Le musée d’art et d’histoire du Judaïsme (mahJ) présente l’exposition « Alfred Dreyfus. Vérité et justice » qui montre le capitaine (1859-1935) actif, notamment par ses écrits, dans sa défense afin que la vérité émerge et que son innocence soit reconnue. L'exposition brosse un tableau de la société de la Belle Epoque où cette affaire a divisé jusqu'aux impressionnistes.
A l’Ecole militaire, le Président Jacques Chirac a présidé la cérémonie nationale en hommage à Alfred Dreyfus
A l’époque de l’affaire Dreyfus
A l’époque de l’affaire Dreyfus
En 1978, la série historique "Émile Zola ou La Conscience Humaine", réalisée par Stellio Lorenzi, avec Jean Topart, François Chaumette, Maryvonne Schiltz, Pierre Vernier et Gérard Darrieu, avait présenté un Alfred Dreyfus passif, froid envers cet écrivain engagé en sa faveur. Critiqués dans un article de Jean-Louis Levy, petit-fils d'Alfred Dreyfus, publié dans Le Monde (23 mai 1978), le réalisateur et son co-auteur Armand Lanoux avaient justifié, dans une lettre publiée par Le Monde (25 mai 1978), leur vision.
« En 2006, à l’occasion du centenaire de la réhabilitation du capitaine Dreyfus, le mahJ présentait l’exposition « Alfred Dreyfus. Le combat pour la justice ». Près de vingt ans plus tard, le musée revient sur l’Affaire pour rappeler les grandes étapes de ce moment crucial de l’histoire de France, qui suscita la consolidation de la République et la loi de séparation des Eglises et de l’Etat. L’exposition permet ainsi d’appréhender l’actualité de l’Affaire, dans un contexte de regain de l’antisémitisme, alors que l’innocence de Dreyfus fait encore l’objet de polémiques complotistes. »
« Rassemblant près de 250 documents d’archives, photographies, extraits de films et une soixantaine d’œuvres d’art – de Jacques-Emile Blanche, Gustave Caillebotte, Eugène Carrière, Edouard Debat-Ponsan, Maurice Feuillet, Emile Galle, Maximilien Luce, Camille Pissarro, Félix Vallotton ou Edouard Vuillard –, l’exposition raconte l’Affaire « avec » Dreyfus, en replaçant le principal protagoniste au centre du propos. Cette approche nouvelle corrige l’image longtemps véhiculée d’un Dreyfus effacé, spectateur passif de sa propre affaire. Elle révèle un inlassable combattant de la vérité, ainsi que l’auteur de multiples écrits, dont de nombreux inédits accessibles grâce à la publication de ses Œuvres complètes. »
« Alfred Dreyfus naît en 1859 dans une famille alsacienne profondément marquée par la défaite de 1871 et l’annexion de l’Alsace-Moselle. Fervent patriote comme de nombreux juifs de l’Est, polytechnicien, il mène une brillante carrière militaire qui sera brisée en 1894 : injustement accusé de haute trahison au profit de l’Allemagne, il est condamné par un conseil de guerre, dégradé et déporté sur l’ile du Diable, au large de la Guyane. »
Ponctuée par des citations du capitaine Dreyfus, « l’exposition démonte la machination ourdie par l’état-major et illustre le virulent antisémitisme qui se développe en France depuis la seconde moitié du XIXe siècle. »
« Grâce aux nombreuses œuvres présentées, elle replace l’Affaire dans la « Belle Epoque » et éclaire trois aspects moins connus : la diversité des réactions juives – de Joseph Reinach à Theodor Herzl –, la « naissance » des intellectuels et la riposte à l’antisémitisme. Gracié en 1899, Dreyfus est réhabilité en 1906 à l’issue d’un combat de douze années, mais sa carrière ne sera jamais reconstituée. L’exposition s’achève sur le traitement de l’Affaire au cinéma avec des actualités Pathé, un Méliès de 1899 qui en fixe les principaux épisodes, et des fictions censurées par le gouvernement français. »
Le commissariat est assuré par Isabelle Cahn et Philippe Oriol, la coordination par Virginie Michel et Léa Weill.
La scénographie a été confiée à l’Atelier Sylvain Roca - Sylvain Roca et Julia Dessirier – et le graphisme à Nicolas Turki Duchesnay.
L'exposition montre l'engagement des juifs français - du grand rabbin de France Zadoc Kahn aux notables, via les intellectuels - pour Alfred Dreyfus, et ce, des années durant. Une situation qui contraste avec celle constatée depuis le déclenchement de l'Intifada II en 2000 par Arafat : indifférence, réticences, volonté de ne pas fragiliser leur statut privilégié, divisions et médiocrité de leurs successeurs actuels, en particulier certains dirigeants communautaires qui n'ont pas la stature et les qualités requises. L'affaire al-Dura, les assassinats de français juifs et la spoliation de juifs français, dont le Dr Lionel Krief, par le "gouvernement des juges" depuis 2000 illustrent tristement cette situation s'apparentant à une forme de trahison d'élites communautaires, déconnectées de la réalité vécue par leurs coreligionnaires lambda, et refusant de s'engager en leur faveur en rendant publiques leurs affaires.
On peut regretter que l'exposition n'ait pas plus montré la complexité de certains dreyfusards qui, tout en combattant pour la vérité et la justice, conservaient des stéréotypes antijuifs.
Cette exposition, « qui a reçu le soutien exceptionnel du musée d’Orsay, s’appuie sur le riche fonds Dreyfus conservé au mahJ, sur des prêts de plus d’une trentaine d’institutions en France et à l’étranger – Archives nationales, Bibliothèque nationale de France, musées de l’Armée, du Barreau, Carnavalet, de l’Ecole de Nancy, Maison Zola-Musée Dreyfus à Medan, musée juif de Suisse à Bâle – ainsi que sur des collections particulières. »
Elle « est accompagnée d’un large programme de médiation à destination des scolaires et de tous les publics (visites guidées, promenades hors-les-murs, livret-jeux…), de manifestations à l’auditorium, projections, conférences), et de dispositifs d’accessibilité pour les publics malvoyants. »
Autour de l'exposition, le mahJ a proposé des rencontres avec Vincent Duclert, Philippe Oriol et Charles Dreyfus ou dans les salles, conférences, projections, et le colloque "Les juifs et l'affaire Dreyfus" avec Marie Aynie, Isabelle Cahn, Denis Charbit, Catherine Coquio, Vincent Duclert, Jacques Gerstenkorn, Philippe Landau, Milo Levy-Bruhl, Pierre-Andre Meyer, Philippe Oriol, Perrine Simon-Nahum, Bertrand Tillier et Avishag Zafrani. "Dans le dernier quart du XIXe siècle, nombreux furent les juifs qui préférèrent faire silence face aux attaques antisémites. Si l’Affaire montra comme une évidence quelle erreur et quel danger représentaient ce « silence du dédain », selon le mot de Théodore Reinach, la thèse erronée mais persistante d’une « passivité juive » face à la menace s’imposa dans l’historiographie. Notables ou inconnus, bourgeois ou anarchistes, artistes ou rabbins, les juifs français furent pourtant nombreux à s’engager pour défendre Dreyfus et lutter contre l’antisémitisme. Retour sur l’engagement d’un certain nombre de dreyfusards juifs, les différentes attitudes et stratégies qui furent les leurs, et les conclusions politiques voire existentielles qu’ils tirèrent de l’Affaire."
Un dossier pédagogique est consultable gratuitement.
Sous la direction d'Isabelle Cahn et de Philippe Oriol, le catalogue « Alfred Dreyfus. Vérité et Justice » est publié en coédition mahJ-Gallimard.
PREFACE, Paul Salmona, directeur du mahJ
INTRODUCTION, Isabelle Cahn et Philippe Oriol, commissaires
HISTOIRE SOMMAIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS, Philippe Oriol
L’AFFAIRE ET LA POLITIQUE, Bertrand Joly
La France de Dreyfus
« BELLE EPOQUE » ?, Pascal Ory
L’AFFAIRE DREYFUS : DIMENSIONS DE L’ANTISEMITISME, Pierre Birnbaum
LES JUIFS D’ALSACE ET LA FRANCE, Claire Decomps
L’ECOLE POLYTECHNIQUE ET SES NOMBREUX ELEVES JUIFS, Felix Messod Perez
L’ARMEE ET LES JUIFS AU TEMPS DE L’AFFAIRE, Jérôme Hélie
Accusation et défense
LES CROQUIS D’AUDIENCE DU JOURNALISTE MAURICE FEUILLET, Philippe Oriol
EMILE ZOLA OU LA CONSCIENCE HUMAINE, Martine Leblond-Zola
LES ILLEGALITES DANS LES PROCES DREYFUS ET ZOLA, Jean-Louis Halperin
LUCIE DREYFUS : UNE FEMME DANS L’AFFAIRE, Elisabeth Weissman
BERNARD LAZARE, DREYFUSARD DE L’AVANT-VEILLE, Philippe Oriol
L'ile du Diable
Presse et images
LA PRESSE QUOTIDIENNE DANS L’AFFAIRE, Philippe Oriol
LES ARTISTES ET L’AFFAIRE, Isabelle Cahn
UN DEFERLEMENT DE CARICATURES, Bertrand Tillier
LE « MUSEE DES HORREURS » DE VICTOR LENEPVEU, Pierre-Olivier Perl
Retentissements de l'Affaire
LES INTELLECTUELS ET L’AFFAIRE, Perrine Simon-Nahum
DU LEGALISME REPUBLICAIN A L’ENGAGEMENT CITOYEN, Philippe Landau
LES PROTESTANTS DANS L’AFFAIRE, Patrick Cabanel
LES JUIFS ET L’AFFAIRE DREYFUS DANS LE MONDE, Vincent Duclert
LA LOI DE 1905, FILLE DE L’AFFAIRE, Pierre-Yves Kirschleger
« HOMMAGE AU CAPITAINE DREYFUS » : UNE NOUVELLE AFFAIRE ?, Pascale Samuel
UNE FIGURE HISTORIQUE AU COEUR DES SOCIETES DEMOCRATIQUES, Vincent Duclert
Annexes
CHRONOLOGIE ILLUSTREE, Lea Weill
LISTE DES OEUVRES ET DES DOCUMENTS EXPOSES
INDEX DES NOMS
En mars 2025, Le Un a publié, en partenariat avec le mahJ, le hors-série "L'homme et l'Affaire" avec des articles signés par Isabelle Cahn, Philippe Oriol, Perrine Simon-Nahum, Vincent Duclert, Elisabeth Weissman...
"Les préjugés sont souvent tenaces. Si l’affaire Dreyfus, cent trente ans après son déclenchement, a livré tous ses secrets, reste largement méconnu le rôle joué par son acteur principal, le capitaine Alfred Dreyfus. Plus encore, sa personnalité apparaît grandement sous-estimée." On peut lire un extrait.
Depuis l'agression djihadiste du 7 octobre 2023 en Israël par des djihadistes et des civils gazaouis, le nombre d'actes antisémites a dramatiquement augmenté.
Dans ce cadre, le 2 juin 2025, les 197 députés présents à l'Assemblée nationale ont approuvé à l’unanimité une proposition de loi de Gabriel Attal, Président des députés Renaissance, « élevant Alfred Dreyfus au rang de général de brigade », un « acte de réparation » visant à parachever sa réhabilitation, cent trente ans après sa condamnation. "Une proposition de loi identique a été déposée au Sénat par Patrick Kanner, président du groupe socialiste au Palais du Luxembourg. Un texte hautement symbolique, à l’aune des 90 ans de la mort de l’officier d’artillerie français, mais aussi très politique et qui divise le bloc central".
Le 12 juillet 2025, le Président de la République Emmanuel Macron a annoncé sur X, ex-Twitter :
"Le 12 juillet 1906, la cour de cassation rendait à Alfred Dreyfus les biens les plus précieux de l’honnête homme : son innocence, sa liberté, sa dignité et son honneur. Désormais, chaque 12 juillet, se tiendra une cérémonie de commémoration pour Dreyfus, pour la victoire de la justice et de la vérité contre la haine et l’antisémitisme. Alfred Dreyfus et ceux qui combattirent à travers lui pour la Liberté, l’Égalité et la Fraternité continueront d’être l’exemple qui doit inspirer notre conduite. Annonce : https://elysee.fr/emmanuel-macron/2025/07/12/une-ceremonie-de-commemoration-pour-alfred-dreyfus-pour-la-victoire-de-la-justice-et-de-la-verite-contre-la-haine-et-lantisemitisme"
Qu'apportera cette "journée de commémoration nationale pour Alfred Dreyfus, pour la victoire de la justice et de la vérité contre la haine et l’antisémitisme" ? De la communication présidentielle d'un politicien impopulaire ayant rétrogradé les juifs après les musulmans. On peut tabler que, comme la DILCRAH, seront ajoutés au fil des ans "contre la haine des LGBT+++++++" ou "contre la xénophobie" afin de diffamer et d'ostraciser ceux qui alertent sur les dangers et les coûts d'une immigration incontrôlée, attachée à maintenir des principes contraires à ceux de la République prônant l'égalité Homme/Femme ou la liberté d'expression.
Quand on connait l'instrumentalisation de l'Education nationale, notamment de l'enseignement de l'Histoire sous les derniers Présidents, il s'avère vain d'espérer que cette Journée réduira l'antisémitisme.
Parcours de l’exposition
I. Un israélite d’Alsace
« Alfred Dreyfus naît à Mulhouse, le 9 octobre 1859, dans une famille juive française depuis plusieurs générations, patriote et fidèle aux valeurs de la République. Il est le dernier enfant d’une nombreuse fratrie. Son père, Raphaël, colporteur à l’origine, crée en 1862 une grande filature de coton dont le succès commercial lui vaut d’être intégré dans le milieu des barons de l’industrie de Mulhouse. Sa mère, Jeannette Liebmann Weil, d’origine lorraine, est couturière. Son grand-père maternel était marchand de drap et circonciseur. »
« La guerre de 1870, suivie de la défaite française et de l'annexion de l'Alsace-Moselle par l'Allemagne, sont déterminantes dans le choix de Dreyfus de devenir officier au service de la France. Apres la signature du traité de Francfort, le 21 mai 1871, son père choisit pour lui et ses enfants mineurs de demeurer français. Il conserve l’usine textile en activité à Mulhouse, étant dans l’incapacité financière de la déménager. Après être resté deux ans à Bâle, Alfred est envoyé à Paris pour ses études. Il revient voir sa famille à Mulhouse lors de courts voyages officiels ou clandestins. Reçu à l’Ecole polytechnique en 1878, il intègre deux ans plus tard l’Ecole d’application d’artillerie de Fontainebleau avant d’entrer à l’Ecole supérieure de guerre en 1890. »
« Œuvres clés de la section
- archives issues du fonds Dreyfus du mahJ évoquant les années de jeunesse et de formation du capitaine
- œuvres de Jean Baptiste Edouard Detaille et de Paul Dubois sur la guerre de 1870 »
II. Heureux comme Dieu en France
« Heureux comme Dieu en France », dit le proverbe pour exprimer l’idéal que représente pour les juifs persécutés dans toute l’Europe orientale, la France qui, des 1791, leur a accordé la pleine égalité de droits en faisant d’eux des citoyens. Leur ascension sociale est fulgurante sous le Second Empire avec le développement de l’industrie et la modernisation du pays. » Mais en 1808, l'empereur Napoléon Ier avait privé les juifs d'Alsace de certains droits - troisième des décrets relatifs aux Juifs en France institués par Napoléon Ier le 17 mars 1808 surnommé le "décret infâme" -. Et ce n'est qu'en 1846, grâce à Adolphe Crémieux (procès de Saverne), que la Cour de cassation met un terme définitif, dans tout le territoire français, au serment "more judaïco" par lequel "tout Juif déposant en justice était présumé parjure jusqu'à preuve du contraire." A "l'époque même où des savants et des hommes d'affaires juifs jouaient un rôle déjà considérable dans la vie française."
« Mais la « Belle Epoque » ne l’est pas pour tout le monde. Si Paris, ville-lumière, séduit, si ces dernières années du siècle sont celles d’un prodigieux bouillonnement artistique et littéraire, celles de la naissance de l’information et de la prospérité de la presse, celle des avancées techniques et de la mécanisation, le progrès ne touche pas de la même façon toutes les classes de la société. Les grèves, les attentats anarchistes, les manifestations violemment réprimées, les scandales politiques, constituent la face sombre de cette période prospère mais instable. »
« Cette époque contrastée d’une République encore fragile marque la montée en puissance du nationalisme et de ses avatars : populisme, chauvinisme, xénophobie, antisémitisme, opinion devenue à la mode après 1886 et la publication de La France juive, bestseller d’Edouard Drumont. »
« Œuvres clés de la section
- peintures de Camille Pissarro, James Tissot évoquant la Belle époque
- xylographies de Félix Vallotton, La grève au Creusot de Jules Adler autour des tensions sociales »
III. Accusation et procès
« A la fin septembre 1894, une femme de ménage de l’ambassade d’Allemagne à Paris, rétribuée par les services secrets militaires français, communique à l’état-major une lettre de renseignements qui sera désignée sous le nom de bordereau. Pour le général Mercier, ministre de la Guerre, l’identification et la condamnation du traître est le moyen de sauver son avenir politique menace. »
« L’enquête est bâclée et, guidée par le préjugé antisémite, l’attention, est portée sur Alfred Dreyfus, qui du jour au lendemain cesse d’être le brillant stagiaire à l’état-major qu’on reconnaît en lui pour devenir le traître. »
« L’expert graphologue consulté n’arrivant pas à la conclusion qu’on attend de lui, on s’adresse à Alphonse Bertillon, chef du service de l’identité judiciaire de la préfecture de police, qui met tout le poids de son autorité dans la balance et indique la voie à suivre à deux autres experts officiels. Sur cette base, sur celle de ragots ramassés un peu partout et de témoignages obéissants de camarades, Dreyfus est arrêté et mis au secret à la prison du Cherche-Midi après avoir été soumis à une dictée, scène de mauvais théâtre dont l’issue est écrite par avance. Pour garantir la condamnation du traître, le ministre de la Guerre fait prononcer le huis clos et décide la constitution d’un dossier secret illégalement soumis aux juges à l’insu de l’inculpé et de son défenseur. »
« Le 22 décembre 1894, Dreyfus, qui n’a eu de cesse de clamer son innocence, est condamné à la dégradation et à la déportation perpétuelle pour haute trahison. »
« Œuvres clés de la section
- bordereau (fac-similé)
- la scène de la dictée extraite du film de Méliès
- étude sur le rapport d'Ormescheville de 1894, issue de notes rédigées par Dreyfus entre le 12 décembre 1894 et le 11 janvier 1895 à l’attention de son avocat »
IV. Condamnation
« Condamné à la peine maximale, la déportation perpétuelle dans une enceinte fortifiée et la destitution de son grade, le capitaine Dreyfus est solennellement dégradé le 5 janvier 1895 dans la cour de l’Ecole militaire en présence de l’armée. Dans une parade d’exécution, les boutons de son uniforme, les bandes de son pantalon, les insignes de grade sur son képi et ses manches, et ses galons sont arrachés. Son épée est brisée. »
« La foule s’est massée nombreuse aux abords de l’Ecole militaire pour conspuer le « traître ». S’il n’y a alors aucune raison de douter du verdict d’un conseil de guerre, rares sont ceux qui condamnent la campagne de presse accompagnant la révélation de l’arrestation du capitaine par La Libre Parole de Drumont. Cette couverture médiatique inspirée par l’état-major, foule aux pieds la présomption d’innocence tout en plaçant le débat sur l’unique terrain de l’antisémitisme. Au lendemain de cette parade de haine, de nombreux députés proposent des projets de loi visant à exclure les juifs des fonctions de l’Etat quand ce n’est pas, tout simplement, de la citoyenneté. »
« Au moment de son départ en déportation, Dreyfus adresse de nombreux courriers à ses connaissances, dont une lettre au grand-rabbin de France, Zadoc Kahn, qui avait officié à son mariage, pour demander « consolations et encouragements ».
Le « Pacte secret »
« Devant le verdict de ce procès qui défie la raison, Alfred Dreyfus ne peut douter que justice lui sera rendue, puisqu’il est innocent. Mais combien d’années faudra-t-il attendre avant que la réparation soit faite ? Aura-t-il la force de tenir jusque-là ? Dans ses moments de désespoir, une solution s’offre à lui : « J’étais résolu à mourir, tu le sais », écrit-il à son frère ; « le coup était terrible, ce qui m’attend plus terrible encore. La mort n’a rien qui m’effraie, c’était l’anéantissement de toutes mes souffrances. Mais après ! Mon nom était sali et avili à tout jamais, on aurait fait le silence autour de ma tombe. C’est ce que je ne veux pas. » Et pour sa famille, pour son nom, pour l’honneur, il résistera, jusqu’au bout, quels que soient les supplices qui lui seront infligés : « Je veux lutter pour mon honneur, pour l’honneur de notre famille, jusqu’à la dernière goutte de sang. »
- lettre de Maximilien von Schwartzkoppen, pièce clé du dossier de justice militaire dit « dossier secret » sur la base de laquelle Dreyfus est condamné (à confirmer)
- lettre d’Alfred Dreyfus à son frère Mathieu
- rare photographie de la dégradation du capitaine Dreyfus, le 5 janvier 1895 ; titres de presse
- galons arrachés à Dreyfus lors de la dégradation
- études préparatoires pour Hommage au capitaine Dreyfus de Tim »
V. Cinq années de ma vie
« Au lieu d’être déporté en Nouvelle-Calédonie, où sa famille aurait pu le rejoindre, Dreyfus est condamné à un régime d’isolement encore plus sévère. Le 21 février 1895, il est embarqué a La Rochelle pour l’île du Diable, au large de la Guyane, ancien bagne devenu campement de lépreux, qu’il atteint le 14 avril après une traversée éprouvante ».
« Enfermé dans une case de 4 m², chichement nourri, éprouvé par le climat équatorial, il est mis aux fers la nuit à partir de septembre 1896 en réponse à la publication de la fausse nouvelle de son évasion, stratagème ourdi par Mathieu Dreyfus pour éviter que l’oubli n’ensevelisse son frère. Une nouvelle palissade est construite autour de sa case l’empêchant de voir la mer. »
« Dans l’ignorance totale de ce qui se passe en Métropole, Dreyfus ne cesse de clamer son innocence et adresse des dizaines de lettres au Président de la République et aux différentes autorités pour demander la révision de son procès ».
« A son retour du bagne, il reprendra ses notes complétées par sa correspondance avec son épouse Lucie pour publier en 1901, Cinq années de ma vie. »
« Œuvres clés de la section
- registres des gardiens de l'île du Diable
- original du journal d'Alfred Dreyfus
- cahiers de notes du capitaine, recouverts d’équations, de traductions, de pensées et de dessins géométriques, reproduits à l’infini, afin d'occuper continuellement son esprit et de ne pas sombrer dans la folie. »
VI. L’Affaire
« La famille Dreyfus, sous l’impulsion de Mathieu, tente de rallier les bonnes volontés pour sauver Alfred, « retranché du monde des vivants ». Dans un premier temps, elle ne parvient guère qu’à obtenir l’appui d’un jeune écrivain anarchiste, Bernard Lazare qui, seul contre tous, publie en 1896 le premier mémoire en défense de Dreyfus. La presse se rue sur l’auteur mais le doute commence à s’installer dans les esprits et arrivent les premiers ralliements dont ceux de nombreux « intellectuels », savants, artistes, écrivains. »
« De petites revues et quelques journaux s’engagent. Le pays se trouve alors partagé entre une minorité « dreyfusarde » qui se heurte a une majorité « antidreyfusarde » intoxiquée par un état-major désireux de masquer sa machination, et par des hommes politiques soucieux de ne pas contrarier leurs électeurs. Le véritable traître, le commandant Esterhazy, dont l’identité est découverte et révélée fin 1897 par Mathieu Dreyfus, est protégé par l’état-major qui obtient son acquittement en janvier 1898. »
« Pour relancer le débat, le 13 janvier, Emile Zola publie dans L’Aurore son « J’Accuse ! », obligeant les autorités à lui intenter un procès, rouvrant ainsi devant les tribunaux civils une affaire close par la justice militaire. La France devient alors un véritable champ de bataille sur lequel s’affrontent les deux camps en présence à travers force tracts, affiches, chansons, cartes postales, réunions publiques… »
Bernard Lazare
« Convaincu de l’innocence de Dreyfus dès le lendemain de la condamnation du capitaine, Bernard Lazare, critique, poète, publiciste, analyse l’Affaire naissante sous l’angle de l’antisémitisme et de l’impossibilité de faire entendre la justice pour un homme quand il est juif. »
« Il met toute son énergie et son talent au service de la cause de l’innocent, rendant visite à tout Paris ce que compte de célébrités pour obtenir leur soutien. Dès 1896, il publie un mémoire pour montrer le vide d’une accusation et d’une condamnation de parti-pris, une brochure dont le premier texte, écarté par la famille de Dreyfus pour sa trop grande violence, contient déjà une litanie de « j’accuse » qu’il cèdera à Zola pour que ne soit pas perdu un procédé rhétorique d’une redoutable efficacité. »
« Parallèlement, sous l’égide d’un Comite de défense contre l’antisémitisme, il organise le combat contre les marchands de haine et leurs journaux, en favorisant la publication d’autres journaux et de livres. »
« J’Accuse ! »
Premier récit complet de l’Affaire, la lettre ouverte de Zola au Président de la République relate comment Dreyfus a été condamné injustement et illégalement en 1894, comment il a été humilié devant le front des troupes avant d’être envoyé sur un « rocher d’infamie » ou lui a été réservé le plus impitoyable et le plus ignoble des traitements. Il y raconte comment l’état-major et les ministres ont préféré le silence à la vérité quand, à l’été 1896, le lieutenant-colonel Picquart leur a fait part de sa découverte de la culpabilité d’Esterhazy et de l’innocence de Dreyfus ; il y raconte comment après cette même découverte par Mathieu Dreyfus, Esterhazy a été acquitté à l’issue d’une mascarade de procès, illustration de ce qu’est un ordre et de ce qu’est l’obéissance. »
« C’est dans la perspective de ce verdict prévisible et prévu que Zola prend le parti d’agir de manière révolutionnaire. Les 300 000 exemplaires de L'Aurore sont vendus en quelques heures et Zola obtient son procès. Son « J’Accuse ! » lui permet de rouvrir à lui seul l’Affaire, forçant ceux qui voulaient le silence à écouter et surtout à témoigner dans le prétoire d’un tribunal civil. »
Emile Gallé
« Le verrier, ébéniste et céramiste Emile Gallé, convaincu de l’innocence de Dreyfus, s’engage pour sa défense en avril 1898 à la suite du verdict du procès Zola. Cette même année, il crée la section nancéenne de la Ligue pour les droits de l’Homme. Son désir de réparation s’exprime dans sa création avec des œuvres ornées de sentences ou de vers qui manifestent son engagement dans le combat pour la vérité et la justice. »
« Son envoi à l’Exposition universelle de 1900 est un hommage à Dreyfus et au soutien de son épouse Henriette, à qui il dédicace le secrétaire Forêt lorraine, « en mémoire des luttes patriotiques pour les principes d'humanité, de justice et de liberté ». Son vase Berce des prés ou Heracleum s’inspire de l’angélique pour symboliser l’innocence de Dreyfus. Son engagement lui vaut d’être mis au ban de la bonne société nancéenne et de perdre des commandes. Le 9 septembre 1899, jour du jugement du procès de Rennes, Gallé prononce un discours solennel devant ses ouvriers avant de fermer son usine. »
- manuscrit d'Une erreur judiciaire. La vérité sur l’Affaire Dreyfus, de Bernard Lazare, (première version) 1895
- croquis d’audience du procès Zola, réalisés par Maurice Feuillet, en grande partie inédits
- objets, jeux, chansons, imprimés, illustrations montrant le rôle de la presse et d’une propagande qui prend de multiples formes
- tableaux de Félix Vallotton, Édouard Vuillard, Eugène Carrière, Édouard Debat-Ponsan, Jacques-Émile Blanche, Maximilien Luce, objets d’art d’Émile Gallé
- dessins, estampes, documents, journaux mettant en lumière les grandes figures des camps dreyfusards et anti-dreyfusards »
VII. Le procès de Rennes
« En septembre 1898, on découvre que le dossier Dreyfus contient un certain nombre de faux. Apres avoir avoué son forfait, le lieutenant-colonel Henry, qui en assume la responsabilité pour couvrir ses chefs, est retrouvé mort dans sa cellule, la gorge tranchée, un rasoir à la main. La révision du procès de 1894 devient inévitable. Apres une longue enquête, la Cour de cassation casse le procès de 1894. Le 3 juin 1899, Dreyfus est ramené de l’ile du Diable pour être rejugé, à Rennes. »
« Les débats se tiennent du 7 août au 9 septembre 1899 dans une ville en état de siège. Des envoyés spéciaux du monde entier et le Tout-Paris donnent au procès une atmosphère de spectacle de l’année, qu’il faut voir et où il faut être vu. Le procès n'est qu'une machination au cours de laquelle le nouveau conseil de guerre a décidé – contre le droit – de reprendre toute l’Affaire et ainsi de ne tenir aucun compte de l’arrêt de la Cour de cassation. Chaque témoin de l’accusation a répété son rôle sous la houlette des hommes de l’état-major. Dans une ambiance électrique, qui vaudra même à Fernand Labori, avocat de la défense, d’être victime d’une tentative d’assassinat, Dreyfus est une nouvelle fois condamné par 5 voix contre 2 à dix ans de détention une condamnation assortie d’improbables circonstances atténuantes ! »
La grâce et l’amnistie
Après sa nouvelle condamnation, Dreyfus est gracié par le Président Emile Loubet, sur la proposition du Président du Conseil Waldek-Rousseau. « L’incident est clos », dira avec un sens consommé de la litote le ministre de la Guerre, le général de Galliffet. Clos mais pas pour Dreyfus qui ne désarme pas : « Le gouvernement de la République me rend la liberté. Elle n’est rien pour moi sans l’honneur. Dès aujourd’hui, je vais continuer à poursuivre la réparation de l’effroyable erreur judiciaire dont je suis encore victime. Je veux que la France entière sache par un jugement définitif que je suis innocent. Mon cœur ne sera apaisé que lorsqu’il n’y aura pas un Français qui m’impute le crime abominable qu’un autre a commis. » Dans la foule, pour obtenir l’apaisement du pays, une proposition de loi d’amnistie est votée à la fin de 1900, mettant fin aux procès en suspens (Zola, Picquart, Reinach) et permettant aux coupables de s’en tirer sans être inquiétés ».
« Œuvres clés de la section
- fac-similé du « faux Henry »
- vue d’audience du procès de Rennes, 1899
- croquis d’audience de Maurice Feuillet
- œuvres de Paul Renouard : lithographies d'audience et peinture Vue d’audience du procès de Rennes (vers 1899)
- portrait d'Émile Loubet par Léon Bonnat »
VIII. La réhabilitation
« En avril 1903, à la tribune de la Chambre des députés, Jean Jaurès fait un grand discours qui incite le ministre de la Guerre, le général Louis André, à ouvrir une enquête personnelle. Découvrant l’étendue des crimes commis contre Dreyfus, celui-ci saisit la Cour de cassation. « Le 11 juillet 1906, le procès de Rennes est cassé sans renvoi. Alfred Dreyfus est enfin innocente du crime pour lequel il a été injustement condamné. »
« Apres avoir été réintégré dans l’armée avec le grade de commandant, il est décoré de la Légion d’honneur. L’affaire Dreyfus est officiellement terminée... Mais Alfred Dreyfus connaitra toutefois une dernière injustice : le calcul de son ancienneté a « oublié » ses cinq années de terribles souffrances à l’ile du Diable, mettant un terme à une carrière qui devait le mener aux plus hautes responsabilités militaires. Il tente de faire valoir ses droits mais se heurte au refus de tous : à celui de Georges Clemenceau, Président du Conseil, et à celui du général George Picquart, ministre de la Guerre, deux de ses plus importants défenseurs au paroxysme de l’Affaire. « Je resterai une victime jusqu’au bout », écrit-il, en quittant cette armée qui était toute sa vie. »
« Œuvres clés de la section
- voix d'Alfred Dreyfus : enregistrement sonore réalisé à la Sorbonne en mars 1912
- portraits de Jean Jaurès et du général André
- croix d’officier de la Légion d’honneur reçue par Alfred Dreyfus
- photographies de la réhabilitation »
IX. Au-delà de l’Affaire
« La réhabilitation de Dreyfus, en 1906, n’apporte pas l’apaisement qu’avait souhaité le gouvernement. « A bas les Juifs ! A bas les Juifs ! Nous allons la réviser n’est-ce pas », écrit deux jours après la réhabilitation Charles Maurras à Maurice Barrès. Dès lors, les nationalistes, sous l’impulsion de l’Action française, n’auront de cesse de tenter de réviser l’Affaire, menant l’agitation partout où ils le peuvent, détruisant les statues des grandes figures dreyfusardes et tirant même sur Dreyfus à l’occasion du transfert des cendres de Zola au Panthéon en 1908. »
« Parallèlement, dans le mouvement ouvrier, l’Affaire suscite une prise de conscience, et ses théoriciens remettent en cause un antisémitisme de gauche, conçu comme une critique du capitalisme. Et pour les juifs européens, commence à se poser la question de leur devenir dans des sociétés hostiles où le préjugé antisémite est devenu programme politique. Si l’Affaire n’est pas le déclencheur de la pensée sioniste, elle conforte le journaliste autrichien Theodor Herzl, présent à Paris lors du procès de 1894, dans la conviction de la nécessité d’un « Etat des juifs », dont il formule le projet dans Der Judenstaat, publié à Vienne et Leipzig en 1896. » Le titre original est traduit soit par « Etat des juifs » soit par « Etat juif ».
Dreyfus et le cinéma
« Les seules images d’actualité connues de l’affaire Dreyfus ont été tournées par la société Pathé frères à l’occasion du procès de Rennes en 1899. En octobre de cette même année, Georges Méliès, réalisateur dreyfusard, tourne la première œuvre cinématographique sur Dreyfus. Ce film muet de 13 minutes reconstitue l’Affaire dans des décors et des costumes réalistes, inspirés de photographies et de dessins. Cette restitution par l’image animée convertit l’histoire en événement visuel. Toujours en 1899, la société Pathé frères produit sept courts métrages muets d’une durée de 35 minutes chacun racontant différents épisodes de l’histoire de Dreyfus dans des mises en scènes et des décors simplifiés. »
« Lorsque l’Affaire prend fin en 1906, Lucien Nonguet tourne un nouveau film pour Pathé en reprenant les mêmes séquences. Il remplace toutefois la première d'entre elles par une scène, ou l’on présente directement Esterhazy comme le traitre. Le film n’est pas projeté en France, mais aux Etats-Unis. »
« La diffusion des films sur l’Affaire provoque l’inquiétude du gouvernement français qui promulgue en 1915 une loi interdisant tous les films sur Dreyfus. Cette interdiction, qui touche également Dreyfus, film allemand du réalisateur autrichien d’origine juive Richard Oswald, sorti en 1930, ne sera levée qu’en 1950. »
« Œuvres clés de la section
- caricatures antidreyfusardes
- documents relatifs au premier congrès sioniste à Bâle (1897)
- extraits de films : courts-métrages réalisés entre 1898 et 1908, L'Affaire Dreyfus de Georges Méliès (1899) ; Lucien Nonguet (1908) ; Dreyfus de Richard Oswald (1930)
- archives familiales du fonds Dreyfus du mahJ »
« 1859 Naissance d’Alfred Dreyfus à Mulhouse.
1878-1892 Formation militaire à l’Ecole polytechnique et à l’Ecole supérieure de guerre.
1894 Fin septembre : découverte de l’existence d’un traitre au sein de l’état-major.
15 octobre : Dreyfus est arrêté et incarcéré.
19-22 décembre : à l’issue du procès à huis clos, Dreyfus est condamné pour haute trahison sur la base de pièces qui ne lui sont pas montrées.
1895 5 janvier : Dreyfus est dégradé publiquement.
13 avril : il est débarqué sur l’ile du Diable.
1896 Fin août : le lieutenant-colonel Picquart, chef du service de renseignements militaire, découvre la culpabilité d’Esterhazy. Ses chefs refusent de l’entendre.
6 septembre : Dreyfus est mis aux fers.
Automne : Bernard Lazare publie Une erreur judiciaire. La vérité sur l’affaire Dreyfus.
1897 Juillet : le vice-président du Senat, Scheurer-Kestner, convaincu de l’innocence de Dreyfus, prend sa défense.
Novembre : le frère d’Alfred Dreyfus, Mathieu, apprend l’identité du véritable traitre, Esterhazy, et le dénonce.
13 janvier : Emile Zola publie ≪ J’Accuse…! ≫ dans L’Aurore.
7-23 février : à l’issue de son procès, Zola est condamné.
30 août : le lieutenant-colonel Henry avoue avoir fabriqué un faux contre Dreyfus.
Le lendemain, il est retrouvé la gorge tranchée dans sa cellule.
1899 3 juin : la Cour de cassation casse et annule le jugement de 1894 et renvoie Dreyfus devant le conseil de guerre de Rennes.
30 juin : Dreyfus revient en France.
7 août-9 septembre : à l’issue du procès de Rennes, Dreyfus est condamné avec circonstances atténuantes.
19 septembre : le président Emile Loubet le gracie.
1900 27 décembre : loi d’amnistie.
1903 6-7 avril : le député Jean Jaurès relance l’Affaire. Le ministre de la Guerre André promet une enquête et saisit quelques mois plus tard la Cour de cassation.
1906 11 juillet : la Cour de cassation casse le jugement de Rennes.
13 juillet : Dreyfus est réintégré dans l’armée mais perd cinq ans d’ancienneté.
1907 26 juin : voyant sa carrière bloquée, Dreyfus demande sa mise à la retraite.
1908 4 juin : lors de la panthéonisation de Zola, Dreyfus est victime d’une tentative d’assassinat.
1914-1918 Dès l’annonce de la mobilisation, Dreyfus reprend son service.
1935 Décès de Dreyfus. »
Le fonds Alfred Dreyfus du mahJ
« Le mahJ est détenteur d’un ensemble d’archives visuelles et écrites de plus de 3 500 pièces (manuscrits, lettres et télégrammes, photographies, souvenirs familiaux, pièces officielles, livres, cartes postales, affiches…), relatives à la famille d’Alfred Dreyfus et à l’Affaire.
En outre, la bibliothèque du musée dispose de plus de 300 ouvrages évoquant directement ou indirectement l’Affaire, dont la majorité sont des publications majeures parues entre 1894 et 1935. »
Historique de la constitution du fonds
« Initialement composé de caricatures et de photographies de presse offertes par Georges Aboucaya en 1991 et 1996, puis élargi par d’autres dons et achats ultérieurs, le fonds Dreyfus est devenu une collection à part entière en 1997, grâce au don exceptionnel des petits enfants du capitaine Dreyfus, qui constitue désormais l’essentiel du fonds. Comportant 2 571 pièces inventoriées par l’historien Philippe Oriol, ce don a non seulement contribué de façon majeure et décisive à la présence de l’affaire Dreyfus au sein des collections, mais il est également l’apport le plus significatif aux collections historiques du musée depuis sa création. De 1999 à aujourd’hui, des dons (dont ceux de Gilbert et Claude Schil, de Theo Klein, de Norbert Ducrot-Granderye et de Jean Barthelemy) et des achats ont complété l’ensemble des archives Dreyfus. Parmi les acquisitions récentes, on compte l'achat en 2020 de 200 croquis d’audience des procès Zola et Dreyfus, réalisés par Maurice Feuillet. »
Description du fonds
« Parmi les documents essentiels de ce fonds : l’inhumaine consigne de l’ile du Diable qu’un gardien réussit à conserver, les autorisations données à Lucie Dreyfus de revoir son mari, l’original de l'émouvante lettre adressée par Alfred Dreyfus à son épouse, les galons qui furent arrachés au capitaine lors de sa dégradation, les observations rédigées en prison par Dreyfus sur diverses dépositions du procès de Rennes, un exemplaire de Cinq années de ma vie, corrigé de sa main. La plus large part du fonds est constituée de plus de 2 200 lettres adressées à Lucie Dreyfus et au Capitaine pendant sa captivité à l’ile du Diable et, surtout, pendant la période la moins connue de l’Affaire, comprise entre sa seconde condamnation et sa grâce (septembre 1899) et sa mise en retraite (1907). Dans cet ensemble remarquable, on signalera les nombreuses lettres de Mathieu Dreyfus, de Joseph Reinach, de Louis et Olympe Havet, de Louis Leblois et du colonel Hartmann, qui nous renseignent sur la « troisième affaire » : le combat acharné du capitaine pour faire réviser son procès et les dissensions au sein du camp dreyfusard ; beaucoup de lettres émanent d’« amis inconnus », témoignages de soutien du monde entier, mais aussi de grandes figures dreyfusardes : les frères Reinach, Alexandrine Zola, Auguste Scheurer-Kestner, le grand rabbin Zadoc Kahn, etc. »
« Ce fonds compte également de nombreuses photographies, dont certaines inédites, du procès de Rennes, d’une magnifique collection de cartes postales et d’émouvants souvenirs familiaux. »
« En 2020, cet ensemble a été considérablement enrichi par l'acquisition de plus de 200 croquis d’audience réalisés lors des procès Zola (1898) et Dreyfus (Rennes, 1899), par le journaliste Maurice Feuillet. »
Accessibilité du fonds Dreyfus
« La numérisation de la totalité de ce don a été réalisée grâce aux financements accordés par le ministère de la Culture et par la Direction des musées de France. »
« Le fonds Dreyfus est intégralement inclus dans les collections du mahJ et en grande partie consultable sur la page des collections du site internet du musée. »
Le musée d'art et d'histoire du Judaïsme
« Installé dans le cadre prestigieux de l’hôtel de Saint-Aignan, au cœur du Marais à Paris, le mahJ retrace l’histoire des juifs de France, d’Europe et de Méditerranée à travers la diversité de leurs formes d’expression artistique, de leur patrimoine et de leurs traditions, de l’Antiquité à nos jours.
Inauguré en 1998, il s’impose aujourd’hui comme l’un des musées les plus vivants de la capitale. En proposant au plus large public de découvrir l’ancrage très ancien des juifs dans la nation, et l’universalité de leurs productions artistiques et culturelles, le mahJ illustre deux mille ans de « cultures en partage ».
Depuis son ouverture, le mahJ a présente une centaine d’expositions, parmi lesquelles « Le Dibbouk. Fantôme du monde disparu », « Joann Sfar. La vie dessinée », « Marcel Proust. Du côté de la mère », « Patrick Zachmann. Voyages de mémoire », « Chagall, Modigliani, Soutine... Paris pour école, 1905-1940 », « Sigmund Freud. Du regard à l'écoute », « René Goscinny. Au-delà du rire », « Golem ! Avatars d’une légende d’argile », « Les mondes de Gotlib », « La Valise mexicaine », « Chagall et la Bible », « Felix Nussbaum », « De Superman au Chat du rabbin », « Charlotte Salomon : Vie ? ou théâtre ? », « Rembrandt et la nouvelle Jérusalem » ou « Alfred Dreyfus. Le combat pour la justice », ainsi que des installations d’art contemporain marquantes comme C'est un petit chemin de Jérôme Zonder, Miqlat de Sigalit Landau, Shadow Procession de William Kentridge, L'Erouv de Jérusalem de Sophie Calle ou Big Bang de Kader Attia.
Sa collection, qui s'enrichit régulièrement, notamment dans le champ de l’art contemporain et de la photographie, compte plus de 12 000 œuvres, dont plus de 3 500 acquises par dons et legs. L’auditorium propose une centaine de séances par an, pour appréhender les dimensions multiples des cultures du judaïsme à travers la musique, la littérature, le théâtre ou le cinéma.
De nombreuses activités pédagogiques – visites guidées, conférences et ateliers – permettent d’accueillir chaque année des milliers de visiteurs – enfants, familles, groupes scolaires, étudiants et enseignants.
La bibliothèque propose un fonds unique de plus de 27 000 volumes sur l’art et l’archéologie du judaïsme, et sur l’histoire des juifs de France, ainsi qu’une vidéothèque de plus de 3 000 œuvres audiovisuelles. Et avec près de 6 000 titres, la librairie du mahJ est un fonds de référence pour l’art, l’histoire et les littératures du judaïsme.
Le mahJ est engagé dans un ambitieux projet d’extension, avec le soutien de la Ville de Paris, du ministère de la Culture, de la Région Ile-de-France et de la fondation Pro mahJ.
Doté d’un budget de 22 M€, il permettra d’augmenter de 35 % des surfaces du parcours permanent (passant de 907 à 1226 m²) et de 34 % celles des expositions temporaires (passant de 455 à 609 m²). Il soulignera la longue histoire de la présence juive en France, de l’Antiquité à nos jours, et permettra la découverte du judaïsme comme culture vivante. Il s’enrichira de salles sur les juifs des marges du royaume à l’époque moderne, l’apogée du franco-judaïsme, l’immigration juive dans l’entre-deux-guerres, le sauvetage de juifs de France sous l’Occupation et les résistances juives, l’après-guerre et l’arrivée des juifs d’Afrique du Nord en Métropole, ainsi que sur la présence en France aujourd’hui.
Un effort important portera sur la médiation pour tous les publics.
Apres des études préparatoires, le musée devrait fermer ses portes pour travaux fin 2027, et rouvrir début 2030. »
Le 27 janvier 2025, le mahJ a quitté X, ex-Twitter :
"Le mahJ, musée engagé pour les valeurs de la République et contre toutes les formes de discriminations, a cessé son activité sur X le 20 janvier.
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Sous la direction d'Isabelle Cahn et de Philippe Oriol, « Alfred Dreyfus. Vérité et Justice ». Coédition mahJ-Gallimard, 2025. 288 pages ; 250 illustrations ; 39 €.
Hôtel de Saint-Aignan
71, rue du Temple 75003 Paris
01 53 01 86 53 ; info@mahj.org
Du mardi au vendredi de 11h à 18h
Samedi et dimanche de 10h à 19h
Visuels :
Affiche
Alphonse Bertillon, Portait d'Alfred Dreyfus pris après sa dégradation (photo colorisée), 5 janvier 1895
Photographie, 14,4 x 14,1 cm
Aix-en-Provence-Archives nationales d’outre-mer
Félix Vallotton, Portrait décoratif d’Émile Zola
1902
Huile sur carton, H. 76 x L. 63,5 cm
Zurich, collection Walter Feilchenfeldt
© Photo Elmer de Haas
Edouard Vuillard, Thadée Natanson à son bureau
1899
Huile sur carton monté sur panneau, H. 47,2 x L. 56,7 cm
© Photograph by Thomas Barratt, courtesy Helen Frankenthaler Foundation, New York
Sergent Beal, Dégradation du Capitaine Dreyfus, le 5 janvier 1895
Photographie, contretype sur papier argentique
H. 23,9 x L. 30,4 cm
mahJ, don des petits-enfants du capitaine Dreyfus
Aron Gerschel, Alfred Dreyfus en uniforme (lieutenant)
Paris, 1882-1889
Épreuve sur papier albuminé collé sur carton, H. 12,2 x L. 9,2 cm
© mahJ, don de Gilbert Schil – photo Niels Forg
Edgar Degas, Portrait du rabbin Elie Aristide Astruc et du général Emile Mellinet
1871
Huile sur toile, 16 x 22 cm
Ville de Gérardmer (legs Gabrielle Reinach)
© Ville de Gérardmer
Henri Meyer (illustration), « Le Traître. Dégradation d'Alfred Dreyfus »
Le Petit Journal, supplément illustré, 13 janvier 1895
Impression couleur sur papier, H. 32,7 x L. 27,5 cm
© mahJ/Christophe Fouin
Tim, Hommage au capitaine Dreyfus
Paris, 2003
Surmoulage en résine, 395 x 92 x116 cm
Dépôt du Centre national des arts plastiques
© mahJ/Niels Forg
© Adagp, Paris, 2025
Ernest Pignon-Ernest, Portrait d'Émile Zola sur le texte de son article « J'accuse » à la une de L'Aurore du 13 janvier 1898
Paris, 1995
Pastel gras et gouache sur impression photomécanique contrecollée sur carton, H. 66,5 - L. 50,5 cm
© mahJ/Christophe Fouin
© Adagp, Paris, 2025
Eugène Carrière, Affiche de lancement de L’Aurore
1897
Lithographie sur papier, H. 216 x L. 149 cm
Paris, musée Carnavalet – Histoire de Paris
© mahJ/Christophe Fouin
« L’âge du papier »
Le Cri de Paris, 23 janvier 1898
Lithographie, H. 28,5 x L. 19 cm
BnF, département des Estampes et de la Photographie
© Paris, Bibliothèque nationale de France
Après la réhabilitation de Dreyfus
Paris, 21 juillet 1906
Épreuve au gélatino-bromure d'argent, H. 14 x L. 9 cm
© mahJ/Christophe Fouin
Edouard Debat-Ponsan, Nec mergitur ou La Vérité sortant du puits
1898
Huile sur toile, H. 240 x L. 150,5 cm
© Musée d’Art et d’Histoire d’Amboise
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