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lundi 1 février 2016

Luiz Martins de Souza Dantas, un "Don Quichotte dans les ténèbres"

  La Maison de l’Amérique latine a rendu hommage en 2005 à Luiz Martins de Souza Dantas (1876-1954), ambassadeur brésilien (1922-1944) qui a aidé des centaines de personnes persécutées par le nazisme, à émigrer au Brésil en leur fournissant illégalement des visas diplomatiques et fut le co-fondateur de la Maison de l’Amérique latine en 1946. En 2003, Yad Vashem lui a décerné à titre posthume le titre de Juste parmi les nations. En janvier 2016, quarante anciens diplomates brésiliens ont signé une lettre s'opposant à la nomination de Dani Dayan, ancien dirigeant des habitants des agglomérations de Judée et de Samarie, au poste d'ambassadeur d'Israël au Brésil. Ils y ont évoqué les souvenirs de cet ambassadeur brésilien et d'Oswaldo Aranha, qui a présidé en 1947 la session des Nations unies au cours de laquelle a été adopté le plan de partage de la Palestine mandataire et la refondation de l'Etat d'Israël.

Luiz Martins de Souza Dantas est né dans une célèbre famille de sénateurs brésiliens. Ministre lors de la Première Guerre mondiale, il est nommé ambassadeur à Rome en 1919, puis à Paris en 1922. Il occupe cette dernière fonction jusqu’en 1944, et de 1924 à 1926, il représente son pays à la Société  des Nations.

En 1933, il épouse une veuve américaine, Elise Meyer Stern qui, avant l’invasion de la France par l’armée allemande, quitte la France pour les Etats-Unis. Il la reverra à la mi-1944.

En 1940, Dantas demande et reçoit l’autorisation du ministre brésilien des affaires étrangères d’accorder des visas d’immigration à un nombre limité de citoyens français. Malgré l’interdiction du Brésil relative à l’immigration des Juifs, il délivre des visas diplomatiques à des centaines de Juifs cherchant à fuir le régime de Vichy, en prenant soin de dissimuler tout élément prouvant leur judéité. Pour cela, il antidate souvent les documents. Conscient de l’illégalité de ses actes, il ne demande jamais la moindre compensation pour ces faux.

En 1941, cette grande figure de l'Itamaraty (ministère des Affaires étrangères du Brésil) intervient pour sauver un passager d’un navire transportant un grand nombre de Juifs grâce à ces visas. Empêché par le blocus britannique de débarquer au Sénégal pendant quatre mois, l’Alsina est forcé de débarquer à Casablanca, alors un protectorat français. M. Dantas agit afin que la durée de validité des visas expirés soient prorogée. Ce qui permet à ces Juifs de fuir sans problème vers Rio de Janeiro.

Cependant, les soupçons à l’égard de Dantas ont augmenté et Dantas est rappelé au Brésil pour une audience disciplinaire. Il échappe à un procès car son statut diplomatique lors de la période au cours de laquelle il a accordé des visas lui est retiré.

De retour en France en 1945, Dantas contribue à créer la Maison de l'Amérique latine à Paris.

Comment expliquer l’attitude de ce diplomate qui rappelle celle de Aristides de Sousa Mendes, Consul du Portugal à Bordeaux, qui, en 1940, a délivré les titres diplomatiques permettant à trente mille réfugiés, dont dix mille Juifs, d’échapper au nazisme ? « J’ai fait ce qui devait être fait dans la noblesse de l’âme brésilienne, mû par les sentiments chrétiens de compassion les plus élémentaires », a écrit ce diplomate à la fin de 1941 à ses autorités à Rio de Janeiro. Ses télégrammes racontent la détresse des Juifs persécutés, aux familles séparées et détruites, par le gouvernement de Vichy dont « les actes violent les droits traditionnels de protection et les principes d’humanité et déshonorent la France ».

Le 10 décembre 2003, le titre de Juste parmi les nations lui est décerné à titre posthume en présence notamment de Raphael Zimetbaum, un des centaines de Juifs sauvés, et de Sergio Moreira Lima, ambassadeur du Brésil en Israël. Le 6 décembre 2004, la Fondation internationale Raoul Wallenberg a rendu hommage à Dantas au consulat général du Brésil à New York.

Une exposition documentaire évoque son rôle de Juste parmi les Nations à partir des recherches de son biographe brésilien, l’historien Fabio Koifman, auteur de « Quixote nas trevas-o embaixador Souza Dantas e os refugiados do nazismo (Don Quichotte dans les ténèbres) » (Ed. Record, 2002, Rio de Janeiro). 


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Cet article a été publié par L'Arche et sur ce blog le 6 juillet 2014.

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