Citations

« Le goût de la vérité n’empêche pas la prise de parti. » (Albert Camus)
« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
« Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. » (Vladimir Jankélévitch)
« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

jeudi 23 août 2018

Helmar Lerski (1871-1956). Pionnier de la lumière


Le musée d’art et d’histoire du Judaïsme (mahJ) présente l’exposition « Helmar Lerski (1871-1956). Pionnier de la lumière  ». Né à Strasbourg de parents polonais, Helmar Lerski émigre en 1893 aux Etats-Unis où il devient acteur, puis photographe. En 1915, il va à Berlin où il s’affirme en talentueux chef opérateur et spécialiste des effets spéciaux de cinéma. Revenu à la photographie en 1927, il se rend en 1932 en Eretz Israël (Terre d'Israël), alors Palestine mandataire, et documente en photographies ainsi qu'en films la vie quotidienne, laborieuse, des Juifs pionniers. Des portraits photographiés comme des paysages aux contrastes Noir et blanc accentués. En 1978, Helmar Lerski se fixe à Zurich (Suisse).


For heaven’s sake, dear Mr. Meidner, you aren’t going to throw down your brush and palette and
become a photographer, are you? …Don’t take offense at the machine. Here too, it’s the spirit that
creates value… Photography is something great. It doesn’t do any good to step back and cry. Join
in, but hurry! Photography marches on!” - Helmar Lerski to the painter Ludwig Meidner, 1930

Pour ses vingt ans et le 70e anniversaire de la refondation de l’Etat d’Israël, le mahJ propose la première rétrospective  en France dédiée au photographe et cinéaste juif Helmar Lerski (1871-1956).

« Né en 1871 à Strasbourg (France) de parents juifs polonais, Israël Schmuklerski, dit « Helmar Lerski », émigre à 22 ans aux Etats-Unis, où il mène une carrière de comédien avant de se lancer dans la photographie. Il s’installe à Berlin en 1915, travaillant comme chef opérateur et spécialiste des effets spéciaux de cinéma, notamment pour Métropolis de Fritz Lang. Il revient en 1927 à la photographie, avec des portraits de célébrités et de gens ordinaires (Têtes de tous les jours), dans lesquels il exploite en virtuose sa maîtrise de la lumière. En 1929, il participe à Stuttgart à la grande exposition « Film und Foto », manifeste de la Nouvelle Vision (Neues Sehen). En 1932, il s’installe en Palestine, où il réalise des films – dont Awodah [Labeur], 1933 – et une œuvre photographique fortement marquée par l’esthétique expressionniste (Métamorphoses par la lumière). Sa série Arabes et juifs témoigne d’un intérêt puissant porté à la diversité humaine de la Palestine, véritable manifeste de tolérance et de respect de l’autre. Quelques mois avant la création de l’Etat d’Israël, Lerski s’installe à Zurich où il finit ses jours en 1956 ». Il s'agit de la Palestine mandataire ou Eretz Israël sous mandat britannique.

En 200 œuvres du Folkwang Museum d’Essen et du mahJ, cette exposition « dévoile une partie importante du fonds exceptionnel de 435 épreuves anciennes - tirages anciens et plaques de verre - acquises par le musée en 2015 grâce à une souscription publique ». Cet ensemble constitue l'un des plus importants fonds sur l'artiste. Cet achat a été réalisé grâce à la contribution de 330 donateurs et aux concours du Fonds du Patrimoine, du Fonds régional d'acquisition des musées d'Île-de-France, du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), de la Fondation Pro mahJ, de la fondation Fams (sous l'égide de la fondation du Judaïsme français) et de la Fondation Rothschild-Institut Alain de Rothschild.

On « y découvre un travail photographique d’une grande cohérence artistique, où la lumière occupe une place centrale. Principalement auteur de portraits, Lerski use de chambres exigeant des négatifs de grande taille (jusqu’à 24 x 30 cm), de miroirs et d’accessoires sophistiqués, pour explorer les reliefs des visages comme autant de paysages, modelant brillances et contrastes afin de faire surgir l’âme de ses sujets ».

L’exposition « éclaire également le parcours de Lerski, emblématique de celui de nombre d’intellectuels et d’artistes allemands et autrichiens qui émigrèrent en Palestine dans les années 1930. Ils y introduisirent des courants intellectuels et artistiques d’avant-garde, dont la psychanalyse et le Bauhaus sont parmi les exemples les plus remarquables. L’exposition fait aussi découvrir l’œuvre cinématographique de l’un des précurseurs du futur cinéma israélien, qui constitua la première école de cinéma en Palestine à l’instigation de Golda Meir, sous l’égide de la Histadrout (syndicat des travailleurs juifs). »

Les films sur le travail harassant des Juifs sionistes en Eretz Israël sont très émouvants. Ces images de pionniers juifs travaillant une terre aride sont remarquables.

L’exposition a pour commissaire général Paul Salmona, directeur du mahJ, et commissaire Nicolas Feuillie, responsable des collections photographiques du mahJ. Elle a pour partenaires le Folkwang Museum à Essen, Libération, Télérama et Connaissance des Arts, et bénéficie du soutien de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, de la fondation Fams, sous l'égide de la Fondation du Judaïsme français, et de la Délégation interministérielle a la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les haines anti-LGBT  (DILCRAH).

Pour un musée juif, évoquer la « création » de l’Etat d’Israël au lieu de sa recréation, la « Palestine », au lieu de la Palestine mandataire, c’est pour le moins gênant.

Le mahJ se présente aussi "comme un acteur essentiel de la préservation du vivre-ensemble ». Une mission imposée par le ministère de la Culture qui ne définit pas ce « vivre ensemble ». Est-ce la mission d’un musée ? Cela risquerait-il d'interférer parfois avec la rigueur attendue d'un musée ?

La rétrospective « est accompagnée d’une série de manifestations : rencontre, table ronde, colloque, lecture musicale, projections, ciné-concert, parcours inter-musées, activités pour le jeune public... »

Le colloque avait pour titre « Le sionisme. Réflexions sur l’histoire d’une idée en action » (13-15 juin 2018) : « Le sionisme est devenu un objet d’études scientifiques. Cependant, en dehors du cercle des spécialistes, il reste peu et mal connu. Pour les profanes, il est surtout un champ d’affrontements idéologiques. Un débat que ce colloque entend dépassionner. » Placé sous la direction d’Elie Barnavi, historien, conseiller scientifique auprès du musée de l’Europe à Bruxelles, il réunissait Michel Abitbol, Université hébraïque de Jérusalem, Alexandre Adler, université Paris-Dauphine, Dov Alfon, Haaretz, Georges Bensoussan, Mémorial de la Shoah, Pierre Birnbaum, université Panthéon-Sorbonne, Denis Charbit, Université ouverte d’Israël, Alexandre Defay, École normale supérieure de Paris, Alain Greilsammer, université Bar-Ilan, Ran Halevi, CNRS-Centre de recherches politiques Raymond-Aron, Joël Kotek, conseiller au Parlement francophone bruxellois, Maurice Kriegel, EHESS, Francoise Saquer-Sabin, université Lille III, Dominique Schnapper, EHESS, Frédérique Schillo, Centre d’histoire de Sciences-Po, Antoine Sfeir, Les Cahiers de l’Orient, A. B. Yehoshua, écrivain, et Nicolas Weill, Le Monde. Pourquoi cette surreprésenation de la Gôche ou de JCall ?

Était prévue la lecture musicale de « Des voleurs dans la nuit (La Tour d’Ezra) » d’Arthur Koestler ; traduit de l’anglais par Hélène Claireau (Les Belles Lettres, 2016). Un livre lu par Noam Morgensztern, de la Comédie française, accompagné au piano par Jeremy Hababou. « Des voleurs dans la nuit relate la construction du kibboutz la Tour d’Ezra à la fin des années 1930. Arthur Koestler (1905-1983) s’inspire de son expérience en Palestine en 1926, pour ce roman publie en 1946, qui suit de quelques années le célèbre Zéro et l’Infini, ou il dénonçait la terreur stalinienne. »

A eu lieu la conférence « Portraits d’intellectuels juifs allemands en Palestine, 1929-1939 », par Dominique Bourel, CNRS, auteur notamment de Martin Buber. Sentinelle de l’Humanité (Albin Michel, 2015). « Nombre d’intellectuels et d’artistes, dont Helmar Lerski, participèrent à la cinquième alya, entre 1929 et 1933. Psychanalystes, architectes, chercheurs en sciences humaines, médecins, juristes et ingénieurs venus d’Allemagne et d’Europe centrale apportèrent avec eux les idées progressistes et l’avant-garde artistique, imprimant une marque décisive sur le futur Etat. Deux générations âpres, leurs traces sont encore présentes en Israël. »

Le mahj a aussi prévu la projection de films dans le cadre de « Helmar Lerski, une approche photographique du 7e art ». « De l’Allemagne des années 1920 à la Palestine mandataire, Lerski participe à l’avant-garde expressionniste allemande et aux premiers pas du futur cinéma israélien. Il travaille avec Fritz Lang, Paul Leni ou Robert Reinert, avant de réaliser ses propres films en Palestine de 1932 à 1948. Paul Dessau, compositeur de nombreuses musiques de scène pour Bertolt Brecht, est l’auteur de la musique de deux de ses films. » Étaient projetés « Sur les nerfs » (Nerven) de Robert Reinert (Allemagne, 1919, 110 min, muet, noir et blanc, VOSTF) - « Une peinture de la société allemande en révolution dans l’immédiat après-guerre, en proie à une épidémie causée par les horreurs du conflit » - et « Le Cabinet des figures de cire » (Das Wachsfi gurenkabinett) de Paul Leni et Leo Birinsky (Allemagne, 1924, 90 min, muet, noir et blanc, VOSTF) : « Le directeur d’un cabinet de mannequins de cire engage un écrivain pour raconter la vie de ses personnages. Trois récits naîtront, ceux d’Haroun al-Rachid, d’Ivan le Terrible et de Jack l’Éventreur. » Deux séances présentées par Bernard Eisenschitz.

Les courts métrages de Helmar Lerski réalisés en Palestine mandataire, « et pour la plupart commandés par la Fédération générale des travailleurs de la Terre d’Israël (Histadrout), ont été projetés accompagnés au piano par Jeremy Hababou : « La Terre » (Adamah) de Helmar Lerski (Palestine, 1947, 46 min, noir et blanc, VOSTF) - séance présentée par Ariel Schweitzer, historien du cinéma et critique aux Cahiers du cinéma.  Dans le cadre d’un ciné-concert, a été montré « Labeur » (Awodah) de Helmar Lerski (Palestine, fiction documentaire, 1935, 50 min, muet, noir et blanc, produit par Paul Boroschek, avec l’aimable autorisation de la famille Brosh). « Création musicale et interprétation au piano par Yonathan Avishai Épopée historique, œuvre marquante du cinéma sioniste, le film décrit le quotidien d’un pionnier de la diaspora parti rejoindre une collectivité ouvrière dans la Palestine mandataire. » Des séances présentées par Ariel Schweitzer.

A noter : des visites guidées en parcours croisé des photographes August Sander, auquel le Mémorial de la Shoah rend hommage (8 mars-30 novembre 2018) et Helmar Lerski : deux photographes face à la société allemande de l’entre-deux-guerres.

Et une Masterclasse de photographie sur les Secrets de l’œuvre de Helmar Lerski par Eric Genevrier et Arno Gisinger, photographes.

Pour les enfants et les adolescents : des stages d’initiation à la pratique du portrait photographique en studio et en plein air, en s’inspirant des techniques novatrices de Helmar Lerski.

Portraits américains. Etats-Unis, 1910-1915
« Israël Schmuklerski nait à Strasbourg en 1871 ; ses parents sont originaires de Zgierz, près de Łódź en Pologne. Dès 1875, la famille s’installe en Suisse, près de Zurich. Le jeune Israël entre à l’âge de seize ans comme apprenti dans une banque. Deux ans plus tard, il entreprend un voyage en Afrique, qui le mène d’Algérie en Abyssinie ».

« En 1893, Israël Schmuklerski rejoint sa sœur Janette installée à Chicago. Il vit d’expédients et prend des cours de théâtre. Engagé en 1896 dans une troupe à New York, il adopte le nom de scène de Helmar Lerski. L’année suivante, il suit sa sœur à Milwaukee, où il travaille durant six ans au sein d'une scène allemande, le Pabst Theater. En 1905, il épouse l’actrice et photographe Emilie Bertha Rossbach à Zurich, avant de réintégrer le Pabst Theater de Milwaukee.

« En 1909, à la mort du directeur du théâtre, il interrompt sa carrière d’acteur et s’initie à la photographie avec sa femme. D’emblée, Lerski se plait à ne respecter aucune des règles esthétiques alors en usage. Il se consacre au portrait, photographiant ses collègues acteurs ou travaillant sur commande, et s’engage aussi dans des recherches personnelles, comme une série de photographies de Robert Mann, un ingénieur qu’il fait poser, vêtu de costumes historiques et prenant des poses expressives, sous des éclairages variés ».

Son « ascension est fulgurante. En 1910, il ouvre un studio avec sa femme. L'année suivante, il présente son travail à la convention des photographes de Saint-Paul (Missouri), dont la figure centrale est Rudolf Duhrkoop (1848-1918), célèbre portraitiste allemand, pionnier de la photographie progressiste. Deux ans plus tard, lors de la convention de 1913 à Kansas City, c’est Lerski qui occupe le devant de la scène. Des revues spécialisées (Photo-Era, Wilson’s Photographic Magazine ou American Annual of Photography) font connaitre son œuvre ».

Helmar Lerski « découvre le pouvoir démiurgique de l'éclairage, les « possibilités illimitées des effets de lumière ». Dans sa Tête de Jean-Baptiste, Lerski transforme « un visage resplendissant et plein de vie en un visage marque par la mort ». Lors de la saison 1914-1915, il enseigne à l’université du Texas à Austin ».

Cinéma muet. Berlin, 1916-1929
En 1915, Helmar Lerski retourne dans une Europe en proie à la Grande guerre.

Il « expose à la galerie Graphik-Verlag de Berlin et noue des contacts dans le milieu du cinéma. Il travaille durant un an avec William Wauer, qui vient de lancer sa maison de production W.-W. Film Co. Wauer l’emploie pour son sens de la lumière. On ne pourra juger du résultat, le fruit de cette collaboration, sept films en tout, étant perdu ».

« Dans un second temps, Lerski intègre la Deutsche Bioscop Film comme directeur de la photographie, et travaille avec le réalisateur Robert Reinert sur vingt-deux films, dont la trilogie Ahasver (1917). De ce récit fantastique évoquant la figure du Juif errant, qui répand sans le vouloir le malheur autour de lui, il ne reste que quelques photos promotionnelles que fut chargé de prendre Lerski. Très tourmentés également, les films Nerven et Opium, toujours de Reinert, sont produits au lendemain de la » Première Guerre mondiale.

« Dans ces drames, Lerski peut exprimer tout son talent de mise en lumière. Il travaille ensuite en indépendant pour différents studios, et participe à son plus grand film, Die Wachsfigurenskabinett [Le cabinet des figures de cire] de Paul Leni (1924). La dernière séquence du film, tout en lumière et transparence, avec un jeu de surimpressions, est remarquable ».

Lerski « adopte ensuite le procédé Schüfftan – du nom de son inventeur, Eugen Schüfftan – qui permet, grâce à un jeu de miroirs, d’assembler sur la pellicule une scène jouée par des acteurs devant un décor de maquettes ».

Il contribue « ainsi à la réalisation du chef-d’œuvre de Fritz Lang Metropolis, en intégrant ces trucages, sans pour autant être crédité au générique ».

Personnalités berlinoises et Têtes de tous les jours. Berlin, 1927-1931
« A la fin des années 1920, alors que ses engagements pour le cinéma se raréfient, Lerski revient à la photographie, en réalisant des portraits d’artistes et d’intellectuels : Leni Riefenstahl, avec laquelle il travaille sur le film La montagne sacrée d’Arnold Fanck, ou Eleonora von Mendelssohn. Mais il jugera bientôt que ces personnalités, trop soucieuses de maîtriser leur image, l’empêchent de s’exprimer pleinement ».

Lerski « se consacre alors au portrait d’anonymes, à travers Kopfe des Alltags (littéralement, Les têtes de la vie quotidienne). L’ensemble de ces portraits, qui sera publié en 1931, constitue une « série », une forme alors nouvelle en photographie, ou le sujet n’est pas représenté par une image, mais plusieurs ; ainsi, un même individu peut figurer sur plusieurs portraits, avec des poses et des éclairages différents. Ces gens modestes, recrutés dans la rue ou envoyés par le bureau de placement, Lerski les fait poser longuement, les épuise afin de faire tomber leur masque, et remodèle leur visage avec des éclairages étudiés. Cadrés en plan serré, les clichés ou l’on ne distingue le plus souvent aucun élément de costume ou de décor, dessinent les traits en ombres et lumière de personnages que la légende seule ramène à une situation sociale ou un métier : femme de ménage, ouvrier métallurgiste, couturière, mendiant… Les visages partiellement coupés recomposent et dynamisent les images, en mettant en valeur une joue, un nez, quelques rides ou un regardé.

Lerski "n’est pas loin de l’esthétique de la Nouvelle vision (Neues Sehen) promue par Lazlo Moholy-Nagy, où l’appareil photo mobile tire parti d’angles de vision inusités, offre des raccourcis saisissants et une recomposition du réel ».

Il « n’est pas loin non plus de l’esthétique de la Nouvelle objectivité (Neue Sachlichkeit), ou monde naturel et univers industriel se trouvent magnifiés par des gros plans saisissants et une composition parfaite ».

« Ancré dans l’avant-garde de son temps, Lerski participe à trois expositions qui feront date : « Fotografie der Gegenwart » (Essen, 1929), « Film und Foto » (Stuttgart, 1929) et « Das Lichtbild » (Munich, 1931) ».

Arabes et juifs. Palestine, 1931-1935
A l’aube « des années 1930, Lerski propose à Charles Peignot, éditeur parisien de la revue Arts et Métiers graphiques, de publier un ouvrage qui doit s’intituler Judische Kopfe [Visages juifs].

La « société allemande est alors parcourue par le mouvement volkisch, qui prône, sur des fondements racistes et antisémites, l’idée d’une supériorité de la race germanique. Des photographes comme Erich Retzlaff (Deutschen Menschen – Le peuple allemand, 1931) ou Erna Lendvai-Dircksen (Das deutsche Volksgesicht – Le visage du peuple allemand, 1932) dessinent ainsi le portrait d’une germanite mythique ».

« Visant à montrer une physionomie juive « originelle » et authentique, la publication imaginée par Lerski peut être perçue comme une réponse à ce courant ».

Le « projet démarre à Berlin, avec quelques portraits pris dans une maison de retraite, et évolue lorsque Lerski, inquiet de la montée de l’antisémitisme en Allemagne, s’installe en Palestine en 1932. Les pionniers, nouveaux paysans des kibboutzim, offrent de nouveaux visages, et aux visages juifs viennent s’ajouter ceux des Bédouins et des Arabes. Lerski donne à la série le titre d’Arabes et juifs et y travaille jusque vers 1935, alors que le projet d’édition avorte, pour des raisons apparemment financières ».

La « démarche de Lerski n’est pas de nature anthropologique, mais essentiellement artistique. Comme l’étaient les « Têtes de tous les jours », les visages de ces résidents palestiniens sont souvent extraits de tout contexte, tandis que l’attention se porte sur le relief du visage. Si les modèles sont d’origines diverses (Maroc, Pologne, Irak…), on décèle une forte présence des juifs orientaux, tout particulièrement des juifs yéménites. Lerski s’inscrit ainsi dans la continuité des artistes de la génération précédente, les fondateurs de l’école Bezalel, tels Ephraïm Moses Lilien (1874-1925) ou Zeev Raban (1890-1970), pour qui les juifs yéménites semblaient incarner l’essence d’une judéité orientale originelle, celle du nouvel établissement sioniste. »

Métamorphoses par la lumière. Tel Aviv, 1936
« En 1936, en quelques mois, Lerski réalise la série qu’il considérera comme l’œuvre de sa vie. Métamorphoses par la lumière représente effectivement une forme radicale en germe dans les travaux antérieurs ».

La série est constituée de « 137 portraits d’un même homme, pris sous des lumières différentes, des angles différents, et suggérant des expressions très variées ».

« Pour ce projet, Lerski embauche un jeune architecte suisse, choisi pour son absence totale de talent d’acteur. Travaillant en plein soleil sur le toit de son atelier à Tel-Aviv, modelant la lumière à l’aide de miroirs et de réflecteurs sur un visage accablé par la chaleur, il suggère des transformations radicales, et fait ressortir des figures les plus diverses ».

« J’écrivais "avec la lumière" et du modèle sortirent toutes les formes de ma fantaisie, tour à tour Napoléon, un mendiant, un moine du Moyen Age, un croisé, un technicien moderne, un fanatique religieux, la statue gothique, le masque mortuaire ».

« Si la série exprime tout le pouvoir de transformation de la photographie, par le biais de la lumière, elle contredit l’idée exprimée par Lerski lui-même, selon laquelle le portrait photographique rendrait visible la nature profonde du sujet. En réalité, c’est d’abord le pouvoir démiurgique du photographe et sa créativité, qui s’expriment dans cette série ».

La lumière, comme l’ombre, façonne, sculpte le visage. En souligne les rides, la transpiration.

L’œuvre sioniste. Palestine, 1939-1948
Pionniers (haloutsim), 1939-1948
En 1933, Lerski « renoue avec le cinéma, désormais en tant que réalisateur ».

« Produit par le Keren Hayessod (Fonds national de construction en terre d’Israël), son premier film, Awodah [Labeur], évoque le travail des pionniers juifs en Palestine, en particulier la quête de l’eau, avec le creusement d’un puits. Comme dans les photographies, le film privilégie les cadrages serrés, sur les visages ou les machines ».

« Présenté dans différents festivals en Europe, et à Venise en même temps que Le triomphe de la volonté de Leni Riefenstahl, le film convainc la critique cinématographique, mais reste trop « artistique » pour les commanditaires ».

Lerski « tourne également un court-métrage, Mangina Ivrit [Mélodie hébraïque], où l’on suit une excursion du violoniste Andreas Weissgerber dans la vallée de Josaphat à Jérusalem ».

En 1939, le « comité exécutif de la Histadrout, puissant syndicat des travailleurs juifs dirigé par Golda Meir et Aaron Remez, sollicite Lerski pour créer une division « film » au sein de l’organisation ».

Lerski « pilote des sessions de formation au 16 mm, qui aboutissent à de modestes documentaires de propagande ».

« L’atelier ferme en 1941, en raison des difficultés dues à la guerre. Quatre courts métrages sont réalisés : Yaldei Hashemesh [Enfants du soleil], Amal [Peine], Kupat Holim (l’organisation médicale de la Histadrout) et Labour Palestine ».

« C’est à cette époque que Lerski photographie, probablement sur commande, de jeunes pionniers dans différents kibboutzim et kvutzot (petites structures rurales collectives) de Palestine. Il réalise dans ces collectivités des portraits de travailleurs en pleine action, qu’ils s’occupent d’horticulture, de soudure ou de terrassement. La lumière est toujours travaillée, tandis qu’avec l’usage de contre-plongée, la composition de ces portraits plein d’humanité évoque parfois les constructivistes russes ».

Soldats juifs, 1941-1943
« En 1943, le Keren Hayessod (Fonds national de construction en terre d'Israël) organise au musée d’art de Tel-Aviv une exposition intitulée « Combattre et travailler ». Zoltan Kluger (1933-1958), l’un des plus importants photographes de la Palestine mandataire y présente des vues aériennes, Lerski des portraits de soldates et soldats juifs dans l’armée britannique. Prés de 30 000 juifs de Palestine constituant la Brigade juive se sont engagés aux côtés des Anglais dès 1940, se battant lors de la campagne des Balkans et les campagnes du Moyen-Orient. Lerski fait le portrait d’une centaine d’hommes ou de femmes, de différents grades ».

Portraits et paysages de Palestine, 1939-1948
« Durant son séjour en Palestine, Lerski côtoie la communauté des écrivains et artistes allemands. Parmi eux, Else Lasker-Schuler, Max Brod, Arnold Zweig ou Wolfgang Hildescheimer. Ils se retrouvent dans des soirées littéraires, et s’expriment dans Orient, une revue en langue allemande fondée par Wolfgang Yourgrau (1942-1943) ».

Lerski « réalise des portraits de relations et d'amis, comme l’architecte Jaakov Ornstein et son épouse la danseuse Margalit ».

« Plusieurs photographes fuyant l’Europe s’installent en Palestine et deviendront des figures de la profession, tels Rudi Weissenstein ou Alfons Himmelreich ».

« Avec Walter Zadek, Lerski fonde et préside en 1939 The Palestinian Professional Photographers Association. C’est à cette époque sans doute qu’il donne des cours sur le toit de son immeuble à Tel-Aviv, qui lui sert d’atelier. »

« En 1946, Lerski tourne Adamah [La Terre], sa dernière contribution cinématographique en Palestine, produite par Hadassah, l'organisation sioniste féminine américaine. Le film évoque la difficile réadaptation à la vie au sein d’une colonie de jeunes orphelins d’un garçon sortant d’un camp de concentration. Le film est transféré à Hollywood et sort sous le titre Tomorrow is a Wonderful Day, dans un montage entièrement remanié, ce qui provoque la colère de Lerski. »

On peut regretter qu'aucune photographie de paysage ne soit libre de droit pour la presse.

Dernières séries. Palestine, 1935-1947
Mains humaines, 1935-1944
Initiée en 1929, la « série consacrée aux mains avait fait impression lors de l’exposition « Film und Foto ». Lerski s’y consacre plus systématiquement dans les années 1930 et 1940, en travaillant sur l’image de mains exerçant les activités les plus diverses. A la manière des visages, ces « portraits » de mains expriment un métier, une activité, et révèlent l’âme de leur possesseur. »

Paysages du visage, 1941
Alors que durant la Deuxième Guerre mondiale, le « matériel photographique se fait plus rare, Lerski réalise des agrandissements de visages, issus des séries Arabes et juifs et Métamorphoses par la lumière. Montrant un œil, une tempe, les plis de la peau, ces images concentrent en quelques visions abstraites l’ambition de Lerski, avec un titre qui pourrait s’appliquer à la plupart de ses images, celui de « paysage du visage ».

Le théâtre de marionnettes de Paul Lowy, 1945-1947
« Vers 1945, Lerski travaille avec Paul Lowy, un marionnettiste d’origine tchèque, immigré en Palestine [mandataire] en 1939. Fondateur du Palestine Puppet Théâtre, il fut aussi architecte de décors de théâtre ».
« Lerski photographie ses marionnettes, comme s’il s’agissait de personnes, mais filme surtout une pièce biblique, L’histoire de Balaam et de son ânesse (Nombres, 22-24) réalisant un court-métrage d’une dizaine de minutes. Produit en 1946 par le Keren Hayessod, le film est inséré, en 1950, dans un long métrage de Joseph Krumgold, Mi Klalah L’Brahah [Au-dela du mal].

Helmar Lerski « quitte la Palestine en mars 1948, un mois avant » la recréation de l’Etat d’Israël.

« Dans les années 1950, il connait une certaine reconnaissance et plusieurs expositions lui sont consacrées. »

Il meurt à Zurich en 1956.

Helmar Lerski par lui-même

Extraits de « Lerski uber sich selbst » (Lerski à propos de lui-même)
In Anneliese Lerski, Der Mensch — Mein Bruder [L'Homme — Mon frère], Dresde, VEB
Verlag der Kunst, 1958

Initiation à la photographie
« En 1911, lorsque j’ai fait mes premiers essais photographiques, j’étais encore membre du Deutsches Theater de Chicago-Milwaukee [...]. Ma première épouse, issue d’une vieille famille de photographes, était engagée avec moi dans le même théâtre ; puis, en 1911, elle a ouvert à Milwaukee un studio de photographie. Je n’avais moi-même aucun lien avec la photo et n’aurais jamais eu l’idée de travailler dans ce domaine si mes collègues du théâtre ne m’avaient incité, un jour, pour s’amuser, à les prendre moi aussi en photo. Bien que je n’eusse jamais manié un appareil photo et que je n’eusse pas la moindre formation professionnelle, j’ai finalement accédé au désir des collègues et accompli ma nouvelle mission avec un certain succès, sans doute grâce à l’assistance discrète de ma femme. C’était une excellente photographe, qui a jugé bon de m’initier à la technique de l’époque. Elle m’a expliqué toutes les règles en détail, notamment le placement de l’objet à photographier par rapport à la lumière du nord. »

Découverte du pouvoir de la lumière
≪ [...] notre atelier [...] avait [...] deux fenêtres, une à l’est et une à l’ouest, qui étaient toutes deux hermétiquement fermées. J’ai carrément ouvert ces deux sources de lumière [...]. Et, en poursuivant ce jeu, en laissant couler sur l’objet toutes les sources de lumière de l’atelier, en opposition aux principes de la photographie, j’ai éprouvé la plus intense sensation de ma vie. Le cas de figure idéale de l’effet que peut avoir la lumière – provenant de différentes sources – sur un visage humain a du se produire à ce moment-là : ce qui est apparu, ce qui m’a frappé comme l’éclair, ce n’était pas l’éclairage, mais la translucidité, de sorte que j’avais l’impression de regarder le verre dépoli comme si je voyais à l’intérieur de la personne. Les différentes lumières baignaient sa tête, la rendaient plastique, lui donnaient une forme particulière, une singularité et des caractéristiques inhabituelles. Je découvrais la plasticité de la lumière, son pouvoir de création et de métamorphose. Il me semblait qu’avec ces lumières, que j’apprenais désormais à diriger, je pouvais pénétrer par la surface dans la peau de l’être humain, que je pouvais rendre l’invisible visible, éclairer les profondeurs et dévoiler les secrets. Des ces premiers essais, je suis devenu obsessionnel : j’ai essayé des lors, avec une immense passion, de reproduire cette constellation lumineuse. Les résistances extérieures n’avaient aucune prise sur mon obsession. »

Portraits
« A cet égard, j’ai renoncé par principe à obtenir des portraits beaux, plaisants et immédiatement ressemblants, préférant façonner chaque visage tel que je le voyais intérieurement. On comprend aisément, dès lors, que cela aboutissait souvent à une restructuration, en quelque sorte à une libre création. J’ai ainsi réussi une fois, par exemple, à transformer la tête d’un ami scientifique, au début sceptique vis-à-vis de mes aspirations, en la tête morte de saint Jean-Baptiste, c’est-à-dire un visage resplendissant et plein de vie en un visage marqué par la mort, auquel je conférais par mon seul éclairage toutes les caractéristiques de la vie qui l’avait quitté.
[...]
Le dernier reste de romantisme qui était encore visible çà et là dans mes photographies américaines a disparu, seule l’extrême véracité m’importait encore, la pénétration de l’essentiel. Les rides et les plis d’un visage mur, l’écriture inscrite par la vie, ne me dérangeaient pas, non, ils m’enthousiasmaient. Je ne voulais rien dissimuler, je voulais au contraire montrer ces gens comme ils étaient. Bien évidemment, pareille tendance ne m’a pas valu un accueil très favorable – à quelques exceptions prés – de la part des célébrités dont j’ai commencé par faire le portrait à Berlin. Et moi, je me suis aussi lassé d’avoir affaire à des gens qui essayaient de m’obliger à les voir tels qu’eux-mêmes voulaient se voir. Je me suis donc tourné vers les gens simples, les gens de la rue, de tous les jours. Je les plaçais dans la « juste lumière » et ces « humiliés et offensés » devenaient entre mes mains des personnes pleines de force et de dignité, de courage et d’intelligence. Le jeune révolutionnaire qui peinait à nourrir sa famille en travaillant à l’usine devenait dans mon portrait un grand acteur de la Révolution française, le balayeur humble et courbé avait droit au profil d’un noble de la Renaissance. Une maison d’édition berlinoise a rassemblé ces photos dans un livre intitulé Kopfe des Alltags (« Têtes de tous les jours), 1931. ≫

Métamorphoses par la lumière
« Le désir de trouver pour mon travail, ou je dédaignais la lumière artificielle, un autre soleil que le soleil d’Europe centrale, m’a amené à changer de pays, et j’ai choisi la Palestine pour ses possibilités lumineuses. J’ai donc travaillé à partir de 1931 dans le soleil palestinien, c’est là qu’ont vu le jour mes grandes séries de portraits d’Arabes, de photos de vieux Juifs, de portraits de jeunes soldats et ouvriers juifs, et c’est là aussi que j’ai réalisé mon œuvre « Métamorphoses par la lumière », qui se préparait en moi depuis des années et par laquelle je croyais avoir fourni la preuve que l’objectif n’a pas besoin d’être objectif, que le photographe peut créer librement, caractériser librement à l’aide de la lumière, selon sa vision intérieure. Le modèle de cette œuvre, qui est mon ouvrage principal – constitué de 175 clichés de la même personne –, était un jeune homme simple, même pas photogénique, qui n’était pas capable d’interpréter la moindre expression, qui ne faisait rien d’autre que rester trois mois à ma disposition, tous les jours, avec patience et bonté. Je l’ai placé dans un véritable feu croisé de lumières en captant le soleil à l’aide de miroirs et d’obturateurs, et j’ai créé avec lui, grâce à mes seules lumières, les différents types de mon imagination. »

Repères biographiques

« 1871 Naissance d’Israël Schmuklerski à Strasbourg, de parents originaires de Zgierz, prés de Łodź en Pologne.
1875 La famille Schmuklerski s'installe à Aussersihl, prés de Zurich.
Vers 1886 Israël entre comme apprenti dans une banque.
1888 Alors âgé de 17 ans, il voyage en Afrique du Nord (Alger, Tripoli, Abyssinie).
1893 A 22 ans, il rejoint sa sœur Janette à Chicago ; il vit de petits boulots et prend des cours de théâtre.
1896 Engagé par un théâtre de New York, le Hans Conried’s Living Place, il adopte le pseudonyme de Helmar Lerski.
1897 Il suit sa sœur à Milwaukee, où il est engagé dans un théâtre allemand traditionnel, le Pabst Theater, jusqu'en avril 1903.
1905 Il épouse l’actrice et photographe Emilie Bertha Rossbach ; le couple séjourne a Zurich et à Berlin ; en septembre, Lerski est de retour au Pabst Theater, pour les trois ans à venir.
1909 Apres la mort de Leon Wachsner, propriétaire du Pabst Theather, Lerski arrête le théâtre ; il se lance dans la photographie, métier exercé par sa femme.
1910 Le couple ouvre un studio photo à Milwaukee.
1911 A la convention de la Photographers’ Association of America à St-Paul (Minnesota), il rencontre Rudolf Duhrkoop (1848-1918), célèbre photographe allemand ; entre 1911 et 1914, de nombreux articles illustrent ou parlent de son travail.
1912 Expose à la convention de la Photographers’ Association of America a Philadelphie, son travail connait de nouveau un grand succès.
1913 Il participe au 9e salon de l’American Federation of Photographic Societies et à la 33e convention de la Photographers’ Association of America à Kansas City.
1914 Il enseigne la photographie à l’université du Texas, ) Austin, jusqu' en mai 1915.
1915 Il se rend à Berlin, où son travail est exposé une semaine au Graphik-Verlag en novembre ; il présente en 1916 une rétrospective à la société des photographes de Berlin.
1916 Engagé par William Wauer au sein de la W.-W. Film Gesellschaft de Berlin, il est chargé de « gérer tous les aspects liés à la technique photo de l’opération ».
1917 Lerski devient directeur technique à la Deutsch Bioscop GmbH ; il fait des photos promotionnelles de l’acteur Carl de Vogt ; dans le même temps, il est directeur photo pour Robert Reinert.
1918-1921 En 1918, Robert Reinert fonde Monumental-Filmwerke ; Lerski réalise avec lui 22 films, dont Opium (1919) et Nerven (1919) qui sont des succès populaires.
1921-1926 Cinéaste indépendant pour differentes sociétés de production.
1921 Mort de son épouse Emilie Bertha Rossbach.
1922 Il se marie avec Anneliese Margarete Wolfkamp (1886-1963).
1924 Il travaille sur Le Cabinet des figures de cire [Das Wachsfigurenkabinett] de Paul Leni, première contribution importante au cinéma de Lerski.
1927-1928 Il est responsable de la photographie dans la compagnie Deutsche Spiegel Technik GmbH où il met en œuvre le procédé Schüfftan, qui permet grâce à des miroirs d’intégrer des décors miniatures dans les prises de vue ; il travaille notamment sur Metropolis de Fritz Lang.
1929-1931 Ses portraits sont publiés dans de nombreuses revues allemandes ; en 1929, il participe à l'exposition « Film und Foto » (Fifo), qui consacre la Nouvelle Vision en photographie, avec des images de la série des Kopfe des Alltags [Têtes de tous les jours] ; cette série est exposée intégralement à la Kunstbibliothek en 1930.
1931 Kopfe des Alltags est publié par Hermann Reckendorf ; Lerski entame le projet de publication de la série Visages juifs avec l'éditeur Peignot ; les premiers « visages juifs » sont réalisés à Berlin dans une maison de retraite.
1932 Après un séjour à Zurich en 1932, il s'installe en Palestine.
1933 Des Visages juifs sont exposés à la galerie Divan à Jérusalem ; Lerski réalise le film Avodah (Labeur), d'inspiration sioniste ; publication Les juifs. Témoignages de notre temps.
1933-1935 Il réalise Mélodie hébraïque, pour l'Association culturelle juive de Berlin.
1935 Première projection du film Avodah à Tel-Aviv ; le film reçoit un accueil très favorable en Europe ; entre fin octobre 1935 et février 1936, Lerski réalise les 137 portraits des Métamorphoses par la lumière.
1937-1939 Long séjour en France et en Angleterre ; il rencontre Hans Feld et Berthold Viertel à Londres, Philippe Halsman à Paris, qui réalise son portrait ; à Paris, il présente sa série des Métamorphoses à Siegfried Kracauer (sociologue et critique proche d’Adorno et de Benjamin) ; expose à Londres en 1938, avec 12 diapositives de la série des Métamorphoses.
1939-1941 De retour en Palestine, il crée un département cinéma au sein de la Histadrout ; jusqu'en 1941, il y organise des sessions de formation 16 mm, qui produisent de modestes documentaires de propagande ; réalisation de 4 cours métrages : Yaldei Hashemesh [Enfants du soleil], 1939-1940, Amal [Peine], 1940, Kupat Holim, 1940-1941 et Labour Palestine, 1941 ; Lerski est président de The Palestinian Professional Photographers Association, qu’il a fondée en 1939 avec Walter Zadek.
1941 Exposition rétrospective au musée Bezalel, « 30 Years of Photographic Work », à l’occasion du 70e anniversaire de l'artiste; la série des Paysages du visage est exposée au musée Bezalel à Jérusalem en 1942.
1940-1946 Lerski reçoit la communauté germanophone chez lui le samedi, dont un groupe antifasciste composé d’Arnold Zweig, Rudolf Hirsch, Louis Furnberg, Ernst Loewy.
1942 Sous contrat avec le Keren Hayesod (Fonds national de construction en terre d'Israël), Lerski photographie soldats et travailleurs pour l’exposition « Combattre et travailler », présentée en 1943 au musée d’art de Tel-Aviv.
1945 Exposition de la série Mains humaines au musée d’art de Tel Aviv.
1945-1947 Travaille avec le marionnettiste Paul Lowy, puis réalise un court métrage, L'histoire de Balaam avec des marionnettes, le film est constitué presque intégralement de plans rapprochés.
1947 Réalise son dernier film Adamah [Terre], produit par Hadassah, organisation sioniste féminine américaine ; le film est transféré à Hollywood sous le titre de Tomorrow is a Wonderful Day, dans un montage entièrement remanié ; en le découvrant lors de la première au festival de Locarno, Lerski est furieux.
1948 Lerski retourne vivre en Suisse, au moment de la création de l'Etat d'Israël ; il ne fait plus de photo, mais élabore encore des projets de films ; des expositions de son œuvre sont présentées en Europe ; Arnold Zweig, soutenu par Bertholt Brecht, demande l’admission de Lerski à l’Académie des arts de la RDA ; la demande est rejetée.
1948-1955 Plusieurs d'expositions collectives en Suisse au Luxembourg et en Allemagne.
1956 Décède à Zurich.
1958 Publication par sa femme Anneliese de Der Mensch — Mein Bruder.
1982 Première grande exposition rétrospective organisée par le musée Folkwang d’Essen.
2003 « Métamorphoses par la lumière », Strasbourg, Musée d'art moderne et contemporain »
2004 La Howard Greenberg Gallery présente l'exposition Helmar Lerski - Metamorphosis.

Le mahJ célèbre son vingtième anniversaire en 2018

« Pour l’occasion, Le musée présente tout au long de l’année un riche programme scientifique et culturel ».
« En 1998, le mahJ ouvrait ses portes dans le cadre prestigieux de l’hôtel de Saint-Aignan, au cœur du Marais a Paris, et dotait la France d’un musée unique au monde par sa vocation : retracer l’histoire des communautés juives de France, d’Europe et de Méditerranée à travers la diversité de leurs formes d’expression artistique, de leur patrimoine et de leurs traditions, depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours.
Vingt ans âpres sa création, le mahJ conserve une collection de 12 000 œuvres et s’impose, à travers sa programmation culturelle, comme l’un des musées les plus vivants de Paris, ainsi que comme un acteur essentiel de la préservation du vivre-ensemble ». Quel « vivre ensemble » ? Est-ce la mission d’un musée d’art et d’histoire du Judaïsme ?
« En proposant au plus large public de découvrir l’ancrage très ancien des juifs dans la nation, et l’universalité de leurs productions artistiques et culturelles, le mahJ illustre 2000 ans de culture en partage », explique Paul Salmona, directeur du mahJ.
En 20 ans, le mahJ a présenté une centaine d’expositions, ainsi que des installations d’art contemporain. Le musée s’inscrit dans les manifestations telles que le mois de la Photo, la Nuit blanche, la Nuit des musées et les Journées nationales de l’Archéologie.
Un auditorium de 200 places propose de nombreux rendez-vous pour mieux appréhender les dimensions multiples des cultures du judaïsme à travers la musique, la littérature, le théâtre ou le cinéma. De nombreuses activités pédagogiques sont organisées : visites guidées et conférences, ateliers pour enfants, familles et groupes scolaires… 20 000 ouvrages et plus de 3 000 documents audiovisuels sont consultables en libre accès à la médiathèque. Outre les éditions du musée, la librairie offre un large éventail d’ouvrages d’art, d’histoire et de littérature, ainsi qu’un choix destiné aux plus jeunes (prés de 5 000 titres en tout), et une sélection d’objets et d’images.
Le mahJ est géré par une association à but non lucratif. Il est subventionné à parité par le ministère de la Culture et de la Communication et par la ville de Paris. C'est un « musée de France ». A travers sa fondation, Pro-mahJ, il a la capacité de recevoir des dons et legs en exonération des droits de mutation.
Dominique Schnapper est la présidente du mahJ, et Paul Salmona son directeur ».


Du 11 avril au 26 août 2018
Hotel de Saint-Aignan
71, rue du Temple. 75003 Paris
Tél. : 01 53 01 86 65
Mardi, jeudi, vendredi de 11 h à 18 h. Mercredi de 11 h à 21 h. Samedi et dimanche de 10 h à 19 h

Visuels :
Affiche
Pionnier, Guivat-Haïm
vers 1940
© mahJ © Succession Helmar Lerski, Museum Folkwang

Autoportrait avant 1911
© Succession Helmar Lerski, Museum Folkwang

Enfant
Palestine, 1931-1935
© mahJ © Succession Helmar Lerski, Museum Folkwang

Arabe à Jérusalem
Palestine, 1931-1935
© mahJ © Succession Helmar Lerski, Museum Folkwang

Actrice
vers 1911
© Succession Helmar Lerski, Museum Folkwang

Bédouin
Palestine, 1931-1935
© mahJ © Succession Helmar Lerski, Museum Folkwang

Juive yéménite
Palestine
© Succession Helmar Lerski, Museum Folkwang

Soldat juif
Palestine, 1941-1943
© mahJ © Succession Helmar Lerski, Museum Folkwang

Mains
Palestine, vers 1935-1945
© mahJ © Succession Helmar Lerski, Museum Folkwang

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Les citations proviennent du dossier de presse du mahJ.

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