Sherin Khankan, quadragénaire danoise née d'une union mixte d'immigrés, dirige à Copenhague la mosquée Mariam, première mosquée uniquement pour les femmes en Europe. Arte diffusera le 26 août 2020 « Quand l'imam est une femme » (Die Reformerin. Wenn der Imam eine Frau ist ; Reformisten ; The Reformist - A Female Imam) de Marie Skovgaard.
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Sherin Khankan, est née en 1974 au Danemark dans une famille constituée d'un père homme de lettres syrien et d'une mère infirmière finlandaise chrétienne. Elle aspire à réconcilier ces deux mondes opposés.
"Lorsqu'elle avait 11 ans, elle a vu son réfugié syrien de père, qui l'avait jusqu'alors éduquée avec sa sœur à l'écart de la religion, traverser une crise de foi, écrasé par la culpabilité d'avoir élevé ses filles sans leur parler de l'islam. "Il s'est senti coupable", souffle-t-elle. Une phrase terrible lui reste en mémoire : "Si tu ne crois en rien, tu n'es rien!" A ce moment-là, l'adolescente comprend que l'univers est habité par une force venue de l'au-delà, que la colère noire de son père englobe "la foudre tombée du Walhalla [le lieu de séjour des héros dans la mythologie nordique] et le ciel des Vikings". "Et encore, ajoute-t-elle, aujourd'hui, je vous passe les détails. Son discours a été très violent, surtout pour une enfant. A 19 ans, elle qui est "née musulmane" se "soumet" à son tour à l'islam. Pour cela, elle change son prénom d'Ann Christine en Sherin. Son père, alors, ne crie plus. Pourtant, loin de se réjouir à l'idée de la voir aspirer à des responsabilités religieuses, il s'inquiète et l'implore : "Porte le voile mais surtout ne prends pas le titre d'imame." Pour lui, c'est trop révolutionnaire et trop dangereux".
Sherin Khankan débute des études à Damas, en Syrie, et retourne au Danemark en 2000. A l'université de Copenhague, elle obtient un master en sociologie des religions et philosophie, et un Master en arabisme à l’université de Damas.
Liant la religion et la politique, opposée aux "structures patriarcales", elle a créé l'association Musulmans critiques en août 2001. Elle prône un "féminisme islamique", un islam "ouvert, tolérant" conciliable avec la démocratie.
Sherin Khankan a été candidate du Parti social-libéral danois aux élections législatives au Danemark. Au début des années 2000, "alors qu’elle envisageait de se lancer en politique (dans Radikale Venstre, un parti de centre gauche), elle avait refusé d’abjurer la charia". "Sherin Khankan est étrillée, estampillée radicale, à la suite d'une prise de position ambiguë sur la lapidation. "Je suis contre, évidemment, mais j'ai élargi le débat à la peine de mort en général, même de façon légitime, comme en Occident." Quinze ans après, cette histoire la "hante encore" et elle se montre désormais plus claire : "L'islam politique est un échec. Il a été utilisé comme idéologie pour manipuler et provoquer des antagonismes entre croyants et non-croyants, entre l'Orient et l'Occident... En 2017, "trois députés d'extrême droite – dont un musulman – l'accusent de propager un islam radical. "Cette fois, je vais les assigner en justice pour diffamation. Ils vont trop loin", soupire-t-elle."
Le 26 décembre 2016, dans un post intitulé "Un état islamique n'est pas notre rêve" publié sur Facebook, Sherin Khankan a qualifié Tarik Ramadan d'"islamologue réformiste", de "théologien de l'islam", de "réformateur" et de "philosophe". Or, Tarik ou Tariq Ramadan, "de haute lignée islamiste", "nie tout lien avec le terrorisme, mais les indices sont clairs. Comme l'écrit Lee Smith dans The American Prospect, il est un islamiste de sang froid dont le « cri de mort à l'Occident procède d'un djihad plus discret et subtil, mais d'un djihad tout de même ». (Daniel Pipes)
Elle a affirmé en 2018 : « Si une femme est contrainte de porter le hijab, je me battrai pour qu’elle ne le porte pas ».
"Sa double culture, en revanche, la questionne toujours. "Je suis syrienne", lâche-t-elle au détour d'une phrase. Avant de se reprendre : "Je suis danoise, finlandaise et syrienne, je refuse de me définir du point de vue de la nation : le passeport et le sang n'ont rien à voir." Ce qui la définit, c'est son opposition "à tous les dogmes" : "Les femmes doivent être entièrement libres de choisir de porter le voile ou non."... Son propre mari, un Danois d'origine pakistanaise pratiquant un islam strict et politique, ne fête pas Noël. Du coup, elle a cessé de le célébrer", précise-t-elle à l'automne 2017.
Le 13 mai 2020, sur son compte Facebook, elle a publié un "Manifeste musulman", plaidoyer pour la mosquée Mariam et listant "7 thèses de réforme fondé sur des principes islamiques de justice et des droits humains universel"..
Mère de famille nombreuse, elle a divorcé.
Sherin Khankan figure parmi les 100 femmes de l'année 2016 par la BBC. Elle a fondé "Exitcirklen (ExitCercle), première organisation de développement au Danemark qui propose des groupes de discussion pour les personnes exposées aux violences psychologiques, au contrôle social et religieux. éNous avons un programme qui donne aux participants douze outils cognitifs leur permettant de faire face aux conséquences de la violence J’ai 40 volontaires et 3 employés qui travaillent avec moi et nous comptons aujourd’hui sept groupes de soutien au Danemark", a-t-elle expliqué en mai 2019. Et d'ajouter : "Nous avons donc dû raconter toute ces histoires qui sont tombées dans l’oubli, ces histoires de femmes qui étaient imams à l’époque du prophète à Médine. En réalité, nous ne faisons aucune réforme, nous retournons à nos racines, aux sources et à nos traditions... Nous avons également reçu la visite du grand imam de Jakarta en Indonésie, qui reçoit 200 000 visiteurs chaque vendredi dans la Mosquée Istiqlal. Ce dernier est venu bénir notre mosquée et nous a confié que les femmes imams sont une bénédiction pour les communautés islamiques. Nous avons aussi reçu la visite d’un grand sheikh d’Afrique du Sud et nous avons établi un partenariat avec le Centre de théologie et de science islamique de Münster en Allemagne avec lequel nous planifions une conférence. Donc notre légitimité à l’étranger ne fait qu’augmenter."
"Lorsqu'elle avait 11 ans, elle a vu son réfugié syrien de père, qui l'avait jusqu'alors éduquée avec sa sœur à l'écart de la religion, traverser une crise de foi, écrasé par la culpabilité d'avoir élevé ses filles sans leur parler de l'islam. "Il s'est senti coupable", souffle-t-elle. Une phrase terrible lui reste en mémoire : "Si tu ne crois en rien, tu n'es rien!" A ce moment-là, l'adolescente comprend que l'univers est habité par une force venue de l'au-delà, que la colère noire de son père englobe "la foudre tombée du Walhalla [le lieu de séjour des héros dans la mythologie nordique] et le ciel des Vikings". "Et encore, ajoute-t-elle, aujourd'hui, je vous passe les détails. Son discours a été très violent, surtout pour une enfant. A 19 ans, elle qui est "née musulmane" se "soumet" à son tour à l'islam. Pour cela, elle change son prénom d'Ann Christine en Sherin. Son père, alors, ne crie plus. Pourtant, loin de se réjouir à l'idée de la voir aspirer à des responsabilités religieuses, il s'inquiète et l'implore : "Porte le voile mais surtout ne prends pas le titre d'imame." Pour lui, c'est trop révolutionnaire et trop dangereux".
Sherin Khankan débute des études à Damas, en Syrie, et retourne au Danemark en 2000. A l'université de Copenhague, elle obtient un master en sociologie des religions et philosophie, et un Master en arabisme à l’université de Damas.
Liant la religion et la politique, opposée aux "structures patriarcales", elle a créé l'association Musulmans critiques en août 2001. Elle prône un "féminisme islamique", un islam "ouvert, tolérant" conciliable avec la démocratie.
En février 2016, à Copenhague, elle ouvre la mosquée Mariam, première mosquée accueillant exclusivement des femmes en Europe, et y dirige les prières dès août 2006. La mosquée a une autre femme imam : Saliha Marie Fetteh. "Les contrats de mariage se veulent progressistes : interdisant la polygamie et les violences conjugales, ils reconnaissent aussi le droit des femmes au divorce".
Le 26 décembre 2016, dans un post intitulé "Un état islamique n'est pas notre rêve" publié sur Facebook, Sherin Khankan a qualifié Tarik Ramadan d'"islamologue réformiste", de "théologien de l'islam", de "réformateur" et de "philosophe". Or, Tarik ou Tariq Ramadan, "de haute lignée islamiste", "nie tout lien avec le terrorisme, mais les indices sont clairs. Comme l'écrit Lee Smith dans The American Prospect, il est un islamiste de sang froid dont le « cri de mort à l'Occident procède d'un djihad plus discret et subtil, mais d'un djihad tout de même ». (Daniel Pipes)
Elle a affirmé en 2018 : « Si une femme est contrainte de porter le hijab, je me battrai pour qu’elle ne le porte pas ».
"Sa double culture, en revanche, la questionne toujours. "Je suis syrienne", lâche-t-elle au détour d'une phrase. Avant de se reprendre : "Je suis danoise, finlandaise et syrienne, je refuse de me définir du point de vue de la nation : le passeport et le sang n'ont rien à voir." Ce qui la définit, c'est son opposition "à tous les dogmes" : "Les femmes doivent être entièrement libres de choisir de porter le voile ou non."... Son propre mari, un Danois d'origine pakistanaise pratiquant un islam strict et politique, ne fête pas Noël. Du coup, elle a cessé de le célébrer", précise-t-elle à l'automne 2017.
Le 13 mai 2020, sur son compte Facebook, elle a publié un "Manifeste musulman", plaidoyer pour la mosquée Mariam et listant "7 thèses de réforme fondé sur des principes islamiques de justice et des droits humains universel"..
Mère de famille nombreuse, elle a divorcé.
Sherin Khankan figure parmi les 100 femmes de l'année 2016 par la BBC. Elle a fondé "Exitcirklen (ExitCercle), première organisation de développement au Danemark qui propose des groupes de discussion pour les personnes exposées aux violences psychologiques, au contrôle social et religieux. éNous avons un programme qui donne aux participants douze outils cognitifs leur permettant de faire face aux conséquences de la violence J’ai 40 volontaires et 3 employés qui travaillent avec moi et nous comptons aujourd’hui sept groupes de soutien au Danemark", a-t-elle expliqué en mai 2019. Et d'ajouter : "Nous avons donc dû raconter toute ces histoires qui sont tombées dans l’oubli, ces histoires de femmes qui étaient imams à l’époque du prophète à Médine. En réalité, nous ne faisons aucune réforme, nous retournons à nos racines, aux sources et à nos traditions... Nous avons également reçu la visite du grand imam de Jakarta en Indonésie, qui reçoit 200 000 visiteurs chaque vendredi dans la Mosquée Istiqlal. Ce dernier est venu bénir notre mosquée et nous a confié que les femmes imams sont une bénédiction pour les communautés islamiques. Nous avons aussi reçu la visite d’un grand sheikh d’Afrique du Sud et nous avons établi un partenariat avec le Centre de théologie et de science islamique de Münster en Allemagne avec lequel nous planifions une conférence. Donc notre légitimité à l’étranger ne fait qu’augmenter."
« La femme est l'avenir de l'islam »
En 2017, les éditions Stock ont publié « La femme est l'avenir de l'islam » de Sherin Khankan, qui avait signé "Islam et réconciliation - une affaire publique" (2007). « C’est à la mosquée que l’idée d’un féminisme islamique me traverse l’esprit. Écoutant le khutba du grand mufti, je me dis : Se pourrait-il qu’une femme conduise la grande prière du vendredi et qu’au lieu d’un homme, ce soit une personne du sexe opposé qui parle en ce moment ? Que se passerait-il ? » Et pourquoi pas ? Sherin Khankan ne connaît pas la peur. Elle raisonne. Elle croit. Dans la première mosquée pour femmes en Europe, à Copenhague, elle se bat chaque jour pour une relecture tolérante du Coran. Ne portant le voile qu’à la mosquée, elle anime une « Islamic Academy » à l’intention des femmes, où sont enseignées la philosophie islamique et la prière. Elle y célèbre aussi ses premiers mariages interreligieux. Dans ce livre confession, Sherin Khankan parle pour la première fois de son enfance, de sa pratique religieuse, du soufisme. La mère de quatre enfants évoque sa famille avec tendresse, la militante son combat pour un féminisme islamique. »
« Quand l'imam est une femme »
Arte diffusera le 26 août 2020 « Quand l'imam est une femme » (Die Reformerin. Wenn der Imam eine Frau ist) de Marie Skovgaard. « Une femme imam, Sherin Khankan, a ouvert à Copenhague la première mosquée 100% féminine d'Europe. Elle entend combattre l’influence de ces docteurs en religion qui s’appuient sur le Coran pour prôner l’assujettissement de l’épouse à l’époux, stigmatiser les non-croyants ou interdire les mariages inter-religieux et homosexuels... »
« Copenhague, hiver 2015. Avec un groupe de proches, Sherin Khankan, qui commence à exercer des fonctions d’imam, que beaucoup lui contestent en raison de son genre, planche sur le projet d’une nouvelle mosquée ».
« Divorcée, mère de deux enfants, cette quadragénaire charismatique issue d’un couple mixte (un père syrien, une mère finlandaise) et ses alliés veulent promouvoir une vision de l’islam qu’ils savent, sinon minoritaire parmi les fidèles, en tout cas combattue par la majorité de ceux qui parlent au nom de "la communauté musulmane”.
« Comment convaincre leurs coreligionnaires, et au-delà l’ensemble de la société danoise, que leur foi est compatible avec les valeurs démocratiques, les libertés individuelles, l’égalité entre hommes et femmes, l’homosexualité ? »
« Comment combattre l’influence de ces docteurs en religion qui s’appuient sur le Coran pour prôner l’assujettissement de l’épouse à l’époux, stigmatiser les non-croyants ou interdire les mariages interreligieux et homosexuels ? »
« Pour remettre en question cette lecture patriarcale des fondements de la religion, le chemin est étroit. »
« La direction collégiale de la future mosquée, dont Sherin est la figure de proue, décide ainsi de renoncer à la mixité pour ne pas heurter la tradition, et opte pour une congrégation réservée aux femmes. »
« De même, la nouvelle imam accepte, contrairement à ses convictions, de ne pas célébrer de mariages homosexuels ».
« Elle qui débat et expose inlassablement ses idées consent aussi à ne pas rendre public le fait que les unions inter-religieuses impliquant une musulmane, proscrites partout ailleurs, seront accueillies à la mosquée Mariam ».
« Celle-ci ouvre ses portes en février 2016 dans un appartement spacieux, situé dans une rue commerçante du centre-ville ».
« Le jour de la première prière, quelques mois plus tard, la grande salle est pleine à craquer. »
Il est dommage que de nombreuses photographies destinées à la presse se réduisent à Sherin Khankan posant comme un top model ou une madone.
Médiatisée, Sherin Khankan paraît moins courageuse dans ses propos, moins audacieuse dans sa réflexion et ses actes que Wafa Sultan, psychiatre et essayiste américaine alaouite née en Syrie, ou "Eva Janadin, 29 ans, et Anne-Sophie Monsinay, 30 ans, converties à l'islam il y a 10 ans" en suivant un parcours "soufie pour l’une, mutazilite pour l’autre", et ayant ouvert en septembre 2019 une mosquée mixte à Paris (France). "Une fois par mois, elles louent un local parisien pour diriger la prière". Elles espèrent en "l’émergence d’un islam spirituel et progressiste".
France
Le 26 mars 2018, à l'Elysée, le Président de la République Emmanuel Macron a dialogué durant une heure avec Delphine Horvilleur, femme rabbin du Mouvement juif libéral de France (MJLF) et Sherin Khankan. Quid des chrétiens ? En 2016, Delphine Horvilleur et Sherin Khankan avaient dialogué à la Royal Library.
Il est dommage que de nombreuses photographies destinées à la presse se réduisent à Sherin Khankan posant comme un top model ou une madone.
Médiatisée, Sherin Khankan paraît moins courageuse dans ses propos, moins audacieuse dans sa réflexion et ses actes que Wafa Sultan, psychiatre et essayiste américaine alaouite née en Syrie, ou "Eva Janadin, 29 ans, et Anne-Sophie Monsinay, 30 ans, converties à l'islam il y a 10 ans" en suivant un parcours "soufie pour l’une, mutazilite pour l’autre", et ayant ouvert en septembre 2019 une mosquée mixte à Paris (France). "Une fois par mois, elles louent un local parisien pour diriger la prière". Elles espèrent en "l’émergence d’un islam spirituel et progressiste".
Le 26 mars 2018, à l'Elysée, le Président de la République Emmanuel Macron a dialogué durant une heure avec Delphine Horvilleur, femme rabbin du Mouvement juif libéral de France (MJLF) et Sherin Khankan. Quid des chrétiens ? En 2016, Delphine Horvilleur et Sherin Khankan avaient dialogué à la Royal Library.
Sur son compte Facebook, Sherin Khankan pose souriante, assise dans le fauteuil présidentiel, le Président Emmanuel Macron aussi souriant debout derrière eux, et derrière eux, le drapeau de l'Union européenne (UE), mais pas celui français. Elle a posté sur son compte Facebook la photographie ainsi commentée :
"Il faut un Président sage pour soutenir le féminisme islamique et considérer la religion comme une partie de la solution et non du problème."Le chef de l'Etat français avait sollicité les deux femmes pour recueillir leurs réflexions sur meilleure manière, selon elles, d'améliorer le dialogue des civilisations. L'imame féministe Sherin Khankan a suggéré au Président l'idée d'une grande conférence réunissant des femmes imam venues du monde entier, des femmes rabbin, des pasteures protestantes, des prêtres catholiques ainsi que des intellectuels des toutes les religions, notamment des musulmans, sans discrimination de sexe."Le Président français Emmanuel Macron envoie un signal politique important selon lequel la société laïque peut coexister avec la religion.La France est un pays connu pour sa séparation indéfectible et inconditionnelle entre la religion et la politique. Mais le Président Macron a une interprétation plus souple de la laïcité. J'essaie de montrer par mon militantisme que la religion peut apporter une contribution progressiste à la société.La radicalisation peut être une réaction au sentiment de ne pas appartenir ou de ne pas faire partie de la communauté, il est donc important que les dirigeants mondiaux de demain trouvent des moyens d'inclure leurs minorités.Et il est important que nous trouvions tous des moyens de remettre en question les dichotomies manipulées entre "Eux et Nous".
"Le chef de l'Etat s'est dit intéressé par l'idée et a promis de donner suite", confie la Danoise. Cette adepte du soufisme poursuit: "Le Maroc serait parfaitement indiqué pour une telle conférence dans la mesure où ce pays forme déjà, depuis quelques années, une nouvelle génération de professeures de religion : les mushidad." Il s'agit de femmes chargées de prêcher la bonne parole jusque dans les villages reculés, avec la mission de promouvoir un islam raisonnable, tolérant et "authentiquement conforme à sa vocation pacifique."
"Par hasard du calendrier, le rendez-vous avec Emmanuel Macron, programmé depuis plus d'un mois, est tombé trois jours après l'attaque terroriste de Trèbes et Carcassonne. Ce sujet n'a pas été évoqué lors de l'entretien avec Sherin Khankan et Delphine Horvilleur." Pourquoi ?
"La quadragénaire Sherin Khankan s'est orientée vers l'islam dans l'entrée à l'âge adulte tout en militant pour un "féminisme islamique" qui vise à mettre fin à la culture du patriarcat au sein de la religion de Mahomet".
"Rien, dans le Coran, n'interdit aux femmes de conduire la prière ni de gérer un mosquée", affirme cette imame qui célèbre des mariages inter-religieux et milite inlassablement pour l'égalité homme-femme au sein de l'islam. Inspirée notamment, par les féministes musulmanes Amina Wadud, qui est américaine, et la Marocaine Fatima Mernissi (décédée en 2015) Sherin Khankan a inauguré, l'année dernière à Copenhague, la première mosquée d'Europe réservée aux femmes".
"C’est un personnage surprenant", confie Delphine Horvilleur, qui a débattu avec elle au mois de mai, lors d’une rencontre à Copenhague, organisée par l’ambassade de France. "Elle est très féminine, maternelle et douce. Je pense que c’est un atout pour elle d’incarner cette féminité classique, car les gens s’attendent au contraire à ce qu’une femme qui cherche à mener le culte soit dans une démarche belliqueuse ou violente. Quand je l’ai rencontrée, elle portait une grande robe traditionnelle et faisait très grande prêtresse, c’était un peu une incarnation de l’essentiel féminin, même si, évidemment, le rôle des femmes ne doit pas se limiter à cela dans la religion."
« En 2016, au Danemark, Sherin Khankan a pris la tête de la première mosquée pour femmes. Un documentaire intimiste, issu de la collection "La vie en face", nous emmène à ses côtés et raconte plusieurs années d'un combat hors norme. Entretien. Propos recueillis par Raphaël Badache ».
« Quelles valeurs porte votre mosquée ?
Sherin Khankan : Le droit des femmes à être imam au sein d'une institution islamique, à se marier avec un non-musulman et à divorcer. Autrement dit, la mosquée Mariam de Copenhague redonne aux femmes musulmanes leurs droits les plus élémentaires. On propose également une relecture du Coran à travers le prisme de l'égalité des genres. On se bat enfin contre l'homophobie. Nous voulons changer les pratiques et les structures de l'islam.
Vous êtes prise entre deux feux : l'islamophobie galopante et la radicalité de certains musulmans.
Quelle est votre marge de manœuvre ?
Quelle est votre marge de manœuvre ?
Je le sais, j'entends dire qu'on n'y arrivera jamais, que la situation empire… Très bien, les gens parlent, mais moi je suis une activiste. J'agis pour créer un pont entre les différentes religions, les différentes cultures. C'est ma mission. Je trace un chemin alternatif pour l'islam qui permettra de lutter contre les extrémismes, quels qu'ils soient.
Je suis fière que ma mère soit une émigrée finlandaise catholique et mon père un réfugié syrien musulman, fière d'être l'enfant de deux religions. Autoriser les mariages inter-religieux, c'est créer le changement dans la société, permettre ce dialogue entre les cultures. J'ai deux filles : quelles sont les chances pour qu'un jour, elles tombent amoureuses de garçons d'une autre religion ? Au Danemark, elles sont énormes et il faut l'accepter ! Notre mosquée a déjà célébré près de soixante unions entre musulmanes et non-musulmans. La société évolue.
Lorsqu’on veut changer les choses, en effet, il faut accepter la solitude comme compagne de route. Des personnes ont un pouvoir et ne veulent pas le lâcher. Mais je ne suis pas seule. Il existe des femmes imams en Chine, aux États-Unis, au Canada, en Allemagne, en France… Le phénomène se développe. Au fond, personne ne nous oppose d'arguments crédibles.
Vous poursuivez votre combat en dehors de la mosquée ?
Oui. Mes activités à la mosquée Mariam sont bénévoles. À côté, je dirige Exit Circle, une ONG laïque qui aide les victimes de violences psychologiques. J'ai toujours ce même objectif : combattre les structures oppressives patriarcales.
Vous êtes parfois menacée. Vous sentez-vous en danger ?
Je n'ai jamais peur. Je crois qu'Allah me protège. Dans ma famille, quand j'étais jeune, on m'appelait Fearless ("sans peur"). J'avais un autre surnom : Tigresse. »
« Quand l'imam est une femme » de Marie Skovgaard
Danemark, House of Real, 2019, 60 min
Sur Arte les 26 août 2020 à 22 h 30 et 28 septembre 2020 à 3 h 35
Disponible du 03/06/2020 au 15/08/2022
Visuels :
Sherin Khankan est la première femme imam du Danemark qui a dirigé la fondation d' une mosquée dirigée par des femmes à Copenhague, appelée Mariam Mosque. Elle est également militante sur les questions musulmanes, notamment l' intégration des femmes et l' extrémisme, et a écrit de nombreux textes sur l' islam et la politique
Sherin Khankan (born 13 October 1974) is Denmark' s first female imam who has led the foundation of a women-led mosque in Copenhagen called Mariam Mosque. She is also an activist on Muslim issues including female integration and extremism, and has written numerous texts discussing Islam and politics.
The Reformist
Sherin Khankan dirige la prière
Prière à la mosquée Mariam à Copenhague
Poster pour la Grande-Bretagne
© Marie Skovgaard
Sherin Khankan (born 13 October 1974) is Denmark' s first female imam who has led the foundation of a women-led mosque in Copenhagen called Mariam Mosque. She is also an activist on Muslim issues including female integration and extremism, and has written numerous texts discussing Islam and politics.
The Reformist
Sherin Khankan dirige la prière
Prière à la mosquée Mariam à Copenhague
Poster pour la Grande-Bretagne
© Marie Skovgaard
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