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jeudi 1 août 2019

« Leaving, never to return ! »


Le MUSA, the Eretz Israel Museum, a présenté l’exposition « Leaving, never to return ! » Un hommage partial aux Juifs ayant du quitter, en quelques décennies, « onze pays de la sphère musulmane »
« Leaving, never to return »


En quelques décennies, essentiellement des années 1940 aux années 1970, près d’un million de Juifs ont été contraints de quitter les pays du monde arabe, la Turquie, l’Iran, la Judée, la Samarie, les hauteurs du Golan, la vieille ville de Jérusalem… Des lieux où ils étaient implantés parfois depuis des millénaires. Un espace constitué de pays (quasi)Jüdenrein.

Cet exil sans nom, certes parfois dénommé « exode oublié », a été longtemps occulté, méconnu. Et éclipsé par le narratif arabe sur les « réfugiés palestiniens » de la « Nakba ». Un nombre qui se réduit au fil des recherches historiques. Selon les calculs de l'historien Efraim Karsh, lors de la guerre d’Indépendance de l’Etat d’Israël, 583 000-609 000 Arabes palestiniens ont fui leurs foyersgénéralement de plein gré et en raison des actions menées par les dirigeants arabes, donc des exilés pour la plupart volontaires(How Many Palestinian Arab Refugees Were There?, Israel Affairs, Avril 2011) "Le nombre total de réfugiés Arabes palestiniens - résultant d'une guerre lancée par les Arabes - ne pouvait pas excéder 320 000, dans le contexte de plus de 100 millions de réfugiés globaux", a rappelé Yoram Ettinger (1948 Arab refugees: concocted circumstances and numbers, 27 mai 2016).  Quant au journaliste Richard Mather, il a listé les statistiques fournies par des sources officielles - palestiniennes, onusiennes, etc. - , et a évalué le nombre d'Arabes ayant fui à environ 270 000. (Palestinian refugees from1948 may have numbered less than 300,000, 13 janvier 2016).


Des écrivains, dont Naïm Kattan et Bat Ye'or, chanteurs (Enrico Macias), comédiens ou réalisateurs, dont Alexandre Arcady, juifs l’ont évoqué dans leurs œuvres, soit lors de cet exode, soit des années après, souvent par le biais de fictions, avec un succès critique et populaire.

Depuis quelques décennies, notamment en France sous l’impulsion du professeur Shmuel Trigano, des colloques l’ont étudié. Des questions ont opposé universitaires et politiques : les juifs étaient-ils des réfugiés ?


Le 24 juin 2014, la Knesset a approuvé la proposition de loi instituant la journée du 30 novembre en Jour marquant l'exil des Juifs des terres arabes et d'Iran (Day Marking the Exit and Deportation of Jews from Arab Lands and Iran), et présentée par les parlementaires Shimon Ohayon (Likud Beiténou) et Nissim Zeev (Shas).

Plusieurs ministres se mobilisèrent : celui des Personnes âgées dirigera la cérémonie ouvrant la commémoration, celui de l'Education et celui des Affaires étrangères par des événements, dont certains dans les ambassades israéliennes, afin d'augmenter la prise de conscience internationale des Juifs réfugiés ayant quitté les terres arabes et l'Iran et leur droit à indemnisation. 

Cette loi précise : ”Durant ce long exode, les Juifs vivant en terres arabes ont subi de nombreux pogroms. Le monde arabe a répondu gravement au renforcement du mouvement national Juif et au sionisme à la veille" du rétablissement de l'Etat d'Israël. "Cette opposition s'est exprimée par des attaques cruelles à l'égard des Juifs et une augmentation des troubles contre eux. Des ordres et lois officiels émis par les régimes des terres arabes ont empêché les Juifs de bénéficier des droits de l'homme ou de ceux des citoyens ainsi que d'avoir un travail, leurs biens leur ont été confisqués, leur nationalité leur a été retirée. De nombreuses fois, les Juifs sont été victimes de meurtres, d'arrestations arbitraires infondées, d'emprisonnements, de torture et de déportation. De 1947 à 1972, environ 856 000 Juifs des terres arabes ont été déracinés, dépossédés de tout et sont devenus des réfugiés".

Cette loi omet malheureusement la Turquie, le Golan, la Judée, la Samarie et Jérusalem que les Juifs ont été alors contraints de quitter.



Il est difficile d''estimer la valeur des biens dont ces réfugiés juifs ont été spoliés lors de cet exode forcé : de quelle date à quelle date ? Quels pays inclut-on ? Additionne-t-on la valeur des biens détenus à titre individuel à ceux de la communauté juive locale - hôpitaux, écoles, synagogues, etc. - ? En 2008, la World Organization of Jews from Arab Countries (WOJAC) a estimé la valeur de ces biens à environ $100 milliards (valeur de 2006) et d'autres ont avancé $300 milliards (valeur de 2007). En 2018, YJ Draiman,  président d'AFSI de la Région du Grand Los Angeles, "les biens immobiliers de ces Juifs contraints de les laisser en terres Arabes ont été estimés à 120 000 km². La valeur actuelle est d'environ 15 trillion de dollars" (15 billions - un billion est un million de million ou mille milliards).
Le coût humain s'est avéré tragiquement élevé.


Selon un article en 2012 de Ron Prosor, ancien ambassadeur israélien, "la superficie totale des terres confisquées aux Juifs des pays Arabes atteint près de 40 000 miles carrés - cinq fois la taille d'Israël" et environ 104 000 km². 

C'est un sujet historique aux implications nombreuses, notamment diplomatiques dans le cadre du règlement des différends entre le monde islamique ou/et musulman et l'Etat des anciens dhimmis.

Hommage muséal
En 2019, le MUSA, l’Eretz Israel Museum a présenté l’exposition « Leaving, never to return ! ». Un « hommage aux Juifs de pays Arabes et d’Iran ».

Ce double énoncé souligne combien cette exposition se calque sur cette loi israélienne, avec ses omissions, notamment géographiques, biaisées. Dommage pour l'Histoire.



Cette exposition est « une partie d’expositions au Musa  the Eretz Israel Museum, Tel Aviv dévolues aux thèmes de l’immigration et du multiculturalisme en Israel. La présentation d’objets provenant des cultures de 11 communautés juives de la sphère musulmane invite les visiteurs à partager ce voyage qui a amené ces communautés en Israël », a écrit Dana Avrish, commissaire de l’exposition. Ces Juifs exilés sont également partis vers des pays européens, américains, etc.

Et de préciser : « Le titre de l’exposition a été inspiré par les mots tamponnés sur les certificats de sortie et les valises de centaines de milliers de juifs :رحلة بدون رجعة  (littéralement : un voyage sans retour). Nonobstant leur sens de la connexion aux cultures des pays musulmans où ils vivaient, les Juifs au fil des générations, et spécialement à l’âge moderne, ont aussi souffert des difficultés qui les ont contraints à se déraciner, transformant nombre d’entre eux en réfugiés. Bien que la plupart d’entre eux désiraient immigrer en Israël – dans certains cas quittant leur pays pour des raisons religieuses ou sionistes même avant la fondation d’Israël et de leur déportation massive–  la rupture avec leur pays d’origine a été douloureuse. L’expérience de devenir Israéliens en elle-même a constitué un long et ardu parcours, dont les échos continuent de résonner à ce jour ».


Et d’expliciter : « Pendant plus de 2 500 ans, des centaines de milliers de Juifs vivaient dans des communautés anciennes et prospères en Afrique du nord et au Moyen-Orient - au Maroc, en Algérie, Tunisie, Libye, Egypte, Yémen et Aden, Iran, Iraq, Syrie et Liban. Les visiteurs de l’exposition sont invités à embarquer pour un périple symbolique parmi les 11 communautés de ces pays, ce qui les mène à la fin au douzième pays, Israël – l’ouverture et la fermeture d’un cercle. Ce voyage est une introduction aux membres de ces communautés et à leurs coutumes, ainsi qu’aux voix des deuxième et troisième générations, qui sont représentées par une série d’objets. Chaque objet a été créé par un jeune artiste israélien inspiré par son patrimoine ». Il est quand même curieux que cette commissaire d'exposition ait omis les parties d'Eretz Israël, berceau du peuple juif, que les Juifs ont été contraints de quitter en 1948.

Et de conclure
« The realization of this exhibition was, for me, a journey in time to the places in which my ancestors once lived as part of different Jewish communities, whose descendants currently constitute more than half the population of the state of Israel. The cultural flourishing of these communities was also influenced by the Muslim environment, as attested to by the exhibits chosen to embody their history: sacred and everyday objects, photographs, documents, testimonies, video footage, and photographs. These exhibits contribute to deciphering a cultural, social, religious and political code of Jewish existence that persisted for thousands of years. The selection of a restricted set of objects was challenging, for each community has its own story, and differences can be found even among communities in the same country, such as the communities of Aleppo and Damascus in Syria or Alexandria and Cairo in Egypt.At the same time, there are also common denominators shared by Jews living in Islamic countries, forging an inextricable connection between the members of these communities. This connection, which is evident throughout the exhibition, is given expression through the image of the tallit, which serves as a backdrop for the history of each community and its good and bad times. This image was inspired by an event that took place at the Jadu work camp in Libya during the Second World War, following the Nazi conquest: an officer entering a barrack crowded with some 100 inmates ran his finger over the dusty wooden beams, and threatened the inmates with heavy punishment if the barrack was not cleaned. In the absence of anything but the scant clothing on their bodies, one man took out his tallit, detached its fringes, and turned it into a cloth. And so, more than the Jews preserved the tallit, the tallit preserved them.This exhibition pays tribute to the world of 11 Jewish communities and to their rich traditional and modern life, commemorating them while calling for an Israeli cultural revival and for the proud continuation of their legacy.  »
Quid du processus commun de cette expulsion ? Quid du rôle des Nazis ? Quid de la dhimmitude ?

A quand une exposition sur ce thème historique au musée d'art et d'histoire du Judaïsme (mahJ) à Paris ?


Jusqu'au 31 juillet 2019
Au MUSA, the Eretz Israel Museum
2 Haim Levanon St., Ramat Aviv, Tel Aviv 69975
Du lundi au mercredi de 10 h à 16 h. Mardi et jeudi de 10 h à 20 h. Vendredi de 10 h à 14 h. Samedi de 10 h à 16 h

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Les citations sur l'exposition proviennent du site du musée.

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