte. Cet article a été publié le 10 juin 2016, puis les 6 juin et 16 décembre 2017, 28 juin 2019.

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