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vendredi 15 juillet 2016

« Alefbet, tapisserie » de Grisha Bruskin


Dans le cadre de l’Année croisée France-Russie et de l'exposition Radical Jewish Culture dont Bruskin fut un des inspirateurs visuels, le Musée d’art et d’histoire du judaïsme présenta l’exposition éponyme accompagnée d’un catalogue français/anglais passionnant. Cet artiste juif a réalisé une grande tapisserie figurative, allégorique et inspirée de la Bible, de sources talmudiques ainsi que hassidiques. Le 10 juillet, le Président de la République François Hollande a inauguré la nouvelle Cité internationale de la tapisserie d'Aubusson (Creuse).

« Car nous marchons sur les traces de ceux qui nous ont précédés et toute vie est un présent coulé dans des formes mythiques ».
Thomas Mann, Joseph et ses frères


Grisha Bruskin est né en 1945 dans une famille juive moscovite.

Dès 1966, il présente ses œuvres dans des expositions, sous la double menace de la censure – trois expositions personnelles sont fermées par les autorités soviétiques en 1983 et 1984 - et d’être exclu de l’Union des artistes. Il étudie au département artistique de l’Institut du Textile de Moscou et est diplômé de l’Institut d’Art.

En 1987, le cinéaste Milos Forman achète une de ses œuvres. Cet artiste est aussi repéré par William Struve, un galeriste de Chicago.

En 1988, lors d’une vente d’art contemporain Sotheby’s à Moscou, ses œuvres atteignent des prix élevés.

En 1999, il réalise une installation permanente en triptyque Leben über alles (La Vie par dessus tout) pour le Reichstag restauré à Berlin.

En 2000, les jardins du Palais Royal (Paris) puis la ville de La Haye (Pays-Bas) accueillent une exposition collective de sculptures modernes et contemporaines placée sous le haut-patronage de l'UNESCO, dont Birth of the Hero, Figure K:Tennis Player (1989/90) et Birth of the Hero, Figure K :Tennis Player (1989/90) réalisées par Grisha Bruskin et prêtées par la Marlborough Gallery (New York). Ces œuvres « ne tendent pas seulement à montrer le profond décalage existant entre l'individu et l'idéologie dans une société totalitaire mais démontrent aussi les compromis entre l'individu et la société en général ».

Grisha Bruskin vit et crée ses œuvres - tapisserie, peinture (Alefbet, 1984), sculpture (On the Edge), dessin, porcelaine (Alphabetic Truths, 1998), écriture, installations et performances -, liées au judaïsme et au communisme - à New York et Moscou.

Son œuvre a exercé une grande influence sur Frank London et ses musiciens, pionniers d’un klezmer renaissance, « funkisé », « rockisé » dans les années 1980. Des albums de Frank London et de son trio Nigunim sont illustrés par Grisha Bruskin.

« Une métaphore kabbalistique »
Sur un pan de mur du MAHJ, la tapisserie Alefbet, alphabet hébraïque (2004-2006), s’étale, avec en face, l’ensemble des textes expliquant chacun de ses éléments, un Dictionnaire mythologique, commentant la tapisserie.

Cette tapisserie de 11 mètres de long a été « réalisée dans la plus pure tradition par des tisserands russes. Peuplée de 160 figures issues de la mythologie, de la Bible, de la kabbale, du folklore, l’œuvre forme un message, le fragment d’un livre destiné à être continué, interprété, commenté... »

Grisha Bruskin a recouru à une technique et à un art assuré par de brillants tisserands sur des métiers de haute lice. Ce qui pourrait paraître suranné, démodé, mais qui s’allie au style classique du dessin, sous la forme d’un assemblage de scènes parfaitement cadrées aux couleurs chaudes, et à l’atmosphère mystérieuse, intrigante.

Le fond de la composition est un manuscrit composé d’une écriture cursive en hébreu.

Sur « ce texte, tiré du Tanya, livre fondateur du hassidisme de Loubavitch, mais rendu ici indéchiffrable », se trouvent 160 personnages, essentiellement masculins, gens vêtus d’habits ordinaires ou portant le talit (châle de prières) et à la tête couverte ainsi que créatures bizarres ou fantastiques. Ces personnages vont, quatre par quatre et ont tous des accessoires (livre, poterie, fleurs).

Chaque personnage « devient une figure symbolique, dont la signification est donnée dans un lexique rédigé par l’artiste ». Alefbet « n’est pas un théâtre, une parade, mais plutôt une collection. L’œuvre est conçue pour un examen prolongé, méditatif ».

Grisha Bruskin « utilise une métaphore kabbalistique : chaque élément – composé par le personnage et son accessoire – est une petite particule, un éclat de lumière. Le spectateur, allant de l’un à l’autre, pour tenter d’en découvrir la signification, recolle les morceaux des Vases brisés, reconstitue le sens de la tapisserie ».

Alefbet est « une sorte de sphinx qui propose des énigmes au spectateur. L'œuvre est liée à la vie du Livre, une vie idéale, au monde du mythe, des lettres, du langage ».


Evgen Barabanov, Grisha Bruskin et Boris Groys, Alefbet, tapisserie, Tapestry Project. Traduction du russe de Luba Jurgenson et Nathalie Hazan-Brunet. MAHJ/Lienart éditions, 2010. 196 pages, coédition. 32 euros. ISBN : 978-2-35906-024-9

Jusqu’au 29 août 2010
Hôtel de Saint-Aignan, salle des anciennes écuries
71, rue du Temple, 75003 Paris
Tél. : 01 53 01 86 48
Ouvert du lundi au vendredi de 11 h à 18 h et le dimanche de 10 h à 18 h
Nocturnes les mercredis jusqu’à 21 h

Visuels de haut en bas :
Grisha Bruskin, Alefbet, tapisserie (détail), 2004-2006
Collection de l’artiste © Grisha Bruskin © ADAGP

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Les citations sont extraites du communiqué de presse. L'article a été publié le 7 août 2010.

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