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jeudi 12 septembre 2013

La Cour d’appel de Paris a évoqué les blessures de Jamal al-Dura

Le 14 décembre 2011, Clément Weill-Raynal, journaliste à Actualité juive hebdo, et le Dr Yehouda David ont comparu devant la Cour d’appel de Paris. Ils avaient interjeté appel d’un jugement du Tribunal correctionnel de Paris du 29 avril 2011 les condamnant sévèrement pour diffamation à l’égard du Gazaoui Jamal al-Dura : en 2008, tous deux avaient mis en doute le lien entre des cicatrices de Jamal al-Dura et les blessures qui lui auraient été infligées par des « tirs israéliens » au carrefour de Netzarim (bande de Gaza) le 30 septembre 2000. Cet article est republié car la Cour de cassation a cassé sans renvoi l'arrêt de la Cour d'appel de Paris ayant condamné Clément Weill-Raynal et relaxé le Dr Yehouda  (ou Yehuda) David. Elle a rejeté le pourvoi de Jamal al-Dura qui portait sur la relaxe du Dr Yehouda David. Elle a retenu l'argumentation de la défense du chroniqueur judiciaire estimant que la cour d'appel n'avait pas tenu compte du "caractère d'intérêt général du sujet traité", alors que, selon l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'Homme, "dans le cadre d'un débat d'intérêt général, la liberté d'expression autorise la mise en cause des personnes avec une dose d'exagération et même de provocation qui exclut toute condamnation pour injure ou diffamation publique". 

Le Dr Yehuda David, Clément Weill-Raynal et Actualité juive condamnés par le Tribunal correctionnel de Paris pour avoir diffamé Jamal al-Dura
French Justice scrutinized Jamal al-Dura’s Wounds
French Journalist and Israeli Surgeon Condemned for Defamation of Jamal Al Dura

Une longue audience - plus de sept heures – soulignant les doutes légitimes concernant l’authenticité des allégations du reportage sur « la mort de Mohammed al-Dura » et les « blessures de son père Jamal al-Dura »... et toujours absent : le plaignant, Jamal al-Dura.

Une interview et un droit de réponse
Le 30 septembre 2000, France 2 a diffusé au JT (journal télévisé)  de 20 heures un reportage d’environ 50 secondes de Charles Enderlin, son correspondant permanent à Jérusalem, déclarant en voix off sur des images signées par le cameraman palestinien Talal Abu Rahma :
« Près de l’implantation de Netzarim (bande de Gaza)… Jamal et son fils Mohamed (12 ans) sont la cible des tirs venus de la position israélienne. Son père tente de le protéger... Une nouvelle rafale. Mohamed est mort et son père gravement blessé ».
L’image du « petit Mohamed » devient l’icône de l’Intifada II.

Ce reportage suscite des doutes, et des enquêtes dès 2000 de Nahum Shahaf, physicien israélien, de Stéphane Juffa, rédacteur en chef de l’agence de presse Mena (Metula News Agency). Au sein de la Ména, Gérard Huber, psychanalyste, et Luc Rosenzweig, journaliste, poursuivent leurs investigations. Nahum Shahaf et la Ména contestent l'authenticité des faits allégués dans ce reportage, et concluent, au terme de leurs démonstrations, à la mise en scène.

Dans son documentaire Trois balles et un enfant mort. Qui a tué Mohamed al-Dura ? diffusé en 2002 par ARD, Esther Schapira, documentariste allemande, soutient que l'enfant serait mort vraisemblablement par des balles palestiniennes. 

C'est Richard Landes, historien américain, qui parvient à interviewer Charles Enderlin, et forge le néologisme Pallywood pour désigner l'industrie audiovisuelle palestinienne de propagande

La polémique sur ce reportage controversé est alimentée par le long refus de France 2 de rendre publics les rushes du reportage, et les versions successives de Talal Abu Rahma qui, le 3 octobre 2000, affirme sous serment, au Centre palestinien des droits de l’homme : « L’enfant a été tué intentionnellement et de sang-froid par l’armée israélienne », puis se rétracte le 30 septembre 2002, soit deux ans plus tard, dans un fax adressé à France 2 Jérusalem : « Je n’ai jamais dit à l’Organisation palestinienne des droits de l’homme à Gaza que les soldats israéliens avaient tué intentionnellement et en connaissance de cause Mohamed al-Dura et blessé son père ».

Dans deux textes électroniques de novembre 2004, Philippe Karsenty, directeur de l’agence de notation des médias Media-Ratings, qualifie en particulier d’« imposture médiatique », de « faux reportage », « pure fiction » et « supercherie » ce reportage controversé et exhorte aux licenciements de Charles Enderlin et d’Arlette Chabot, alors directrice de l’information de France 2.

Ceux-ci portent plainte contre lui pour diffamation.
 
Talal Abu Rahma a filmé en octobre 2004 des cicatrices de Jamal al-Dura, à son domicile gazaoui. France 2 a diffusé ce film lors d’une conférence de presse peu après.
 
Plusieurs procédures judiciaires ont été lancées en France et en Israël dans l’affaire al-Dura.

Condamné le 19 octobre 2006 par le Tribunal de Grande instance de Paris, Philippe Karsenty interjette appel.

Après avoir demandé par un arrêt du 3 octobre 2007 les rushes du reportage à France 2 et les avoir visionnés, la Cour d’appel de Paris relaxe Philippe Karsenty, le 21 mai 2008, dans un arrêt tançant sévèrement les intimés.
 
Dans ses numéros respectivement des 4 septembre et 25 septembre 2008, Actualité juive (1), hebdomadaire incontournable de la communauté Juive française, a publié l’interview du Dr Yehuda David, chirurgien orthopédique spécialisé en micro-chirurgie de la main à l’hôpital Tel ha Shomer (Tel-Aviv), « le plus important du Moyen-Orient » (Dr David), par le journaliste Clément Weill-Raynal, sous le pseudonyme de Daniel Vavinsky, puis la réponse de celui-ci à un droit de réponse de Charles Enderlin - un texte que Clément Weill-Raynal a confié lors de l'audience judiciaire avoir rédigé, malgré ses réticences, à la demande de Serge Benattar, directeur de l'hebdomadaire. Le Dr Yehuda David a affirmé dans son interview avoir opéré en 1994, dans le cadre d’une opération de chirurgie réparatrice, Jamal al-Dura, victime en 1992, de blessures à l’arme blanche (hache, couteau) lors d’une rixe entre Palestiniens, donc bien avant le reportage controversé en 2000. Les blessures de 1992 avaient induit une paralysie de la main droite causée par une section des nerfs médian et cubital.
 
Sans avoir examiné Jamal al-Dura, dans une lettre du 9 septembre 2008, le professeur Raphaël Walden (2), spécialiste de chirurgie vasculaire à l'hôpital de Tal ha Shomer, a repris la teneur d'un rapport médical jordanien sur Jamal al-Dura.

Le 29 octobre 2008, Jamal al-Dura a déposé plainte pour diffamation contre le Dr Yehuda David, Clément Weill-Raynal et Serge Bénattar, directeur de cet hebdomadaire, à propos de certains passages de cette interview et de la réponse de Clément Weill-Raynal à Charles Enderlin. Une réponse rédigée à la demande de Serge Bénattar, directeur-fondateur d'Actualité juive hebdo.

Le 29 avril 2011, la XVIIe chambre du Tribunal de grande instance (TGI) de Paris – tribunal correctionnel - avait estimé diffamatoires les propos alléguant que ce Gazaoui avait participé à une mise en scène diffusée par France 2, puis qu’il avait imputé à tort à des tirs israéliens la mort de son fils Mohammed et ses anciennes blessures afin de berner l'opinion publique, et ce, avec la complicité de médecins palestiniens.

Ce Tribunal avait condamné chaque défendeur - Dr Yehuda David, Clément Weill-Raynal et Serge Bénattar, directeur de cet hebdomadaire -, notamment à une amende de 1 000 euros, assortie d'un sursis total, et tous trois solidairement à verser à Jamal al-Dura 5 000 euros au titre des dommages et intérêts, ainsi que 5 000 euros au titre de ses frais de justice.
 
L’exécution provisoire de ce jugement a été suspendue le 8 juillet 2011 : les défenseurs ont déposé une consignation de 5 000 euros.

Des cicatrices antérieures à 2000
A la différence de l’audience devant la XVIIe chambre du TGI quelques mois plus tôt, cette audience publique s’est déroulée sans intervention de témoins et les explications chirurgicales ont été concises et claires. Les débats sont demeurés centrés sur les propos tenus et leur qualification juridique.

Les juges et l’avocat général se sont montrés particulièrement attentifs aux verbatim de la vidéo présentée en 2004 sur les cicatrices de Jamal al-Dura filmées par Talal Abu Rahma. Le commentaire off de cette vidéo a fait l’objet d’une quasi-exégèse afin de déterminer si cette vidéo visait ou non les seules cicatrices de Jamal al-Dura liées à l’incident du 30 septembre 2000. Malgré les suggestions de la défense, la Cour a préféré visionner cette vidéo lors de son délibéré, et non lors de l’audience.

Le Dr Yéhuda David a rappelé avoir effectué une opération de chirurgie réparatrice sur Jamal al-Dura : il a implanté dans le bras et la main des tendons prélevés dans le pied gauche de ce patient Gazaoui. Il a précisé s'être prononcé sur les cicatrices de son opération lors de l'interview accordée à Clément Weill-Raynal.

Quand, en 2007, une équipe de la Ména lui a présenté le dossier médical de Jamal al-Dura, le Dr David s’est souvenu de son ancien patient, et a répondu aux journalistes israéliens le sollicitant, sans que Jamal al-Dura ne porte plainte contre eux ou contre lui.

Le Dr Yéhuda David a affirmé s’être exprimé dans cette affaire en étant motivé par un souci de paix entre Israéliens et Palestiniens, et avec l’accord du directeur du ministère israélien de la Santé.

Il a souligné l’éthique des soldats israéliens – « On accuse les soldats israéliens d’avoir tiré sur un enfant pendant 45 secondes ou une minute. En plus de 20 ans, je n’ai pas vu de pareil ordre de tir. Avant de tirer, un soldat israélien doit avoir l’accord de plusieurs échelons ».

Se fondant sur son expérience médicale, notamment dans une unité combattante israélienne, il a dénoncé des incohérences et invraisemblances : ainsi, un rapport médical allègue qu’une balle aurait atteint Jamal al-Dura par derrière ; or, derrière ce Gazaoui, se trouvait un mur. En outre, si la veine fémorale du Gazaoui avait été atteinte par une balle israélienne à haute vélocité, Jamal al-Dura serait mort exsangue en quelques minutes. Aucune goutte de sang ne corrobore les allégations de blessures, etc.
Quant à Clément Weill-Raynal, il a évoqué son évolution, de l’indifférence à l’intérêt tardif en 2008, via la méfiance à l’égard des tenants de la mise en scène de l’incident. Il a réalisé de nombreux recoupements dans le cadre de son enquête journalistique, et s’est vu opposer le refus de Jamal al-Dura de répondre à ses questions.

Ce journaliste a soulevé le « problème de la crédibilité de Talal Abu Rahma » qui a « ses secrets » et a déclaré au journal marocain Le Matin, en 2001, qu’il était « venu au journalisme afin de poursuivre la lutte en faveur de son peuple » (3).

Clément Weill-Raynal a listé des contradictions : changement du prénom de l’enfant (« Rami » pendant 48 heures, puis « Mohamed ») dans les dépêches d’agences de presse, heure de la présence d’un enfant palestinien décédé à l’hôpital de Gaza (à « 13 h » selon le médecin palestinien Taweel ou après « 15 h » selon Charles Enderlin ?), etc.

Et de retracer la dégradation de ses relations avec Charles Enderlin dès le début de son enquête : « Tu vas tirer sur ton camp », le prévient le correspondant de France 2 à Jérusalem.

« Un permis de douter » ( Pascale Robert-Diard, Le Monde, 2008)
Avocate de Jamal al-Dura, Me Orly Rezlan s’est attirée les foudres du Président de la cour pour avoir interrompu à plusieurs reprises les prévenus lors de leurs explications.

Elle a fait preuve d’une moindre habileté qu’en première instance, notamment car elle s’est efforcée d’associer les deux prévenus à la Ména et à Philippe Karsenty, pourtant relaxé par cette même Cour en une composition certes différente, et s’est enquis si l’Etat d’Israël finançait les frais de justice du Dr David.

Elle a déploré cette polémique – « Si Jamal al-Dura n’a pas été blessé lors de la fusillade, alors imaginez ce qui est arrivé à son fils… » - s’autoalimentant par des questionnements sans fin, cette « méthode hypercritique qui consiste à multiplier les questions. Personne n’a le temps de répondre à ces questions. Chaque contradiction signifie un mensonge. Cette méthode consiste à mener à la situation où la victime doit se justifier ».

« J’ai des doutes. J’ai des doutes. J’ai des doutes. Mais je m’arrête là. Il n’est pas question de prendre position sur un sujet aussi sensible », a déclaré Jean-François Cormaille de Valbray, avocat général. Et d’asséner : « Chacun dit « Il [Nda : Jamal al-Dura] ment ». Or on lui fait dire ce qu’il ne dit pas » dans la vidéo montrant ses cicatrices.

Jean-François Cormaille de Valbray a stigmatisé « l’imprudence » verbale du Dr David, sans examen de Jamal al-Dura et en se « focalisant sur sa main ». Il s’en est remis à la sagesse de la Cour pour le reste.

Me Alain Jakubowicz, avocat du Dr Yéhuda David, et Me Gilles-William Goldnadel, avocat de Clément Weill-Raynal, ont décortiqué chaque passage incriminé pour en prouver le caractère factuel et descriptif, en démontrer l’absence de tout caractère diffamatoire et souligner la prudence de l’expression, tout en insistant sur la bonne foi de leurs clients et leur absence d’animosité à l’égard du plaignant.

Ils se sont étonnés que Jamal al-Dura ne se soit pas « soumis aux examens et expertises qui auraient pu permettre de faire la lumière sur l’origine de ses blessures ». C’était l’une des missions de la commission d’enquête indépendante composée d’experts acceptée par France 2 qui a fait lanterner le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France).

Me Alain Jakubowicz a persiflé sur la plainte déposée par Jamal al-Dura à propos d’un article écrit dans une langue qu’il ignore.

Puis, Me Gilles-William Goldnadel a vivement rappelé à la Cour son arrêt, certes rendu dans une formation différente, relaxant Philippe Karsenty en 2008.

Il a insisté sur l’enquête sérieuse de son client et des enjeux du procès : « la possibilité de remettre en question une vérité officielle » et l’existence d’un contre-pouvoir au pouvoir de la presse. Et de citer une jurisprudence constante épargnant aux journalistes toute poursuite judiciaire fondée sur leurs questions lors d’une interview.

Il s’est étonné de la « procuration » donnée par Jamal al-Dura à « France Télévisions et leur correspondant à Jérusalem d’exploiter les rapports médicaux le concernant, devant les tribunaux ou à la télé ou pour tout autre usage approprié » et autorisant « le correspondant à utiliser ces rapports médicaux comme il lui conviendra ».

Me Gilles-William Goldnadel a persiflé sur les incohérences notamment dans le rapport médical jordanien et sur les témoignages « fantaisistes » des cameramen et photographes palestiniens collaborant à de célèbres agences de presse, présents lors de l’incident al-Dura et dont les images de cet incident ont brûlé, été égarées, etc.

Quant à la réponse de Clément Weill-Raynal au droit de réponse de Charles Enderlin, si elle contenait un élément diffamatoire à son encontre, ce serait au correspondant de France 2 à Jérusalem, et non à Jamal al-Dura, d’en poursuivre l’auteur.

« Je ne suis pas un conspirationniste. Je ne suis pas un délinquant. Certains veulent que je sois mis au ban de ma profession. Pour ceux-là, une condamnation serait accueillie par une fête », a soupiré Clément Weill-Raynal.
Quant au Dr Yehuda David, il a conclu sur l’attente du verdict de la Cour par l’Etat d’Israël, le peuple d’Israël et les Palestiniens.
 
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris, présidée par Alain Verleene, sera rendu le 15 février 2012. La veille, le 14 février 2012, la Cour de cassation examinera le pourvoi formé par Charles Enderlin et France 2 contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 21 mai 2008. Jean Berkani, avocat général auprès de la Cour de cassation, devrait recommander le rejet de ce pourvoi.

Le 15 février 2012, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris a condamné le journaliste Clément Weill-Raynal, pour les phrases incriminées dans sa réponse au droit de réponse de Charles Enderlin, à 1 000 euros d'amende avec sursis, 1 000 euros de dommages-intérêts et 6 000 euros de frais de justice. Cet arrêt a aussi relaxé le Dr Yehuda David.

Actualité juive hebdo a alors titré en encadré en bas de sa couverture de son n° 1199 (23 février 2012) sur la « victoire posthume de Serge Benattar », directeur de la publication et fondateur du journal. La quasi-totalité de la page 26 de ce numéro est consacrée à l’affaire al-Dura : « Le DrYehuda David gagne son procès en appel et Serge Benattar (zal) est mis hors de cause » et « Victoire posthume de Serge Benattar », ce titre-ci étant surmonté par « Reconnaissance ». Curieusement, aucun des articles publiés n’informait sur la condamnation du chroniqueur judiciaire du journal !? Clément Weill-Raynal avait été condamné pour sa réponse, écrite à la demande de Serge Benattar, au droit de réponse de Charles Enderlin.

En septembre 2013, la Cour de cassation a cassé sans renvoi l'arrêt de la Cour d'appel de Paris ayant condamné Clément Weill-Raynal et relaxé le Dr Yehouda David. Elle a rejeté le pourvoi de Jamal al-Dura qui portait sur la relaxe du Dr Yehouda David. Elle a retenu l'argumentation de la défense du chroniqueur judiciaire estimant que la cour d'appel n'avait pas tenu compte du "caractère d'intérêt général du sujet traité", alors que, selon l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'Homme, "dans le cadre d'un débat d'intérêt général, la liberté d'expression autorise la mise en cause des personnes avec une dose d'exagération et même de provocation qui exclut toute condamnation pour injure ou diffamation publique".

La Cour de cassation a considéré que "le passage incriminé... ne dépassait pas les limites admissibles de la liberté d'expression sur le sujet d'intérêt général constitué par le débat relatif à la couverture par la chaîne France 2 d'un événement ayant eu un retentissement mondial ainsi qu'à l'origine des blessures présentées par M. Al-Dura".

Le 11 septembre 2012, Clément Weill-Raynal a déclaré : "En enquêtant sur cette affaire, je n’ai fait que mon travail de journaliste. Ma seule intention a toujours été de participer à l’établissement de la vérité sur un reportage controversé. Treize ans après les faits, il n’est pas trop tard pour que toute la lumière soit faite sur cette affaire".
 
Une affaire d’Etat
D’une certaine manière, cette procédure judiciaire a affaibli France 2 et Charles Enderlin : le jugement condamnant les prévenus n’a pas mis un terme aux questionnements lors même qu’il portait sur des éléments objectifs – cicatrices de blessures - distincts des images controversées et supposés clore définitivement l’affaire al-Dura. Pis, les audiences et cette décision judiciaire ont rendu publics des documents qui laminent la réalité des faits allégués. De plus, les magistrats de la Cour d’appel ont évoqué les doutes sur les faits allégués sans les présenter comme des élucubrations.

La désinformation ? Clément Weill-Raynal l’a définie comme un mensonge construit sur un élément réel. Mais les exemples qu’il a cités révèlent que cette désinformation peut ne contenir aucun élément réel. Ainsi, un soldat israélien a été présenté par des médias comme menaçant un Palestinien, alors qu’il protégeait l’étudiant Juif américain, Tuvia Grossman, de la violence d’Arabes palestiniens ; en 2002, après un prétendu « massacre » par des soldats israéliens, un Arabe palestinien présumé mort tombe de sa civière, puis y remonte prestement en suscitant la peur des passants, etc. Dans cette guerre médiatique, ce qui est en jeu, c’est aussi l’histoire de ce conflit déformée ou/et occultée par le récit propagandiste palestinien distillé dans des médias, livres d’histoire, documentaires, reportages, bandes dessinées, romans, etc. et gobé par une large partie de l’opinion publique.

« Que ces débats sont longs. Ce n’est pas une affaire d’Etat ! », s’exclame une spectatrice. Pourtant si, il s’agit d’une affaire d’Etat. Et qui perdure car elle sert la « politique arabe » de la France en imposant le narratif palestinien diabolisant l’Etat d’Israël et délitant le lien entre la diaspora Juive et cet Etat diffamé, isolé et marginalisé, en laissant perdurer un blood libel qui attise la haine antisémite dans le monde et en érigeant la France édictrice de paramètres de la paix.

« On n’a jamais décidé de s’emparer de ce sujet-là [Nda : l’affaire al-Dura] de manière forte. Déjà, parce qu’on considère que c’est un sujet qui préoccupe en fait essentiellement la communauté juive. Ce n’est pas un vrai enjeu dans la défense d’Israël pour nous aujourd’hui. Je regrette que la commission qui a été mise en place par France Télévisions n’a jamais abouti à quelque chose de concret. Rester accroché à ce qui s’est passé dans ce reportage vidéo n’est pas le combat essentiel que nous devons mener aujourd’hui, ce n’est pas le plus constructif. Le combat pour défendre l’image d’Israël passe par autre chose que par ressasser cette affaire là », a déclaré Jonathan Hayoun, président de l’UEJF (Union des Etudiants Juifs de France) sur RCJ, « la radio de la communauté Juive » française, le 4 janvier 2012, sans citer de combat « plus constructif ».

Résumons : les autorités israéliennes – Bureau israélien gouvernemental de presse (GPO), Tsahal, etc. –, le CRIF, des journalistes de toutes nationalités luttent pour établir les faits, des historiens et essayistes étudient cette affaire… Ils auraient tout faux !?

L’affaire Dreyfus a débuté en 1894 et pris fin en 1906 par l’arrêt de la Cour de cassation qui a innocenté et réhabilité le capitaine Dreyfus. Jonathan Hayoun ne se serait pas alors battu pour que justice soit rendue à son compatriote et coreligionnaire injustement condamné ?

Foin d’ironie, cette déclaration de Jonathan Hayoun révèle les longues incompréhensions et inactions d’une grande partie du leadership communautaire français – lors d’une réunion publique de candidats à la présidence du CRIF en 2007, seul Richard Prasquier s’était engagé à agir dans cette affaire - à l’égard de cette gravissime affaire aux multiples facettes et à dimension internationale.
Enfin, malgré les doutes argumentés, malgré les brèches délitant le bien-fondé d’allégations de ce reportage, malgré les incohérences et contradictions de Charles Enderlin, de Talal Abu Rahma et des images analysées au fil des années, malgré le sévère arrêt de la Cour d’appel de Paris du 21 mai 2008 tançant sévèrement France 2 et Charles Enderlin, malgré la condamnation de Canal + et de TAC Presse - confirmée en appel le 5 janvier 2012 - pour diffamation à l’égard de Philippe Karsenty, France 2 n’infléchit pas sa position. Sans que nulle autorité publique – ministère de la Culture et de la Communication, Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), etc. - ne lui rappelle des impératifs déontologiques ou ne la sanctionne.

« Existerait-t-il une sorte de spécificité du service public de l’information nationale (…) qui ferait que, non content de ne pas méditer les erreurs du passé, il se sentirait en droit, sinon en devoir, de les réitérer sans fin ? », interroge Me Gilles-William Goldnadel, le 6 janvier 2012, à propos du numéro controversé Un Etat palestinien est-il encore possible ? de l’émission Un œil sur la planète diffusé le 3 octobre 2011 par France 2.

(1) J’ai collaboré comme journaliste à Actualité juive et à la Mena
(2) Le professeur Raphael Walden milite au sein de l'association pro-palestinienne Doctors for Human Rights (Médecins pour les droits de l'homme). Il est aussi le gendre du président Shimon Peres.
(3) Richard Landes souligne la spécificité des « journalistes islamiques » respectant la Charte des médias islamiques de grande diffusion (Jakarta, 1980), listant des règles distinctes des principes déontologiques journalistiques des Occidentaux : Al-Dura and the "Public Secret" of Middle East Journalism, 11 novembre 2007. En français Al-Dura et le secret d’intérêt public du journalisme du Moyen-Orient et l’information qu’on nous donne, traduction de Menahem Macina.

Cet article a été publié le 11 janvier 2012 et le 1er mai 2013 alors que Clément Weill-Raynal, chroniqueur judiciaire sur France 3, a exercé son travail de journaliste en filmant l'indigne "mur des cons" affiché par le  Syndicat de la magistrature. Tout comme il a agi en journaliste dans l'affaire (a)l-Dura. Le 6 mai 2013, une pétition de soutien au journaliste et réclamant que France 3 abandonne ses menaces de sanction à son égard a recueilli plus de 1 630 signatures en quelques heures... Il a été modifié le 12 septembre 2013.

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2 commentaires:

  1. Magnifique resumé !(comme d'habitude)
    Giora Hod

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  2. les assassins de la vérité doivent payer pour leur diffamation d'Israel

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