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samedi 27 août 2016

Cranach et son temps


Le musée du Luxembourg a rouvert ses portes par cette exposition éponyme consacrée à Lucas Cranach (1472-1553), peintre important, "fécond et polyvalent" de la Renaissance allemande, à une époque de "profonds bouleversements politiques et religieux marquée en particulier par la Réforme protestante dont la doctrine sera exprimée sous forme d'iconographie par Cranach. Le 15 août 2016, John Walter, juge californien, a statué en faveur du Norton Simon Museum. Il a débouté Marei von Saher, héritière du collectionneur néerlandais juif Jacques Goudstikker de sa requête visant à ce que lui soit restitué Adam et Eve (c.1530), diptyque de Lucas Cranach l'Ancien. 


Cette exposition s'articule autour de quatre thématiques : Lucas Cranach, un artiste européen ; la cour, les Pays-Bas et l’Italie ; un peintre de la beauté féminine ; un acteur de la réforme protestante.

Cette exposition souligne les influences des œuvres de Dürer et des artistes et humanistes des Pays-Bas sur cet artiste qui occupe une position officielle dès 1505 à la cour de Frédéric III le Sage (1463-1525), prince électeur de Saxe, Etat puissant du Saint Empire romain germanique, qui à Wittenberg protège Martin Luther (1483-1546), dont le visage sera popularisé via des tableaux et gravures par Cranach. La traduction allemande de la Bible est agrémentée de gravures par Cranach de Samson et Dalila ainsi que de David et Bethsabée pour illustrer le 6e commandement - "Tu ne commettras point d'adultère" -.

Ce mécène  lui confie des missions diplomatiques, et offre ses œuvres notamment à Charles Quint et à François 1er. Certaines enrichissent les collections du roi Henri VIII.

Une section est dédiée à la représentation du nu au travers de personnages féminins empruntés à l'Antiquité ou à la Bible - Eve du tableau inspiré d'une gravure sur cuivre de Dürer ; Judith, veuve israélite, est transformée par Cranach en héroïne de la résistance protestante -. Des images "ambiguës" mêlant érotisme et morale. Ainsi cette Justice dont les mains portent une balance, évoquant la pondération, et une épée symbole de la dureté du jugement.

Arte rediffusa les 22 mai et 3 juin 2016 Cranach, les voleurs et la Stasidocumentaire de Heike Nelsen-Minkenberg et Thomas Müller (2015, 52 min) : "Une nuit de mai 1980, les deux volets d'un retable peints par Lucas Cranach, dit "l'Ancien", sont dérobés dans une église de Klieken, un village de RDA proche de Wittenberg, où se trouvait l'atelier du maître. Vingt-sept ans plus tard, l'oeuvre estimée à des centaines de milliers d'euros sur le marché de l'art ressurgit tout aussi mystérieusement. Mais s'agit-il de l'original ou d'une excellente copie ? Afin de tenter d'élucider l'affaire, l'historienne Natalie Akbari et le criminologue Michael Baurmann s'associent pour mener l'enquête. Celle-ci les conduit au coeur des troubles activités de la Stasi et de la Koko, sa branche commerciale, impliquée dans le trafic d'art en échange de devises. Chantages, internement de collectionneurs en hôpital psychiatrique, vols : la police de renseignement est-allemande ne lésinait pas sur les méthodes pour se procurer des trésors, avant de les revendre à l'Ouest. Certains marchands d'art commandaient même directement à la Stasi les toiles et antiquités qu'ils convoitaient. Entre histoire de l'art et débats d'experts sur les attributions - un examen aux rayons infrarouges révèle ainsi que c'est un des élèves les plus doués de Cranach qui a exécuté le retable -, politique et polar, cette passionnante investigation, qui revisite l'oeuvre du pionnier du nu profane, met en lumière l'extraordinaire opacité du marché de l'art en Europe et la faiblesse Une enquête édifiante sur le vol d'un retable de Cranach en Allemagne de l'Est, qui montre le rôle actif de la Stasi, alors en quête de devises, dans le trafic d’œuvres d'art".

Le 15 août 2016, John Walter, juge californien, a statué en faveur du Norton Simon Museum. Il a débouté Marei von Saher, héritière du collectionneur néerlandais juif Jacques Goudstikker de sa requête visant à ce que lui soit restitué Adam et Eve (c.1530), diptyque de Lucas Cranach l'Ancien. Cette affaire dure depuis dix ans devant la justice. Le juge a considéré que la famille Goudstikker n'avait pas respecté le délai concernant une réclamation en propriété de peintures. La Norton Simon Foundation a déclaré qu'elle "prend au sérieux la responsabilité fiduciaire à l'égard du public que notre titre de propriété d'oeuvres d'une telle importance confère. Nous avons exposé au public de manière quasi-continue les panneaux depuis 1971, et nous continuerons d'assurer qu'ils demeurent accessibles pour le public pendant les années à venir".

Le collectionneur juif Jacques Goudstikker a été contraint de vendre ces tableaux au dirigeant nazi Hermann Göring durant la Deuxième Guerre mondiale. Goudstikker avait acheté ces œuvres, qui avaient été mises en vente aux enchères par le gouvernement soviétique à Berlin, en 1931, avant de fuir l'Allemagne pour les Pays-Bas, qui sont tombés sous le joug nazi en 1940. C'est alors qu'il avait été contraint à cette vente à Göring ; les œuvres sont retournées aux Pays-Bas après la guerre.

“Evidemment, Mme von Saher est déçue par la décision de la Cour, et elle a l'intention d'interjeter appel”, a annoncé Larry Kaye, de la firme new-yorkaise Herrick Feinstein, à Artnet News. “Pendant les nombreuses années pendant lesquelles elle a cherché justice à propos du vol des biens de Jacques Goudstikker par les Nazis, Mme von Saher a eu beaucoup de succès, notamment quand ceux en possession de ses œuvres d'art ont bien agi et lui ont rendu des œuvres sans qu'elle ait à saisir la justice. Vraiment, Mme von Saher croit fermement que des négociations amiables sont le meilleur moyen à l'égard des revendications d’œuvres d'art volées par les Nazis et  ont résolu des douzaines de réclamations avec des particuliers, galeries et musées. Bien qu'elle ait affronté une résistance dans cette affaire, elle demeure optimiste sur sa victoire finale.”
Desi Goudstikker, la veuve de Jacque, a eu l'opportunité de réclamer les tableaux après la guerre, mais n'a pas initié de procédure, car elle pensait que le procès ne serait pas équitable.
Puis, de manière inattendue, les Stroganoffs, ont réclamé Adam et Eve. En 1961, George Stroganoff, alors exilé, a réclamé ces œuvres de Cranach, ainsi qu'un Rembrandt et un Petrus Christus, en indiquant qu'elles avaient été prises à sa famille après la Révolution russe.
Cependant Marei von Saher affirme que ces tableaux ont été pris par les Bolcheviques dans une église de Kiev.
Le gouvernement néerlandais a vendu Adam et Eve et le Petrus Christus à Stroganoff pour 60 000 florins en 1966, après avoir renoncé à réclamer le Rembrandt. En 1971, un collectionneur américain Norton Simon a acheté Adam et  Eve à Stroganoff pour $800 000.
Le Pasadena Museum of Modern Art a été renommé Musée Norton Simon en 1975 et a reçu sa collection, dont les tableaux de Cranach.
Depuis 2007, Von Saher réclame ces tableaux devant la justice américaine fédérale, mais on lui objecte toujours que Desi Goudstikker ne les a jamais réclamés. Mais le fait que l'affaire ait été entendue par la justice est en soi remarquable.
“Si ces tableaux ne reviennent pas à leur propriétaire, il y a un réel problème sur la manière de traiter les œuvres d'art volées par les Nazis” a dit E. Randol Schoenberg, avocat pour Von Saher, à  TAN.

Jusqu'au 23 mai 2011
Au musée du Luxembourg
19, rue de Vaugirard, 75006 Paris
Tél. : 01 40 13 62 00
Tous les jours de 10 h à 20h, nocturnes le vendredi et le samedi jusqu'à 22 h

Visuels
Lucas Cranach L’Ancien
Allégorie de la justice
1537
Panneau, 74 x 52 cm
collection privée
© Collection privée

Lucas Cranach L’Ancien
Autoportrait
1531
huile sur panneau de hêtre,
45,4 x 35,6 cm
Burgen, Schlösser Altertümer
© GDKE Rheinland-Pfalz
Lucas Cranach L’Ancien
Adam et Eve
vers 1510
tempera et huile sur bois, 58 x 44 cm
Varsovie, Museum Narodowe w Warzawie
© Museum Narodowe w Warzawie

Articles sur ce blog concernant :
Cet article a été publié le 17 mai 2011, et 21 mai 2016. 

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