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vendredi 12 août 2022

Jean-Marie Lustiger (1926-2007)

Né dans une famille juive d’origine polonaise, 
Aron Jean-Marie Lustiger (1926-2007) s'est converti adolescent sous l’Occupation au catholicisme. Archevêque de Paris (1981-2005), créé cardinal par le pape Jean-Paul II en 1983, il est membre de l’Académie française. Un artisan du rapprochement entre juifs et catholiques. Un homme revendiquant, jusqu’à ses obsèques, deux identités – juive et catholique - exclusives l’une de l’autre. Arte rediffusera les 12 août 2022 à 20 h 55, soir du chabbat, et 15 août 2022 à 13 h 35 « Le métis de Dieu » (Der Jüdische Kardinal), par Ilan Duran Cohen.


« Je suis une provocation vivante », disait de lui Aron Jean-Marie Lustiger (1926-2007).

Double identité revendiquée
Aron Lustiger naît à Paris dans une famille juive d’origine polonaise. Il est circoncis, mais ne reçoit pas d'éducation religieuse, et ne fera pas sa bar-mitzva.

Pour gagner sa vie, son père Charles abandonne son métier de boulanger pour diriger une boutique de bonneterie-mercerie à Paris.

Âgé d’une dizaine d’années, cet élève au lycée Montaigne lit la Bible – le « Nouveau Testament » lui semble la finalité et le parachèvement de la Bible hébraïque - et subit l’antisémitisme.

Lors d’un séjour au sein d’une famille protestante en Allemagne nazie en 1936-1937, il pressent le projet génocidaire nazi, et rencontre des Allemands anti-nazis.

En 1939, après un séjour à l’hôpital maritime de Berck, il se réfugie avec sa sœur Arlette à Orléans lorsqu’éclate la Deuxième Guerre mondiale. Là, tous deux vivent chez Suzanne Combes, professeur de lettres classiques trentenaire. Aaron Lustiger se rend souvent au siège des Œuvres diocésaines.

"Un jour d’avril 1940 (jour du Jeudi Saint – ce qu’il ignore alors), il entre dans la cathédrale Sainte-Croix d’Orléans. Il y retourne même le lendemain. Et là, dira-t-il plus tard : « J’ai eu l’intuition que ce que je pensais de la condition juive trouvait dans la figure du Messie son sens et un certain aboutissement » Cet adolescent veut se convertir. Ses parents s'y opposent et le ramènent à Paris. Ils organisent une réunion avec un rabbin pour qu'il retrouve sa judéité.

Le 25 août 1940, sous l’Occupation, à Orléans, cet adolescent et sa sœur Arlette se convertissent au catholicisme, contre l'avis de leurs parents. Aaron Lustiger ajoute à son prénom hébraïque « Jean » et « Marie ».  Dans sa biographie de Jean-Marie Lustiger, le journaliste Henri Tincq a révélé que les parents Lustiger avaient obtenu le 31 octobre 1940 un « baptême de complaisance », attesté dans les registres de l'évêché d'Orléans. Le 9 juin 1941, l'évêque d'Orléans écrit dans une lettre au commissaire aux affaires juives Xavier Vallat : « M. et Mme Lustiger sont de religion catholique ». Xavier Vallat lui répond qu'ils ne seront pas « inquiétés » bien qu'ils soient « juifs en vertu de loi française du 2 juin 1941 ».

Dénoncée par son employée de maison qui souhaitait obtenir l’appartement de la famille Lustiger situé rue Delambre, arrêtée pour ne pas avoir porté l'étoile jaune, sa mère Gisèle est déportée à Auschwitz où elle est tuée le 13 février 1943.

Bachelier en 1943, Aaron Jean-Marie Lustiger retrouve son père à Decazeville. L’abbé Bezombes et l’Ecole jésuite de Purpan les protègent.

A la Libération, Charles Lustiger s’efforce de convaincre son fils de faire annuler sa conversion. En vain. Il saisit le Consistoire israélite à cette fin. Jean-Marie Lustiger demeure catholique.

Il étudie les lettres dans une université parisienne.

Puis, après une formation au séminaire des Carmes de l’Institut catholique de Paris (1946), il est ordonné prêtre en 1954.

De 1954 à 1969, il est aumônier de la paroisse universitaire de Paris (centre Richelieu), puis des étudiants de la Sorbonne et des Grandes écoles. Il y rencontre le gratin de l’élite française.

En 1969, il devient curé de la paroisse Sainte-Jeanne-de-Chantal (75016) à Paris. Il y a pour vicaire André Vingt-Trois, son assistant pendant 18 ans, qui lui succèdera à l’archevêché de Paris en 2005. Jean-Marie Lustiger marque son passage par l’organisation de l’enseignement paroissial, le renouvellement de la liturgie, le recours à Alfred Kern pour l’orgue, etc. 

En 1979 : retour à Orléans où le pape Jean-Paul II l’a nommé évêque. Ces deux polyglottes - français, yiddish, polonais – nouent une profonde amitié.

Deux ans plus tard, Jean-Marie Lustiger devient archevêque de Paris. Il renforce la formation des prêtres, crée une faculté de théologie indépendante dans l’Ecole cathédrale de Paris, fonde Radio Notre-Dame et la chaine de télévision KTO en 1999.

En 1983, le pape nomme Jean-Marie Lustiger cardinal-prêtre. Et l’Académie française l’admet en son sein en 1995.

Ce conseiller des papes Jean-Paul II et Benoît XVI œuvre au rapprochement entre Juifs et le Vatican. En 1987, il s’efforce de résoudre le problème lié à l’installation de carmélites polonaises dans le camp d’Auschwitz. Un problème qui se réglera par le départ des religieuses en 1994. Il impulse la déclaration de « repentance » de l’épiscopat français en septembre 1997 à Drancy. Contribue au succès de la visite du pape Jean-Paul II à Jérusalem (Israël) en 2000 - visite à Yad Vashem et au mur des Lamentations dans fut un « pèlerinage de la mémoire » -, et à la reconnaissance de la dette chrétienne aux « frères aînés » juifs. 

En 2004, le cardinal Jean-Marie Lustiger et le rabbin Israel Singer, président du Congrès juif mondial (CJM) créent les « Rencontres internationales judéo-catholiques de New York ». Le dialogue régulier d’une trentaine de juifs orthodoxes et des plus hautes autorités de l’Église catholique. En janvier 2005, le cardinal Jean-Marie Lustiger représente le pape Jean-Paul II, lors des cérémonies du 60e anniversaire de la libération du camp d'Auschwitz . Puis, en mai 2006, il se tient à Birkenau aux côtés du pape Benoît XVI.

Actif dans la sphère publique, le cardinal Lustiger mène la fronde contre le projet du président François Mitterrand de supprimer l’école privée catholique. Un million de manifestants soutenant l’école privée défilent dans toute la France. Ce qui contraint le gouvernement socialo-communiste à retirer le projet de loi Savary. Il s’engage en faveur des chômeurs et des immigrés.

Mgr Lustiger s’affirme sur des sujets de bioéthiques : il défend l’embryon, s’oppose à l’euthanasie et au clonage.

Il manifeste son respect de la loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État, lors de la crise causée par le port du voile islamique dans les établissements publics, en particulier scolaires, dès 1989. En 2003, il s’oppose à une loi concernant le port du voile à l’école.

Conformément à l’attitude de l’Église catholique à l'égard de la Révolution française, il ne s’associe pas à l’hommage rendu par la nation française à l’Abbé Grégoire en 1989, lors du transfert des cendres de ce dernier au Panthéon.

A l'âge de 75 ans, suivant le code de droit canon, Mgr Lustiger présente sa renonciation à son office d'archevêque de Paris au pape Jean-Paul II. En février 2005, alors qu’il est âgé de 78,  sa démission est acceptée, et Mgr André Vingt-Trois est désigné archevêque de Paris. Le cardinal Lustiger porte désormais le titre d'archevêque émérite de Paris.

En 2005, il avait confié à Claude Barouch, président de l'Union des patrons et professionnels juifs de France (UPJF) : « En 1962, j'ai été consulté par Mme de Gaulle sur le projet de son mari de faire venir en France des immigrés du Maghreb. J'ai encouragé cette proposition car je croyais que ces gens venaient pour manger à leur faim. J’ai eu tort. Ils venaient pour nous dominer ».

En octobre 2006, il annonce aux prêtres et diacres de Paris qu'il souffre d'« une maladie grave dont le traitement a commencé ». 

Le 31 mai 2007, il fait ses adieux aux « Immortels » à l’Académie française : « Vous ne me reverrez pas ».

Le 5 août 2007, il décède d’un cancer à l'âge de 80 ans, à la Maison Médicale Jeanne Garnier (75015).

Le 10 août 2007, ses obsèques  sont célébrées devant et dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. 

Lors de la levée du corps du défunt, avant l'entrée dans la cathédrale et la liturgie catholique, de la terre prélevée en Israël est déposée sur son cercueil. Son cousin Arno Lustiger et son arrière-petit cousin Jonas Moses-Lustiger, demeurés juifs, récitent le Psaume 113 (112) en hébreu, et le Kaddish, prière juive des endeuillés. 

Dans la cathédrale, l’office est mené par l'archevêque Mgr André Vingt-Trois, en présence de nombreuses personnalités, dont le représentant du pape le cardinal Paul Poupard, le président Nicolas Sarkozy, le Premier ministre François Fillon, les ministres Michèle Alliot-Marie, Jean-Louis Borloo, Nathalie Kosciusko-Morizet et Roger Karoutchi, les présidents de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, et du Sénat, Christian Poncelet, le président de la région Île-de-France Jean-Paul Huchon, Mme Bernadette Chirac représentant l'ancien président Jacques Chirac, l'ancien président polonais Lech Wałęsa, plusieurs membres de l'Académie française, dont l’historienne Hélène Carrère d'Encausse, secrétaire perpétuel, et Maurice Druon, secrétaire honoraire, 500 prêtres, 50 évêques, 16 cardinaux et de nombreux prélats, représentants des Églises catholiques d'Orient. Le cardinal Lustiger est inhumé dans la crypte de Notre-Dame de Paris, dans le caveau des archevêques de Paris. A ces obsèques assistent près de 5 000 personnes.

Ainsi était symbolisée son espérance de voir judaïsme et christianisme engagés « du même côté », « dans le combat pour l'homme, enraciné dans la même foi au Dieu unique et la même espérance dans les promesses du Messie ».

Une plaque est apposée dans la cathédrale à la demande du Cardinal Lustiger avec le texte suivant signé de Aron Jean-Marie cardinal Lustiger, Archevêque de Paris : « Je suis né juif. J’ai reçu le nom de mon grand-père paternel, Aron. Devenu chrétien par la foi et le baptême, je suis demeuré juif comme le demeuraient les Apôtres. J’ai pour saints patrons Aron le Grand Prêtre, saint Jean l’Apôtre, sainte Marie pleine de grâce. Nommé 139e archevêque de Paris par Sa Sainteté le pape Jean-Paul II, j’ai été intronisé dans cette cathédrale le 27 février 1981, puis j’y ai exercé tout mon ministère. Passants, priez pour moi. »

Dans divers articles publiés par Le Figaro - le cardinal Jean-Marie Lustiger est assimilé aux « tenants de la théorie de la substitution » (8-9 septembre 2007), Lustiger était un prince de l'Église mais il n'était plus juif (14 octobre 2007) -, Actualité juive hebdo et Information juive (octobre 2007) après le décès de Jean-Marie Lustiger, le rabbin Josy Eisenberg a "démontré :
1) que le cardinal ne pouvait d'aucune manière être considéré comme juif ;
2) qu'il a certes rendu de grands services à l'Eglise, mais qu'il incarnait cependant la doctrine de la substitution selon laquelle le christianisme est la forme la plus accomplie du judaïsme, thèse aussi nocive qu'inadmissible pour la conscience juive ;
3) que, dans cette démarche, il allait à contre-courant d'un désir de plus en plus affirmé dans le monde chrétien - sauf au Vatican - d'abolir ce fantasme qui a empoisonné les relations judéo-chrétiennes pendant deux millénaires".
Et ce rabbin, qui "regarde avec tristesse et appréhension la déchristianisation de la France" d'ajouter : "Le cardinal avait osé utiliser les morts d'Auschwitz pour prouver la véracité de la mort du Christ, thèse scandaleuse que j'avais jadis ouvertement stigmatisée dans "Le Nouvel Observateur".

Et Jacques Duquesne, ancien directeur du Point et écrivain, de préciser dans une lettre à ce rabbin producteur de l'émission dominicale La source de vie sur France 2 : « Le christianisme n’accomplit pas le judaïsme. Il est une révolution. Et si l'on compare avec ce qui se produit en d'autres domaines, une révolution peut garder certains traits du régime précédents, une partie de ses rites et de ses formes, de ses lois et de ses normes, mais fondamentalement, elle s'en distingue. Théologiquement le point fondamental me paraît être l'incarnation. Le Dieu de Jésus n’est pas celui de Moïse. Que l'on respecte enfin, que l'on prie en même temps et côte à côte, très bien. Mais que l'on entretienne la confusion, non. Je suis parfois agacé à la messe, d’entendre lire aux fidèles les textes de ce que les chrétiens appellent l’Ancien Testament, textes sans doute bien choisis mais qui sont quelque peu – et parfois beaucoup – en contradiction avec ce que va lire ensuite et les propos que va tenir le prêtre... J'ai été moi aussi choqué par la confusion que l'on a entretenue, renforcée même, lors des obsèques de Lustiger. Et j'étais étonné que des juifs s'y soient prêtés ». (Information juive, octobre 2007, p.12.)

Dans Actualité juive hebdo, Richard Prasquier, alors président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), a affirmé que l'ancien archevêque de Paris n'était pas « un convertisseur masqué ». La « conviction qu'avait le cardinal d'appartenir au peuple juif s'inscrit dans une ambiguïté sémiologique sur le signifiant « juif » qui demande à être explicitée longuement et peut partiellement être discutée ».

En janvier 2004, l’association Yahad-In Unum – « Yahad » et « In Unum » signifient l’un et l’autre « ensemble » en hébreu et en latin – est créée à l’initiative du cardinal Jean-Marie Lustiger, archevêque de Paris, du cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon et du cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux, du rabbin Israël Singer, président du directoire du Congrès juif mondial (CJM), et Serge Cwajgenbaum, secrétaire général du CJM, afin d’approfondir « la connaissance et la coopération entre catholiques et juifs ».

Le 11 décembre 2007, l’Hôtel de Ville de Paris a accueilli le colloque organisé par le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) Dix ans après la Déclaration des évêques de France à Drancy : quel dialogue pour l’avenir ? L’occasion de mesurer les progrès accomplis. Une rencontre de haut niveau entre responsables d’organisations, juives et catholiques, d’institutions publiques, françaises et étrangères, marquée par un hommage au cardinal Jean-Marie Lustiger. 

Quelques décennies ont suffi pour permettre le passage de « l’enseignement du mépris » (Jules Isaac) à « l’enseignement de l’estime » (grand rabbin Kaplan) grâce à une réflexion « sur ce qui est commun et sur ce qui sépare les deux religions » (cardinal Lustiger), grâce à un dialogue sincère, profond, marqué par la volonté « d’aller à la racine des problèmes et des malentendus pour comprendre ce qui blesse l’autre et en sortir vivifié. Une relation bâtie sur le roc, et non sur le sable », relevait le père Patrick Desbois, directeur du SNRJ, qui a participé à un chabbat de Bné Hakiva, à l’initiative de l’essayiste Michel Gurfinkiel.

Le cardinal Aaron-Jean-Marie Lustiger, juif ou catholique ?

Pour rendre hommage au cardinal Lustiger, des souvenirs personnels ont été égrenés : son rôle discret pour trouver une solution au problème posé par le Carmel à Auschwitz, ses « relations privilégiées fondées sur l’estime réciproque » avec le pape Jean-Paul II, son émotion lors de sa première visite personnelle à Auschwitz (2005) devant la « petite maison blanche » où a commencé l'extermination systématiques de Juifs et où a péri sa mère déportée début 1943, et sa revendication d’une double identité.

Le cardinal Lustiger avait défini sa conversion au catholicisme comme un « accomplissement » de son judaïsme. Un vocable qui « ne voulait pas choquer », mais qui avait suscité des questionnements de fidèles des deux religions et avivé une méfiance dans le monde juif : le judaïsme « s’accomplirait-il » dans le catholicisme ? Ce dialogue interconfessionnel est-il un leurre ?

« La croyance dans le Christ comme Messie et personne de la Trinité n'est, pour les Juifs, pas compatible avec la religion juive… La position de la tradition juive vis-à-vis des convertis est ancienne et en apparence paradoxale : ils restent considérés comme juifs sur le plan civil. En revanche, on porte sur eux un regard hostile : voir un Juif quitter le judaïsme est considéré avec douleur, étant donné le faible nombre de juifs dans le monde. Le cardinal Lustiger ne pouvait se qualifier de juif. Mais la façon dont lui se voyait est un élément fondamental de sa personnalité et ne peut pas être négligée », a précisé le Dr Richard Prasquier, président du CRIF.

« Mon ami, le cardinal Lustiger » définissait [par le terme accomplissement] sa « trajectoire spirituelle personnelle et particulière, le chemin d'un adolescent, puis d'un homme qui ayant eu peu de transmission familiale de la tradition juive a trouvé la plénitude de sa quête spirituelle dans la rencontre avec Jésus. Le cardinal Lustiger a vécu et est mort en chrétien », constatait  le Dr Richard Prasquier.

En 2013, a été inauguré un mémorial paysager dédié à Aron Jean-Marie Lustiger au monastère bénédictin d'Abou Ghosh, près de Jérusalem (Israël).

« Le métis de Dieu  » 
Arte rediffusera 
les 12 août 2022 à 20 h 55, soir du chabbat, et 15 août 2022 à 13 h 35 « Le métis de Dieu » (Der Jüdische Kardinal), par Ilan Duran Cohen (2012) avec 
Laurent Lucas, Aurélien Recoing, Audrey Dana, Henri Guybet, Pascal Greggory

"Incarné par Laurent Lucas, énergique et tourmenté, un portrait à fleur de peau du cardinal Lustiger, acteur majeur de la réconciliation judéo-chrétienne".

"Aron Jean-Marie Lustiger est issu d'une famille juive. À 14 ans, en pleine Occupation, il se convertit au catholicisme contre l’avis de ses parents. Il perd sa mère en déportation et se heurte violemment à son père, qui n’accepte pas son choix. Devenu curé, il se hisse au sommet de la hiérarchie ecclésiastique grâce à Jean-Paul II, avec lequel il se lie d'amitié". 

"Mais en 1985, un couvent de carmélites polonaises s'installe dans les murs d'Auschwitz, là où Gisèle Lustiger a été gazée. L’événement déclenche la plus grave crise entre juifs et chrétiens depuis la Seconde Guerre mondiale. Et c’est à cet homme d’Église pas comme les autres qu'il revient de trouver une issue au conflit, qui le bouleverse intimement."

"Ilan Duran Cohen s'éloigne ici du ton hilarant de son précédent film, Le plaisir de chanter, pour proposer un passionnant portrait, concentrant quinze ans de la vie de Jean-Marie Lustiger. Il ne commet pas l’erreur de vouloir raconter toute l’existence du cardinal disparu en 2007, mais s’attache à peindre la dualité de celui qui se nommait lui-même "le métis de Dieu" : sa double identité juive et chrétienne, à l'origine d'un douloureux conflit personnel qui va devenir le moteur d’une réconciliation collective". 

"En incarnant cet homme d'action avant tout, Laurent Lucas insuffle au récit une énergie qui ne faiblit jamais. On se laisse ainsi conduire à pas pressés dans les coulisses de l’Église, des bureaux fonctionnels de l’archevêché de Paris jusqu’aux luxueux salons du Vatican. Dans ce parcours constamment guidé par l’urgence, la religion s’exerce moins dans les rites que dans le dialogue et la négociation, où les sentiments personnels comme les impératifs politiques ont leur mot à dire." 

« Concentrant quinze ans de la vie de Jean-Marie Lustiger, Ilan Duran Cohen s’attache à peindre la dualité de celui qui se nommait lui-même « le métis de Dieu » : sa double identité juive et chrétienne, à l'origine d'un douloureux conflit personnel qui va devenir le moteur d'une réconciliation collective ».

« En évitant la charge satirique autant que l'hagiographie, le téléfilm captivant se tient à juste distance de ces grands personnages que sont le pape Jean-Paul II et Jean-Marie Lustiger. Il parvient à nous les rendre proches grâce à un humour souvent bienvenu et à la présence de seconds rôles parfaitement composés ».

« Un portrait à fleur de peau du cardinal Jean-Marie Lustiger, acteur majeur de la réconciliation judéo-chrétienne ». Henri Guybet campe avec sensibilité Charles Lustiger, père meurtri par la conversion de son fils avec lequel il maintient sa fonction paternelle. Quant à Aurélien Recoing, il interprète un pape Jean-Paul II habile jusqu’à la rouerie, lucide et courageux dans son rapport de forces avec l’Union soviétique et ses satellites. Quant à Pascal Greggory, il joue un Albert Decourtray, sincère artisan du rapprochement avec les Juifs, et conscient de la spécificité de la Shoah longtemps occultée par le régime communiste polonais.

Meilleure fiction, Luchon 2013.


« Le métis de Dieu  » (
Der Jüdische Kardinal)) par Ilan Duran Cohen
France, 2012, 1 h 36 mn
Joëy Faré, Scarlett Production, Fugitive Productions, ARTE F, Euro Media France, A Plus Image 4, TV5 Monde, 2012, 96 min
Scénario : Chantal de Rudder
Costumes : Jürgen Doering
Décors : Isabelle Filleul de Brohy, Valérie Grall
Image : Christophe Graillot
Montage : Elif Uluengin, Fabrice Rouaud
Musique : Nathaniel Méchaly
Son : Laurent Poirier
Avec Laurent Lucas (Lustiger), Aurélien Recoing (Jean-Paul II), Audrey Dana (Fanny), Henri Guybet (Charles Lustiger), Pascal Greggory (Albert Decourtray)
Sur Arte les 29 mars 2013, 12 août 2022 à 20 h 55, 15 août 2022 à 13 h 35
Sur arte.tv du 05/08/2022 au 09/11/2022
Visuels
© Hassen Brahiti

Laurent Lucas (Lustiger), Nathalie Richard (Mère supérieure), Mirza Halilovic (Macharski) et Alex Skarbek (Kristof)
© Hassen Brahiti

Laurent Lucas (Lustiger)
© Jérémie Bouillon

Aurélien Recoing (Jean-Paul II)
© Jérémie Bouillon

Aurélien Recoing (Jean-Paul II) et Laurent Lucas (Lustiger)
© Jérémie Bouillon

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Cet article a été publié le 12 février 2016.

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