Citations

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« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
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vendredi 1 septembre 2017

France 2 et Charles Enderlin n’expliquent pas à la Cour d’appel de Paris les incohérences et contradictions relatives à l’incident al-Dura


Le 27 février 2008, Philippe Karsenty, directeur de l’agence de notation des médias Media-Ratings, a listé devant la 11e chambre de la Cour d’appel de Paris les incohérences, contradictions et invraisemblances relatives au reportage filmé au carrefour de Netzarim (bande de Gaza) et diffusé au JT de France 2 le 30 septembre 2000. Ce qui l’amenait à maintenir ses propos initiaux - « faux reportage » - et à souligner la « mise en scène de la mort de Mohamed al-Dura ». Ce qui a fortement embarrassé Arlette Chabot, directrice de l’information de France 2, et Charles Enderlin, correspondant en Israël de la chaîne publique, démunis d’explications pour contrer les objections de l’appelant. Reportage sur des débats tendus. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a souhaité que soit retirée la carte d'accréditation accordée à al Jazeera en raison de sa couverture partisane et de ses incitations à la violence. Le Government Press Office (GPO) a refusé ce retrait.


Devant la salle de la 11e chambre de cette Cour, où s’agglutinent des dizaines de personnes une dame interroge une voisine venue soutenir Charles Enderlin : « Pourquoi Charles Enderlin a-t-il affirmé n’avoir pas diffusé la scène de l’agonie de Mohamed al-Dura parce qu’elle était insoutenable, alors qu’il n’y aucune scène d’agonie dans les rushes qu’il a présentés en novembre 2007 à la Cour ? » Sa voisine se tait, en souriant avec assurance.

L’audience de plus de six heures devant cette Cour a souvent ressemblé à cette scène, à la différence que Charles Enderlin et Arlette Chabot furent visiblement gênés face à la démonstration de Philippe Karsenty.

Celui-ci avait interjeté appel du jugement de la XVIIe chambre du Tribunal de grande instance de Paris le condamnant en 2006 pour diffamation à l’égard des intimés car il avait notamment qualifié d’« imposture médiatique » ces images controversées (1).

La présidente de la Cour, Laurence Trébucq, s’improvise gendarme pour dégager un espace dans le hall attenant à la salle d’audience. Elle fait ajouter des chaises dans cette salle, traite quelques affaires et fait entrer la presse. A Philippe Karsenty, elle ordonne : « Vous vous tairez quand je vous le dirai ».

Afin d’accueillir la foule compacte qui s’exaspère bruyamment dans le hall, elle décide que l’audience aura lieu dans une salle plus vaste.

Le refus d’entendre comme témoin un expert balistique
Là, Arlette Chabot, directrice de l’information de France 2, se place discrètement parmi le public, puis rejoint Charles Enderlin et un responsable de France 2 dans les bancs où se sont placés les intimés. Le cameraman palestinien Talal Abou Rahma, qui a filmé les images controversées, demeure absent des audiences.

Dans le banc derrière celui des avocats de l’appelant, est assis le Dr Richard Prasquier, président du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France). Il avait demandé le 14 août 2007 à France 2 de rendre publics les rushes tournés le 30 septembre 2000 par Talal Abou Rahma. Le 15 janvier 2008, il s’est exprimé en faveur de la création d'une commission d'enquête technique composée de spécialistes - en balistique, de la médecine légale, des images, etc. - pour analyser ce reportage contesté (2). Sur le chemin menant à cette salle, une spectatrice lui déclarait que « ces images ont attisé l’antisémitisme » et évoque « l’agression antisémite dont [son] fils a été victime : « Moi, je peux [faire face]. Mais un enfant ! »

Patrick Klugman, membre du comité directeur du CRIF et vice-président de SOS-Racisme, s’assied du côté de France 2 en expliquant que cela ne revêt aucune signification.

Cette fois-ci, Charles Enderlin répond aux questions posées par les journalistes. L’une d’elles est accueillie fraîchement par les intimés qui ne semblent pas avoir apprécié son article sur l’audience de visionnage de ces rushes émaillés de saynètes de guerre. Cette journaliste se défend : « J’ai fait mon travail de journaliste ». « Alors faîtes votre travail de journaliste ! », lui intime Arlette Chabot. « C’est ce que je fais ! » lui répond cette journaliste qui soulève des questions pertinentes auprès de Charles Enderlin. Celui-ci l’informe qu’il va présenter des images des mêmes scènes, mais prises sous un angle différent, ce qui démontrera la réalité des blessures des Palestiniens.

La Présidente Laurence Trébucq présente ses « excuses pour n’avoir pas » prévu la tenue de l’audience dans une salle suffisamment grande pour accueillir tant de spectateurs. Puis, elle rappelle au public les consignes à respecter, à peine d’expulsion de la personne troublant la sérénité des débats, voire celle de tout le public. Un rappel qu’elle répètera quand les partisans de l’une ou l’autre partie exprimeront leur soutien. L’audience demeurera très attentive, malgré la longueur inattendue de l’audience.

Philippe Karsenty et l’un de ses deux avocats Me Patrick Maisonneuve demandent que soit entendu, « dans le respect du contradictoire », l’expert balistique Jean-Claude Schlinger, missionné par l’appelant et auteur d’un rapport exonérant Israël de la responsabilité des tirs qui, selon Charles Enderlin et son cameraman, auraient le 30 septembre 2000 tué Mohamed et blessé Jamal al-Dura (3).

Jean-Claude Schlinger a étudié des images de France 2, d’agences de presse et de médias - Associated Press, Reuters, BBC - disponibles « dans les mois ayant suivi l’incident du 30 septembre 2000 ». Dans son rapport, il conclut : « Il est sérieusement possible qu’il s’agisse d’une mise en scène » (4).

Cette demande d’audition est considérée comme tardive par les intimés et inutile par le représentant du ministère public, l’avocat général Antoine Bartoli, car ce rapport a été communiqué aux parties et aux juges. Après une pause, la Cour rejette cette requête.

Le visionnage de la présentation PowerPoint de Philippe Karsenty
Philippe Karsenty et son avocat Me Patrick Maisonneuve sollicitent de la Cour l’autorisation de visionner un document pour « compléter l’information sur la scène objet de la discussion ».

« Je ne veux pas donner l’impression de fuir la vérité », assure Me Francis Szpiner, avocat de France 2 et de Charles Enderlin.

L’avocat général Antoine Bartoli s’en « rapporte à la Cour ».

La Cour « est favorable à cette demande concernant une présentation qu’elle va découvrir : pour des raisons techniques, elle n’a pu en voir le contenu d’une durée d’environ 30 minutes ».

La présidente Laurence Trébucq fixe le programme de l’audience : visionnage de cette présentation de Philippe Karsenty et du CD-Rom des parties civiles, puis les plaidoiries et les réquisitions de l’avocat général. Elle réitère les règles : Philippe Karsenty et Charles Enderlin s’arrêteront « de parler quand la Cour dira Stop ! »

Sur le côté gauche de la salle, Philippe Karsenty se place près de son moniteur, pour être quasi face à la Cour, et presque de dos au public. Quittant leurs bancs, les intimés et leurs avocats s’agglutinent à quelques mètres face à l’écran, de profil par rapport à la Cour.

« Talal Abu Rahma, supermenteur »
Philippe Karsenty mentionne la présence de dix secondes de rushes de France 2, non diffusés par cette dernière, mais par la BBC.

« Ces rushes n’ont jamais été donnés à la BBC », assure Arlette Chabot. Ce que répète en exultant Me Francis Szpiner.

« J’ai acquis ces archives auprès de la BBC. Je peux vous apporter la facture », affirme Philippe Karsenty.

La Présidente rappelle qu’il ne peut pas présenter de « pièces supplémentaires ».

Vite, Arlette Chabot se ravise : « Je me demande si Charles Enderlin ne les a pas utilisés dans un autre sujet… »

Philippe Karsenty désigne le time code (5) de la BBC qui authentifie ces images cruciales, postérieures à celles où Charles Enderlin (6) annonce l’enfant mort et dans lesquelles l’enfant bouge. Des images utilisées par la journaliste Esther Schapira en 2001 dans son documentaire, malgré « l’obstruction de France 2 ».

Philippe Karsenty commente un document d’une douzaine de Questions/Réponses illustrées de manière didactique et vivante par des cartes, des photos, le reportage incriminé, des rushes d’agences de presse présentes au carrefour de Netzarim, des saynètes de guerre simulée (7), des interviews par Canal + ou Esther Schapira (8) de protagonistes, en particulier Talal Abu Rahma, qui se contredisent avec aplomb, etc.

Exemples. Combien de minutes de l’incident al-Dura Talal Abu Rahma a-t-il filmé ? En 2000, ce cameraman affirmait sous serment avoir filmé 27 minutes, puis en 2001 il réduisait cette duré à six minutes. A Esther Schapira, Charles Enderlin parlait d’« environ 30 minutes ». Cet incident dure moins d’une minute dans les rushes de France 2 visionnés en 2007 devant la Cour d’appel de Paris (9).

Combien de cameramen étaient présents au carrefour de Netzarim ? Talal Abu Rahma évoquait « 20, 25 à 30 cameramen ». Lors de l’audience, ce nombre est fixé par France 2 à « au moins quatre cameramen, dont Talal Abu Rahma » et ceux de Reuters et d’AP (Associated Press).

Que tournaient Reuters et AP au même endroit ? Des saynètes de guerre, mais pas l’incident al-Dura. En tout cas, aucun film de ces cameramen sur les al-Dura n’est visible pour diverses raisons selon leurs auteurs : film « brûlé », film raté au développement, etc.


Combien d’impacts résultent du tir nourri visant les al-Dura ? En 2001, Talal Abu Rahma déclarait : « Les balles pleuvaient autour de nous comme de la pluie ». Et ce, pendant « 45 minutes ». Sur le mur derrière les al-Dura, il n’y a que huit traces pouvant être des impacts de projectiles. Soit un tir toutes les cinq à six minutes.

Où sont les balles censées avoir blessé (10) le père et tué l’enfant ? Talal Abu Rahma a indiqué qu’un général palestinien les détient. A la suite des dénégations de ce dernier, il s’est emberlificoté dans ses explications en affirmant que « France 2 a récupéré les balles dans le mur », puis a concédé en souriant les détenir : « Nous avons nos secrets… »

Pourquoi Talal Abu Rahma n’a-t-il pas filmé l’évacuation par ambulance de Mohamed al-Dura mort, lui a qui en filmé plusieurs auparavant ? « Il n’avait plus de batterie dans sa caméra », avance Charles Enderlin. « C’est faux. Il lui restait la moitié de sa cassette et de la batterie comme il l’a affirmé à Esther Schapira », assène Philippe Karsenty.

Pourquoi Charles Enderlin fait-il confiance à Talal Abu Rahma ? Interviewé par Esther Schapira, il évoque la « désinformation israélienne » qu’il distingue des « Palestiniens qui sont des cameramen journalistes professionnels ». Il défend son cameraman : « Talal a la carte de presse israélienne, un laissez-passer israélien. Quand nous voulons savoir si un cameraman appartient à une organisation, a maille à partir avec Israël, on vérifie auprès du Shin Bet, le service intérieur de renseignement israélien ».

Philippe Karsenty réplique vivement en citant Daniel Seaman (11), chef du service de presse du Premier ministre, qualifiant Talal Abu Rahma de « menteur ».

Lapidaire, il résume : « Arlette Chabot fait confiance à Charles Enderlin qui fait confiance à son cameraman super menteur ».

Or, Guysen a révélé le 2 mars 2008 que Talal Abu Rahma, cameraman palestinien de France 2, n’a plus de carte de presse israélienne depuis 2002
.
« Charles Enderlin se trompe et nous trompe »

Qui est prévenu et qui est partie civile ? Qui est sur la défensive et qui poursuit ? Même la présidente Laurence Trébucq s’y perd. Et pourtant, cette qualité traduit aussi un rapport de force patent et induit des obligations en termes de charge de la preuve.

Sans explication convaincante, les parties civiles pinaillent sur des éléments marginaux de la démonstration – nombre d’enfants de Jamal al-Dura -, sans ébranler la pertinence de l’argumentation de Philippe Karsenty. Elles s’engouffrent dans les minuscules failles ou supposées telles pour stigmatiser l’impudent qui, sans carte de presse, se permet de critiquer Charles Enderlin et Talal Abu Rahma, titulaires, eux, du précieux Sésame (12).

Philippe Karsenty s’étonne que Jamal al-Dura soit plâtré à des endroits exempts la veille d’impacts de balles ou de traces de sang, et que du sang soit visible sur son plâtre. Il informe la Cour que Jamal al-Dura avait été attaqué en 1992 à coups de hache par des Palestiniens qui l’accusaient de collaborer avec Israël. Soigné à Gaza, ce dernier avait bénéficié, grâce à son employeur israélien, d’une opération dans un hôpital israélien en 1994. A l’appui de ses dires, Philippe Karsenty cite le dossier médical de Jamal al-Dura.

« Même les Palestiniens ont droit au respect de leur vie privée. Comment vous êtes-vous procuré ce dossier médical ? », s’offusque Me Francis Szpiner.

« Je l’ai reçu par La Poste », réplique Philippe Karsenty. Rires dans la salle.

Philippe Karsenty fait part du refus de CNN de diffuser la première ces images pour ne pas les authentifier. « Avez-vous une attestation de CNN le prouvant ? », interroge Me Francis Szpiner. L’appelant n’en a pas, mais présente sa source : Ton rêve est mon cauchemar, un livre d’Elisabeth Schemla (13). « C’est l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’ours… », persifle Me Francis Szpiner.

Quant aux témoignages de cameramen palestiniens présentés par les intimés, la graphologue missionnée par Philippe Karsenty conclut qu’ils sont écrits par… Talal Abu Rahma. Ce qui incite l’appelant à évoquer d’autres « faux ».

« Les conditions de tournage à Gaza »

L’appelant décortique les images diffusées par France 2 au JT du 30 : saynètes de guerre jouées (14), Palestiniens simulant de fausses blessures, etc. Me Patrick Maisonneuve souligne une contradiction : « Un médecin parle d’une blessure par balle à la jambe gauche, alors que le père situe cette blessure à la jambe droite ».

Les intimés et leur défense esquivent les questionnements sur les nombreuses incohérences, contradictions et invraisemblances.

Face au moniteur, Charles Enderlin intervient sans convaincre, en réitérant sa confiance en son cameraman et en mettant en avant son savoir sur l’Intifadah : « Certains Palestiniens croient que les tirs ne les concernent pas... Ce sont des rushes, pas de la vidéosurveillance ! Les cameramen filment des scènes qu’ils pensent utiles à leur reportage... Je suis passé des dizaines de fois au carrefour de Netzarim ».

« Ces images donnent l’impression d’un tournage », remarque la Présidente, en évoquant le Palestinien tirant au travers d’un trou dans une pièce… vide !

« C’est réel. Les Palestiniens n’utilisent pas leurs balles pour rien », affirme Charles Enderlin.

« C’est une mise en scène », note la présidente.

« Ce n’est pas une mise en scène. Je suis un professionnel qui couvre l’Intifadah depuis des années. C’est la réalité », maintient Charles Enderlin.

« Ces images donnent un peu l’impression que cela ne se passe pas trop mal et que c’est filmé à la demande des cameramen », insiste la présidente.

« AP et Reuters, ce sont des professionnels. Ce sont les conditions de tournage à Gaza ».

« Vous dîtes que ce n’est pas de la mise en scène ? »

« Non, c’est filmé ».

Arlette Chabot contre-attaque en extrapolant : « On envoie les images dans le monde entier. Cela tendrait à prouver que depuis des années, les agences de presse internationales, reprises par les télévisions du monde entier… C’est une mise en cause de toute la presse internationale. Cela veut dire qu’AP et Reuters ne filment que des [Palestiniens] qui simulent, des mises en scènes ! »

« Pas que [des mises en scène]. Mais aussi [des mises en scène]… », rectifie la présidente.

Progressivement, d’invraisemblances en contradictions, Philippe Karsenty parvient à sa conclusion : toutes les scènes diffusées ce 30 septembre 2000 sont jouées par les Palestiniens, aucune trace de sang sur le sol, sur le mur et sur les vêtements des al-Dura n’atteste une quelconque blessure des al-Dura, nulle image ne prouve la mort de Mohamed al-Dura vers 15 h, comme l’a asséné Charles Enderlin se fiant à son unique source : Talal Abu Rahma. Ainsi, Mohamed al-Dura déplace un chiffon rouge de sa cuisse vers son abdomen, pour symboliser une blessure sanglante. Quand il pose ce tissu sur son ventre, on constate l’absence de blessure à la cuisse. Par contre, le matin même, avant midi, un garçon palestinien mort a été transféré à la morgue de l’hôpital de Gaza. Nul ne connaît les circonstances de sa mort ou son identité. Sur les photos produites par France 2 et prises à la morgue, les blessures de cet enfant palestinien sont différentes de celles censées avoir tué Mohamed al-Dura selon les témoignages de Jamal al-Dura et Talal Abu Rahma.

« Le scandale du siècle »

Bras croisés, Arlette Chabot hoche la tête en signe d’incrédulité, de négation ou d’effarement. Elle s’étonne : « Ne croyez-vous pas qu'en huit ans le gouvernement israélien n'aurait pas réagi ? »

Philippe Karsenty explique que le colonel Yom Tov Samia a diligenté une enquête, marginalisée par « l’establishment israélien soucieux fin 2000 de conclure un accord avec l’Autorité palestinienne et ne se rendant pas compte de l’impact de ces images dans le monde musulman ». Ce que nie Charles Enderlin : « Israéliens et Palestiniens ont suspendu leurs négociations jusqu’en décembre 2000 ».

Philippe Karsenty se prévaut du soutien précoce et continu de Daniel Seaman, directeur du bureau de presse gouvernemental (GPO) qui dépend du Premier ministre, et celui récent de Raanan Gissin, ancien porte-parole d’Ariel Sharon.

« Pourquoi les autorités israéliennes n’ont-elles pas dénoncé le scandale du siècle ? », relance Me Francis Szpiner.

« Charles Enderlin a travaillé avec le porte-parole d’Ariel Sharon. Il connaît beaucoup de monde », estime Philippe Karsenty.

« Vous avez énormément travaillé… Quelles raisons vous ont poussé à investiguer, à dire qu’il s’agit de désinformation ? », s’enquiert la présidente.

Et Philippe Karsenty de raconter comment « ce reportage l’a interpellé ». Et d’évoquer le film d’Esther Schapira, l’enquête de l’ingénieur israélien Nahum Shahaf, la manifestation en 2002 du Prix de la désinformation à France 2 et à Charles Enderlin, ses rencontres avec des responsables de France 2…

« Je ne fais pas de politique. Je suis un citoyen français. Les images diffusées par France 2 sont des mises en scène. C’est un faux. France 2 dépense énormément d’argent pour cacher ce mensonge. L’argent du contribuable français peut être mieux utilisé. Des gens de France 2 me téléphonent : « On a honte ». On ne peut pas continuer avec une chaîne d’Etat qui diffuse ces mensonges », s’indigne l’appelant.

« L’icône médiatique d’une icône journalistique » (Philippe Karsenty)

Eviter de répondre aux questionnements se retourne contre les parties civiles. Aussi, celles-ci déploient avec habileté leur tactique : abandonner dès que possible le domaine de la raison - celui de Philippe Karsenty et de la Cour -, pour se situer sur le registre émotionnel afin de gagner l’empathie des juges, et discréditer l’argumentation de Philippe Karsenty en l’assimilant à une thèse conspirationniste.

Calmement et prudemment, Philippe Karsenty refuse de se laisser entraîner hors du cadre de la plainte et répond en circonscrivant son sujet étudié et l’objet des débats : le reportage incriminé du 30 septembre 2000. En résumé : « Charles Enderlin affirme que Mohamed al-Dura a été tué par les soldats israéliens. Aucune image ne montre cet enfant mort ni des tirs israéliens. Certains disent l’avoir vu dans un marché à Gaza ».

Charles Enderlin déclare alors que Jamal al-Dura est prêt à faire exhumer le corps de son fils afin que des examens ADN établissent un lien familial entre l’enfant décédé et lui. « Pourquoi vouloir exhumer le corps ? Que [France 2 et Charles Enderlin] nous montrent ces balles ! », s’exclame Philippe Karsenty.

Ni la Cour ni Philippe Karsenty ne réclament ni ne retiennent cette mesure. Même quand Arlette Chabot, éludant une remarque de Me Patrick Maisonneuve et de la présidente, reprend à deux reprises cette proposition d’une « expertise ADN pour sortir du débat ».

Pendant une pause, conscient de l’enjeu médiatique, Charles Enderlin s’approche du banc de la presse (15), et exprime calmement à des journalistes de médias arabes son incrédulité choquée : « Le père perd son fils le matin et va tourner l’après-midi ! »

Le visionnage souvent calamiteux du CD-Rom de France 2 et Charles Enderlin

Maintenant, c’est au tour de France 2 et de Charles Enderlin de présenter leur CD-Rom composé de trois éléments : « les mêmes scènes [contestées par Philippe Karsenty] filmées par d’autres cameramen sous un autre angle », le reportage diffusé le même jour sur TF1 et un reportage comportant l’interview de Jamal al-Dura par Talal Abu Rahma montrant les « cicatrices de ses blessures ».

Le premier élément est conçu pour prouver l’authenticité des saynètes de guerre. Et on va voir ce qu’on va voir : « tous les points litigieux soulevés par Philippe Karsenty » apparaîtront vains, selon Arlette Chabot ! Et on a vu.

Et ce film s’est retourné contre les intimés car on est resté sur les questions soulevées par Philippe Karsenty. En étant partagé entre la stupeur devant le grotesque et le ridicule de commentaires off feignant d’expliquer l’invraisemblable.

Exemple : « On entend : « L’enfant est mort, l’enfant est mort ! ». Ce qui signifie en arabe parlé qu’il est en danger de mort ».

Autre citation : « Sous les rafales, l’enfant bouge une dernière fois. Il est blessé à la tête et enfin, ne bouge plus. Le pied de l’enfant selon un médecin légiste n’est à l’évidence pas dans une position naturelle ». Et comment ! Rappelons que dans cette image, Mohamed al-Dura, annoncé comme mort par Charles Enderlin sur des images précédentes, maintient ses jambes au-dessus du sol et soulève son coude pour regarder la caméra.

Ces assertions du film ne suscitent pas de questions de la Cour et de l’Avocat général Antoine Bartoli.

Le reportage de TF1 montre des saynètes de guerre et évoque notamment la mort de « 15 Palestiniens dont deux enfants ».

Dans le troisième reportage, le « médecin orthopédiste montre la radio et décrit la nature des blessures » de Jamal al-Dura. Puis, se rendant compte que cette radio est à l’envers, il la fait pivoter pour la mettre dans le bon sens de lecture. Puis, nous voyons le roi Abdallah II de Jordanie effectuer une visite à l’hôpital militaire d’Amman où est pris en charge Jamal al-Dura. Suivent les images d’un enfant palestinien à la morgue de Gaza. Enfin, Jamal al-Dura, maigre, montre les cicatrices longues et fines sur son corps : jambe gauche, abdomen, etc. Charles Enderlin explique que « trois médecins jordaniens l’ont soigné ».

Un film à voir absolument sur le blog de Charles Enderlin.

De manière surprenante, Talal Abu Rahma ne s’explique pas, dans ce document audiovisuel, sur les contradictions émaillant ses déclarations successives, les invraisemblances de ses images, etc. Ce témoin, journaliste-cameraman et source constitue pourtant l’élément nodal de l’affaire al-Dura.

Talal Abu Rahma sert la Cause palestinienne

« Qui aurait fait la manipulation ? Le cameraman ? Charles Enderlin ? Pour faire venir un faux malade et le roi de Jordanie dans l’hôpital, il faut…», dit la présidente, exprimant des réserves et du scepticisme dans le ton de sa voix.

« Talal Abu Rahma est responsable », juge Philippe Karsenty. Et il cite Daniel Seaman : « Ces images sont des mises en scène. Talal Abu Rahma est un criminel et France 2 a une attitude criminelle en défendant ces images ».

« Est-ce que vous êtes en train de nous dire : « [Talal] est vendu. [Les cameramen] savent que c’est un faux. Ils se tiennent les coudes » ? », demande la présidente.

Philippe Karsenty évoque Pallywood, l’industrie audiovisuelle de propagande palestinienne, et poursuit : « Talal Abu Rahma a déclaré à un journal marocain avoir choisi le journalisme pour servir la cause palestinienne. Les médias sont les instruments des faibles. Nous, Occidentaux, avons un regard critique et n’avons pas à nous laisser manipuler… Charles Enderlin a reçu ces images en urgence. Il n’a pas du se rendre compte sur le moment. Mais après, quand nous avons apporté les preuves des mises en scène, il aurait du reconnaître son erreur initiale... Rien ne peut empêcher la vérité de prospérer ».

Charles Enderlin tempête : « C’est l’accusation la plus grave contre un journaliste : bidonnage, être responsable d’un faux. Je me serais fait avoir par Talal ! Je lui fais totalement confiance depuis 1988. Jamais France 2 et les autres médias n’ont eu de problème avec Talal qui n’a jamais été mis en cause par Israël (16). La carte de presse israélienne a été retirée à tous les cameramen palestiniens au début de l’Intifadah. Talal Abu Rahma est blanc comme neige ». Or, Guysen a révélé que ce cameraman ne détient pas cette fameuse carte de presse.

« Très vite, il y a eu une controverse sur l’origine des tirs », se souvient la présidente.

« Nous avons diffusé les réactions des autorités israéliennes. Jamais une autorité ne nous a écrit pour nous demander une enquête. Il y a quelques mois, quelqu’un a demandé les rushes. On a proposé un visionnage à l’état-major israélien », révèle Charles Enderlin.

Des parallèles infamants : « Karsenty, c’est le croisement de Faurisson et de Meyssan »

Me Bénédicte Amblard, autre défenseur des intimés, reprend sa plaidoirie traditionnelle afin de démontrer la diffamation à l’égard de Charles Enderlin et discréditer ceux qui contestent sa version de l’incident al-Dura.

« Philippe Karsenty se fonde sur le documentaire de la Metula News Agency (Mena) », dont elle allègue, à tort, avoir obtenu récemment la condamnation (17). A la Mena, elle associe les critiques de la version de Charles Enderlin : Gérard Huber et Luc Rosenzweig.

« Selon la Mena, Mohamed n’est pas mort ! Il suffit de regarder les images ! Nous sommes dans la folie…. La Mena se fonde sur une prétendue enquête de l’armée. C’est faux. Le colonel Yom Tov Samia a pris une initiative personnelle. [Le physicien] Nahum Shahaf et Yossef Uriel [Ndlr : membre pendant peu de temps de la commission d’enquête de Tsahal] ont fait l’objet de critiques. Ce ne sont pas des experts en balistique ». Et de lire un extrait d’un jugement du tribunal de Tel-Aviv (18), « qui a examiné toute l’enquête. Yossef Uriel a été débouté. Ce jugement les stigmatise tous deux. Nahum Shahaf prétend que l’assassin d’Ytzhak Rabin n’est pas le bon assassin ! »

Afin de caractériser l’infraction de diffamation, elle insiste sur l’absence de bonne foi, « l’animosité particulière » de Philippe Karsenty à l’égard de Charles Enderlin : « On va loin et fort. C’est inadmissible… pour un professionnel dont nul n’a contesté le sérieux ». Usant d’effet de manche, elle laisse tomber théâtralement ses papiers pour exprimer son exaspération devant l’accusation de « faussaire » visant son client.

Défenseur de Charles Enderlin « qui fait honneur à sa profession et a été récompensé », Me Francis Szpiner (19) va poursuivre dans cette veine visant à discréditer l’appelant, la graphologue et l’expert israélien.

« Je me garderai de dire [s’il s’agit de] balles israéliennes ou palestiniennes [Ndlr : Charles Enderlin marque sa désapprobation en dodelinant de la tête]. Personne n’en saura jamais rien... Je parle des honnêtes gens », énonce Me Francis Szpiner, qui exclut de cette catégorie Philippe Karsenty, « croisement de Robert Faurisson (20) et de Thierry Meyssan (21) ». Narquois, il évoque « l’immense complot international, une mise en scène qui a continué à la morgue, à l’hôpital à Gaza, à Amman où le roi Abdallah II de Jordanie a été trompé par ses médecins ! »

Dans sa plaidoirie, cet avocat glisse une « définition » du sionisme : « Un Juif qui paie un deuxième Juif pour qu’un troisième Juif aille faire la guerre en Israël ». Lors de ses déambulations, il jette de fréquents regards vers les bancs de la presse et le public, peut-être pour vérifier l’effet de son discours. Sa voix fluette s’enfonce dans les graves pour stigmatiser « les extrémistes qui n’acceptent pas la couverture honnête des évènements de Charles Enderlin ».

Quant à Nahum Shahaf, Me Francis Szpiner fabule sur les conditions de reconstitution de la scène controversée : « Cet expert a utilisé des poupées Barbie. A 99,99%, les poupées Barbie sont blondes. Ce physicien israélien a peint en noir leur visage. Pour certains Israéliens, les Palestiniens sont les Nègres de leur temps ».

Daniel Pearl décapité par des terroristes islamistes avec l’image du petit Mohamed al-Dura incrustée dans la video d’al-Qaïda ? Ben Laden justifiant les attentats du 11 septembre 2001 par la mort de Mohamed al-Dura ? Se targuant de sa fonction de défenseur de l’association SOS-Attentats, Me Francis Szpiner récuse tout lien de cause à effet : « On a voulu faire porter tout cela [à Charles Enderlin] ! C’est scandaleux ! Les terroristes n’ont pas besoin de prétexte pour tuer et n’ont pas un raisonnement intentionnel ».

L’avocat général requiert la confirmation du jugement

D’une voix doucereuse, l’avocat général Antoine Bartoli (22), soucieux de ne pas être long à une heure tardive, requiert la confirmation du jugement condamnant pour diffamation M. Karsenty : « Il y a incontestablement des recherches, mais les sources sont « univoques par rapport à sa thèse », c’est-à-dire abondent dans son sens. Il dénie le bénéfice de la bonne foi.

L’étroit contrôle de l’Autorité palestinienne sur les médias, notamment internationaux

Pour Philippe Karsenty, Me Delphine Meillet souligne l’étroit contrôle des médias par l’Autorité palestinienne (23) - ce dont se plaint Reporters sans frontières (RSF) (24) - et l’engagement politico-journalistique de Talal Abu Rahma en faveur de la Cause palestinienne.

« L’Autorité palestinienne a pris une loi en 1995 qui prévoit une peine de six mois d’emprisonnement pour quiconque critique l’Autorité palestinienne. En plus des pressions exercées par cette Autorité sur les journalistes, pour parfaire le tableau, il y a l’affiliation politique des cameramen palestiniens utilisés par les médias internationaux. Parfois, les médias ne sont pas téméraires, et frisent la collaboration avec le pouvoir en place. Pour beaucoup, la règle est de rester en bons termes avec le pouvoir. C’est le cas de Talal Abu Rahma. Dans certains cas, l’information contrôlée est fabriquée, manipulée, tronquée. Comme l’a écrit Khaled Abu Toameh, journaliste du Jerusalem Post : « On ne sait pas ce qui se passe [dans les territoires de l’Autorité palestinienne] ».

Cette avocate cite les sources diverses, antérieures aux propos poursuivis de Philippe Karsenty, et ayant alimenté sa réflexion : les films de la Mena, d’Esther Schapira, le livre de Gérard Huber Contre-expertise d’une mise en scène (25), la question du député Roland Blum (26)…

« Philippe Karsenty n’est pas un extrémiste. Ses sources ne sont pas univoques : Canal +, un livre non poursuivi par les parties civiles. Philippe Karsenty a commencé à avoir des doutes. Il a mené une investigation. Sans vous [Ndlr : la Cour], il n’aurait jamais pu obtenir les rushes de France 2. Il a fallu sept ans pour les avoir. Pour tout le monde, ces rushes durent 27 minutes. Ceux visionnés durent 18 minutes. Il en manque un peu, [notamment] la scène de l’agonie de Mohamed al-Dura que Charles Enderlin a déclaré au Nouvel Obs ou à Télérama avoir coupée car elle était « insupportable » (27), déduit Me Patrick Maisonneuve.

Il interroge : « L’expert balistique n’est pas un mercenaire de Philippe Karsenty. Il corrobore ses affirmations. Les tirs ne provenaient pas de la position israélienne. Charles Enderlin maintient qu’il s’agit de tirs israéliens [Ndlr : Charles Enderlin approuve de la tête]. Ces images auraient-elles eu de telles conséquences sans son commentaire ? »

Il récapitule les invraisemblances, incohérences et mensonges émaillant l’affaire al-Dura et conclut sur la demande de relaxe de son client.

Enfin, la Laurence Trébucq donne la parole à la défense.

Avec cœur, Philippe Karsenty déclare : « Je suis sincère. J’ai fait une enquête sérieuse. Des gens ont payé de leur vie cette imposture médiatique réalisée par Talal Abu Rahma, commentée par Charles Enderlin et diffusée par France 2. L’histoire jugera ce mensonge (28). Dans cette affaire, il n’y a pas de complot, mais une somme de lâchetés. La plupart des médias se sont fourvoyés. Le rapport balistique prouvant mes affirmations sera bientôt en ligne. Les 18 minutes de rushes de France 2 seront prochainement en ligne sur un site américain. La vérité est plus forte que tout. Elle prévaudra un jour. Je maintiens mes accusations contre France 2 et je les renforce après avoir vu les images qui ont été présentées à la Cour et les explications abracadabrantesques de Charles Enderlin. Je me battrai jusqu’au bout pour faire reconnaître aux autorités françaises le mensonge Al Dura. Je le dois au père de Daniel Pearl (29), Judea Pearl, qui un jour m’a demandé d’obtenir justice au nom de son fils. Je le dois à mes parents qui m’ont élevé dans le respect de la vérité. Je le dois au peuple juif victime de massacres pendant 3000 ans à cause de mensonges comme celui-ci. Je le dois à la France dont des médias et certaines élites se sont fourvoyés pour couvrir ce mensonge inique. Je le dois à l’Histoire ».

L’arrêt sera rendu le 21 mai 2008.


(1) Le 22 novembre 2004. M-R.fr publiait « France 2 : Arlette Chabot et Charles Enderlin doivent être démis de leurs fonctions immédiatement » (http://www.m-r.fr/actualite.php?id=1064), un des deux textes aux passages jugés diffamatoires. Le 19 octobre 2006, Philippe Karsenty a été condamné par la XVIIe chambre du TGI de Paris pour diffamation à une amende de 1 000 euros, à verser à chaque partie civile un euro de dommages intérêts et à la chaîne publique et à son journaliste ensemble 3 000 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale (frais de justice).

(2) Sur RCJ, Richard Prasquier avait poursuivi : ''Ces professionnels doivent enquêter sur les documents primitifs - le master - pour avoir des images de meilleure qualité afin d'éclaircir ce qui s'est passé. Ce qui ne s'est jamais fait auparavant. Ces images de la mort de Mohamed al-Dura, telles qu'elles ont été présentées par Charles Enderlin, annoncées par des chaînes, refusées par CNN, sont très graves. Elles ont tué, car elles ont créé des vocations de terroristes. C'est faux de dire : ''Maintenant, cette affaire, c'est du passé''. Les [images] de France 2 sont extrêmement troublantes. J'ai été très troublé''. (Guysen Internationa News, 15 janvier 2008).

(3) Sur des images filmées par Talal Abu Rahma, Charles Enderlin avait dit lors du reportage diffusé au JT le 30 septembre 2000 : « Près de l’implantation de Netzarim (bande de Gaza)… Jamal et son fils Mohamed (12 ans) sont la cible des tirs venus des positions israéliennes. Son père tente de le protéger... Une nouvelle rafale. Mohamed est mort et son père gravement blessé’’.

(4) Jean-Claude Schlinger est expert en Armes et Munitions près la Cour d’Appel de Paris et agréé par la Cour de Cassation. Son rapport est publié intégralement à http://www.m-r.fr/balistique.pdf.

(5) Le time code est un indicateur temporel affiché sur l’image.

(6) Charles Enderlin se trouvait à Ramallah pendant que Talal Abu Rahma se trouvait au carrefour de Netzarim.

(7) Evacuations par ambulances de Palestiniens simulant des blessures, Palestiniens passant calmement devant le poste militaire israélien, etc.

(8) Esther Schapira a réalisé, pour la chaîne allemande AR, le documentaire Qui a tué Mohamed al Dura ? (2001-2002), disponible en DVD.

(9) Talal Abu Rahma a déclaré le 3 octobre 2000, sous la foi du serment, au Centre palestinien des droits de l’homme : J’ai filmé approximativement 27 minutes de l’incident [al-Dura] qui a duré 45 minutes » (http://www.pchrgaza.org/special/tv2.htm). En septembre 2001, il répond à la réalisatrice Esther Schapira : « J’ai filmé environ six minutes de la scène des al-Dura. Six minutes sur 45 minutes de tirs sur l’enfant ». J’ai fourni six minutes de la scène des al-Doura. J’ai filmé du début des tirs jusqu’à la fin ». Dans les rushes de France 2 visionnés par la Cour d’appel de Paris le 14 novembre 2007, la scène des al-Dura dure moins d’une minute.

(10) Jamal al-Dura se plaint « de balles qui lui ont arraché les muscles et pulvérisé l’os ».

(11) Le 2 mars 2008, Daniel Seaman a déclaré à Guysen Internationa News-Paris : « Charles Enderlin n’a pas respecté le minimum de critères professionnels journalistiques de vérification, avant d’accuser Israël d’avoir tué Mohamed al-Dura. Il y a suffisamment de preuves de sources indépendantes prouvant l’incident al-Dura a été mis en scène pour les caméras. L’Etat d’Israël respecte énormément les médias. De nombreux médias du monde arabe travaillent librement en Israël. Les autoriser à travailler librement en Israël n’implique pas que nous soyons d’accord avec leurs positions. Comme toute démocratie, Israël assure une liberté absolue à la presse et ne retire pas aisément les accréditations de presse aux journalistes. Ceci est particulièrement vrai pour les journalistes travaillant pour la respectée France 2. Charles Enderlin est pleinement conscient de cela et se cache derrière cela pour tenter de distraire l’attention de son manquement professionnel. Le fait que Charles Enderlin dispose toujours de son accréditation presse de l’Etat d’Israël atteste de la force et de la tolérance de la démocratie israélienne, et non de l’intégrité du reportage de Charles Enderlin ce [30 septembre 2000]. La question n’est pas ’’Pourquoi Charles Enderlin a-t-il encore de son accréditif presse de l’Etat d’Israël ?’’, mais plutôt pourquoi France 2 l’emploie-t-elle encore ?»

(12) Idem

(13) Ce livre a été publié par Flammarion en 2001. Entretien exclusif avec Charles Enderlin par Elisabeth Schemla, 1er octobre 2002, à http://www.debriefing.org/25726.html

(14) Un Palestinien tire avec son arme à feu au travers d’un trou comme s’il s’était engagé dans un échange de tirs avec des soldats israéliens. Les images antérieures montrent la mise en scène : entouré de Palestiniens nonchalants, ce Palestinien tire dans… une pièce vide. Un Palestinien déambule calmement devant le poste israélien sans crainte d’être touché par des tirs, etc.

(15) Ce 27 février 2008, des médias anglo-saxons, français, arabes et israéliens sont représentés. Peu de médias français ont publié des comptes-rendus de l’audience instructive de visionnage des rushes de France 2. http://www.m-r.fr/danslesmedias.php?id=65 et http://www.debriefing.org/index0.php?sectionid=143

(16) Après avoir rappelé les rétentions d’informations, notamment des Palestiniens, le colonel Shlomi Am-Shalom, porte-parole adjoint de Tsahal, écrit le 10 septembre 2007 : « Nous sommes bien conscients des tentatives de mises en scène médiatisées et comme un doute s’est insinué à cet égard envers le dit reportage » à http://www.m-r.fr/page1.htm

(17) Nicolas Ciarapica, directeur de publication des sites Internet Blogdei/Bethel, a mis en ligne le 24 février 2006 la 2e partie de l’article Le grand ras-le-bol des Français juifs écrit par Stéphane Juffa, rédacteur en chef de la Mena, dont des passages ont été jugés diffamatoires par la XVIIe chambre du TGI de Paris. Ce protestant évangélique ami d'Israël a été condamné le 12 février 2008 pour diffamation raciale à l'égard de Charles Enderlin à une amende de 1 000 euros avec sursis et à verser un euro de dommage et intérêt et 1 000 euros au titre des frais de justice à Charles Enderlin. Il devra publier le jugement sur ces sites pendant deux mois.
Véronique Chemla, Charles Enderlin poursuit un chrétien ami d’Israël dans l’affaire al-Dura

(18) « Aaron Hauptman publia, le 12 novembre 2000, dans le courrier des lecteurs du quotidien Haaretz, une violente critique contre les théories formulées de façon indépendante par Yossef Duriel. Celui-ci assigna Aaron Hauptman en justice pour diffamation à son égard. Le tribunal de Tel-Aviv relaxa Aaron Hauptman. Il qualifia l’enquête de Yossef Duriel de « non professionnelle et non objective ». « Le travail de la commission d’enquête de Tsahal relative à l’Affaire al-Dura n’a pas été envisagé » par ce tribunal. Yossef Duriel interjeta appel et la Cour du district de Tel-Aviv a fait droit à sa demande et a récemment réformé le jugement de première instance. (Sources : Mena, Enderlin à nouveau pris par la Ména en flag de contrevérité, 19 juin 2006, et Guysen International News).

(19) Me Francis Szpiner est aussi l’avocat de la famille d’Ilan Halimi (z’’l), kidnappé, torturé et tué en février 2006 par le gang des Barbares dont le chef est Youssef Fofana.

(20) Robert Faurisson nie l’existence des chambres à gaz des camps nazis d’extermination lors de la Seconde Guerre mondiale et la Shoah. Il a été condamné par la justice pour contestation de crimes contre l’humanité. Le 4 juillet 2007, la Cour d’appel de Paris a confirmé sa condamnation pour avoir tenu des propos négationnistes en février 2005 sur la chaîne iranienne Sahar 1.

(21) Dans son livre 11 septembre 2001 : L’effroyable imposture (2002), Thierry Meyssan nie que deux avions se soient écrasés sur les Twin Towers (New York) et qu’un avion sur le Pentagone dans le cadre d’un attentat terroriste islamiste. Il diffuse une théorie du complot américain.

(22) Antoine Bartoli s’était prononcé contre la communication des rushes par France 2 et Charles Enderlin. Véronique Chemla, La Cour d’appel de Paris demande à France 2 les rushes sur l’incident al-Dura

(23) Le 12 octobre 2000, Yossi Avrahami (z’’l) et Vadim Nurzhitz (z’’l), deux soldats israéliens, qui s’étaient égarés à Ramallah, ont été sauvagement tués dans un commissariat de Ramallah (Cisjordanie) et leurs dépouilles mutilées par une foule palestinienne voulant venger la mort de Mohamed al-Dura.

(24) Une équipe de la chaîne de télévision italienne Retequattro (Mediaset) a filmé ces faits. Ses images ont été diffusées dans le monde, suscitant l’horreur devant cette barbarie. L’Autorité palestinienne a été mécontente de cette mauvaise image donnée d’elle. Par crainte de représailles, « toutes les télévisions italiennes présentes à Jérusalem, Gaza et la Cisjordanie, ont plié bagage. A l'origine de ce branle-bas de combat : les images exclusives du lynchage des soldats israéliens à Ramallah, tournées par une équipe de Retequattro (Mediaset), et la lettre de Riccardo Cristiano, l'un des deux correspondants de la RAI à Jérusalem, adressée à l'Autorité palestinienne. Dans celle-ci, le journaliste, s'adressant à ses “chers amis de Palestine” indiquait à propos des images de Ramallah. « C'est une chaîne privée italienne en concurrence avec nous (et non la chaîne de télévision officielle italienne) qui a filmé les événements. Par la suite, la télévision israélienne a transmis les images en les attribuant à une chaîne italienne, créant ainsi l'impression dans le public qu'il s'agissait de la RAI. Je veux souligner auprès de vous que ce n'est pas le cas parce que nous, nous avons toujours respecté (et continuerons de le faire) les procédures journalistiques prévues par l'Autorité nationale palestinienne pour le travail en Palestine et nous, nous sommes crédibles dans notre travail ». Craignant des représailles contre les journalistes, notamment Anna Migotto, auteur des images de Ramallah, Mediaset sonne le rappel de ses équipes (ce genre de document rend les Palestiniens furieux : non seulement il donne une mauvaise image d'eux, mais permet aux Israéliens d'identifier les coupables). Au siège de la RAI, on jure ne pas être au courant de la lettre de Cristiano, lequel est aussitôt convoqué à Rome. La télévision publique assure que le comportement du journaliste “est étranger à la manière dont la Rai conçoit le rôle de l'information” mais repousse les accusations de délation ». Eric Jozsef, L'Italie replie ses caméras, Libération, 21-22 octobre 2000

« Depuis le début de la deuxième Intifada, une grande partie de la presse [de l’Autorité palestinienne] s’est mise au service de la cause palestinienne. Après les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis, l’Autorité palestinienne, de crainte de voir son image ternie, a multiplié les pressions sur les journalistes pour les empêcher de couvrir des mouvements de soutien à Oussama ben Laden ». RSF, Rapport annuel 2002 - Censure et autocensure : des journalistes toujours sous la botte des dictateurs au Maghreb et au Moyen-Orient

(25) Gérard Huber. Contre-expertise d’une mise en scène. Editions Raphaël. Paris, 2003. 242 pages. ISBN : 2-87781-066-6
Interview de Gérard Huber par Véronique Chemla

(26) A l'Assemblée nationale (Paris), Roland Blum, député (UMP), a déposé le 8 novembre 2004 une question écrite à Renaud Donnedieu de Vabres, alors ministre de la Communication, '' relative à des images ... dont l'authenticité ainsi que l'interprétation sont contestées. Il s'agit du reportage, fait par un reporter palestinien de [France 2], qui se serait ensuite rétracté, et du correspondant permanent de la chaîne en Israël, censé montrer l'assassinat d'un enfant palestinien par des militaires israéliens, sous le regard du père ». M. Blum lui demande de « bien vouloir lui préciser si les faits qui ont été rapportés par la chaîne publique sont exacts, et dans le cas contraire, de lui faire connaître les résultats de l'enquête qu'il n'aura pas manquée de prescrire ''. Guysen International News, 21 novembre 2004.

(27) Charles Enderlin a déclaré à Télérama : « J'ai coupé l'agonie de l'enfant. C'était insupportable... Cela n'aurait rien apporté de plus ».

(28) La mort de Mohamed al-Dura tué par des tirs israéliens.

(29) Le journalise juif américain Daniel Pearl (z’’l) a été égorgé avec sur le fond de l’image de la vidéo de son exécution, celle de Mohamed al-Dura.


Visuels de haut en bas :
Les al-Dura

L’entrée de la 11e chambre de la Cour d’appel de Paris.

Arlette Chabot

Philippe Karsenty

Bande de Gaza
Carrefour de Netzarim

Croquis de Charles Enderlin avec des emplacements erronés et à côté plan des lieux

Jamal al-Dura hospitalisé

Mohamed déclaré mort par Charles Enderlin et en train de soulever son coude et ses jambes et de regarder la caméra.

Photo du journaliste juif américain Daniel Pearl égorgé par des terroristes islamistes, avec des images des "al-Dura": © DR

Les grilles du jardin du Luxembourg lors de l’exposition Objectif Une : un demi-siècle vu par L’Express (2004). La légende du cliché des al-Dura, indiquait en français, anglais et espagnol : « 30 septembre 2000. Jamal al-Dura et son fils Mohamed, âgé de 12 ans, se protègent des balles israéliennes. L’enfant sera tué ». Des passants ont supprimé les mots « israéliennes, tué ». Des barrières métalliques ont été mises pour protéger le texte. L’autre photo représente l’un des assassins barbares de deux soldats réservistes israéliens, Yosef Avrahami and Vadim Norzhich, qui s’étaient égarés le 12 octobre 2000, et elle est ainsi légendée : « Un Palestinien montre ses mains trempées dans le sang de deux soldats israéliens lynchés dans un poste de police à Ramallah, en Cisjordanie ».

France 2 diffusa le 31 mars 2015, à 23 h 40, Au nom du Templedocumentaire de Charles Enderlin.

A lire sur ce blog :
Cet article a été publié sur ce blog le 5 octobre 2010, puis le 30 mars 2015.

1 commentaire:

  1. La difficulté pour la chaîne France 2 c'est que étant un établissement ayant une mission de service public, son hypothétique et éventuel repentir auait pour conséquence la co-responsabilité de la France en tant qu'Etat dans cette manipulation de l'information et surtout pour les évènements qui ont suivi. On peut imaginer le poids d'un éventuel repentir sur les épaules de Mr Pflimlin, comme il devait y en avoir sur celles de Mr de Carolis. Parce que si la vérité triomphe, qui devra finalement rendre des comptes si ce n'est in fine l'Etat Français de par sa "possession" de France Television?

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