Le Service historique de la Défense (SHD) présente, au Pavillon du Roi du château de Vincennes, l’exposition « politiquement correcte », choquante car elle occulte notamment les juifs et l'alliance étroite entre les Nazis et le grand mufti de Jérusalem Mohammad al-Husseini, intitulée « De la Libération à la Victoire combattre et reconstruire 1944-1945 » dotée d’un catalogue.
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On croit, souvent et à tort, que les débarquements des Alliés en Normandie puis en Provence, suivis de la Libération de Paris ont mis fin aux combats contre l'Occupant nazi en France. Cette exposition montre les territoires où les Nazis ont continué de lutter, freinant la fin de la Deuxième Guerre mondiale sur le territoire métropolitain.
« Les débarquements de Normandie (6 juin 1944) et de Provence (15 août 1944) ouvrent une séquence historique qui s’achève symboliquement par la Libération de Paris et la descente triomphale du général de Gaulle sur l’avenue des Champs-Élysées le 26 août 1944. Pour une majorité de Français, la guerre semble terminée. »
« Dans les faits, c’est une réalité pour les trois quarts du territoire national, puisque de Marseille à Paris les combats ont cessé, l’occupant a été vaincu et la légalité républicaine restaurée. Mais pour d’autres, la guerre est toujours présente. Elle continue dans l’Est au fil de la progression des armées alliées, dont l’armée française, et autour des dernières défenses allemandes de l’Atlantique. »
« Les campagnes des Vosges et d’Alsace au cœur du rude hiver 1944-1945 illustrent la difficulté à vaincre un ennemi qui continue à se battre vigoureusement. Il faut attendre le 30 mars 1945 pour que la 1ère armée française du général de Lattre de Tassigny franchisse le Rhin et lance, en Allemagne, une campagne qui la mènera jusqu’au Danube et au lac de Constance. Quant à la 2e division blindée du général Leclerc, elle s’illustre en délivrant Strasbourg et en plantant le drapeau français sur le Berghof, lieu de villégiature d’Hitler situé à proximité de Berchtesgaden, à l’extrême sud-est de l’Allemagne. La présence du général de Lattre de Tassigny aux côtés des grands chefs alliés lors de la signature de l’acte de capitulation de l’Allemagne à Berlin le 8 mai 1945 témoigne de la place de la France parmi les vainqueurs. »
« Les opérations militaires d’août 1944 à mai 1945 ne doivent cependant pas masquer le caractère dramatique dans lequel se trouve un pays victorieux mais exsangue. Pour un million de foyers, il y a toujours un mari, un père ou un frère prisonnier en Allemagne. Pour des dizaines de milliers d’autres, ce sont des familles entières décimées par la répression et disparues dans la nuit des camps de concentration et d’extermination. Les rivalités politiques entre le Gouvernement provisoire et un parti communiste en position de force au sein de la Résistance, la difficile fusion entre l’armée régulière et les Forces françaises de l’intérieur, l’épuration des anciens collaborateurs constituent des enjeux majeurs pour le retour de l’autorité de l’État républicain ».
« Dans le cadre du programme élaboré par le Conseil national de la résistance, un projet de refondation de la société commence à être mis en place. Cela s’articule avec les prémices de la reconstruction matérielle d’un pays en partie détruit par les combats et cherchant à panser les plaies de quatre années d’occupation. Sur le plan des relations extérieures, si de Gaulle est parvenu à s’imposer face aux alliés en obtenant une zone d’occupation en Allemagne, son gouvernement et ses armées restent largement dépendants de la logistique anglo-saxonne. Enfin, le rôle essentiel joué par l’empire colonial dans le retour de la France au combat modifie les équilibres politiques dans les colonies françaises. De l’Afrique du Nord à l’Indochine en passant par le Levant, le Sénégal ou Madagascar, les nationalismes locaux relèvent la tête et réclament a minima l’égalité des droits vis-à-vis de la métropole, voire l’indépendance. »
« Riche d’une documentation largement inédite composée d’archives, de photographies, d’affiches, d’objets ou de documents audiovisuels issus des fonds du Service historique de la Défense, de la DGSE, du musée de l’Armée, du musée de l’Air et de l’Espace, des Archives diplomatiques et de l’ECPAD, l’exposition De la Libération à la victoire. Combattre et reconstruire, 1944-1945 propose au public de redécouvrir, 80 ans après ces événements, la période souvent méconnue mais cruciale de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Elle s’attache ce faisant à décrypter et remettre en perspective la multiplicité des enjeux auxquels la France fut confrontée durant une des phases les plus décisives de son histoire contemporaine. »
Les quatre commissaires de l’exposition sont :
Guillaume Denglos: chargé d’études au département de l’histoire et de la symbolique du Service historique de la Défense, docteur en histoire contemporaine de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
Jean-Christophe Lucas : attaché d’administration de l’État, chef de la division défense du département des fonds d’archives au sein du Centre historique des archives du Service historique de la Défense.
Mathilde Dumonteil : archiviste, adjointe au chef de la division défense du département des fonds d’archives au sein du Centre historique des archives du Service historique de la Défense. Co-directrice de l’ouvrage Pour que renaisse la liberté. La Libération dans les archives du Service historique de la Défense.
Vincent Berne : docteur en philosophie de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et assistant de documentation et de conservation au département des entrées par voie extraordinaire du Centre historique des archives du Service historique de la Défense. Co-directeur de l’ouvrage Pour que renaisse la liberté. La Libération dans les archives du Service historique de la Défense.
Sous la direction de Vincent Berne, Mathilde Dumonteil, Magali Duchesne Lachèvre, l’ouvrage « Pour que renaisse la liberté. La libération dans les archives du Service historique de la défense » accompagne l’exposition. « À l’heure des commémorations du 80e anniversaire des débarquements, de la Libération et de la Victoire, le Service historique de la Défense – acteur culturel majeur du ministère des Armées, dont il conserve les quatre cent cinquante kilomètres linéaires d’archives – invite à redécouvrir ces moments-clés à la lumière de ses fonds et collections. Écrits ou figurés, institutionnels ou personnels, les documents conservés aussi bien à Vincennes que dans les neuf autres implantations du SHD, constituent des pièces indispensables à la compréhension des événements qui se succèdent à compter de juin1944. »
« Cette année-là, les actions coordonnées des armées alliées, de l’armée de Libération et de la Résistance intérieure parviennent à chasser l’occupant de ses points d’attache sur le sol français. Ce n’est qu’après avoir vu ses soldats libérer l’Alsace et franchir le Rhin que la France est élevée, le 8mai 1945, au rang d’allié-vainqueur. Enrichis de documents souvent méconnus, parfois inédits, dix-sept chapitres et portfolios reviennent sur ces événements et leurs acteurs, puisant dans les savoirs que les équipes du Service historique de la Défense, historiens et archivistes, œuvrent à perpétuer et enrichir au quotidien. »
La partialité de cette exposition choque, et provient peut-être du partenariat avec le Quai d'Orsay. Par exemple, aucune mention des juifs n'est indiquée dans les cartels. Le mot apparaît uniquement dans la photographie d'un papier d'identité exposé. Plus d'un million de juifs ont combattu, dans les rangs de la France Libre et dans ceux des armées des autres Alliés (US Army, Armée rouge, etc.) durant la Deuxième Guerre mondiale. Parmi ceux-ci, André Hadjadj, né à Constantine (Algérie) et donc ayant bénéficié du décret Crémieux, ayant grandi en Tunisie après le décès prématuré de son père. Blessé en Forêt noire (Allemagne), il est soigné notamment à Biarritz, et revient à Sousse (Tunisie). Là, sa mère, qui ne parle pas le français, lui demande de se rendre au commissariat de police pour récupérer l'immeuble dont elle avait été spoliée par le régime de Vichy. André Hadjadj revêt son uniforme militaire, y fixe ses médailles gagnées sur les champs de bataille (Italie, France, Allemagne) et se rend au commissariat où il parvient à récupérer le bien immobilier familial. On peut citer le Tunisien Miro Boukobza qui a combattu jusqu'aux camps nazis, jusqu'en Autriche...
Le 11 juillet 2025, j'ai interrogé la direction du musée et du Service historique de la Défense, ainsi que les commissaires de cette exposition ne me semblant pas répondre aux exigences historiques : pourquoi tous ces oublis ? Pourquoi personne parmi la dizaine d'experts ayant travaillé sur cette exposition n'a vu ces oublis graves ? Les responsables vont-ils corriger ces fautes historiques ?
Le 12 juillet 2025, Caroline Siarry, Chargée de la valorisation et de la communication du Service historique de la Défense, m'a répondu :
"Nous accusons réception de vos remarques et questionnements concernant votre visite de l’exposition le 22 mai dernier.
Comme vous l’avez vu lors de votre visite, l’exposition porte sur la libération de la métropole et la campagne d’Allemagne entre septembre 1944 et mai 1945, en mettant en avant le rôle spécifique des armées françaises à travers les archives (pour la plupart inédites) issues de nos fonds. Il s’agit de mettre en avant une période qui est peu connue sur le plan des opérations militaires, mais aussi sur le plan des enjeux de la reconstruction du pays (destruction massive des villes, rapatriement des 2 millions de Français déportés et prisonniers, dénazification, épuration…). Cette exposition est donc une synthèse des grands enjeux de cette période concernant le cas français.
Concernant votre première interrogation, le chiffre d’un million de combattants juifs que vous avancez est exact mais concerne l’ensemble des armées alliées (en particulier les armées américaine, soviétique et polonaise) sur l’ensemble de la période 1939-1945. À notre connaissance, nous n’avons pas de statistiques spécifiques dans nos archives sur le nombre de combattants juifs ayant combattus dans l’armée française entre septembre 1944 et mai 1945. Par ailleurs, nous vous rappelons que nous traitons largement de la question du rapatriement de l’ensemble des déportés français (juifs inclus) dans la troisième partie de l’exposition, ainsi que de la libération des camps de la mort par l’armée française à travers l’exemple du camp de Vehingen illustré par l’estampe de Jean Delpech ; un camp où 3 000 déportés sont décédés entre août 1944 et avril 1945.
Concernant votre seconde interrogation sur l’absence du grand mufti de Jérusalem lors du procès de Nuremberg, nous avons fait le choix de nous concentrer sur la traque des anciens dignitaires et criminels de guerre nazis à travers des fonds d’archives inédites qui nous été transmises récemment : le grand mufti n’apparaît pas dans ces documents. Il s'agit d'un cas très particulier de la dénazification.
La contribution des troupes marocaines est en effet soulignée dans notre exposition pour illustrer la part importante des troupes coloniales dans la libération de la métropole et l’occupation de l’Allemagne (12 % des forces françaises en 1944-1945 viennent du Maroc). Les viols que vous mentionnez concernent le théâtre d’opération italien entre mai et juin 1944, une période et une campagne qui n’est pas traitée dans notre exposition.
Plus globalement, les commissaires ont dû faire des choix en fonction des archives militaires disponibles dans nos fonds et qui ne concernent pas, par nature, tous les aspects de la Seconde Guerre mondiale. Ainsi, nous ne traitons pas du rôle majeur joué par les armées américaine, soviétique et britannique dans la victoire finale contre l’Allemagne nazie, où d’autres théâtres d’opérations (combat des Alpes...)."
Le 13 juillet 2025, je lui ai répondu :
"Je comprends la volonté du Service historique de la Défense (SHD) de mieux faire connaître, étudier, valoriser son fonds documentaire.
Cependant, votre message ne me convainc pas car il y avait des sections et documents permettant d'évoquer les juifs.
Cela fait près de 25 ans que je couvre des expositions en France et j'ai un DEA d'Histoire du XXe siècle. C'est la première fois que les juifs sont absents d'une exposition sur la Deuxième Guerre mondiale, à l'exception d'un document que j'ai du expliquer aux commissaires d'exposition.
C'est la fonction des panneaux de présenter le contexte - historique, géographique, social, etc. - d'une section d'exposition. C'est aussi la fonction des cartels d'informer sur les documents auxquels ils se rapportent. Ce qui manque dans vos archives aurait du/pu être indiqué dans les panneaux introduisant les sections de l'exposition. C'est ce que font les historiens, commissaires d'expositions et directeurs de musées. Et tous ceux qui ont contribué à l'exposition sont des professionnels.
Pour vous, les juifs semblent nécessairement des déportés - vous ne paraissez pas faire la différence entre les déportés raciaux et les déportés politiques - ou des morts. Non, l'Histoire montre qu'ils ont résisté (Marc Bloch), été présents lors du débarquement en Normandie et en Provence (Jean-Pierre Aumont), dans les FAFL (Max Guedj, Compagnon de la Libération, est considéré par la RAF et par Pierre Clostermann, comme le plus grand pilote de la France libre), etc. Le rétablissement de la légalité républicaine, un enjeu majeur, n'apparait guère dans l'exposition dans le volet "Reconstruction". C'eût été le moment de citer l'éminent juriste René Cassin, nommé vice-président du Conseil d’État (1944-1960) ou Raymond Aubrac, résistant nommé Commissaire de la République (préfet).
Concernant le camp de Vaihingen, 187 déportés juifs y avaient été transférés du ghetto de Radom (Pologne). Eh bien d'autres déportés juifs y ont été maltraités. Cette information aurait du/pu être indiquée par les commissaires de l'exposition, soit dans le cartel soit dans un panneau. Quand Le Figaro a décrit en 1945 les survivants de ce camp, il a omis d'indiquer qu'ils étaient juifs. 80 ans après, cette exposition occulte ce fait. Pourquoi ? A l'évidence, pas par ignorance.
Le grand mufti de Jérusalem al-Husseini a été l'allié d'Hitler qu'il avait rencontré à Berlin, et assuré notamment la propagande nazie à partir de Berlin dans le monde Arabe, notamment en Afrique du nord. Il était recherché par la Grande-Bretagne, la Yougoslavie et la France pour être inculpé au Tribunal de Nuremberg comme criminel de guerre. Pour les gouvernements de ces pays, il ne s'agissait pas d'un "cas très particulier de la dénazification". La France l'a capturé, placé en résidence surveillée à Paris. C'est le quai d'Orsay qui a organisé, avec l'accord de Charles de Gaulle, sa fuite vers l'Egypte. Les Archives diplomatiques sont partenaires de l'exposition, donc il eût été possible d'y trouver les documents, inédits, sur al-Husseini. Les commissaires de l'exposition, le directeur du musée, le ministère des Affaires étrangères et vous avez fait un choix, qui me paraît partial, injustifié et critiquable d'occulter ce personnage historique majeur en évoquant le Tribunal de Nuremberg. De plus, ce tribunal international a, pour la première fois, poursuivi et condamné pour crimes contre l'Humanité, une notion juridique élaborée par Hersch Lauterpacht.
Les images de la libération de Paris ne montrent guère l'Armée d'Afrique ou la Coloniale... En quoi l'occupation de l'Allemagne par les soldats marocains concernerait-elle une exposition intitulée "Combattre et reconstruire : de la Libération à la victoire" ou justifierait-elle la place disproportionnée accordée aux soldats marocains, au détriment par exemple de ceux plus nombreux originaires d'Algérie ? La part importante des soldats de l'Armée d'Afrique s'explique aussi par le "blanchiment" des armées alliées, notamment françaises. Ce qui est omis, sauf erreur involontaire de ma part, dans l'exposition.
Je vous ai cité quelques unes des possibilités d'introduire les juifs dans l'exposition, et suis disponible pour contribuer gracieusement à rétablir leur présence historiquement justifiée dans l'exposition.
J'attends la réponse de la direction du musée et des commissaires de l'exposition, du ministère de la Défense ainsi que du Quai d'Orsay afin de les citer aussi dans mon article".
Aucun ne m'a répondu.
Introduction
« L’exposition s’ouvre sur une présentation de la situation qui prévaut à l’été 1944. »
« L’occupation de l’Europe par l’Allemagne nazie atteint son apogée à l’été 1942. Pour reconquérir les territoires perdus depuis l’invasion de la Pologne en septembre 1939, les Alliés réfléchissent à une nouvelle stratégie et travaillent à une meilleure coordination. La Conférence de Téhéran, en novembre 1943, permet à Staline, Churchill et Roosevelt de s’entendre sur la nature des opérations à préparer pour l’année suivante. Afin de vaincre l’Allemagne, une stratégie d’encerclement est mise au point. Sa réussite est conditionnée par un effort simultané sur les fronts Ouest et Est. »
« Le débarquement en Normandie débute le 6 juin 1944 avec l’envoi de combattants à l’intérieur des terres, en soutien d’une opération inédite par son ampleur sur les plages de l’ouest du Calvados et de l’est du Cotentin. Si le fameux mur de l’Atlantique ne tient pas plus de douze heures, l’engorgement des plages et les mauvaises conditions météorologiques retardent l’arrivée des renforts. La« bataille des haies »(13juin-24juillet) dans le bocage normand marque d’abord l’enlisement des troupes alliées, avant qu’une ample offensive (opération Cobra) ne fasse céder le front, le 27 juillet. La percée d’Avranches (30juillet) permet de renouer avec la guerre de mouvement. Les lignes allemandes s’effondrent avec la rupture de la poche de Falaise (16-21août), un événement qui, deux jours après la fin de la contre-offensive soviétique (opération Bagration) sur le front de l’Est, marque le dernier haut fait de la bataille de Normandie. »
« Alors que cette dernière prend fin, le débarquement de Provence (opération Dragoon) est déjà un succès. La conduite de ce «second jour J» (15août1944), a été confiée au général américain Alexander Patch. Contrairement à Overlord, la France joue un rôle majeur dans la réussite de cette opération, avec le débarquement des 260 000 combattants de l’armée B (bientôt rebaptisée 1re armée) du général Jean de Lattre de Tassigny. »
« Ayant débuté par la Corse (septembre-octobre1943), la Libération franchit ainsi, avec le débarquement allié dans le Var, une autre étape décisive. Mais si la guerre semble déjà gagnée à l’Ouest et à l’Est, la libération de Paris – en ébullition depuis le 19 août – est l’occasion, pour le général de Gaulle, d’asseoir son autorité en rappelant à tous que les Français participent à leur propre libération. Alors que la «bataille de Paris» se poursuit – notamment à Vincennes, dont le château constitue un point d’observation et un refuge pour des troupes allemandes en repli –, le chef de la France libre gagne la capitale le 25 août et défile en triomphateur le lendemain sur les Champs-Élysées. Cependant, dans son discours à l’Hôtel-de-Ville, de Gaulle prévient que, certes, « L’ennemi chancelle mais il n’est pas encore battu. Il reste sur notre sol ».
I -L'armée nouvelle d'une république restaurée (septembre-novembre 1944)
« La première séquence de l’exposition permet de comprendre comment a été forgé et a évolué l’outil militaire mis à l’épreuve de la reconquête du territoire français après les débarquements. »
« Les armées françaises qui combattent pour la libération de la métropole sont le fruit de plusieurs amalgames. Si la 2e division blindée (2eDB) du général Philippe Leclerc est issue des Forces françaises libres (FFL) commandées par de Gaulle depuis 1940, la 1re armée du général Jean de Lattre de Tassigny est l’héritière de l’armée qui a combattu en Italie entre décembre 1943 et juillet 1944 sous les ordres du général Alphonse Juin : le Corps expéditionnaire français. Ce dernier est lui-même issu de la difficile fusion entre l’armée d’Afrique ex-vichyste et la 1re division française libre opérée à l’été 1943 en Afrique du Nord. »
« La libération de Paris est le prélude à une nouvelle fusion. Pour des raisons tant politiques (saper l’influence du parti communiste) que militaires (compenser les pertes), de Gaulle décide de réaliser rapidement l’amalgame entre les armées régulières et les Forces françaises de l’intérieur (FFI) nées dans la Résistance. Le décret du 20 septembre 1944 propose aux FFI soit de s’engager, soit de rentrer dans leurs foyers. Entre 430 000 et 530 000 FFI combattent sur le front de septembre 1944 à mai 1945. Pour raffermir l’identité républicaine de cette hétéroclite « armée nouvelle », l’imaginaire des armées de la Révolution française à travers le souvenir de la victoire de Valmy et de l’héroïsme des soldats de l’an II est réactivé. Ce sont donc des troupes issues d’horizons très variés et aux idéologies parfois antagonistes qui combattent côte-à-côte tout au long de la libération du territoire. »
Des archives remarquables issues des fonds du SHD
« L’exposition illustre la richesse des fonds d’archives militaires, en mettant en scène des œuvres de typologies mais aussi d’origines différentes. Se côtoient ainsi documents officiels issus des archives publiques, des documents figurés, des objets de symboliques militaires ou encore des témoignages personnels issus des fonds privés donnés au service, pour certains dans le contexte du 80e anniversaire de la Libération. »
« En mai 1940, Pierre Racine(1909-2011) est officier de liaison, affecté comme lieutenant à la 41e demi-brigade de chasseurs à pied. Fait prisonnier, il est interné dans l’Oflag XVIIA en Autriche, jusqu’en avril 1945. Dans le carnet qu’il a laissé, aujourd’hui conservé au Service historique de la Défense, il témoigne des événements qui ont conduit à sa libération. »
Le serment de Koufra
« Début1941, des Français libres, sous les ordres du colonel Leclerc, marchent sur la Libye avec pour objectif l’oasis de Koufra, bastion italien. Après un long mois de siège, le fort El Tag capitule finalement et le drapeau français y est hissé le 2 mars. Leclerc et ses hommes jurent alors qu’ils n’arrêteront pas le combattant que les couleurs françaises ne flotteront pas sur la cathédrale de Strasbourg. »
« Ce serment, un marqueur symbolique fort pour Leclerc, est finalement tenu en novembre 1944 lorsque ses troupes libèrent la capitale alsacienne. »
L’insigne des bisons du 126e régiment d’infanterie
« Le 126e régiment d’infanterie (RI) est en garnison à Brive-la-Gaillarde (Corrèze) depuis 1907. Dissous après la défaite de juin 1940, il est recréé à partir des maquis de la Corrèze et de la Dordogne en octobre 1944. »
« Pour son insigne, le 126e RI a choisi le bison, symbole de force. Aux côtés de la croix de Lorraine, le blason « Oradour » est un hommage au village martyr. »
« Cet insigne et ceux des autres régiments de l’armée de Terre issus des Forces françaises de l’intérieur font l’objet d’une présentation dédiée dans l’exposition, qui met en valeur les collections exceptionnelles de symbolique militaire du SHD. »
II –De l’hiver des combats au printemps de la Victoire (novembre 1944-mai 1945)
« Fin septembre 1944, seules les régions frontalières de la ligne Siegfried (ligne de défense allemande faisant face à la ligne Maginot), quelques bastions dans les Alpes ou longeant l’Italie, ainsi que les poches de l’Atlantique, voient les combats se prolonger. Visant une reddition inconditionnelle, les Alliés veulent porter le fer en Allemagne. De leur côté, les Soviétiques comptent effacer l’affront que représenta l’opération Barbarossa (juin-décembre1941), s’emparer de Berlin et asseoir leur hégémonie en Europe orientale. Une course de vitesse s’engage donc entre les membres de la coalition jusqu’à la capitulation allemande, que présente la seconde partie de l’exposition. »
« Cet hiver-là, sur le front Ouest, l’objectif est d’atteindre le Rhin. La guerre de position des Vosges se mue en guerre d’usure. D’abord tenus en échec, les Français reprennent des villes importantes grâce à l’appui américain, mais la détermination de l’adversaire n’est nullement ébranlée, et d’intenses combats ont lieu, retardant l’échéance de la Victoire. L’ennemi est définitivement chassé du territoire national le 9 février 1945. D’abord cantonnée à un rôle défensif, la 1re armée française du général de Lattre peine d’abord à prendre pied sur le sol allemand, avant de participer ensuite activement à la campagne d’Allemagne. »
Des prêts inédits accordés au SHD
« L’exposition est le fruit des partenariats noués entre le Service historique de la Défense et différentes institutions afin d’enrichir le parcours proposé au public. Des documents exceptionnels ont ainsi pu faire l’objet de prêts, notamment par le Musée de l’Armée et les Archives diplomatiques de La Courneuve. Cohabitent ainsi archives, vidéos, photographies, œuvres iconographiques, uniformes et objets, qui permettent de comprendre les événements qui amènent à la capitulation allemande et offrent une vision sensible et concrète de l’expérience de guerre des contemporains. »
La déclaration concernant la défaite de l’Allemagne
« Est présenté au sein du parcours l’original de la version en français de la «déclaration concernant la défaite de l’Allemagne et la prise de l’autorité suprême par le Gouvernement provisoire de la République française et par les Gouvernements des États-Unis, du Royaume-Uni et de l’Union des Républiques socialistes soviétiques » du 5 juin 1945, signée par le maréchal soviétique Georgi Joukov, le General of the Army américain Dwight D.Eisenhower, le FieldMarshal britannique Bernard Law Montgomery et le général d’armée Jean de Lattre de Tassigny. Ce texte important fixe les modalités de la prise de contrôle du pays vaincu par les vainqueurs. Contrairement à 1918, l’Allemagne sera donc bel et bien occupée et administrée par les Alliés. »
Forêt-Noire-7echasseurs d’Afrique
« L’estampe du reporter de guerre Jean Delpech intitulée «ForêtNoire-7echasseurs d’Afrique» représente la libération du camp de concentration de Vaihingen par la 1re armée françaiseenavril1945.Plus de 3000 déportés y sont décédés entre août1944 et avril 1945 : le camp était utilisé comme un mouroir pour les détenus malades des différents Kommandos du camp du Struthof. Horrifié par les scènes des cadavres laissés sur place, Jean Delpech apporte ici par l’image un témoignage puissant sur cet épisode tragique. »
Exemplaire de Mein Kampf d’Adolf Hitler
« L’exposition présente un exemplaire de Mein Kampf particulièrement symbolique puisqu’il a appartenu à Adolf Hitler. Publié en 1940, l’ouvrage a été pris à Berchtesgaden, au nid d’aigle, le 5 mai 1945 par la 3e compagnie du 13e bataillon du génie de la 2e division blindée française. »
III –Reconstruire un pays vainqueur mais éprouvé (mai 1945-décembre 1946)
« La troisième partie de l’exposition est consacrée aux immenses défis qu’affronte la France de 1945 : reconstruction, rapatriement des prisonniers, déportés et personnes déplacées, épuration et poursuite des criminels de guerre, occupation de l’Allemagne et ébranlement de l’empire colonial. »
« Le conflit se solde par d’énormes destructions et les problèmes matériels handicapent lourdement le quotidien des Français. Le bilan des pertes civiles de la Libération est lourd. Redevenue champ de bataille, la France a aussi subi de considérables dommages. Des villes entières, comme Brest, Saint-Lô, Caenou Le Havre, sont réduites à l’état de ruines par l’intensité des combats. Les chantiers sont donc immenses, entre le relogement des sans-abris, l’indemnisation des »dégâts matériels, la reconstitution des équipements et la renaissance des villes détruites. »
« À la Libération, les troupes alliées progressent en territoire ennemi. Prisonniers de guerre et travailleurs issus de toute l’Europe sont libérés de leurs stalags et oflags. Environ 950 000 prisonniers et 800 000 travailleurs attendent de rentrer en France. De juillet 1944 à mai1945, les camps de concentration et d’extermination sont également libérés. »
« C’est aussi l’heure des comptes et de l’épuration en métropole, alors qu’est lancée la dénazification de l’Allemagne occupée et qu’est mis en place un tribunal militaire international à Nuremberg. »
« Retrouvant son rang international, La France accède au statut de pays vainqueur, auquel sont accordés un siège permanent et un droit de veto au sein du conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU) instituéeenoctobre1945. Mais la sortie de guerre voit la puissance coloniale française confrontée à la renaissance des nationalismes locaux et des aspirations à l’indépendance, qui vont ouvrir une nouvelle séquence historique : celle des conflits de décolonisation sur fond de guerre froide. » Pourquoi ne pas évoquer le djihad en Algérie ?
Des archives inédites des services de renseignement
« Le parcours offre aux visiteurs des documents qui sont pour la première fois présentés au public. En font partie des archives de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE). Instituée en 1982, la DGSE est l’héritière des services secrets de la France libre, le Bureau central de renseignements et d’action (BCRA) fondé en 1942. »
« Les archives produites par le BCRA jusqu’à la Libération illustrent l’œuvre accomplie dans la lutte clandestine pour organiser ses structures, recruter des agents, recueillir le renseignement et coordonner l’action des réseaux en France occupée. À l’heure de la victoire, alors que le BCRA fait place à la Direction générale des études et recherches (DGER) en 1944, puis au Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE) en 1945, le renseignement français est devenu une institution moderne. »
« Les archives constituées après 1945 apportent quant à elles un éclairage sur le rôle méconnu des services français dans la traque des criminels de guerre nazis et de leurs complices. La « section spéciale Allemagne» en particulier, effectue en zone d’occupation française un formidable travail de collecte d’archives allemandes, permettant de conserver une trace écrite exhaustive du système policier nazi. La «direction des services de documentation», chargée du contre-espionnage, ouvre de son côté plusieurs milliers de dossiers d’enquêtes, sur des criminels recherchés en France et en Allemagne. »
« Restées longtemps inaccessibles au public avant d’être progressivement classées et inventoriées par les archivistes du SHD depuis les années 2010, les archives des services spéciaux de la Seconde Guerre mondiale constituent un riche fonds d’archives de plus de 500 mètres linéaires. Un nouveau versement réalisé en 2024 par la DGSE a fait entrer dans les fonds du SHD un complément de quelques centaines de dossiers. Ces archives inédites de la Seconde Guerre mondiale témoignent de l’action à long terme du renseignement français. »
Conclusion
« Les archives produites durant la Seconde Guerre mondiale, en particulier durant les combats de la Libération, constituent une source indispensable à l’histoire collective et individuelle. Elles sont aussi le matériau irréfutable de la recherche historique, avec plus de 70 000 ouvrages et 2000 thèses consacrés au conflit. »
« À la différence des guerres précédentes, ces archives n’ont pas seulement concerné les acteurs militaires, mais bien l’ensemble des populations, qu’il s’agisse des prisonniers de guerre, des déportés politiques et résistants ou des autres victimes civiles. Longtemps exploitées par l’administration, elles ont permis d’accorder à tous un statut et des droits. Aux résistants, combattants de la Libération et de la Victoire, les archives ont attesté de la reconnaissance qu’ils méritaient, avant d’en constituer le patrimoine. »
« Le parcours de ces archives est lui-même marqué par les aléas de la guerre. Alors que certaines sont détruites dans les bombardements, d’autres sont évacuées et dispersées, d’autres encore saisies par l’occupant pour son profit. Elles ont aujourd’hui retrouvé leur place et comblé les lacunes de l’Histoire. Les archives allemandes de l’Occupation et de la répression ont elles aussi disparu dans les bouleversements de la Libération ou ont été saisies à leur tour par les forces françaises en Allemagne. »
« Classées et mises à la disposition du public à partir de 1994, les archives militaires de la Seconde Guerre mondiale se sont enrichies d’images, de témoignages et de dons privés. Elles inspirent encore aujourd’hui les armées, en éclairant les commémorations et en inspirant la symbolique militaire. Plus globalement, les archives de la guerre permettent, sans oublier le côté sombre (la collaboration et la répression), d’illustrer le meilleur (la Résistance et la Victoire). »
« 80 ans après les derniers combats, le Service historique de la Défense conserve précieusement ces documents, qui sont autant de traces de l’histoire militaire de la Nation, laissées par une génération appelée à disparaître, comme celle de la Première Guerre mondiale avant elle. Tous ces combattants de la liberté nous parlent aujourd’hui encore au travers de ces archives. »
PARTENAIRES DE L’EXPOSITION
Le musée de l’Armée
« Grand musée d’histoire militaire française et européenne, le musée de l’Armée, placé sous la tutelle du ministère de la Défense, offre l’une des collections les plus riches au monde dans ce domaine avec près de 500000 pièces, de l’âge de bronze à nos jours. Situé au cœur de l’Hôtel national des Invalides, lieu chargé d’histoire créé par Louis XIV en 1670 pour accueillir les soldats invalides et vétérans, il est né en 1905 de la fusion des collections du musée d’Artillerie et du musée historique de l’Armée. Classé parmi les cinq musées français les plus fréquentés, le musée de l’Armée propose une large programmation culturelle, ouverte à tous les publics. »
Les Archives diplomatiques
« Depuis 1680, les archives du ministère des Affaires étrangères conservent les engagements internationaux de la France et l’ensemble des documents qui émanent des activités de ce département ministériel depuis son apparition à la fin du règne de Henri III. Les Archives diplomatiques constituent aujourd’hui une direction du ministère des Affaires étrangères, pour lequel elles conservent et communiquent des actes juridiques à valeur probante pour l’État ou pour les citoyens ainsi que des fonds qui matérialisent la mémoire de travail des services chargés de la politique extérieure de la France. Depuis 150 ans et la création de la commission des archives diplomatiques, elles multiplient les activités de recherche, documentation, publication et communication au service de la recherche historique. »
Le musée de l’Air et de l’Espace
« Situé sur le site de l'aéroport du Bourget, le Musée de l'Air et de l'Espace est l'un des plus importants musées aéronautiques de France et possède l'une des collections les plus riches au monde. Fondé en 1919, il retrace l'histoire de la conquête de l'air et de l'espace. »
L’établissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense
« Héritier des Sections photographique et cinématographique des armées créées en 1915, l’ECPAD conserve des fonds d’archives audiovisuelles et photographiques sur tous les conflits contemporains, de la Première Guerre mondiale à nos jours, soit 15 millions de photos et 100000 heures de films. »
« Aujourd’hui, l’ECPAD est un témoin en temps réel de l’engagement des forces armées françaises sur tous les théâtres d’opérations avec ses équipes de reportage formées aux conditions de tournage opérationnel. En un peu plus d’un siècle, le visage des conflits dans lesquels l’armée française a été engagée a profondément changé. Parallèlement, les contraintes techniques ont évolué, ouvrant la voie à une production plus importante, tandis que l’expertise des opérateurs des armées leur a permis, en toutes circonstances, de capter des images pour l’information et de témoigner pour la mémoire. Leurs images sont autant de fenêtres ouvertes sur l’Histoire et sur l’action de toutes les armées. »
L’institut national de l’audiovisuel
« L’Institut national de l’audiovisuel (INA), modèle d’entreprise publique unique au monde, est un média riche de décennies de mémoire télé, radio et web. Fort de plus de deux milliards de vidéos vues par an, l’INA archive, préserve, numérise et diffuse vers tous les publics l’une des plus vastes collections audiovisuelles au monde. Dans un contexte de mutations technologiques accélérées, l’INA participe à la réinvention de l’écosystème audiovisuel et numérique en déployant une expertise singulière qui fait de lui un média distinctif, un média patrimonial ancré dans le temps long et la mémoire, soucieux de transmettre les savoirs et les savoir-faire dont il est le dépositaire. »
Pour en savoir plus: ina.fr
Sous la direction de Vincent Berne, Mathilde Dumonteil, Magali Duchesne Lachèvre, l’ouvrage « Pour que renaisse la liberté. La libération dans les archives du Service historique de la défense ». Silvana Editoriale et Service historique de la Défense, 2025. Format : 21,5 x 28,5 cm. Couverture : reliée. 192 pages. 160 pages. ISBN : 9788836657209. 25 €
Au château de Vincennes
Pavillon du Roi, 1er étage, salles d’exposition
Avenue de Paris, 94300 Vincennes
Du mardi au vendredi de 13h00 à 17h00
Le samedi de 9h30 à 15h00
Le dimanche de 10h à 17h00
L'exposition est fermée le lundi
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