dimanche 16 juillet 2023

Paul Dessau (1894-1979)

Paul Dessau (1894-1979) était un  compositeur -  opéras, pièces scéniques, musique de scène pour Bertolt Brecht, ballets, symphonies, pièces pour instruments solistes, musique de films dès le cinéma muet... - et chef d'orchestre juif, sioniste, allemand et engagé (pacifiste, communiste). Arte a déprogrammé la diffusion le 17 juillet 2023 à 00 h 05 « Le compositeur Paul Dessau » d’Anne-Kathrin Peitz.

Paul Dessau (1894-1979)
Saleem Ashkar
Daniel Barenboim  
« Requiem pour la vie », de Doug Schulz

Paul Dessau (1894-1979) était un  compositeur et chef d'orchestre juif allemand et engagé à gauche. 

Il était à Hambourg dans une famille artistique. Son grand-père, Moses Berend Dessau, et son arrière-grand père étaient chantre (cantor) à la synagogue de Hambourg. Un de ses oncles était violoniste de l'orchestre de l'Opéra de Berlin. Un de ses cousins Max Winterfeld est auteur d'opérettes sous le nom de Jean Gilbert.

Il apprend le violon dès l'âge de six ans, et se produit en public à l'âge de dix ans.

Dès 1909, Paul Dessau se spécialise en violon et étudie avec Florian Zajic au Conservatoire Klindworth-Scharwenka de Berlin. En 1912, il devient répétiteur au Stadttheater Hamburg, théâtre municipal. Il a étudié le travail de chefs d'orchestre, Felix Weingartner et Arthur Nikisch, et a eu pour professeur de composition Max Julius Loewengard. Il a été second Kapellmeister au Théâtre Tivoli de Brême en 1914, puis s'est engagé en 1915 durant la Première Guerre mondiale. Il reçoit la Croix de Fer. Il nourrit des convictions pacifistes.

Après ce conflit, il est chef d'orchestre au Kammerspiele de Hambourg, puis répétiteur, ensuite maître de chapelle à l' Opéra de Cologne sous la direction d' Otto Klemperer (1919-1923). En 1923, il devient maître de chapelle au Staatstheater Mainz et à partir de 1925 premier maître de chapelle au Städtische Oper Berlin sous Bruno Walter. 

Parmi les films dont il a signé la musique : Alice the Fire Fighter (Alice und ihre Feuerwehr) (21.8.1928), Alice's Monkey Business (Alice und die Flöhe) (25.9.1928), Alice in the Wooly West (Alice und die Wildwest-Banditen) (18.10.1928) et Alice Helps the Romance (Alice und der Selbstmörder) (31.1.1929) de Walt Disney, Schmutziges Geld de Richard Eichberg (1928), Das Lockende Ziel de Max Reichmann (1930)...

Il compose la musique de l'hymne liturgique Adon olam, pour chantre ténor, chœur mixte, vents, contrebasse, percussions et orgue (1927), et met en musique le Psaume 5 (1927) et le Psaume 3 (1930).

En 1933, il fuit l'Allemagne nazie pour la France. Il compose l'oratorio Hagadah shel Pessach d'après un livret de Max Brod - une oeuvre créée en 1994 à Hambourg -, et la musique de films de Max Ophüls (Yoshiwara, 1937), et Detlef Sierck, connu à Hollywood sous le nom de Douglas Sirk, ainsi que d'un film réalisé en Palestine mandataire par le photographe et cinéaste suisse Helmar Lerski Avoda (1935). Citons aussi dans sa filmographie : Tarass Boulba d'Alexis Granowsky (1936), Le Chemin de Rio de Robert Siodmak (1937), Le Grand Élan de Christian-Jaque (1939). 

Le musicologue émigré juif allemand Hans Nathan sollicite divers compositeurs, dont Paul Dessau, Darius Milhaud, Arthur Honegger, Stefan Wolpe, Aaron Copland, Ernst Toch, Erich Walter Sternberg, Lazare Saminsky, Frederick Jacobi et Kurt Weill, pour créer des arrangements de chants liés au sionisme. Cette compilation est connue sous divers titres : Folk Songs of the New Palestine, Musique folklorique israélienne : Chansons des premiers pionniers, et a été publiée à titre posthume dans la série Recherches récentes sur les traditions orales de la musique (AR Editions, Middletown, Wisconsin, 1994). Paul Dessau est l'auteur des arrangements des chansons Alei giv'a sham begalil (Au sommet d'une colline en Galilée), Hine a ḥ al'la ba ḥ alil (Lo, I Play Upon My ḥ alil [flûte]), V'ulai (Peut-être), Ali b'er (montez, mon puits), Al s'fat yam kinneret (Sur les rives du [lac] Kinneret), et Gamal, gamali (chameau, mon chameau). Son arrangement d' Al s'fat yam kinneret a également été publié avec Shirat ro'e (Chant du berger) à Zagreb, en Yougoslavie, en 1937 sous le nom de Zwei Palästinensische Volkslieder (Edition Omanut).

En 1936, Paul Dessau rencontre le compositeur et pédagogue français René Leibowitz, qui l'initie aux techniques sérielles et, notamment, à la musique d' Arnold Schoenberg.

Paul Dessau entre au Parti communiste et, sous le pseudonyme de Peter Daniel, a écrit des chansons pour la Brigade internationale durant la Guerre d'Espagne, notamment sa chanson de marche, Die Thälmannkolonne, sur un texte de sa première épouse, Gudrun Kabisch.

En 1939, Paul Dessau se fixe aux Etats-Unis. A New York, il survit difficilement en exerçant divers métiers : copiste de partitions, enseignant dans un orphelinat, compositeur de musique de film, ouvrier dans un élevage de poulets du New Jersey. Il compose la musique pour la synagogue et écrit des arrangements de chansons hébraïques. Il est membre du conseil d'administration de l'éphémère Jewish Music Forum-Society for the Advancement of Jewish Music Culture, organisation dissidente d' Abraham Wolf Binder de MAILAMM, devenue le Jewish Music Forum. Dans un numéro de la revue The Jewish Music Forum Bulletin, il a publié un article analysant le Kol Nidre d'Arnold Schoenberg d'un point de vue judaïque et musical.

En 1943, sur l'encouragement de Bertolt Brecht, il s'installe à Los Angeles, et pour Hollywood il compose la musique de films - La Femme en vert (The Woman in Green) de Roy William Neill et The Strange Affair of Uncle Harry de Robert Siodmak (1945), L'Amant sans visage (Nora Prentiss) de Vincent Sherman (1947) -, parfois sans en être crédité (Le Procès Paradine (The Paradine Case) d'Alfred Hitchcock, 1947), ou écrit les arrangements de la musique.

En 1946, il adhère au Parti communiste américain.

Vers 1947, il compose la musique d'un autre film que Lerski a fait en Palestine mandataire, Adama (Tomorrow Is a Wonderful Day).

Avec sa deuxième épouse, la femme de lettres Elisabeth Hauptmann, il s'installe en 1948 à Berlin-Est, en RDA (République démocratique d'Allemagne) sous l'orbite de l'Union soviétique. Il compose pour les pièces mises en scène par Bertolt Brecht : Mère courage, le Cercle de craie caucasien, Die Verurteilung des Lukullus (Le procès de Lucullus (1949-1951)...

Le Parti communiste est-allemand a qualifié le style de certaines oeuvres de « formaliste et étranger au peuple ».

Dès 1952, il enseigne à la Staatliche Schauspielschule (École nationale d'art dramatique) de Berlin-Oberschöneweide où il est enseigne en 1959. En 1952, il est membre de la GDR Akademie der Künste,  qu'il préside (1957-1962). Parmi ses élèves : Friedrich Goldmann, Reiner Bredemeyer, Jörg Herchet, Hans-Karsten Raecke, Friedrich Schenker, Luca Lombardi et Karl Ottomar Treibmann.

Parmi ses oeuvres : In memoriam Bertolt Brecht, Requiem pour Lumumba, Lénine, Lancelot, Einstein.

En 1965, Paul Dessau est distingué par l'Ordre du mérite patriotique, en 1969 par l'Ordre de Karl Marx et en 1979 par un doctorat honorifique de l'Université de Leipzig.

Son style avant-gardiste a évolué du romantisme, au dodécaphonisme, aux style folk, liturgique, puis "populaire" acceptable par le communisme. 

« Le compositeur Paul Dessau »
Arte diffusera le 17 juillet 2023 à 00 h 05 « Le compositeur Paul Dessau  », documentaire d’Anne-Kathrin Peitz.

« Portrait du compositeur allemand Paul Dessau, qui a fui aux États-Unis dans les années 1930, puis a choisi de s'installer à Berlin-Est à la fin de la guerre. »

« Né en Allemagne au sein d'une famille juive, Paul Dessau étudie le violon avant de se tourner vers la direction d'orchestre. »

« Après la Première Guerre mondiale, le jeune musicien commence à diriger ses propres oeuvres, composées pour le cinéma muet. »

« Il fuit le nazisme dès 1933, se réfugiant en France puis aux États-Unis, où des collaborations avec les studios hollywoodiens lui permettent de rencontrer Bertolt Brecht. Les deux hommes nouent dès lors une relation artistique et amicale durable. »

« En 1948, Paul Dessau décide de rentrer dans son pays natal et choisit Berlin-Est, où il ne tardera pas à prendre sa carte au Parti. »

« Entre traumatismes de la Seconde Guerre mondiale, exils et idéalisme, portrait d'un artiste dont le parcours conte à lui seul l'histoire de l'Allemagne du XXe siècle. »


« Le compositeur Paul Dessau » d’Anne-Kathrin Peitz
Allemagne, 2022, 53 min
Sur Arte le 17 juillet 2023 à 00 h 05
Sur arte.tv du 16/07/2023 au 13/10/2023
Visuels :
© Evelyn Richter Archiv der Ostdeutschen Sparkassenstiftung im Museum der bildenden Künste Leipzig
© Alamy Stock Photo
© Peter Richter

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