Citations

« Le goût de la vérité n’empêche pas la prise de parti. » (Albert Camus)
« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
« Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. » (Vladimir Jankélévitch)
« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

mercredi 29 septembre 2021

« Influence, les armes de la com » de Diana Neille et Richard Poplak

Arte diffusera les 5 et 15 octobre 2021 « Influence, les armes de la com » (Der Königsmacher: Mit den Waffen der Werbung ; Influence - The Rise and Fall of the World's Most Dangerous Public Relations Company) de Diana Neille et Richard Poplak. " L'ascension et la chute du défunt magnat de la com politique Timothy Bell, qui a promu tour à tour Margaret Thatcher et Jacob Zuma, Pinochet et Asma el-Assad. Une vertigineuse incursion dans la géopolitique de la désinformation. »

La fabrique des saintes images. Rome-Paris, 1580-1660
« La loi de la banane » par Mathilde Damoisel
« L’affiche - La naissance de la publicité moderne » par Adolfo Conti
Au temps de Klimt - La Sécession à Vienne 
L'esprit du Bauhaus
TIM

Arte propose un "Spécial Propagande". "Quelles formes a pris la propagande au fil du temps ? ARTE consacre à la question une programmation spéciale, avec, entre autres, un documentaire qui recense les manipulations les plus emblématiques de l’histoire."
« Anobli pour ses hauts faits de communicant politique après des débuts fracassants en 1979 auprès de Margaret Thatcher, Timothy Bell (1941-2019) aura travaillé quarante ans à "vendre" aussi, avec un succès inégal, le dauphin de Pinochet, le dernier président du régime sud-africain d'apartheid Frederik De Klerk, l'épouse du dictateur syrien Asma el-Assad ou le projet américain de "nation building" en Irak ». 

« Mais en 2017, les basses œuvres de sa multinationale, Bell Pottinger, rappelée en Afrique du Sud pour redorer le blason des corrupteurs frères Gupta et de leur homme de paille, le président Jacob Zuma, sont exposées en pleine lumière ». 

« Vingt ans après avoir attisé en 1994 les rivalités entre le mouvement zoulou Inkatha et l'ANC de Mandela, au prix de sanglants affrontements, sir Bell a tenté cette fois d'orchestrer la colère des déshérités noirs contre les propriétaires blancs ». 

« Le scandale entraîne sa chute et celle de ses clients. »

« Recueillant l'effarant testament du vieux mercenaire déchu, Richard Poplak et Diana Neille confrontent sa parole à une fascinante pléiade d'anciens alliés, clients et adversaires ». 

« Si Lord Bell, refusant de s'avouer vaincu, déroule un an plus tard avec une forfanterie de façade ses précédents faits d'armes ("J'éprouve une sympathie innée pour les gens qui réussissent"), un autre spin doctor dévalué, Nigel Oakes, expose sa vision quasi mystique de la manipulation “scientifique” des masses ». 

« Ébloui dans les années 1980 par les performances du KGB russe, “trente ans en avance sur tout le monde”, il est le fondateur de la société SCL, dont la filiale Cambridge Analytica a siphonné en 2016 les données de millions d'utilisateurs de Facebook dans le but de faire élire Donald Trump ». 

« Face à ces “vieux hommes blancs riches” (dont Frederik De Klerk), deux des tombeuses sud-africaines de Bell Pottinger, la pétulante ex-députée Phumzile Van Damme et la journaliste Marianne Thamm, apportent une touche d’espoir combatif ». 

« Tissées avec un art consommé du cadre et du montage, les voix de cette vingtaine de témoins de première main racontent l’émergence et l'essor d’un des secteurs commerciaux les plus lucratifs de notre temps, souvent légal, toujours occulte : la subversion de la démocratie ».

« Une incursion vertigineuse dans la géopolitique mondiale de la désinformation ». 


« Influence, les armes de la com » de Diana Neille et Richard Poplak
Afrique du Sud/France/Canada, 2020, 1 h 23 mn
Coproduction : StoryScope, EyeSteelFilm, ARTE France
Sur Arte les 5 octobre 2021 à 22 h 30, 15 octobre 2021 à 9 h 25, 5 janvier 2023 à 23 h 35
Sur arte.tv du 28/09/2021 au 03/12/2021, du 29/12/2022 au 05/03/2023
Visuels :
Paul Bell
Phumzile Van Damme
FW De Klerk
Nigel Oakes
Marianne Thamm
Protestation contre le Brexit
© Daniel Hewett

Interview du psychanalyste Gérard Huber sur l’affaire al-Dura

  
L’écrivain et psychanalyste Gérard Huber (1946-2011) est l’auteur du livre Contre-expertise d’une mise en scène (Editions Raphaël, 2003) sur l’affaire al-Dura. Un ouvrage que Gérard Huber avais mis sur son blog. Dans cette interview, il retraçait les circonstances de son enquête et nous livrait son opinion sur les derniers rebondissements de cette affaire grave. Interview publiée en janvier 2008 par Guysen. Durant l'opération israélienne "Gardien du Mur" ou "Gardien des Murailles" (Chomer Hahomot en hébreu, Guardian of the Walls en anglais), menée du 6 au 21 mai 2021 par l'Etat Juif en réaction aux frappes par tirs de missiles (jusqu'à 400 kg d'explosif par missile) du mouvement islamiste Hamas à partir de la bande de Gaza en direction des populations civiles israéliennes, des blood libels ont été diffusés, dont celui des "al-Dura".

  
Le 30 septembre 2000, le JT de 20 h de France 2 diffusait le reportage de Charles Enderlin commentant les images de son cameraman palestinien Talal Abu Rahma sur les "al-Dura". Le correspondant de France 2 à Jérusalem alléguait que des soldats israéliens avaient sciemment tiré sur les "al-Dura", en tuant Mohamed al-Dura et blessant son père, Jamal al-Dura. 

Comment vous êtes-vous intéressé à l’incident al-Dura ?

Avant de vous répondre, permettez-moi de m’interroger sur ce terme « incident ». Faut-il l’entendre au sens d’un « événement peu important en lui-même, mais capable d’avoir de graves conséquences » (Le Robert) ?

Lorsque les images filmées par Talal Abu Rahma, cameraman palestinien de France 2, le 30 septembre 2000, à Netzarim (bande de Gaza), parviennent à Charles Enderlin (Ndlr : correspondant de France 2), à Jérusalem, et compte tenu de ce qu’il reconnaîtra plus tard (« Ils font ça tout le temps »), ce correspondant de France 2 aurait, en théorie, tout lieu de n’y voir que des images parmi toutes celles que les Palestiniens l’ont habitué à voir en matière de jeux de scènes de guerre.

Ce même jour, peu auparavant, Charles Enderlin se trouve à Ramallah, quand soudain Talal Abu Rahma l’appelle et lui parle au téléphone, en lui faisant entendre un arrière-fond sonore fait de cris et de bruits de tirs, destiné à accréditer l’idée que ce qu’il tourne est un fait de guerre.

Enderlin qui a une totale confiance en son caméraman ne peut que donner du crédit au récit de Abu Rahma qui lui dit qu’il est sous le feu israélien, qu’il risque de mourir, mais qu’au risque de sa vie et de sa mort, il est en train de tourner les images d’un assassinat intentionnel et de sang-froid d’un enfant palestinien, Mohamed al-Dura, par les soldats israéliens.

L’incident, de mineur, devient majeur.

Le 30 septembre 2002, Abu Rahma a démenti la partie essentielle de son témoignage fait auprès d’Enderlin, puis celui auprès de l’organisation palestinienne des droits de l’homme à Gaza le 3 octobre 2000. (Ndlr : Talal Abu Rahma avait déclaré sous serment le 3 octobre 2000 : « L’enfant [Mohamed al-Dura] a été tué intentionnellement et de sang-froid par l’armée israélienne »). 

En conséquence, l’incident « mineur » est devenu « majeur » du fait qu’il a menti à Enderlin.

En 2002, à la suite de ma prise de position dans Le Monde contre l’endoctrinement anti-israélien qu’au nom de la paix au Proche-Orient des organisations pro-palestiniennes répandaient, j’avais été approché par le groupe « Paix et Vérité au Proche-Orient » qui voulait publier un livre autour de 500 lettres d’enfants juifs au Président de la République, dans lesquelles ceux-ci disaient leur malheur d’être victimes d’agressions antisémites dans le cadre scolaire à Sarcelles, à Marseille, etc.

J’avais réuni de nombreux universitaires, quand la mise en route du projet de ce livre collectif fut brutalement contrecarrée.

En attendant de publier un livre sur l’antisémitisme en général, et ce sujet en particulier (1), je cherchais un moyen de communiquer mes analyses à mes lecteurs. Très vite, en effet, tous mes articles étaient refusés par Le Monde et Le Figaro.

Un ami organisa une rencontre avec Stéphane Juffa, rédacteur en chef de Metula News Agency (Mena). II fut convenu que j’en serais le correspondant permanent à Paris, bénévole. Depuis, je me suis retiré de la Mena.

C’est au cours de mes activités journalistiques pour la Mena que j’ai pris connaissance du dossier « Mohamed al-Dura » et que je découvris la controverse autour du reportage de France 2.

Quelle a été votre méthode ?

A l’époque, la question essentielle était la suivante : quelle était l’origine des tirs des balles qui avaient tué l’enfant ? Abu Rahma et Enderlin étaient catégoriques.

Leur attitude n’était pas celle de la crainte, mais au contraire de l’enthousiasme devant la multitude d’effets produits par la diffusion de ces images. Enderlin était fier de ne pas s’être opposé à la diffusion du reportage et d’avoir osé montrer ce qu’il estimait être la réalité de la politique palestinienne d’Israël. Plus que par amour du scoop, Enderlin croyait dur comme fer qu’il avait agi pour servir la vérité.

Or, ayant assisté à la projection du reportage d’Esther Schapira (Ndlr : en mars 2002, la chaîne allemande ARD diffuse l’enquête de la journaliste Esther Schapira, déduisant la responsabilité vraisemblable des Palestiniens dans « la mort de Mohamed al-Dura »), je fus envahi par un nombre impressionnant de questions auxquelles Enderlin refusait de répondre.

Dès lors, je décidai de poser ces questions dans le cadre de la Mena. Puis, un de mes lecteurs m’informa que, si je voulais en savoir plus, il suffisait que j’entre en contact avec un des principaux protagonistes du reportage d’Esther Schapira, le physicien israélien Nahum Shahaf.

Les discussions que j’eues avec cet homme furent longues. J’étais tout à la fois surpris par ce qu’il m’affirmait et taraudé par l’impératif de mettre en doute son témoignage de manière systématique. Je n’avais, à l’époque, que les mots prononcés lors de conversations téléphoniques ou échangés dans des courriels pour me faire une idée du sérieux de cette source d’information. Mais après avoir passé au crible nombre d’objections, et après avoir lu tout ce qui existait sur le sujet sur le web - articles de presse israéliens, palestiniens traduits en anglais… -, je décidai de mettre Juffa en relation avec Shahaf, afin que mon enquête soit élargie.

L’élargissement consista essentiellement en deux actes :
- le visionnage d’une partie des 27 minutes des rushes de France 2, celui des rushes de Reuters et d’Associated Press que Shahaf détenait depuis qu’il avait enquêté au service de l’armée israélienne, et qui tous montraient ce qui s’était passé le 30 septembre 2000 à Netzarim ;

- le croisement de ces rushes avec tout ce que j’avais lu et entendu de la part des protagonistes, des enquêteurs et des journalistes.

Puis Juffa et moi décidâmes de faire un audit du reportage de France 2 qui serait produit par la Mena et de le soumettre à France 2. J’ai rencontré Didier Epelbaum, un des chargés de mission de la chaîne publique, mais le directeur général de celle-ci, Christopher Baldelli, ne répondit pas à toutes nos demandes de rendez-vous.

Parallèlement, à la demande de Yaël König, éditrice à Paris, j’écrivais un livre.

Le titre de votre livre est particulièrement explicite : Contre-expertise d’une mise en scène. Quel but poursuiviez–vous en l’écrivant ?

Le but essentiel était de donner au grand public et aux décideurs l’information nécessaire pour comprendre que le vrai sujet de la controverse n’était pas : qui a tué l’enfant ? Mais qui a voulu faire croire que l’enfant avait été tué, alors que les images montraient que ce n’était pas possible, et pourquoi ?

Il était hors de question que j’écrive un brûlot ou un acte d’accusation, car c’était incompatible avec mon éthique d’intellectuel.

Mon rôle se limitait à produire des documents authentiques qui n’avaient jamais été exposés - croisés avec ceux de l’audit télévisuel - et à les soumettre au jugement de tous.

L’expression « Contre-expertise » était utilisée pour que les lecteurs sachent qu’ils étaient invités à refaire tous les parcours des différentes démarches entreprises par les Palestiniens, Enderlin, les Israéliens, la famille al-Dura, France 2, les journalistes (presse écrite et audio/télévisuelle), les politiques (individus, organisations, États) et les écrivains qui s’étaient prononcés sur le sujet.

Quant à l’expression « mise en scène », je l’imposai pour indiquer le cadre dans lequel la controverse prenait désormais tout son sens. Tous les reportages télé étaient « mis en scène », mais cette « mise en scène » avait quelque chose de particulier qui était sans commune mesure avec celles des autres reportages télévisuels. En effet, la mise en scène palestinienne portait sur l’habillage d’un théâtre de rue fictionnel et propagandiste en témoignage authentique d’un fait de guerre de la pire espèce : le massacre délibéré d’un enfant palestinien par les soldats israéliens.

Quel a été l’accueil de votre livre ?

Dans un premier temps, seuls les auditeurs de Radio J, les lecteurs de la Mena et de quelques sites électroniques intéressés par ses analyses, ainsi que les personnes qui ont assisté à la dizaine de conférences que j’ai données en ont entendu parler.

Le sérieux de la contre-expertise a convaincu, les débats qui ont fait suite aux conférences ont aussi été sérieux, et pas une seule fois, je n’ai entendu la moindre insulte à l’adresse de qui que ce soit de France 2. Partout, en revanche, une exigence de vérité et de courage pour que l’information soit rectifiée a été formulée.

Les autres médias qui ont eu vent de sa parution ont pris garde de ne pas l’annoncer. Même lorsque des journalistes y ont fait allusion pour le vouer au pilori, ils se sont bien gardés de se confronter à son argumentation et d’en donner le titre et l’éditeur.

Le 7 avril 2003, dans l’émission Lundi Investigation sur Canal +, j’apparaissais à tort comme un « attiseur de haine » entre Juifs et Arabes. J’ai demandé des excuses à Canal +, mais en vain.

Comment analysez-vous les derniers rebondissements judiciaires de l’affaire al-Dura ?

Vous venez de passer du mot « incident » au mot « affaire » et ce n’est pas sans raison. Car, à force de prétendre que la vérité sur ce reportage ne sera dite que devant une Cour de justice, Enderlin commence à obtenir gain de cause, sauf que tout ceci risque bien de se retourner contre lui in fine. Certes, aujourd’hui, c’est Philippe Karsenty, directeur de l’agence de notation des médias Media-Ratings, qui est accusé de diffamation, mais, au train où vont les choses, il n’est pas impossible que, demain, ce soit France 2 qui ait à s’expliquer.

Pour autant, la force d’Enderlin, c’est de savoir que tout parallèle avec l’Affaire Dreyfus est inadéquat. D’abord parce que, pour que France 2 soit poursuivie, il faut qu’il y ait une victime qui dépose plainte. Or, force est de constater que sept ans après, la plainte est toujours en quête du plaignant. Il y a bien l’Etat d’Israël et des Juifs – en Israël et dans le monde - qui ont été victimes du déferlement de la haine antisémite et des attentats, après la diffusion de ces images. Qui, en la matière, peut les représenter sur le plan judiciaire ? C’est aux juristes de répondre.

En fait, ceux qui se plaignent le font, mais en silence. Ce sont ceux qui souffrent : les nombreuses familles Juives martyrisées en Israël, exposées à la vindicte antisémite en France et ailleurs, dans le monde.

Voilà pourquoi, sans parler au nom des victimes qui n’ont pas la parole, mais par exigence de vérité, il faut amorcer un autre processus parallèle à celui du rebondissement judiciaire. Tant qu’il n’y a pas de plaignant judiciaire, il est un peu vain d’attendre que la justice se prononce sur le fond.

Dans l’attente, il y a cette solution : appeler à la constitution d’une Commission d’enquête internationale qui sera chargée d’établir toute la vérité.

Quelle est votre interprétation de psychanalyste de l’incident al-Dura ?

Si je n’avais pas été éduqué à la vision et à l’écoute des actes manqués inconscients, je n’aurais jamais pris sur moi de me lancer dans un tel décryptage.

Le scénario de ces images a eu l’effet dévastateur que tout le monde a pu constater et qui continue encore aujourd’hui, parce qu’il met en scène l’accomplissement d’un désir inconscient : le meurtre du Dieu des Juifs.

Il s’agit, en fait, de la figure inversée du meurtre du Dieu biblique pendant la Shoah. Le monde ne parvient pas à se défaire de ce fantôme et tente de le maîtriser, mais dans un renversement.

L’exploitation de la guerre israélo-palestinienne joue en cette affaire pleinement son rôle. Les juifs « avec ou sans Dieu », les chrétiens, les musulmans, les athées ont été saisis d’effroi à l’idée que l’État d’Israël, qui, à leurs yeux, est, quoi qu’on en ait, l’ultime preuve de l’existence du Dieu des juifs après la Shoah, ait pu intentionnellement et de sang froid détruire un enfant palestinien - un descendant d’Ismaël – en direct live.

Dans la Bible, Dieu envoie un ange pour retenir le bras d’Abraham prêt à égorger son fils Isaac. Mais dans ce scénario télévisuel, le Dieu des juifs montre qu’il n’a jamais été qu’un être sanguinaire qui a d’abord exigé l’égorgement d’Isaac, puis l’a sauvé afin d’accomplir ultérieurement la crucifixion de Jésus, puis l’assassinat du « petit Mohamed », figure réactualisée d’Ismaël.

C’est pourquoi, le soir même de la diffusion de ces images, pris au dépourvu, tout le monde a été hypnotisé par ce scénario et a commencé par croire en sa vraisemblance.

Il y avait aussi l’attente de savoir ce qu’Israël et son armée allaient dire. Dans un premier temps, les autorités israéliennes sont restées silencieuses, puis, le lendemain, elles ont récusé l’accusation d’assassinat ciblé et se sont s’excusées en invoquant le hasard dû à un échange de tirs, ce qui, pour moi, a, au moins, le mérite de montrer que non seulement elles connaissent les ordres données par leur commandement aux soldats, mais aussi qu’elles croient encore au Dieu des juifs.

Depuis, même ceux qui, au vu de l’effondrement de toutes les soi-disant preuves de France 2, sont acquis aux conclusions de ma contre-expertise, ne se mobilisent pas massivement pour exiger de la chaîne publique qu’elle fasse la lumière sur cette imposture palestinienne. Ce qui, à mes yeux, est la preuve que, pour eux, ce n’est encore pas l’essentiel. Ils trouvent toujours une « bonne » raison pour éviter de se confronter à cette exigence.

Ma conclusion ne fera plaisir à personne : il y a là une glaciation des esprits qui résulte de l’impossibilité actuelle de penser la folle satisfaction inconsciente du désir de démasquer le Dieu des Juifs.

(1) Gérard Huber, Guérir de l’antisémitisme, sortir de la condition post-nazie. Préface de Henry Bulawko, avant propos du père Jean Dujardin. Edition du Serpent à plumes, 2005.

ADDENDUM

Cet article a été republié en 2012 à l'occasion de l'hommage intitulé Mystique et folie que rendra l'Institut Elie Wiesel à Gérard Huber le dimanche 22 janvier 2012, de 14 h 30 à 19 h, au Centre communautaire de Paris.

L'opération israélienne "Gardien du Mur" ou "Gardien des Murailles" (Chomer Hahomot en hébreu, Guardian of the Walls en anglais) a été menée du 6 au 21 mai 2021 par l'Etat Juif en réaction aux frappes par tirs de missiles (jusqu'à 400 kg d'explosif par missile) du Hamas à partir de la bande de Gaza en direction des populations civiles israéliennes. Des blood libels ont été diffusés.

Le 15 mai 2021, l’acteur tunisien Mhadheb Rmili, dont la photo a pour fond un drapeau palestinien et le dôme de la mosquée al-Aqsa à Jérusalem (Israël), a posté sur Facebook un texte qui a suscité "une grande controverse. Affirmant défendre la cause palestinienne, il a publié sur sa page Facebook : « leurs lieux de culte ne sont pas plus sacrés que les notres » et laissant entendre que les défenseurs de la cause palestinienne devraient utiliser les lieux de culte juifs situés dans le monde arabo-musulman afin de faire pression sur Israel. « Ainsi, le gouvernement sioniste se retrouvera dans l'obligation de ne pas toucher à la mosquée al-Aqsa afin de sauvegarder la sécurité de ces lieux », a-t-il écrit."

"Citant entre autres la synagogue de la Ghriba à Djerba, Mhadheb Rmili a suggéré un échange de lieux de culte juif dans les pays arabes contre la mosquée al-Aqsa laissant entendre que « pour garantir la sécurité de ses lieux de culte, l’Etat sioniste serait dans l’obligation d’assurer celle d’al-Aqsa »." 

"Une publication très critiquée au sujet de laquelle l'acteur a dû s'expliquer, affirmant que ses propos devaient être compris au second degré et ajoutant qu'il s'agit d'une « solution tout à fait pacifique » et non « d'un appel à la violence ».

Le 17 mai 2021, l'acteur tunisien 
Mhadheb Rmili a forwardé un post du 9 mai 2021 contenant une vidéo siglée Euronews contenant notamment la photo de "Jamal al-Dura" protégeant "Mohamed al-Dura" et commentée en arabe. Traduit en français, ce commentaire est : "Souviens-toi ! Pas de réconciliation". 

L'ensemble a disparu du compte Facebook de l'acteur.
Le 20 mai 2021, l'hebdomadaire français "Marianne" a publié l'éditorial "
Israël-Palestine : sans espoir..." par Natacha Polony, qui révèle ses ignorances historiques :
"La situation actuelle au Proche-Orient résulte à la fois de la radicalisation qui ronge l’ensemble du monde et voit le Hamas et les intégristes juifs se faire la courte échelle, et de l’abandon des Palestiniens par des pays du Golfe qui trouvent que, décidément, il est assez peu payant de soutenir une cause gratuite et qui pourrait bénéficier à l’Iran.
Les bombardements israéliens qui ensevelissent sous leur maison des enfants palestiniens sont en train d’enterrer un peu plus tout espoir de paix, non seulement au Proche-Orient, mais partout où ce conflit sert de catalyseur aux frustrations de chacun. On peut avoir pleinement conscience de la façon dont le Hamas utilise pour sa propagande chaque mort provoquée par une offensive qu’il a lui-même déclenchée. On peut avoir en tête que le prétexte à ce nouvel épisode est une simple querelle juridique sur des maisons de Jérusalem-Est réclamées par des juifs qui en possèdent les titres de propriété (mais les Palestiniens expulsés de chez eux en 1948 ont-ils, eux, les moyens et le droit de réclamer les maisons de leurs ancêtres ?). Pour autant, nul ne peut rester indifférent à la souffrance d’un peuple privé (par Israël, par ses propres dirigeants, par l’apathie de la communauté internationale) du simple droit de croire en l’avenir."
Le 24 mai 2021, Yana Yana Grinshpun a écrit :
"Outre le fait que cette ouverture recrée, peut être involontairement, le topos usé de l’armée israélienne tueuse d’enfants, elle oublie de préciser qu’Israël exerce le droit de défense de ses citoyens qui lui est octroyé par le droit international...
Hamas est l’ennemi global à la fois des Israéliens, mais aussi de Palestiniens opprimés par le totalitarisme meurtrier et anti-démocratique de cette organisation. Malheureusement, la réponse globale ne lui a pas encore été donnée. Quant aux enfants, le Hamas les utilise sans vergogne, sans morale, sans éthique, comme une chair à canon, comme des ouvriers gratuits...
L’armée israélienne prévient les civils gazaouis des attaques à venir, pour qu’ils évacuent les zones qui doivent être bombardées. Et si des enfants sont tués, c’est parce qu’ils sont souvent utilisés comme boucliers humains que le Hamas n’hésite pas à sacrifier pour se présenter comme victimes des méchants juifs...
La remarque finale sur la religion témoigne de l’incompréhension de la dynamique des rapports entre l’islam et le judaïsme, et du rôle du religieux dans cette partie du monde. Natacha Polony raisonne comme une bonne universaliste laïque nichée dans le 5ème arrondissement de Paris, qui ne connaît ni l’histoire, ni le terrain, ni l’arabe, ni la tradition juive, ni la tradition islamique. Ce n’est pas un crime pour un journaliste, qui ne peut pas être spécialiste de tous les sujets, mais cela n’excuse pas une professionnelle qui a décidé de régler le problème par trois clichés et deux poncifs. Il faut rappeler que les événements ont commencé pendant le Ramadan, or le Ramadan, dans la tradition musulmane, est un mois de jihad et de martyr. C’est ce que rappellent des savants musulmans très clairement.
La jeunesse palestinienne est élevée dans cet esprit, l’esprit du jihad, et la haine des ennemis du Prophète. On consultera à ce propos le travail de Impact-se (Institute for Monitoring Peace and Cultural Tolerance in School Education)
Ce n’est pas donc le litige de Cheikh Jarrah, dont Polony balaie d’un revers de phrase l’aboutissement légal, cautionné par la Cour Suprême d’Israël (où siègent des juges juifs et arabes), mais la propagande antijuive qui s’est renforcée dans les médias arabes depuis le mois de mars et qui a coïncidé à la fois avec le Ramadan et les élections annulées par Abbas.
Sa remarque sur les Arabes expulsés de leurs maisons et qui n’auraient pas eu les mêmes droits que les juifs est complètement déplacée, elle est fondée sur la méconnaissance du contexte historique. Quelques rappels historiques :
En 1948, le 15 mai 1948, le Premier Ministre d’Irak déclara à la presse à Bagdad : « Nous écraserons le pays avec nos fusils et nous détruirons tout lieu où les Juifs chercheront refuge. Les Arabes devront emmener leurs femmes et leurs enfants à l’abri pendant le danger, après quoi toute la Palestine sera à eux. »
Les 18 et 24 mars 1948, le recteur d’Al-Azhar au Caire déclara : « Nous jetterons à la mer les bandes de sionistes criminelles et il ne restera plus ainsi un seul Juif en Palestine. Pour que nos armées victorieuses puissent accomplir leur mission sacrée sans s’exposer à faire des victimes parmi nos frères arabes, il faut que ceux-ci quittent provisoirement le pays, afin que nos combattants exercent, dans une liberté totale, l’œuvre d’extermination. »
Le 16 mai 1948, le haut commandement des volontaires arabes pour la libération de la Palestine lance cet appel à Radio Le Caire : « Frères arabes de Palestine, nos armées libéreront en quelques jours le territoire sacré profané par les bandes criminelles athées. Afin que les Juifs, mille fois maudits par Allah, ne se vengent pas sur vous avant leur anéantissement total, nous vous invitons à être nos hôtes. Les Arabes vous ouvrent leurs foyers et leurs cœurs. Nous vaincrons les infidèles, nous écraserons les vipères. Votre patrie, purifiée par vos frères, vous accueillera à nouveau dans la joie et l’allégresse. »
Beaucoup d’Arabes sont partis en attendant l’extermination d’Israël.  Les « réfugies expulsés » palestiniens sont la conséquence des guerres qu’Israël n’a pas initiées. Autre chose, ces « réfugiés » n’ont jamais été intégrés dans leurs pays d’accueil lorsque ces pays sont arabes (Liban, Iraq, Syrie, etc.). Les pays arabes les ont toujours maintenus dans ce statut, d’une part pour qu’ils ne puissent pas bénéficier des droits civiques (par exemple, le statut des Palestiniens en Iraq[3]) d’autre part, pour les avoir comme moyen de pression sur l’ONU afin de délégitimer Israël. 
Par ailleurs, un autre échange de populations a eu lieu dont on n’entend pas parler dans les médias. Entre 1940 et 1970, 900 000 Juifs ont été chassés des pays arabes — et spoliés. 600 000 se sont installés en Israël. Eux, ils n’ont aucun droit de demander la restitution de leurs biens dans les pays dont ils ont été chassés. Pourquoi ne pas le rappeler ? Il s’agit ici de faits vérifiables, attestés et documentés par les historiens, voir les travaux de Shmuel Trigano et Georges Bensoussan sur les Juifs du monde arabe...
L’édito parle des destructions, il pourrait indiquer que le Hamas a enterré des milliards d’euros dans les territoires qui sont les siens et que, au lieu d’en faire un paradis sur terre (car aucun pays au monde n’a reçu autant de subventions que Gaza et l’OLP) depuis 1948, il a rendu Gaza misérable.
Tsahal a détruit un système gigantesque de tunnels : une ville souterraine entière avec un équipement militaire qui coûte des millions de dollars, des  plateformes de  tirs, des armes. Le service de presse de l’IDF a annoncé que, depuis le début de l’opération, l’armée israélienne a détruit cent kilomètres de tunnels. Ce système, dont le seul et unique  but est d’exterminer les Juifs, est appelé « le métro » à Gaza. Pour comparer, le système d’exploitation du métro avec d’autres villes, car vous aimez comparer, par exemple, le métro de Rome (60 km), de Kiev (67,6 km) ou, mettons, de Saint-Pétersbourg (120km). À Gaza, c’est 100km de tunnels qui ont été détruits !
Sur les 4500 roquettes que le Hamas a lancées sur Israël, un bon quart est tombé dans la Bande sans atteindre sa cible. Il n’existe aucune preuve que les enfants enfouis sur leurs maisons ne soient pas victimes de « tirs amis » !"
Le 30 juin 2016, Hallel Yaffa Ariel, âgée de treize ans, de Kiriat Arba, a été mortellement poignardée dans son lit par un Palestinien de 17 ans qui s'était infiltré dans son domicile. "Dans sa chronique du matin", Natacha Polony, avec "une pointe de désinformation exonératrice", avait déclaré : ” La famille de la petite israélienne proclame le droit du peuple juif sur la terre biblique, quitte à expulser les Palestiniens. “ Si on la comprend bien, le tueur avait frappé pour ne pas être expulsé de sa terre. Israël imagine-t-il, prétend-il, prépare-t-il une quelconque expulsion des Palestiniens ?" (Jean-Pierre Bensimon, 4 octobre 2016) La famille du terroriste reçoit une allocation mensuelle. Sa mère a exprimé sa fierté en qualifiant son fils de "héros". 

Le 28 mai 2021, The New York Times a publié en Une, sous le titre "They Were Just Children" (Ils n'étaient que des enfants) les photographies d'enfants palestiniens qui auraient été tués par l'armée israélienne durant ce conflit. Or, il s'agissait d'un montage incluant aussi des visages d'enfants palestiniens toujours vivants ou de victimes gazaouies de tirs du Hamas ou du Djihad islamique. Directeur d'honneur de l'Anti-Defamation League (ADL) a annulé son abonnement à ce quotidien en justifiant son acte par son indignation suscitée par ce blood libel. Il a twitté : "Today’s blood libel of Israel and the Jewish people on the front page is enough." 

Le 5 août 2021, Sami Hamadouche, candidat du Rassemblement national (RN) ayant figuré sur la liste d'Andréa Kotarac (RN) lors des dernières élections régionales dans la Loire, a twitté : "Le nez de Benhamou est le nez d'un fabriquant de poison. Il veut en mettre dans tous les bonbons des enfants".

Le 6 août 2021, la LICRA (Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme) a twitté en illustrant son post de copies-écrans de twitts sde Sami Hamadouche : 
"Le #RN s'enorgueillit-il vraiment des ambitions du militant #Hamadouche qui parle du "juif", du nez du juif, de l'empoisonneur d'enfants, du juif oligarque, etc. et qui pense éteindre tout soupçon d'antisémitisme le concernant en mettant en avant son ascendance ? #JeNeCroisPas".
Le 16 août 2021, Sami Hamadouche a appelé "au rétablissement du national-socialisme pour redonner le "privilège au peuple avant les étrangers". Il a également assuré que "la France prévaut sur le reste du monde est de l'humanité".

Le 28 septembre 2021, Mohammed El-Kurd, écrivain, correspondant de The Nationa twitté en l'illustrant notamment par quatre photographies de l'incident "al-Dura" : 
"Today marks 21 years since the start of the Second Intifada. Glory to those who resisted and sacrificed. Glory to the martyrs, the women and men whose makeshift weapons confronted artilleries, the children whose stones intimidated tanks. The struggle continues, until liberation." (Aujourd'hui, marque le 21e anniversaire du début de la deuxième Intifada. Gloire à ceux qui ont résisté et se sont sacrifiés. Gloire aux martyrs, aux femmes et aux hommes dont les armes de fortune affrontaient les artilleries, aux enfants dont les pierres intimidèrent les chars. La lutte continue, jusqu'à la libération.)

Ce même jour, Yoseph Haddad, journaliste pour i24News en arabe, militant arabe chrétien israélien pour la coexistence, Président de l'association "Together - Vouch for Each Other", a retransmis ce twitt en le commentant : "Muhammad al-Kurd, un activiste du réseau palestinien de Sheikh Jarrah qui a été choisi par le magazine Time comme l'une des 100 personnes de l'année, fait l'éloge de la deuxième Intifada. Oui, les kamikazes qui ont assassiné plus d'un millier d'Israéliens, les lynchages à Ramallah, les actes terroristes contre des civils innocents. Il ne devrait pas être sur la liste des personnes de l'année mais sur la liste des personnes recherchées !"


Gérard Huber. Contre-expertise d’une mise en scène. Editions Raphaël. Paris, 2003. 242 pages. ISBN : 2-87781-066-6


Visuel :
Le Sacrifice d'Abraham par Rembrandt (1635)
huile sur toile, 193 x 133
Musée de l' Hermitage, St. Petersbourg

A lire sur ce blog :
La justice française se prononcera sur les images controversées de « la mort de Mohamed al-Dura »
Interview de l'historien Richard Landes sur l'affaire al-Dura
Pas d’antisémitisme en France ?
Le sénateur Jean-Pierre Plancade a interpellé Rémy Pflimlin, futur président de France Télévisions, sur l’affaire al-Dura
Qui a tué Mohamed al Dura ? (2001) Documentaire de Esther Schapira. DVD, ASIN: B000E6TYTI
Dossier de Media-Ratings sur l'affaire al-Dura
Revue de presse sur l'affaire al-Dura
Dossier sur l'affaire al-Dura par CAMERA (Committee for Accuracy in Middle East Reporting in America)
Dossier sur l’affaire al-Dura par HonestReporting
Sites de l'historien américain Richard Landes :
http://www.seconddraft.org/movies.php
http://www.theaugeanstables.com/
Chrétiens
Culture
France
Il ou elle a dit...
Judaïsme/Juifs
Monde arabe/Islam
Shoah (Holocaust)

Cet article a été publié pour la première fois sur ce blog le 14 août 2010 et modifié le 25 novembre 2011. Il a été republié le 27 novembre 2011 à la mémoire de Gérard Huber (1946-2011). Décédé le 24 novembre 2011, Gérard Huber a été enterré au cimetière de Bagneux le lundi 28 novembre 2011 à 15 h 30. J'ai alors adressé mes condoléances à sa femme Danièle, et à ses enfants Jenny, Paul, Constance et Thomas-Elie.
Article republié le 21 janvier 2012, puis le 29 septembre 2021.

lundi 27 septembre 2021

Mus / Mouse / Maus. Variations suédoises autour de la BD d’Art Spiegelman

La Batterie d’Azeville
accueille l’exposition peu didactique "Mus / Mouse / Maus. Variations suédoises autour de la BD d’Art Spiegelman". Des variations interprétatives de dessinateurs suédois inspirés par Maus, bande dessinée (BD) d’Art Spiegelman retraçant la vie de son père, Vladek Spiegelman, Juif déporté et rescapé de la Shoah (Holocaust). Dans son roman graphique anthropomorphique, Art Spiegelman y représente les Juifs sous la forme de souris (mouse en anglais, mus en suédois, maus en allemand). 


Après le Mémorial de la Shoah, le Centre européen du résistant déporté, le musée de la Résistance à Limogesdans le cadre des Journées européennes de la Culture et du Patrimoine Juifs 2016 la librairie Hisler BD  et Saint-Sébastien-sur-Loire, la Batterie d’Azeville présente l’exposition "Mus / Mouse / Maus. Variations suédoises autour de la BD d’Art Spiegelman".

"Mus / Mouse / Maus, trois mots pour une souris de Suède des États-Unis et d’Allemagne. Trois mots qui forment le point de départ d’une exposition dans laquelle les auteurs de bande dessinée suédois donnent des interprétations uniques de l’œuvre d’Art Spiegelman Maus."

"À travers les planches d’auteurs de bande dessinée suédois, cette exposition souligne aussi bien la valeur patrimoniale de l’œuvre d’Art Spiegelman que l’utilisation du 9e art comme support pour la transmission de l’histoire de la Shoah. Mus / Mouse / Maus est également l’occasion de découvrir la culture de la bande dessinée suédoise, la richesse de ses modes d’expression et des personnalités de sa scène contemporaine. Exposition présentée par l’Association de la bande dessinée suédoise."

Cette exposition montre le 9e art, bande dessinée (BD), comme vecteur de transmission de l’histoire de la Shoah à partir de Maus, d’Art Spiegelman. Une œuvre en deux volumes, originale à maints égards.

Pour relater l’histoire de son père, Vladek Spiegelman, Juif polonais parlant yiddish, déporté et rescapé de la Shoah comme son épouse Anja, le dessinateur et scénariste américain Art Spiegelman choisit le « roman graphique à la forme anthropomorphique ». Ainsi, des animaux représentent des groupes religieux ou nationaux : les Juifs sont des souris, les Allemands nazis des chats, les Américains des chiens, et les Suédois des rennes.

Dès 1944, après la Libération de la France et avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, une bande dessinée en deux volumes avait déjà illustré la Seconde Guerre mondiale par un bestiaire : La bête est morte ! Composée de Quand la bête est déchainée (1944), sous la direction artistique de Williams Péra, et Quand la bête est terrassée (juin 1945), cette BD est dessinée par Edmond-François Calvo sur un scénario de l'éditeur de publications pour la jeunesse Victor Dancette et de Jacques Zimmermann. Centrée sur l'Europe, l'histoire aborde la guerre du Pacifique.

On y perçoit l'influence des dessins animés de Walt Disney sur le dessinateur Edmond-François Calvo. Les Allemands y sont représentés par des loups - Hitler est le "Grand loup", Göring le "Cochon décoré", Goebbels le "putois bavard" -, les Français par des lapins, grenouilles, écureuils et cigognes - les troupes coloniales françaises par des léopards -, les Anglais en dogs, les Américains par des bisons, les Italiens par des hyènes, les Soviétiques par des ours polaires, les Chinois par des buffles et des dragons, les Japonais par des singes jaunes, les Polonais par des lapins, les Ethiopiens par des lions, les Néerlandais par des vaches, les Australiens par des kangourous, les Suisses par des bergers, les Iraniens par des chats, etc. Deux cases sont consacrées à la Shoah. L'étoile jaune figure dans cette BD. Les Juifs sont présentés comme des "rebelles", des "opposants", et "des foules inoffensives"

De la BD underground au Prix Pulitzer
Art Spiegelman est né à Stockholm (Suède) en 1948 de parents polonais rescapés de la Shoah.

En 1950, la famille Spiegelman émigre aux Etats-Unis.

Art Spiegelman fréquente les cercles avant-gardistes de bandes dessinées, participe à des magazines de BD underground à San Francisco. De retour à New York en 1975, il dirige Arcade, the Comics Revue qui publie Robert Crumb, Charles Bukowski. Succès critique, mais échec commercial : la revue disparaît après sept numéros.

Avec son épouse Françoise Mouly, actuelle directrice artistique de The New Yorker, Art Spiegelman lance en 1980 RAW, « tribune pour les auteurs » d’avant-garde (1980-1991).

Dès le numéro 2, apparaît Maus sous le dessin d’Art Spiegelman : plus que l’histoire de la Shoah, c’est « l’histoire d’un père et d’un fils qui essaient de se comprendre » précise son auteur. Pendant des journées entières, Art Spiegelman a interviewé son père : « Je l’écoutais vraiment et il appréciait. A ma grande surprise, mon père était disposé à discuter avec moi ». Art Spiegelman a enregistré leurs conversations qui ont été retranscrites, ce qui a constitué « une matière première pour Maus ».

Il s’est documenté sur la Shoah et a été particulièrement marqué par Le Juif éternel, un « documentaire » allemand (1940) dressant un parallèle entre les Juifs et les rats, « vermines de l’humanité ».

Il lui parut clair que « cette déshumanisation était au cœur même du projet criminel. En fait, le Zyklon B, gaz utilisé à Auschwitz et ailleurs comme agent mortel, était un pesticie produit pour tuer la vermine, comme les puces et les cafards… C’est stupéfiant de voir comme cette image se retrouve souvent dans les bandes dessinées antisémites des pays arabes aujourd’hui », explique cet auteur dans MetaMaus (Pantheon, 2011), livre de conversation avec Hillary Chute, professeur d’anglais à l’université de Chicago.

En 1991, Maus I et Maus II reçoivent le Prix Pulitzer.

Variations suédoises
Mus / Mouse / Maus est présentée par l’Association suédoise de la bande dessinée en partenariat avec l’Institut suédois à Paris. C’est à la fois son intérêt – la vision de jeunes auteurs suédois de BD - et sa faiblesse : si les textes des bulles des planches sélectionnées sont traduits et si des notices biographiques accompagnent chaque dessin – mais sans expliquer les circonstances de la création de chaque BD -, aucun panneau général ne présente clairement l’exposition.

En noir et blanc et en couleurs, les 26 dessinateurs suédois, trentenaires ou quarantenaires, ont soit choisi le registre animal soit conservé la figure humaine pour représenter les Juifs pendant la Shoah.

Parmi les BD présentées dans la première salle : Auschwitz de Pascal Croci, Au nom de tous les miens (1986-1987) de Patrick Cottias et Paul Gillon d’après l’œuvre de Martin Gray... Mais pourquoi Le Juif de New York (2007) de Ben Katchor dont l’action se situe en 1825 aux Etats-Unis, ou Le chat du rabbin (2002) de Joann Sfar dont l’histoire se déroule au début du XXe siècle en Algérie ? La notice de Déogratias (2000) de Jean-Philippe Stassen évoque le génocide [Nda : des Tutsis et de Hutus modérés] au Rwanda en 1994. Cet « album est considéré comme le Maus des Tutsis ». On peut s’interroger sur la pertinence de cette comparaison, en particulier en raison de la spécificité de la Shoah et parce que Art Spiegelman illustre cette 2e génération composée d’enfants de rescapés de la Shoah étudiée à partir des années 1970 par les universitaires et des psys qui ont découvert des traumatismes liés à la Shoah affectant aussi cette première génération post-Shoah, ainsi que des relations particulières, souvent dominées par les silences, entre parents rescapés de la Shoah et leurs enfants.

L’affiche de l’exposition intrigue : le service de communication du Mémorial de la Shoah y est cité. Mais le jour du vernissage, il n’assurait aucun accueil pour la presse, il promettait l’envoi d’une documentation… jamais reçue - les informations m’ont été transmises par une agence de relations presse. Et parmi les visuels disponibles pour la presse, aucun ne provient de la BD d’Art Spiegelman. Un comble !

Retrait de Maus en Russie
Plusieurs librairies russes ont retiré de la vente Maus, monument de la bande dessinée contant la Shoah à hauteur d'homme. Raison invoquée? Sur la couverture de l'ouvrage figure une croix gammée jugée «inappropriée» avant le 70e anniversaire de la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

Le 3 mai 2015, trois librairies importantes de Moscou - Biblio Globus, Moskva et Moskovski Dom Knigui - ont retiré les exemplaires de leurs sites Internet les exemplaires de Maus d'Art Spiegelman.

"Selon Varvara Gornostaïeva, directrice de publication à Corpus, l'éditeur de Maus en Russie, les grandes librairies ont commencé à retirer l'œuvre de leurs rayons et de leurs catalogues internet. «C'est l'un des plus grands livres antifascistes, avec un message profond et parlant. Il se vendait très bien et personne ne s'est jamais plaint », a-t-elle expliqué à l'AFP".

La radio indépendante Écho de Moscou avance une autre raison : la crainte de heurter les autorités politiques russes : le fond de la couverture du livre représente une croix gammée avec au centre le visage d'Hitler. Délicat en ce 70e anniversaire de la victoire des Alliés sur le IIIe Reich. D'autant qu'une loi russe prohibe depuis décembre 2014 la « propagande nazie ».

Selon le distributeur de ce livre, environ 10.000 exemplaires de Maus ont été vendus en Russie.

BD, média pour l'Histoire
Le 10 mars 2016 à 19 h, le Mémorial de la Shoah a accueilli la conférence La bande dessinée : un média pour l’Histoire, avec Emmanuelle Polack, historienne de l’art, coauteur de la série Femmes en résistance (Casterman, 2013-2016), Vincent Petit, éditeur chez Casterman, Kris, scénariste, co auteur de la série Un sac de billes (Futuropolis, 2014), Laurent Galandon, scénariste, coauteur de Le Cahier à fleurs. L'histoire complète : 1915-2015, centenaire du génocide arménien (Bamboo, 2015) et Patrick de Saint-Exupéry, journaliste et rédacteur en chef de la revue XXI. "Auteurs et dessinateurs de bandes dessinées s’approprient des faits historiques pour les restituer dans des publications aussi fidèles à l’Histoire que singulières dans leurs choix artistiques. Ces « BD-Histoires » sont plébiscitées dans les librairies par les néophytes et les passionnés du neuvième art. Un événement dans le cadre de l'exposition Femmes en résistance.

Le 18 novembre 2016, dans le cadre du 33e Bd BOUM, festival de bande dessinée à Blois (18-20 novembre 2016), Armelle Modéré, auteure, évoqua "Les représentations de la Shoah dans la bande dessinée" : "À travers la découverte d’albums parus depuis la fin de la guerre sur le thème de la Shoah, et en particulier celui d’Armelle Modéré. Les élèves abordent l’analyse formelle et stylistique, ainsi que le vocabulaire spécifique de ceux-ci, et ils élaborent une analyse historique à partir de l’évolution des représentations. Ils créent ensuite une planche de bande dessinée en s’inspirant de faits réels". 

Le 19 novembre 2016, en partenariat avec le CERCIL Musée Mémorial des enfants du Vel d’Hiv et le Musée de la résistance de Blois, a eu lieu le café-littéraire sur les Justes parmi les Nations. Ce café-littéraire a été modéré par Nathalie Grenon, directrice du CERCIL, et réunit Armelle Modéré, Jules B, l’histoire d’un Juste, Editions Des ronds dans l’O, David Cenou et Patrice Guillon, auteurs d’Un Juste, La Boîte à Bulles.

A Metz, la librairie Hisler BD présenta cette exposition.

Saint-Sébastien-sur-Loire montra cette exposition. "À travers les planches d’auteurs de bande dessinée suédois, cette exposition souligne aussi bien la valeur patrimoniale de l’oeuvre d’Art Spiegelman que l’utilisation du 9e art comme support pour la transmission de l’histoire de la Shoah. Mus / Mouse / Maus est également l’occasion de découvrir la culture de la bande dessinée suédoise, la richesse de ses modes d’expression et des personnalités de sa scène contemporaine".


Du 19 mai au 1er octobre 2021
Lieu-dit La Rue 50310 Azeville
Tél. : 02 33 40 63 05
Du dimanche au vendredi de 13 h à 18h . Fermé le samedi sauf vacances d’automne.

Du 13 janvier au 18 février 2017
A la Gare d’Anjou
Rue Jean Macé
44230 Saint-Sébastien-sur-Loire
Tél. : 02 40 80 85 00

Du 7 au 20 septembre 2016
1, rue Ambroise Thomas. 57000  Metz
Tél. : 03 87 75 07 11
Du lundi au samedi de 9 h 30 à 19 h. Vernissage le 8 septembre 2016 à 18 h.
  
Du 26 septembre au 3 novembre 2013
7, rue Neuve Saint-Etienne. 87000 Limoges
Tél. : 05 55 45 84 44
Tous les jours sauf le mardi. Entrée libre et gratuite

Du 7 mars au 27 avril 2012
Au Centre européen du résistant déporté
Site de l’ancien camp de Natzweiler au Struthof, 67130 NATZWILLER
Tél. : 00 33 (0)3 88 47 44 67
Inauguration le dimanche 18 mars 2012 à 14 h
L’inauguration a été suivie d’une table-ronde sur le thème « Parler des camps aux enfants » à 15h animée par Eduardo Castillo, en présence de Gilles Rapaport, auteur et illustrateur, Didier Daeninckx, auteur de roman et de bande dessinée, et les auteurs de la bande dessinée Un été en enfer, camp de Natzweiler-Struthof 1942 (éditions du Signe) : Roger Seiter, scénariste et Vincent Wagner, dessinateur

Jusqu’au 30 décembre 2011
Au Mémorial de la Shoah
Niveau crypte, entresol
17, rue Geoffroy L'asnier, 75004 Paris
Entrée libre
Tél. : 01 42 77 44 72

Visuels :
Mus / Mouse / Maus. © Association suédoise de la bande dessinée, auteur : Ola Skogäng
La bête est morte ! © G.P. 1946 Calvo/Dancette
Mus / Mouse / Maus. © Association suédoise de la bande dessinée

Mus / Mouse / Maus. © Association suédoise de la bande dessinée, auteur : Fanny M. Bystedt

Mus / Mouse / Maus. © Association suédoise de la bande dessinée, auteur : Natalia Batista

© L’Association suédoise de la bande dessinée et les auteurs (Magnus Jonason, Allan Haverholm, Robin Ragnarsson, Emelie Friberg, Ola Skogang, Peter Bergting, Asa Ekstrom, Natalia Batista, Fanny M. Bystedt, Lisa Rydberg)

Couverture de l’album n°1 consacré à Amy Johnson 
© Frasier, Hautière, Laboutique, Polack / Casterman


Cet article a été publié pour la première fois le 21 décembre 2011, republiés les 16 mars 2012 et 2 octobre 2013, 6 mai 2015, 9 mars, 7 septembre et 11 décembre 2016, 18 février 2017. Il a été modifié le 27 septembre 2021.