Citations

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mercredi 3 décembre 2025

Le Haut-Karabakh ou l'Artsakh

Depuis la fin de l'Union soviétique dont il formait une des républiques socialistes soviétiques, le Haut-Karabagh, Haut-Karabakh ou Artsakh a été une république autoproclamée de Transcaucasie et majoritairement peuplée de chrétiens arméniens. Au terme de guerres entre le Haut-Karabakh et l'Azerbaïdjan, Etat voisin à la population majoritairement musulmane (chiite), l'Azerbaïdjan a occupé ce territoire montagneux et forestier en 2023. Arte diffusera le 3 décembre 2025 à 23 h 30 « Un garçon, une terre, la guerre » de Sareen Hairabedian.

Arménie 1915. Centenaire du génocide
« Le génocide des Arméniens de l’Empire ottoman. Stigmatiser, détruire, exclure »

En novembre 1917, l'Empire russe se disloque et les Bolcheviks s'emparent du pouvoir. L'Arménie, l'Azerbaïdjan et la Géorgie déclarent leur indépendance. Des combats opposent les républiques d'Arménie et d'Azerbaïdjan dans trois territoires : le Nakhitchevan, le Syunik et le Haut-Karabagh. 

Un an après sa « soviétisation », Staline tranche le différend : il rattache à l'Azerbaïdjan la région peuplée pourtant majoritairement d'Arméniens chrétiens. 

En 1923, est créé "l'oblast (région) autonome du Haut-Karabagh à partir de la partie du Haut-Karabagh majoritairement habitée par des Arméniens, ce qui lui confère une relative autonomie". Ce statut perdure durant soixante-cinq ans. Mais demeurent hors de "l'oblast, des parties du Haut-Karabagh dont les unes sont principalement peuplées d'Azerbaïdjanais, tandis que les autres, dans le nord de la région (district de Shaumyansky de la république socialiste soviétique d'Azerbaïdjan) ont une population majoritairement arménienne".

Depuis la fin de l'Union soviétique dont il formait une des républiques socialistes soviétiques, le Haut-Karabagh, Haut-Karabakh ou Artsakh a été une république autoproclamée de Transcaucasie et d'une superficie de 4403 km² pour 148 917 habitants, majoritairement arméniens chrétiens, en 2015. Sa capitale :  Stepanakert.

Région essentiellement montagneuse et forestière, le Haut-Karabagh a œuvré pour son indépendance ou son rattachement à l'Arménie - pour celle-ci, l'Artsakh constitue son berceau national -, tandis que l'Azerbaïdjan, Etat à la population majoritairement musulmane (chiite), considérait le Haut-Karabagh comme terre azérie. L'Azerbaïdjan revendique des liens culturels anciens, et la volonté de reprendre par le djihad un territoire du "dar al-islam occupé par des Infidèles ou Kouffars.  

Le 2 septembre 1991, l'assemblée nationale du Haut-Karabagh a déclaré son indépendance. Celle-ci est reconnue seulement par l'Abkhazie, l'Ossétie du Sud-Alanie et la Transnistrie. 

Le 12 mai 1994, la trêve négociée par la Russie met un terme aux combats entre les Arméniens et les Azerbaïdjanais. Cependant, des heurts armés sporadiques ont lieu, en particulier en avril 2016.

Le 27 septembre 2020, l'armée azérie bombarde Stepanakert. Président de la République azerbaïdjanaise, Ilham Aliyev signe un décret sur la déclaration de l’état de guerre. Les dirigeants de l'Artsakh déclarent la loi martiale et la mobilisation générale. Quant au gouvernement arménien, il annonce la mobilisation générale et la mise en vigueur de la loi martiale. Premier ministre, Nikol Pachinian prévient que les deux pays sont proches d'une «  guerre d’envergure ». Président turc islamiste et proche des Frères musulmans, Recep Tayyip Erdoğan, affirme son soutien « avec tous nos moyens » à l'Azerbaïdjan. La guerre se déroule de nouveau au Haut-Karabagh.

Début octobre 2020, l'Arménie accuse la Turquie d'amener des mercenaires syriens dans la région contestée. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, environ 850 combattants pro-Ankara y auraient été envoyés. 

Le matériel militaire de l'Azerbaïdjan provient de la Turquie - surtout des drones et de la formation - et d'Israël auquel il offre un promontoire pour surveiller l'Iran. Le 1er octobre 2020, l’Arménie rappelle son ambassadeur en Israël, en signe de protestation contre les ventes d’armes israéliennes à l'Azerbaïdjan. "Dans le Haut-Karabakh (Caucase), la Turquie a soutenu la guerre menée par l'Azerbaïdjan contre l'Arménie afin de créer un couloir islamique turc entre l'Azerbaïdjan, la Turquie et d'autres pays musulmans", a écrit Giulio Meotti. « Le croissant et l'étoile embellissent désormais le ciel du Karabakh grâce aux efforts de nos frères et sœurs azerbaïdjanais... Le drapeau azerbaïdjanais flotte fièrement au-dessus du Haut-Karabakh comme symbole de la bravoure de nos martyrs », a proclamé le président turc Erdogan en décembre 2020. 

Ce conflit n'a pu être résolu par la diplomatie internationale. En 2023, l'Azerbaïdjan a repris tout le Haut-Karabakh qu'il appelle le Dağlıq Qarabağ. Il détient des otages arméniens.

Nicolas Aznavour
Le 23 octobre 2020, le quotidien israélien de gauche Haaretz a publié la lettre ouverte de Nicolas Aznavour, fils de l'artiste Charles Aznavour, cofondateur et président du conseil d’administration de la Fondation Aznavour, adressée au président d’Israël Reuven Rivlin afin qu'il intervienne "pour assurer un moratoire sur la vente de ces armes à l’Azerbaïdjan" :
"Monsieur le Président,
En 2017, avec mon père Charles Aznavour, j’ai eu le plaisir de me rendre en Israël où la Fondation Internationale Raoul Wallenberg (IRWF) a décerné la « Médaille Raoul Wallenberg » à Aïda et Charles Aznavour en votre présence.
Ce prix prestigieux est un gage de reconnaissance à la famille Aznavour, à la mère Knar, au père Misha et à leur fille et fils susmentionnés, qui, pendant les jours sombres de l’occupation nazie en France, ont tendu la main à ceux qui étaient persécutés. Je me souviens que mon père se rappelait comment il avait grandi dans le quartier du Marais à Paris où de nombreux immigrants s’étaient installés côte à côte, dont des réfugiés juifs et arméniens. C’étaient des voisins et des amis proches.
Lorsque la Gestapo a commencé à arrêter des Juifs pour les expulser, l’appartement de mes grands-parents est devenu un abri pour qu’ils se cachent et trouvent un passage sûr. Mes grands-parents savaient qu’ils couraient un danger énorme tous les jours, mais mon père et sa sœur ne l’ont compris que plus tard.
Mes grands-parents avaient fui en France pour échapper au Génocide des Arméniens par l’Empire ottoman dans les années 1920. Leur vie n’a pas toujours été facile à cause de leur pauvreté, de leur méconnaissance du français et de la douleur qu’ils portaient en eux. Lorsque la Seconde Guerre mondiale a éclaté, ils ont réalisé avec consternation que l’Histoire se répétait et ils ont pris de grands risques pour sauver autant de vies que possible.
La médaille que mon père a reçue au nom de notre famille fait partie des objets que nous prévoyons d’exposer prochainement au musée Charles Aznavour à Erevan et d’informer nos visiteurs des horreurs de la Shoah.
Monsieur Reuven Rivlin, depuis le 27 septembre, l’agression militaire de l’Azerbaïdjan s’est déjà transformée en guerre et en tragédie entraînant la mort de centaines, voire de milliers de jeunes hommes, journalistes, civils et enfants. L’armée azerbaïdjanaise utilise de nombreuses armes fabriquées en Israël, notamment des bombes à fragmentation interdites par le droit international, et des drones militaires.
En réponse aux photos publiées par les autorités arméniennes, Amnesty International a publié son rapport en notant en particulier : « Les experts d’Amnesty International Crisis Response ont pu retracer l’emplacement des images dans les quartiers résidentiels de Stépanakert et ont identifié des armes à sous-munitions M095 DPICM de fabrication israélienne tirées par les forces azerbaïdjanaises vers Stepanakert, Shushi, Martakert et d’autres villes. « L’utilisation de bombes à fragmentation en toutes circonstances est interdite par le droit international humanitaire, de sorte que leur utilisation pour attaquer des zones civiles est particulièrement dangereuse et ne fera qu’entraîner de nouveaux morts et blessés », a déclaré Denis Krivosheev, chef par intérim d’Amnesty International pour l’Europe de l’Est et le Centre-Asie. « Les bombes à fragmentation sont par nature des armes aveugles, et leur déploiement dans les zones résidentielles est absolument épouvantable et inacceptable. Alors que les combats continuent de s’intensifier, les civils doivent être protégés et non délibérément ciblés ou mis en danger de manière imprudente. »
En souvenir de mes grands-parents et de mon père, je vous invite, Monsieur le Président, à intervenir pour assurer un moratoire sur la vente de ces armes à l’Azerbaïdjan. Israël, établi par les survivants et descendants de la Shoah, ne peut fermer les yeux ni participer au génocide que l’Azerbaïdjan, avec l’aide du gouvernement turc, se prépare à commettre en Arménie. Ce serait un affront à la mémoire de mes ancêtres qui ont sauvé de nombreuses vies juives pendant la Seconde Guerre mondiale, mais plus encore, donc ce serait un terrible affront à la mémoire des victimes de la Shoah.. Je vous demande de nous aider dans l’intérêt de l’humanité et de la longue amitié entre les Juifs et les Arméniens, de vous tenir debout à nos côtés contre les horreurs de la guerre et de la destruction.
Dans l’annexe de cette lettre, veuillez trouver quelques preuves documentées de l’utilisation des munitions internationalement interdites par les forces armées azerbaïdjanaises.
Je tiens à vous assurer, Monsieur le Président, de ma très haute considération."
Interviewé sur i24News, Nicolas Aznavour a déclaré : "Je ne pense pas qu'armer une dictature à long terme serve les intérêts d'Israël".

Il semble un peu maladroit de la part de Nicolas Aznavour d'avoir adressé sa lettre au Président israélien dont la fonction est honorifique conformément aux lois fondamentales d'Israël. Cependant, depuis quelques décennies, les titulaires de cette fonction sont parfois sortis de leur réserve pour intervenir de manière partiale dans la vie politique, essentiellement lors de la désignation du Premier ministre. Ce qui leur a été reproché par des politiciens ou journalistes.

En outre, l'Etat Juif n'a pas été rétabli uniquement "par les survivants et descendants de la Shoah". Des Juifs autochtones ou ayant du fuir des pays majoritairement musulmans, ont contribué à ce rétablissement.

Par ailleurs, on peut regretter que Nicolas Aznavour ait omis d'évoquer un autre point commun entre Juifs et Arméniens chrétiens : la Bible hébraïque. Il a également occulté le caractère religieux, civilisationnel de ce conflit initié par l'Azerbaïdjan, ainsi que l'aide militaire - drones, mercenaires syriens - fournie par la Turquie dirigée par Recep Tayyip Erdoğan.

Dans cette région, les alliances diplomatiques ou militaires sont particulièrement complexes, et des ONG partiales. Ainsi, depuis le 6 octobre 2020, le régime des ayatollahs iraniens, qui développe un programme militaire iranien visant la destruction de l'Etat Juif, "soutient désormais, de manière indéfectible, Bakou dans le conflit qui l’oppose à Erevan. Un soutien paradoxal, car l’Azerbaïdjan reste un allié proche d’Israël, l’un des plus féroces adversaires de la République islamique d’Iran. Cette dernière a, en revanche, toujours entretenu d’intenses échanges avec l’Arménie, Téhéran lui fournissant du gaz et Erevan de l’électricité".

« Un garçon, une terre, la guerre »
Arte diffusera le 3 décembre 2025 à 23 h 30 « Un garçon, une terre, la guerre » de Sareen Hairabedian.

« Débutant à l’été 2020, ce documentaire suit un jeune garçon et sa famille dans le Haut-Karabakh, à l’heure où l’Azerbaïdjan s’apprête à lancer une offensive sur l’enclave séparatiste arménienne. La guerre à hauteur d’enfant dans une chronique quotidienne d’une remarquable sensibilité. »

« Vrej, 11 ans, vit avec les siens, au milieu des canards et des abeilles, dans un village de cent cinquante habitants “où la guerre peut éclater à tout moment”. Car Tsaghkashen est situé dans la république autoproclamée de l'Artsakh, ou Haut-Karabakh, une enclave montagneuse majoritairement peuplée d’Arméniens, que se disputent Erevan et Bakou depuis des décennies. » Tsaghkashen est localisée dans la région rurale dénommée Martakert.

« En septembre 2020, la menace redevient réalité lorsque l’armée azérie lance une offensive sur la région. »

« Vrej et sa famille fuient en Arménie, d’où leur parviennent les nouvelles catastrophiques du front : au terme des combats, l’Azerbaïdjan contrôle plus de 70 % du territoire. »

« Quelques mois après la signature du cessez-le-feu sous l’égide de Moscou, le père du garçon, qui a pris part aux affrontements, vient enfin les chercher. Vrej retrouve son village, où les chars russes stationnent entre les bâtiments endommagés, tandis que les portraits des morts s’affichent dans le hall de son école. »

« Peu eu après, garçons et filles sont envoyés en camp militaire, où les premiers vont apprendre à manier des armes. Mais Vrej, qui s’était construit un fusil en bois, n’a plus envie de jouer à la guerre... »

“S’il le faut, je me battrai. Comment faire autrement ?” Viscéralement attaché à la terre de ses ancêtres, ce petit bonhomme aux grands yeux curieux, qui rêve d'ouvrir un cabinet de dentiste à Tsaghkashen, prend conscience, au fil de ce récit d’apprentissage déchirant, du poids de son destin. Sa génération, comme les précédentes, devra-t-elle verser son sang pour défendre les dernières miettes de l’Artsakh, ou se résoudra-t-elle à quitter son paradis, déjà en partie perdu ? »

« De promenades à travers champs en anniversaires familiaux, de jeux insouciants en chants patriotiques entonnés avec son petit frère – qui, haut comme trois pommes, assure à sa grand-mère que les territoires conquis seront repris –, la réalisatrice Sareen Hairabedian a capturé, sur plus d’une année, la vie quotidienne de son jeune héros au cœur d’une région déchirée par un conflit séculaire. »

« Entre innocence et gravité, la chronique délicate d’une enfance à l’ombre de la guerre, sélectionnée dans de nombreux festivals internationaux. »

Prix du jury, Prix du public et Prix Fipresci, Amman Film Festival 2024 – Meilleur documentaire, Dublin Film Festival 2025 – Compétition officielle, Fipadoc 2025


« Un garçon, une terre, la guerre » de Sareen Hairabedian
France, 2021, 85 min
Production : HAI Creative, Sister Productions, Soilsiú Films, ITVS, en association avec ARTE France
Sur Arte le 3 décembre 2025 à 23 h 30
Sur arte.tv du 21/11/2025 au 20/09/2026
Visuels : © Sister Prod


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