lundi 31 août 2020

« 315, la donation de Constantin » de Denis van Waerebeke


Arte diffusera le 6 septembre 2020, dans la série « Quand l'histoire fait date » (Zahlen schreiben Geschichte), « 315, la donation de Constantin » (315, Konstantinische Schenkung) de Denis van Waerebeke. « 315 est la date supposée de l’apparition du plus célèbre, ou du moins du plus influent des textes du Moyen Âge : la donation de Constantin ».
      
« -33 - Crucifixion de Jésus » par Denis van Waerebeke 
« 315, la donation de Constantin » de Denis van Waerebeke 
« 24 septembre 622 : l'an 1 de l'islam » par Denis van Waerebeke 
« 1492 : un nouveau monde » par Denis van Waerebeke 
Le Vatican

Nommé au Collège de France en 2015, Patrick Boucheron dirige l’« Histoire mondiale de France » (Seuil, 2017) présentant "les nouvelles grandes dates mondiales qui ont façonné l’hexagone", "mettant en valeur les colonisés et l’islam" et assumant une "islamophilie systématique". Un anti-« Lieux de mémoire » du professeur Pierre Nora.

Un best-seller analysé dans « Histoire de l'islamisation française 1979-2019 » (Ed. L’Artilleur), controversé, critiqué notamment par Pierre Nora (« Politiquement, l’objectif est de lutter, « par une conception pluraliste de l’histoire, contre l’étrécissement identitaire qui domine aujourd’hui le débat public »).

Et fustigé par Eric Zemmour : « En près de 800 pages et 146 dates, on ne déviera pas de la ligne du parti: tout ce qui vient de l’étranger est bon. Les invasions barbares sont des « migrations germanique s» ; la défaite des Gaulois leur permit d’entrer dans la mondialisation romaine ; les conquérants arabes étaient bien plus brillants que les minables défenseurs carolingiens ; les martyrs chrétiens de Lyon venaient d’ailleurs et saint Martin était hongrois. Les théologiens chrétiens doivent tout au grand talmudiste Rachi ; « l’honteux traité de Troyes » de 1420 (qui donnait le royaume de France à la monarchie anglaise) est une heureuse tentative de construire la paix perpétuelle par l’union des couronnes ».


Quant à Alain Finkielkraut, il a estimé : 
« Je découvre, effaré, que ni Rabelais, ni Ronsard, ni La Fontaine, ni Racine, ni Molière, ni Baudelaire, ni Verlaine, ni Proust n’y figurent. Et si Mauriac est cité, ce n’est pas pour son œuvre, c’est pour sa critique honteusement réactionnaire du féminisme. Ainsi s’éclaire le sens de « monde » pour les nouveaux historiens. Mondialiser l’histoire de France, c’est dissoudre ce qu’elle a de spécifique, son identité, son génie propre, dans le grand bain de la mixité, de la diversité, de la mobilité et du métissage. Et c’est répondre au défi islamiste par l’affirmation de notre dette envers l’Islam. De manière générale, l’Histoire mondiale de la France remplace l’identité par l’endettement. Ici doit tout à ailleurs. De la France, patrie littéraire, ce qui surnage, c’est la traduction des Mille et Une Nuits par Antoine Galland et l’audace qui a été la sienne d’ajouter au corpus original des histoires que lui avait racontées un voyageur arabe venu d’Alep.
Instructif aussi est le récit de l’invasion musulmane de 719 à Narbonne, où les cultures se sont mêlées avant que les Francs, hélas, n’arriment par la force cette ville à leur royaume. Ceux qui, en revanche, croient pouvoir mettre au crédit de la France naissante la première traduction latine du Coran par l’abbé de Cluny Pierre le Vénérable en 1143, sont avertis que cette démarche n’était pas inspirée par la curiosité mais par une volonté de dénigrement. Et peu importe le fait que l’Islam de son côté ne pouvait pas même envisager de traduire les Écritures saintes des religions antérieures à son avènement.
Nos éminents universitaires n’ont que l’Autre à la bouche et sous la plume. Ouverture est leur maître mot. Mais ils frappent d’inexistence Cioran, Ionesco, Kundera, Levinas, tous ces étrangers qui ont enrichi notre philosophie et honoré notre littérature. Car c’est à ce «notre» qu’ils veulent faire rendre l’âme...
Le dégoût de l’identité a fait place nette de la culture. Les façonniers de l’Histoire mondiale de la France sont les fossoyeurs du grand héritage français.
« Une histoire libre », dit le journal Libération pour qualifier ce bréviaire de la bien-pensance et de la soumission, cette chronique tout entière asservie aux dogmes du politiquement correct qui ne consacre pas moins de quatorze articles aux intellectuels sans jamais mentionner Raymond Aron, ni Castoriadis, ni Claude Lefort, ni aucun de ceux qui ont médité la catastrophe totalitaire et la bêtise de l’intelligence au XXe siècle…
« Histoire jubilatoire », ajoute Libération. Ce mot – le plus insupportablement bête de la doxa contemporaine – convient particulièrement mal pour une histoire acharnée à priver la France de son rayonnement et à l’amputer de ses merveilles.
Il n’y a pas de civilisation française, la France n’est rien de spécifiquement français: c’est par cette bonne nouvelle que les rédacteurs de ce qui voudrait être le Lavisse du XXIe siècle entendent apaiser la société et contribuer à résoudre la crise du vivre-ensemble.
Quelle misère! »
« Dans cette deuxième saison de la série" « Quand l'histoire fait date », "aussi érudite et ludique que la précédente, le médiéviste Patrick Boucheron, professeur au Collège de France, poursuit son exploration alerte des dates marquantes de l’histoire, des trésors artistiques ornant la grotte de Lascaux, en 18 000 avant notre ère, au coup d’État militaire contre le président chilien Salvador Allende, le 11 septembre 1973 ». 

« Mobilisant son talent de conteur, associé à une animation qui s’appuie sur une riche iconographie, et convoquant éclairages de spécialistes et approche réflexive, l’historien bouscule notre regard sur vingt événements majeurs et les traces qu’ils ont laissées dans les mémoires, en les replaçant dans une perspective globale et en assumant les incertitudes de la science historique ». 

« Entrelaçant plaisir du récit, techniques d’animation et esprit critique, Patrick Boucheron dévoile vingt nouvelles enquêtes sur les grandes dates qui ont marqué l’histoire et la mémoire des hommes ».

Constantin et le christianisme
En 306, Constantin Ier (272?-337) est proclamé 34e empereur romain par les légions de l'actuelle Grande-Bretagne. C'est le premier empereur romain chrétien : il s'est converti en 312 ou 326 et est baptisé sur son lit de mort - . En 330, il crée Constantinople (actuelle Istanbul), « Nouvelle Rome », nouvelle capitale de l'Empire à la place de Rome. Économiquement, il instaure une monnaie stable (le solidus, 312), développe l'administration centrale, défend les frontières de l'Empire contre les Francs, les Alamans, les Sarmates, les Goths et les Sassanides. 

Par l'édit de Milan (313) - une lettre circulaire -, les co-empereurs Constantin Ier et Licinius, païen régnant essentiellement sur la partie orientale de l'empire romain, autorisent la liberté de culte pour toutes les religions, notamment pour le paganisme, reconnaissent le christianisme comme religion légale et mettent un terme aux persécutions des chrétiens, qui représentent alors environ un dixième de la population de l'empire romain. Si l'édit de Sardique (311) leur conférait la liberté de culte de facto, l'édit de Milan la leur accorde de jureEn 325, durant le premier concile de Nicée, l'empereur Constantin Ier impose l'unité des Eglises d'Orient divisées, et son autorité dans la sphère religieuse (césaropapisme). Durant ce concile, est établi avec précision, en latin, le Credo du christianisme. 

L'empereur Constantin adopte des mesures favorables au christianisme : il érige le dimanche, jour du soleil païen (dies solis), en jour de repos légal, il reconnaît les tribunaux épiscopaux aux côtés des tribunaux civils, il édifie des églises ou des basiliques, telles la basilique Saint-Jean-de-Latran (Rome), la basilique Saint-Pierre (Vatican), la basilique Sainte-Sophie (Constantinople) ou l'église du Saint-Sépulcre (Jérusalem), tout en diffusant une monnaie frappées d'images païennes et glorifie le dieu Soleil. Il conserve le titre de grand pontife (pontifex maximus), qui lui donne autorité sur les cultes publics païens.


Par l'édit de Thessalonique (380), le christianisme devient l'Église d'État de l'Empire romain. Empereur romain (361-363), Flavius Claudius Julianus (331 ou 332-363), Julien II, ou Julien l'Apostat par la tradition chrétienne, également appelé Julien le Philosophe, a tenté de rétablir le polythéisme. Les empereurs chrétiens ont persécuté les Juifs, et réduit leurs droits.



« Censé organiser un transfert de pouvoir entre Constantin, l’empereur romain, et le pape Sylvestre, l’évêque de Rome", la Donatio Constantini (donation de Constantin) "est cet acte qui va légitimer le pouvoir temporel des papes, mais aussi faire de la papauté une puissance territoriale ». 

Selon cette "donation", « la ville de Rome est cédée au pape, ainsi que toutes les régions occidentales de l’empire de Constantin ». 

L'enjeu ? "Justifier ou condamner la construction des Etats de l'Eglise et la théocratie pontificale"

« Mais son éblouissante réfutation par l'humaniste Lorenzo Valla en 1440, révèle sa vraie nature : il s'agit du plus grand faux document de l'histoire de l'Occident », vraisemblablement élaboré au VIIIe siècle.

Les premiers doutes sont exprimés dès le début du XIe siècle. Mais en 1439-1440, Lorenzo Valla, un prêtre catholique et un humaniste de la Renaissance italien, a prouvé le caractère faux de cette "donation" en recourant, pour la première fois, à la philologie, notamment au registre lexical.

« Le temps retrouvé »
(Arte mag n° 36. Le programme du 29 août au 4 septembre 2020)

« Pour sa deuxième saison, Quand l’histoire fait dates offre une exploration audacieuse de grands événements et de leurs représentations. Entretien avec son concepteur, l’historien Patrick Boucheron. Propos recueillis par Benoît Hervieu-Léger ».

« Quels critères ont guidé votre approche pour ces vingt nouveaux épisodes ?
Patrick Boucheron : Nous avons radicalisé notre proposition initiale ! Depuis sa conception, la série interroge les diverses manières de faire événement.
Elle propose une collection de problèmes davantage que de périodes. Nous avons, cette fois-ci, voulu aller plus loin en retenant des dates dont on cherche l’événement, comme l’an mil. Nous avons joué sur le contre-factuel * dans l’épisode sur la mise à sac du palais d’été de Pékin en 1860. Nous avons même poussé l’audace jusqu’à dater un événement qui n’a pas eu lieu. Au IVe siècle, l’empereur Constantin est censé avoir donné la moitié de son empire au pape. Le texte de la donation est un faux. Le non-événement a pris une importance que l’événement réel n’aurait pas eue.

La représentation de l’histoire compterait donc plus que l’histoire elle-même ?
Une date a l’apparence de l’évidence, comme Marignan en 1515.
Or derrière chaque date il y a une petite intrigue aussi captivante à explorer que le récit en soi. C’est pourquoi la série inclut deux fils narratifs : le récit que l’on raconte et nous-mêmes en train de le raconter. Cette approche se lit en particulier dans l’épisode sur la révolution religieuse d’Akhenaton, en Égypte ancienne. À la fin de sa vie, Freud, miné par la maladie et l’exil, a voulu en percer le mystère pour expliquer la montée du nazisme et de l’antisémitisme à son époque. La solution aux énigmes du présent se trouve parfois dans le passé.
L’histoire de l’esclavage et de la colonisation resurgit depuis l’affaire George Floyd.

Un épisode aurait-il pu faire écho à ce présent si enraciné dans le passé ?
La question de la justice et de l’égalité, aiguisée par la crise sanitaire, est abordée avec la Déclaration d’indépendance des États-Unis, en 1776. Ce moment marque la première affirmation des droits universels de l’humain dans un pays dont on sait qu’il détruit les nations indiennes et qu’il deviendra esclavagiste. La “question noire”, déjà traitée dans la première saison avec la libération de Mandela, revient maintenant avec le pèlerinage du roi malien Mansa Moussa en 1324.
Nous aurions certes pu aborder plus frontalement la question de la décolonisation. Elle apparaît malgré tout dans l’épisode sur le massacre des Algériens, à Paris le 17 octobre 1961. L’événement pose clairement la question du racisme, de la violence policière et du legs colonial en France.

* Type de raisonnement qui consiste à imaginer l’issue nouvelle d’un événement historique, après avoir modifié l’une de ses causes. »


« 315, la donation de Constantin » de Denis van Waerebeke
France, 2019, 27 min
Sur Arte le 6 septembre 2020 à 16 h 10
Disponible du 30/08/2020 au 04/11/2020
Visuels : © Les Films d'ici

Les citations sur le film proviennent d'Arte.

« La fabrique du film allemand. L’UFA fête ses 100 ans » par Sigrid Faltin


Arte rediffusera le 3 septembre 2020 « La fabrique du film allemand. L’UFA fête ses 100 ans » (100 Jahre UFA. Im Maschinenraum des deutschen Films) par Sigrid Faltin. « Créée en 1917, l’UFA (Universum Film AG) a changé cinq fois d’étendard en cent ans, en passant de la République de Weimar au régime nazi puis à l’ère Adenauer, fondateur de l'Allemagne contemporaine. Depuis ses studios de Babelsberg, ce paquebot cinématographique s’est imposé comme le miroir de l’Allemagne ».

Firme centenaire, l’UFA (Universum Film AG) « est une société de production cinématographique dont le parcours tumultueux fera écho aux nombreux bouleversements de l’histoire allemande. Les trois lettres UFA sont synonymes de cinéma allemand.

Fondée en 1917 sous le nom de BUFA (Bild-und Filmamt) « dans un but de propagande par les militaires de l’empire allemand finissant », pour contrer, en interne et à l’international, la propagande des Alliés, l’UFA s’intègre dans une guerre psychologique. C’est une société associant comme principaux actionnaires l’Etat allemand, la Deutsche Bank.

Après 1918, sous l’impulsion de la Deutsche Bank, l’UFA produit notamment, vers le grand public, les comédies d’Ernst Lubitsch.

Privatisée en 1921, l’UFA bénéficie en 1922 de nouveaux studios, à Babelsberg

Au fil des années, lors des décennies de son apogée (années 1920 et 1930), elle rachète d’autres compagnies.

Elle promeut au rang de stars mondiales Emil Jannings, Pola Negri, Conrad Veidt et Lya de Putti. Et emploie de prestigieux réalisateurs du cinéma muet : Fritz Lang, Ernst Lubitsch, Joe May, Friedrich Wilhelm Murnau, Georg Wilhelm Pabst, Otto Rippert, Arthur Robison, Wilhelm Thiele…

En 1927, l’UFA connait des difficultés : certains de ces réalisateurs émigrent à Hollywood, les films américains s’affirment en rivaux séduisant une part croissante du public allemand, l’UFA affronte des problèmes sur les marchés étrangers, le budget de Metropolis de Fritz Lang enfle. 

Sous la férule d’Alfred Hugenberg et du directeur général Ernst Hugo Correl, l’UFA aborde avec succès l’ère du parlant : accord avec la Tobis-Klangfilm, sortie de L’Ange bleu, etc.

Sous le régime nazi, l’UFA est nationalisée par Joseph Goebbels, ministre du Reich à l’Éducation du peuple et à la Propagande, qui la protège par des mesures protectionnistes. Hugenberg est évincé. A partir du 29 mars 1933, 26 professionnels juifs sont contraints de quitter leurs fonctions.

En mars 1937, Hugenberg est obligé de vendre ses parts à la Cautio Treuhand GmbH, société dont le gouvernement nazi est actionnaire. Refusant d’adhérer au NSDAP (Parti national-socialiste des travailleurs allemands, Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei), Ernst Hugo Correll est viré.

« Organisme d’État » étroitement contrôlé par Goebbels, l’UFA distribue en 1940 La Belle Diplomate (Frauen sind doch bessere Diplomaten), de Georg Jacoby, premier film allemand en couleurs. Un échec commercial.

En 1940, l’UFA fonde sa filiale française, la Continental Films.

De 1942 à 1944, s’effectue la nationalisation de l’UFA, des autres sociétés de production cinématographique, et de ses filiales.

En 1945, dans le cadre de la dénazification, les Alliés dissolvent l’UFA. Ce qu’enregistre le Bundestag en 1953.

L’Armée rouge s’emparent des studios de Berlin et de Babelsberg de la UFA. Là, sera tourné Les assassins sont parmi nous, premier film produit en Allemagne après le conflit.

En 1956, sont reconstituées la Bavaria Film et la UFA, dont la Deutsche Bank devient un actionnaire majeur. Deux ans plus tard, sort Une gamine précoce (Stefanie), de Josef von Báky avec Sabine Sinjen. C’est le premier film de fiction produit.

En 1964, Bertelsmann achète des unités de production de l’UFA. Sous son impulsion, l’UFA s’orient vers la production de téléfilms et documentaires, la diffusion de matchs.

Le Gouvernement allemand institue le Friedrich-Wilhelm-Murnau-Stiftung pour préserver l’oeuvre de Friedrich Wilhelm Murnau et d’initier la restauration de ses films.

En 1969, cesse la production cinématographique de l’UFA.

En 2013, l’UFA est réorganisée en trois départements : UFA Fiction, UFA Serial Drama, UFA Show & Facutal

L’UFA  « a changé cinq fois d’étendard en cent ans, en passant de la République de Weimar au régime nazi puis à l’ère Adenauer, fondateur de l'Allemagne contemporaine. Depuis ses studios de Babelsberg , ce paquebot cinématographique s’est imposé comme le miroir de l’Allemagne ». 

Ce « paquebot du septième art a dû changer cinq fois de pavillon au cours de son histoire : le Kaiser, la République de Weimar, le nazisme, l’ère Adenauer et, finalement, la télévision commerciale. Qui ont été les capitaines, les caps qu’ils ont suivis, les intrigues et les conflits derrière les nuits dansantes enfiévrées ? » 

« Société de production qui aura connu des fortunes diverses au fil des années, l’UFA a tout produit : du cinéma visionnaire à la propagande la plus nauséabonde. La liste des films tournés dans ses studios est le miroir de l’histoire allemande de la première moitié du XXe siècle ». 

« Dans l’entre-deux-guerres, l’UFA a produit de nombreux chefs-d'œuvre et révélé des maîtres comme Ernst Lubitsch, Fritz Lang, Friedrich Wilhelm Murnau et Douglas Sirk. « Qui tirait les ficelles, quelles luttes de pouvoirs se jouaient en coulisses ? » 

Le « centenaire de ces studios mythiques est l’occasion d’un retour en images – illustré d’extraits de films cultes ou oubliés, mais aussi d’interviews d’historiens et de professionnels du septième art – sur l’histoire d’un empire disparu sous les bombes et ressuscité partiellement de ses cendres en RDA » (République démocratique allemande) sous orbite soviétique.

Pour célébrer ce centenaire, ARTE propose dès le 28 août 2017, et jusqu’en décembre 2017, un « florilège de films, depuis l’époque du cinéma muet jusqu’à au-jourd’hui : 20 longs métrages en version restaurée tout récemment par la Fondation Murnau (Les aventures fantastiques du Baron Münchhausen, On a arrêté Sherlock Holmes, L’ange bleu …), deux documentaires inédits (100 ans de l’UFA, la fabrique du cinéma allemand et Quand Hitler faisait son cinéma), et un Court-Circuit spécial, avec les plus grandes signatures comme Georg Wilhelm Pabst, Friedrich Wilhelm Murnau, ou Josef von Sternberg ou Robert Siodmak. Un bon nombre d’étoiles du cinéma d’antan qui atteste de la diversité de la production cinématographique de ce demi-siècle. Tous les genres seront à l’honneur : films à costumes et comédies loufoques, policiers et mélodrames, Kulturfilme, cinéma muet et films de propagande ».

Parmi ces films : Les Films interdits du 3e Reich de Felix Moeller, diffusé le 4 décembre 2017 à 0 h 15, Quand Hitler faisait son cinéma, de Rüdiger Suchsland, programmé le 11 décembre 2017 à 0 h 15, Paramatta, bagne des femmes, de Detlef Sierck, devenu à Hollywood Douglas Sirk.

« Sur internet, ARTE s’arrête sur les grands événements, expositions et conférences organisés pour les 100 ans de l’UFA, et proposera une retransmission en direct des Nuits du cinéma de l’UFA qui sont organisées par Bertelsmann et la UFA et auront lieu sur l’Île des musées à Berlin en août 2017 ».

Sorte de making of de l’UFA, ce documentaire « La fabrique du film allemand. L’UFA fête ses 100 ans » retrace l’histoire de la plus grande et la plus ancienne société de production allemande ». 

L’UFA « est un double miroir de l’histoire allemande : la vie des studios en est le reflet, et bien sûr aussi les films qu’elle a produits. L’histoire allemande est le cadre du film, le fil rouge en est la recherche de son ADN ».


58 Min.
Sur Arte les 28 août 2017 à 22 h 45 et 3 septembre à 00 h 35
Disponible du 02/09/2020 au 08/09/2020

A lire sur ce blog :
Articles in English
Les citations sont d'Arte. Cet article a été publié le 26 août 2017.

dimanche 30 août 2020

« Violences sexuelles dans le sport, l'enquête » de Pierre-Emmanuel Luneau-Daurignac


Arte diffusera le 1er septembre 2020 « Violences sexuelles dans le sport, l'enquête » (Kindesmissbrauch im Spitzensport) de Pierre-Emmanuel Luneau-Daurignac. « Menée pendant deux ans à travers cinq pays, une enquête inédite qui démontre que les violences sexuelles dans le sport ne sont pas le résultat de dérapages ponctuels, mais révélatrices des dérives de tout un système. »

« La victoire des bleus » par Serge Viallet 
#MeToo 
« Violences sexuelles dans le sport, l'enquête » de Pierre-Emmanuel Luneau-Daurignac



"Catherine Moyon de Baecque était championne de France de lancer de marteau. Elle est la première athlète de haut niveau en 1991 à avoir brisé la loi du silence. Elle porte plainte contre ses coéquipiers de l'équipe de France d'athlétisme. Ils participeront aux JO de Barcelone en 1992. Un an plus tard, ils sont condamnés à des peines de prison avec sursis pour agressions sexuelles. "J'ai été terriblement marquée, perturbée et ma vie a été complètement brisée. Mes études ont été stoppées, ma carrière sportive également", confiait l'ex-lanceuse en 1997." Un combat éprouvant, précoce, juste, exemplaire, victorieux, dont la victoire a eu un coût élevé pour la sportive et la jeune femme innocente.

"Tout a été fait pour m'empêcher de parler. J'ai subi des pressions, des humiliations, des intimidations, des menaces, jusqu'à des menaces de mort. Une situation d'autant plus injuste que la justice a condamné les agresseurs, qu'elle a également relevé la responsabilité de l'Etat dans l'affaire. Le milieu du sport aurait dû s'engouffrer dans la brèche. Mais tout l'inverse s'est produit. Je peux vous confier, et les mots sont lourds de sens, que j'ai beaucoup, beaucoup plus souffert de la manière dont j'ai été maltraitée pendant toutes ces années que des violences sexuelles aggravées dont je fus la victime... Les coupables sont tous ceux, hommes et femmes, qui ont eu des responsabilités au plus haut niveau. Certains ministres ont aggravé ma situation, certaines femmes ont été pires que certains hommes... Un rapport de l'Inspection générale de la jeunesse et des sports, rédigé avant le procès (NDLR : qui a eu lieu en 1993) et dont je n'aurais jamais dû avoir connaissance, a conclu que rien de grave ne s'était passé. Que nous étions mythomanes et nymphomanes", a confié Catherine Moyon de Baecque au Parisien (12 février 2020). 

"Quinze ans plus tard, Isabelle Demongeot, championne de France de tennis, décide elle aussi de briser l'omerta et accuse son entraîneur de viols à répétition de 1980 à 1989. Elle va porter plainte contre Régis de Camaret. Le coach est accusé par une vingtaine d'autres femmes. Pour deux d'entre elles, les faits ne sont pas prescrits. Il est condamné en appel à 10 ans de prison en 1994. mais l'affaire Demongeot a fait bouger les choses à la fédération (FFT) : suivi psychologique des jeunes sportifs, sensibilisation, distribution de guides... La mise en place d'un outil de signalement des dérives directement sur le web est étudiée".

« Les révélations d'agressions sexuelles se multiplient dans le sport » depuis fin 2019. 

« En France, le témoignage de l’ancienne patineuse Sarah Abitbol, violée par son entraîneur alors qu’elle était mineure, a mis le feu aux poudres et libéré la parole pour des centaines d’athlètes ». 

« Un phénomène mondial : chaque semaine ou presque, de nouvelles affaires font la une des médias aux États-Unis, en Angleterre, en Espagne, en Allemagne, au Brésil, en Corée du Sud… » 

« Car le sport – amateur ou professionnel, collectif ou individuel – accumule les facteurs qui facilitent les abus d'adultes sur des mineurs : soumission à l’autorité, culture de l’endurance et de la souffrance, surreprésentation masculine, culte du corps, emprise psychologique, éloignement des parents, rêve de gloire et de fortune, enjeux financiers… » 

« Aujourd’hui, toutes les études concordent : fille ou garçon, un sportif sur sept subirait des agressions sexuelles ou des viols avant ses 18 ans ». 

« En s'appuyant sur de nombreux témoignages, sans aucun sensationnalisme, ce documentaire dévoile les mécanismes qui favorisent le crime, dans un milieu où continue de régner l'omerta ».

« L’origine de l'enquête remonte à l’affaire Larry Nassar, qui a éclaté à l’automne 2016 aux États-Unis. Ce soigneur de l’équipe olympique de gymnastique est accusé par plus de 300 jeunes femmes d’agressions sexuelles, puis condamné et enfermé pour le restant de ces jours ». Parmi elles : Aly Raisman, triple championne olympique et ayant allumé la flamme des Maccabiades 2013 à Jérusalem (Israël), et Simone Biles, quadruple championne olympique de gymnastique.

« À la même époque, le Royaume-Uni vit lui aussi un scandale national, avec les révélations des abus commis sur des milliers de jeunes footballeurs, des clubs amateurs à ceux de Premiere League ». 

« Pierre-Emmanuel Luneau-Daurignac commence par rencontrer Paul Stewart. Joueur star de Manchester City et Tottenham, il fut l'un des premiers à oser révéler les viols qu’il a endurés entre ses 10 et ses 14 ans. Son récit permet de comprendre comment la compétition entre enfants et leur rêve de réussite donne tout pouvoir sur eux à l’entraîneur. Il met également en évidence les stratégies d’emprise déployées par les encadrants sportifs sur l’enfant et ses parents ». Paul Stewart a compris que ses addictions à la drogue et à l'alcool le mèneraient au suicide, et a entrepris une thérapie pour se sevrer. Il intervient auprès d’entraîneurs et d'enfants ou d'adolescents durant leur formation sportive pour veiller à les alerter sur ce fléau.

« L'enquête se poursuit en Espagne avec le portrait de Gloria Viseras. Cette ancienne championne de gymnastique, compétitrice olympique en 1980, a révélé avoir été violée par son entraîneur, Jesús Carballo, dès l’âge de 12 ans – une affaire qui a ému et déchiré le pays. Celle qui a tu son histoire pendant trente-six ans explique pourquoi elle ne pouvait pas briser le silence. »

« Aux États-Unis, le film dévoile ensuite les dérives sidérantes d’une fédération sportive, USA Swimming. À l’aide de documents, de témoignages et d’enregistrements inédits, il met au jour la stratégie sophistiquée déployée par sa direction pour étouffer les affaires d’abus sexuels et empêcher les victimes d’obtenir réparation. USA Swimming a protégé ses entraîneurs au mépris de témoignages accablants, et n'a pas hésité à bloquer une loi visant à étendre le délai d’action en justice pour les mineurs victimes de violences sexuelles ». Au Sénat, elle s'est alliée avec l'Eglise catholique pour refuser l'allongement du délai accordé aux victimes pour poursuivre en justice les pédocriminels. Et la proposition de loi n'a pas été approuvée par crainte du montant élevé des sommes à payer aux victimes au titre de dommages et intérêts.

Car les conséquences familiales au sein des familles sont tragiques : sentiment de culpabilité de parents, suicides, etc.

« En France, on découvre enfin le parcours de deux jeunes femmes abusées par une star du moto-cross, Michel Mérel, aujourd’hui sous les barreaux pour viols sur deux de ses élèves, dont une mineure. Il avait bénéficié de la protection non seulement de sa fédération, mais aussi de fonctionnaires du ministère des Sports appartenant à celle-ci ». Fonctionnaires, ces contrôleurs des services techniques (CST) travaillaient pour le ministère au sein de fédérations sportives. Souvent anciens champions, ils n'ont jamais dénoncé, en violation de la loi pénale, les agressions sexuelles ou viols dont se plaignaient auprès d'eux des jeunes sportives.

« Pierre-Emmanuel Luneau-Daurignac révèle ainsi les défaillances de l’État face aux abus ».

« Alors que la ministre actuelle, Roxana Maracineanu, appelle à "plus d’État dans le sport", le Comité international olympique, lui, ne semble toujours pas avoir pris la mesure du scandale. Malgré les milliards à sa disposition, son action s'est limitée jusqu'ici à des recommandations polies adressées aux fédérations sportives ».


« Abus de pouvoir »
(Arte mag n° 36, programme du 29 août au 4 septembre 2020


« De plus en plus d’affaires de violences sexuelles éclaboussent le monde sportif. Dans une enquête alarmante, Pierre-Emmanuel Luneau-Daurignac décrypte les mécanismes qui broient tant d’athlètes. Propos recueillis par Pascal Mouneyres ».

« Pourquoi assiste-t-on actuellement à autant de révélations sur les abus sexuels dans le sport ? 
Pierre-Emmanue Luneau-Daurignac : Les mentalités ont changé. Dans le monde occidental, le patriarcat est remis en cause et les violences sur les enfants, de plus en plus dénoncées. Le mouvement #MeToo a certainement délié les langues, même si beaucoup de victimes sont des hommes. Mais il y a aussi une question de génération. Ceux qui, dans les années 1980, ont été abusés ont aujourd’hui une cinquantaine d’années. Ils sont parents, et leurs enfants ont le même âge qu’eux lorsqu’ils ont subi ces violences.
Certains aussi attendent que leurs propres parents décèdent pour parler, car ils ne veulent pas leur faire de mal. Autant de facteurs qui peuvent aider à libérer la parole et à en affronter les conséquences. Car raconter, c’est vivre à nouveau...

Ces violences ne sont-elles pas consubstantielles à la pratique du sport en club, régie par un rapport de domination entre l’entraîneur et le jeune ?
Le sport d’aujourd’hui est une machine à abuser du sportif. Selon une étude de 2015, 14 % des mineurs inscrits en club ont été agressés sexuellement. Si l’on veut changer quoi que ce soit, il faut prendre conscience des mécanismes qui favorisent ces dérives : une sacralisation de la personne de l’entraîneur, une trop grande proximité entre adultes et enfants, la réification du corps, la déresponsabilisation des parents, la mercantilisation des sportifs, ces pions auxquels on fait cracher les performances avant de les jeter, la puissance, aussi, des fédérations. Les agressions sexuelles participent des autres violences infligées à l’athlète – physiques, émotionnelles, psychologiques –, sans parler de l’homophobie et du racisme.

Le sport de haut niveau n’exacerbe-t-il pas les tentations ?
Un sportif de haut niveau sur trois serait victime d’abus. Je connais de nombreux cas chez les champions dont je respecte, bien entendu, le silence. Ce qui favorise les rapports de domination et les abus de pouvoir, c’est que l’athlète n’a pas le choix : s’il parle, il sait que sa carrière sera terminée. L’entraîneur ou le dirigeant a conscience d’avoir du pouvoir et peut donc être plus facilement tenté de passer à l’acte, même s’il est important d’affirmer que ce n’est pas un problème de pédophilie. L’enjeu n’est pas d’éliminer les brebis galeuses mais de réformer le système qui les engendre. Les fédérations peuvent perdre le sens des réalités, mais lorsqu’elles font prendre trop de risques aux enfants, ou lorsqu’ils sont maltraités, c’est à l’État d’agir. Il n’est pas acceptable qu’il ne se donne pas les moyens de les protéger. »


« Violences sexuelles dans le sport, l'enquête » de Pierre-Emmanuel Luneau-Daurignac
France, 2020, 91 min
Sur Arte le 1 septembre 2020 à 20 h 50
Disponible du 25/08/2020 au 30/10/2020

Visuels :
Jeune joueur de football assis sur le banc de touche regardant son équipe jouer
© iStockphoto

Gloria Viseras, gymnaste espagnole, a été abusée dès l' âge de 12 ans par son entraîneur Jesùs Carballo
Stewart, jeune joueur de football a été abusé par son entraîneur
© YUZU Productions


Les citations sur le film proviennent d'Arte.

samedi 29 août 2020

« Les quatre sœurs » par Claude Lanzmann


La série documentaire « Les quatre sœurs » (Vier Schwestern ; The Four Sisters), réalisée par Claude Lanzmann est disponible sur Arte jusqu'au 31 août 2020. « Au fil d’une tétralogie bouleversante », l’écrivain et cinéaste français juif « dévoile les récits de survie de quatre femmes » juives - la tchécoslovaque Ruth Elias, les polonaises Ada Lichtman et Paula Biren, la Hongroise Hanna Marton – « réchappées de la destruction nazie, qu’il avait longuement interviewées pour « Shoah ». Des témoignages en hébreu, en yiddish et en anglais écoutés par un Claude Lanzmann au regard épaté, tendre, ému. 

« Comme Le dernier des injustes, Sobibor, 14 octobre 1943, 16 heures (2001) ou Le rapport Karski (2010), Les quatre sœurs puisent leur origine dans l’enquête monumentale entreprise par Claude Lanzmann pour la réalisation de Shoah. Plus de trois décennies après la sortie de cette œuvre majeure, le cinéaste a exhumé les déchirants récits de survie de quatre rescapées » - la tchécoslovaque Ruth Elias, les polonaises Ada Lichtman et Paula Biren, la Hongroise Hanna Marton -, « auxquelles il consacre une magnifique tétralogie ». Les deux derniers témoignages sont inédits.

« Par-delà leurs singularités, qui éclairent des chapitres méconnus de l’extermination des Juifs, ces quatre femmes extraordinaires renaissent ici unies dans une relation sororale tissée d’intelligence tranchante, de courage inouï, de poignantes pudeur et dignité ». Après la Deuxième Guerre mondiale, toutes quatre ont fait leur aliyah.

« Au fil des mots et des silences, que Claude Lanzmann sait si bien provoquer et respecter, la caméra effleure délicatement leurs visages pour saisir une larme ou un éclair d’effroi ». 

« Le cinéma, dans son dénuement le plus pur, nous les rend alors si présentes que ces quatre sœurs à la vie à la mort continuent, longtemps après l’écran noir, à habiter nos mémoires et nos cœurs ».


« Paula Biren, Ruth Elias, Ada Lichtman, Hanna Marton, quatre noms et prénoms de femmes juives, témoins et survivantes de la plus folle et de la plus impitoyable barbarie, et qui, pour cette seule raison, mais beaucoup d’autres encore, méritent d’être inscrites à tout jamais dans la mémoire des hommes. Ce qu’elles ont en commun, outre l’horreur spécifique dont chacune a été l’objet, c’est l’intelligence, une intelligence tranchante, aiguë, charnelle, qui récuse tous les faux-semblants, les mauvaises raisons, en un mot l’idéalisme. Filmées par Claude Lanzmann pendant la préparation de ce qui deviendra Shoah, chacune de ces quatre femmes extraordinaires méritait un film en soi, prenant la mesure de leur trempe exceptionnelle, et révélant par leur récit saisissant quatre chapitres mal connus de l’extermination ».

Parmi le matériau filmé par Claude Lanzmann pendant douze années de tournage, on imagine les autres témoignages bouleversants que des survivants de la Shoah lui ont confiés.


Cette série documentaire de Claude Lanzmann a été présentée à la Viennale, festival international du film de Vienne (Autriche) en 2017 et au New York Film Festival (NYFF).

Le serment d'Hippocrate, Ruth Elias
En 1939, Ruth Elias « a 17 ans lorsque les Allemands envahissent la Tchécoslovaquie. Réfugiée à la campagne sous une fausse identité, sa famille est dénoncée et déportée à Theresienstadt en avril 1942 ». Née dans une famille juive bourgeois de commerçants-industriels parlant tchèque, Ruth Elias avait fréquenté une école élémentaire juive dans sa ville natale célèbre pour le charbon. Dès l'invasion allemande, la famille de Ruth est spoliée de l'entreprise familiale, de son grand appartement.

Ruth « y retrouve son petit ami et s’y marie, tandis que ses proches reprennent un train vers les ténèbres ».  Elle "commence à avoir faim". Ce qu'elle n'avais pas ressenti dans "la vie douce" antérieure à la guerre. Son père avait la tuberculose, et respirait difficilement à Theresienstadt. Un rabbin récite la prière du mariage unissant Ruth et son petit ami. Une nouvelle qui bouleverse le père de Ruth : il pleure. C'est cette image qui se grave à jamais dans la mémoire de Ruth Elias. Au point d'effacer celle du bel homme, intelligent et malin qu'il fut. Un jour, un gendarme tchèque lui remet une carte postale de son père lui indiquant être arrivé à Auschwitz, l'assassinat de son épouse car elle ne voulait pas le quitter. Ruth Elias ne parvient pas à comprendre cette réalité tragique qu'il lui relatait.

"Tout d'abord, on perd sa personnalité, puis on se dit "Pourquoi je vis ?" Quand votre esprit meurt, vous êtes mort", résume Ruth Elias guidée alors par son instinct la guidant vers la nourriture "pour survivre, reprendre des forces". Son instinct vital lui sauve à plusieurs reprises la vie en lui inspirant des initiatives audacieuses. Un jour, un dénommé Schneider la désigne pour travailler dans la cuisine, pour porter de lourds chaudrons car il l'a entendue chanter et jouer de l'accordéon.

En 1943, Ruth Elias parvient à rencontrer plus souvent son mari, à vivre parfois avec lui de brefs moment dans une chambre. Elle ne peut pas se faire avorter car les Allemands nazis ont interdit aux médecins de pratiquer des avortements.

« Pendant l’hiver 1943, elle est à son tour transportée à Auschwitz, dans le camp des familles tchèques" où les déportés sont contraints de faire des tâches insensées. "Quelque temps plus tard, alors que ses compatriotes sont menés à la chambre à gaz, la jeune femme, enceinte de huit mois, est miraculeusement sélectionnée pour partir à Hambourg déblayer les gravats d’une raffinerie bombardée ». 

« Sa grossesse découverte, les nazis la renvoient à Auschwitz, où elle tombe dans les griffes du docteur Mengele. Ce dernier lui permet d’accoucher, mais lui interdit de nourrir son bébé. Une nuit, une kapo, médecin, lui procure une seringue de morphine pour endormir son enfant à jamais ».

La « parole limpide, le regard pénétré d’une lumineuse vivacité, Ruth Elias décrit, entre deux airs mélancoliques d’accordéon, l’instinct vital qui l’a habitée, de Theresienstadt à Auschwitz, jusqu’à la mort de son bébé affamé sur sa poitrine bandée ».

De retour en Tchécoslovaquie, Ruth Elias se retrouve seule. Toute sa famille a été décimée. Les "13 frères et sœurs de son père sont morts, et tous leurs enfants aussi. Seule une tante vivait en Palestine" mandataire. Ruth Elias fait une dépression et est amenée dans un sanatorium, sans volonté de vivre. En 1949, elle fait son aliyah. Elle considère comme sa mère, le médecin qui lui a insufflé la volonté de survivre dans le camp nazi et lui a donné la dose de morphine pour mettre un terme aux souffrances de sa fille bébé : la Dr Maza Blaiah a fui la Tchécoslovaquie en 1968 pour Israël. Ruth Elias a eu deux garçons nés en Israël. Quand elle a accouché de son premier fils, une infirmière a pris l'enfant pour lui prodiguer divers soins. Ruth Elias a alors crié et pleuré : "N'emmenez-pas mon enfant ! Vous allez le tuer !" Elle raconte son histoire à un médecin qui ordonne que son bébé lui soit rendu. "On s'est enfermé dans notre silence. Personne ne pouvait nous comprendre. Je suis très heureuse ici, en Israël. C'est ma maison. Je suis une Israélienne fière de son pays. Je l'adore. Je ne me sens en sécurité qu'en Israël. C'est mon pays. Personne ne nous a aidés : six millions de personnes ont disparu. Mais aujourd'hui, on a notre pays. On se battra", conclut Ruth Elias, avec force, confiance et assurance. 

Le 20 octobre 2019, à 11 h, le mémorial du Mont-Valérien, Haut lieu de la mémoire nationale, en partenariat avec le cinéma de la Ville de Suresnes, Le Capitole, a projeté le film sur Ruth Elias.

La Puce joyeuse, Ada Lichtman
Ada Lichtman « est happée dans un tourbillon d’atrocités au premier jour de l’invasion de la Pologne, lorsque tous les hommes juifs de Wieliczka, une petite ville proche de Cracovie, dont son père, sont rassemblés et abattus dans une forêt voisine par les Allemands.  Les corps encore couverts de sang furent alors disposés en demi-cercle, pieds joints et têtes vers l’extérieur comme une représentation artistique de la part des bourreaux ». Des paysans volent les objets précieux des morts. Ceux-ci sont enterrés dans une fosse commune. Ada observe la période de deuil, dénommée Shiv'ah ou Chiva, puis se rend à Cracovie.

La « jeune femme est déplacée à Mielec avec son mari, qui est bientôt expédié au travail forcé et exécuté ». Son mariage a duré environ un an et demi. Le Judenrat s'est emparé des avoirs précieux et de la nourriture des Juifs pour la donner aux Nazis contre la promesse de laisser vivre ses coreligionnaires. Certains Polonais chrétiens frappaient des Juifs, les volaient...

« Après avoir assisté à l’incendie volontaire de l’église de la ville, dans laquelle les nazis ont enfermé des centaines de Juifs, Ada est emmenée à Sobibor, où elle fait partie des trois seules survivantes de son convoi ». 

Au camp d’extermination de Sobibor, dernière étape de son voyage, où plus de 250.000 Juifs furent exterminés dans les chambres à gaz, « affectée au nettoyage de « La Puce joyeuse », la ferme des officiers directeurs du camp, la jeune femme y confectionne des vêtements pour les poupées, pillées, des enfants juifs, que les nazis rapportent en permission. Jusqu’à la révolte du 14 octobre 1943. Elle fait partie des 50 personnes qui ont survécu ».

« Assise au côté de son mari – dont la souffrance, si elle avait un visage humain, serait le sien –, la Polonaise Ada Lichtman détaille, sans ciller et en cajolant des poupées, la litanie d’horreurs qui l’a conduite à Sobibor, pourchassée par cette terrifiante pensée : non pas « Vais-je survivre ? » mais « Comment allais-je mourir ? » Arrivé en mai 1942 au camp de Sobibor, son mari était cordonnier à Sobibor. Sa famille a été décimée.

Baluty, Paula Biren
« Il existe encore nombre d’archives, de journaux intimes et même quelques photos du ghetto de Łódź, mais très peu de témoignages de survivants. Celui de Paula Biren est d’autant plus exceptionnel qu’elle fit partie de la force de police féminine du ghetto à l’époque. Son œil acéré et son intelligence affûtée donnent encore plus d’intensité à son récit ».

« Des centaines de ghettos qui parsèment la campagne polonaise, celui de Lodz fut le plus pérenne. Alors âgée de 17 ans, Paula Biren assiste à la transformation d’un bidonville de Lodz, Baluty, en ghetto administré d’ une main de fer par par l'homme d'affaires juif polonais Chaim Mordechai Rumkowski,  appelé le « Roi Chaim » ». 

 « À la tête d’une parodie d’État juif, le président du Conseil des anciens est pourtant convaincu qu’il peut sauver une partie de la communauté en l’érigeant en main-d’œuvre pour les Allemands ». 

Paula Biren « sort diplômée de l’école qu’il a mise sur pied, où elle a travaillé à l’installation d’une ferme. Employée dans une usine de confection d’imperméables allemands, la jeune femme rejoint ensuite les rangs de la police féminine – depuis un bureau ». 

« À l’heure terrible de la liquidation du ghetto, elle refuse de se mêler au transport réservé aux étudiants de Rumkowski. Tandis que ce dernier prend la direction de Theresienstadt, Paula suit sa famille à Auschwitz ».

« Toute d’élégance et de résistance, cramponnée à la résolution de ne parler qu’en son nom, Paula Biren raconte sa trajectoire de « privilégiée » dans le ghetto de Lodz et la honte qui l’a longtemps muselée ».

L'arche de Noé, Hanna Marton
Hanna Marton « a étudié à Cluj, ville de Transylvanie rebaptisée Kolozsvar lorsque les Hongrois l’ont reprise en 1940. En juin 1942, son mari fait partie des 60 000 Juifs envoyés comme chair à canon sur le front de l’Est.  « Notre destin, maintenant, est scellé par les Allemands », lui affirme-t-il à son retour ».

« Quelques mois plus tard, en mars 1944, la Wehrmacht prend Kolozsvar et emprisonne, en un temps éclair, la population juive dans un ghetto ».

« En 1944, quand les nazis commencèrent à déporter les Juifs de Hongrie, Rudolf Kastner, qui présidait le comité de sauvetage, commença à négocier avec Eichmann une somme de deux mille dollars par Juif, montant les prix jusqu’à ce que Eichmann préfère l’argent à la mort. Il fut conclu qu’un transport spécial quitterait Budapest pour Bergen-Belsen, puis de Bergen-Belsen vers la Suisse ». 

« Alors que les premiers trains sont affrétés dans la foulée, Hanna apprend par son mari qu’ils ont été inscrits sur la liste d’un transport spécial. Ce convoi de 1 684 Juifs devait échapper à une mort certaine grâce aux tractations financières menées depuis Budapest par le président du Comité de sauvetage, Rudolf Kastner, avec l’Obersturmbannführer Adolf Eichmann. Hanna Marton fit partie de ce transport. Arrivés par cette « arche de Noé » au camp de Bergen-Belsen le 9 juillet 1944, Hanna, son mari et leurs compatriotes franchissent la frontière suisse en décembre de la même année ».

« Au même moment 450 000 Juifs hongrois mouraient dans les chambres à gaz de Birkenau ou brûlaient vifs à l’air libre pour satisfaire la cadence imposée par les nazis ».

La « douce Hanna Marton, veuve depuis peu, qui se réfugie dans le journal d’époque de son mari comme pour retrouver ses bras aimés, confie l’inapaisable culpabilité d’avoir été sauvée par la vénalité d’Eichmann ».

Unesco

Dans le cadre de la Journée internationale de commémoration de l'Holocauste 2018, le premier volet intitulé Le serment d’Hippocrate – Ruth Elias a été projeté à l'UNESCO le 22 janvier 2018 en présence de Claude Lanzmann et a été suivi du discours d'Audrey Azoulay, directrice générale de l'UNESCO, et les quatre volets ont été diffusés par Arte les 23 et 30 janvier 2018. 

Mémorial du Mont-Valérien

"Le 20 octobre 2019, à 11 h, le mémorial du Mont-Valérien, Haut lieu de la mémoire nationale, en partenariat avec le cinéma de la Ville de Suresnes, Le Capitole, proposa de venir découvrir l'une des œuvres du cinéaste de la mémoire et de l'Histoire, Claude Lanzmann. Au travers d'une journée thématique qui abordera les différents pans de la politique répressive menée par l'occupant allemand, le mémorial du Mont-Valérien propose de découvrir dans un premier temps, le témoignage bouleversant de Ruth Elias dans le premier volet du film "Les Quatre sœurs" dans "Le Serment d'Hippocrate". 

"11h -  13h30 : Le Serment d'Hippocrate, de Claude Lanzmann – projection-débat

En 1985, le génocide des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale se révèle au travers du film Shoah de Claude Lanzmann. Avec plus de 350 heures de film, le réalisateur monta les rushs non-utilisés pour Shoah dans cinq autres films. L'un d'eux, les Quatre Sœurs, présente le témoignage de quatre survivantes de la Shoah. Ruth Elias, dans le serment d'Hippocrate, raconte son histoire. Tchécoslovaque, elle vit cachée dans une ferme jusqu'en 1942.  Dénoncée, elle fut déportée au camp de Theresienstadt puis à Auschwitz. Enceinte, elle travailla à dégager les gravats dans une raffinerie bombardée à Hambourg. C’est le film que nous vous proposons de découvrir le dimanche 20 octobre en présence de Laura Koeppel, assistante réalisatrice de Claude Lanzmann et de la responsable pédagogique du mémorial du Mont-Valérien."

"Dans un second temps, le public sera invité à découvrir le mémorial du Mont-Valérien, principal lieu d'exécution par l'armée allemande de résistants condamnés à morts et d'otages en France pendant la Seconde Guerre mondiale." 


"15h – 16h30 : visite guidée du mémorial du Mont-Valérien

Entre mars 1941 et août 1944, 1009 hommes sont fusillés dans la clairière du Mont-Valérien. Résistants condamnés à morts ou otages, juifs et/ou communistes, ces parcours incarnent les politiques répressives de l’occupant allemand sur le territoire français. Sur ce lieu, en 1960, le général de Gaulle inaugure le mémorial de la France combattante, où reposent seize Morts pour la France, dans un hommage pour l’ensemble des combats de la Seconde Guerre mondiale. A l'intérieur, la flamme de la Déportation symbolise cet autre pan des politiques répressives."


Propos recueillis par Serge Toubiana

« Entre le moment où j’ai interrogé ces femmes et la réalisation des Quatre Sœurs, plus de trente-cinq ans se sont écoulés. C’est après l’inauguration d’une librairie française à Amsterdam, il y a quelques années, que j’ai pris conscience, grâce aux questions qui m’ont été posées, que je ne cherchais pas à faire un film en collectant la matière qui constituerait Shoah : je tournais encore et encore parce qu’il me fallait accumuler des trésors. Pour ce qui deviendrait Le Dernier des injustes, par exemple, j’ai filmé Benjamin Murmelstein, le dernier président du Conseil juif du ghetto de Theresienstadt, pendant une semaine entière, matin, après-midi et soir. Il fallait être fou, personne ne pouvait produire un tel documentaire ! J’ai mis longtemps à réaliser que j’étais tellement fasciné par ce que je découvrais, ce que j’apprenais, et que c’était ce qui comptait : accumuler des témoignages. Ce que je ferais plus tard de ces trésors s’avérait complètement secondaire.
S’ils ne figurent pas dans Shoah, c’est parce qu’ils exigeaient un film à part entière. Il n’y avait pas d’autre solution. Quand je me suis replongé dans les récits de ces femmes, tout est redevenu immédiatement très vivant, présent. »
Savoir et mémoire
« Lorsque Ruth Elias parle de la première déportation des Juifs tchèques de sa ville natale, Moraska Ostrava, je mentionne Nisko, leur destination. ‘Vous êtes très bien renseigné’, me dit-elle alors. Personne ne connaissait Nisko, sauf moi, et cela a beaucoup aidé. Il fallait que j’en sache le plus possible pour être à la hauteur de leur destin, de leur propre savoir, et pour être capable de les interroger, de les amener à parler. Quand elles ont vu que je connaissais bien l’histoire de l’extermination du peuple Juif, cela a rendu les choses plus importantes, plus faciles, plus intimes. Une fraternité très forte se dégageait de nos rapports.
Elles m’ont appris énormément. Ruth a répondu aux questions que je ne cessais de me poser sur le sort du deuxième convoi des Juifs du camp des familles tchèques d’Auschwitz. De son côté, Hanna Marton m’a renseigné sur l’histoire du convoi de Juifs de Hongrie épargné en échange d’argent, au terme d’une négociation entre Rudolf Kastner, le président du Comité de sauvetage, et l’Obersturmbannführer Adolf Eichmann. »
Résurrection
« Je pleure chaque fois que je regarde ces films. Hanna me bouleverse particulièrement, et j’éprouve une adoration pour Ruth et son accordéon. Ada Lichtman, qui fabrique des poupées, est également très émouvante, avec, à ses côtés, son mari, également rescapé, au visage d’homme intérieurement massacré. Quant à Paula Biren, je l’ai rencontrée lors d’un colloque à New York. Elle m’a beaucoup plu parce qu’elle était extrêmement intelligente. Une profonde unité réunit ces femmes, sans liens de parenté. D’où ce titre en référence aux Trois sœurs de Tchekhov. Quand j’ai interrogé chacune d’elles, ce n’était pas une exploration, mais une véritable incarnation. Tout redevenait vrai et personnifié. Ces femmes portent en elles leur histoire et celle de l’extermination du peuple Juif.
Le cinéma peut tout. Avec peu de choses, il parvient à ressusciter complètement ce qu’il s’est passé. Je suis très fier de cette série, que je considère comme centrale dans tout ce que j’ai réalisé sur la Shoah .»

D'Arnaud Desplechin à Claude Lanzmann (Extraits)

« Après le visionnage des Quatre Sœurs, le cinéaste a écrit à son aîné une longue lettre pour lui exprimer son admiration et son émotion. Extrait de cette missive, à retrouver en intégralité dans le livret du coffret DVD ».

« Il y a un paradoxe vertigineux entre l’apparente simplicité, ou frontalité de ces quatre portraits, qui vient me désarmer, et les complexités au cœur desquelles tu nous plonges quatre fois...
Oui, nous nous tenons devant la vie, comme seul le cinéma le permet. Mais aussi devant des couches de temps, de mémoire.
Ces femmes furent filmées il y a quelques décennies, dans les années 70, le grain de la pellicule en témoigne. C’est une première couche de temps. Ta tendresse, ta droiture, l’acuité de ton écoute, ton savoir, la fraternité que tu sembles éprouver quatre fois, bref tout Claude Lanzmann fait de ce temps, le temps de la prise de vue, un temps qui console.
Chaque femme traverse une solitude extrême. Le titre les réunit et nous déchire le coeur.
Tu sais être, tu deviens chaque fois… un frère. Elles sont bien tes soeurs, nous les reconnaissons.
A ton invitation, chacune plonge dans les temps terribles de la destruction des Juifs d’Europe. C’est un deuxième temps qui vient nous brûler.
Et ces films sont mis en scène, agencés, montés (le montage est magnifique!!!), et projetés aujourd’hui. Et c’est un troisième temps inquiet.
Ruth, Paula, Ada et Hanna ne sont plus. Nous les regardons aujourd’hui ; hier elles nous parlaient d’un temps - hors temps, celui de la destruction. Saurons-nous, à ta suite, les reconnaître comme nos soeurs ? Que faire de leur souvenir ?
Nous ne cessons de les oublier, avec culpabilité, nous ne cessons de nous souvenir, avec douleur. Le cinéma nous permet de vivre avec elles, encore ».


« Les quatre sœurs » (The Four Sisters) par Claude Lanzmann
France, Synecdoche, Arte France, 2017
1er volet : Le serment d'Hippocrate, Ruth Elias (Der hippokratische Eid, Ruth Elias ; The Hippocratic Oath), sur Arte le 23 janvier 2018 à 20 h 50. 90 min
Visuels :
2e volet : La Puce joyeuse, Ada Lichtman  (Zum lustigen Floh, Ada Lichtman ; The Merry Flea) : sur Arte le 23 janvier 2018 à 22 h 25 ; 52 min
3e volet : Baluty , Paula Biren, sur Arte le 30 janvier 2018 à 20 h 50. 64 min
4e volet : L'arche de Noé, Hanna Marton  (Arche Noah, Hanna Marton ; Noah's Ark) sur Arte le 30 janvier 2018 à 22 h ; 68 min
Disponible du 01/07/2020 au 31/08/2020

Visuels :
Les quatre sœurs
Claude Lanzmann avec Paula Biren
Ruth Elias était à Auschwitz où elle a travaillé dans les cuisines. Ruth Elias aimait la vie jusqu’à la chanter derrière les barbelés. Jusqu’à ce que, enceinte de huit mois, elle croise le chemin de Joseph Mengele, le sinistre médecin bourreau tortionnaire d’Auschwitz.
Ada Lichtman, elle, est une survivante de Sobibor. Ada Lichtman, à l’image, pendant son entretien avec Claude Lanzmann, ne cesse de coudre, de coudre de toutes petites robes, de tous petits manteaux. C’est ainsi qu’elle a survécu à Sobibor, elle cousait de jolis vêtements de poupée.
Il existe encore nombre d’archives, de journaux intimes et même quelques photos du ghetto de Lodz, mais très peu de témoignages de survivants. Celui de Paula Biren est d’autant plus exceptionnel qu’elle fit partie de la force de police féminine du ghetto à l’époque. Son œil acéré et son intelligence affutée donnent encore plus d’intensité à son récit.
En 1944, quand les nazis commencèrent à déporter les Juifs de Hongrie, Rudolf Kastner, qui présidait le comité de sauvetage, commença à négocier avec Eichmann une somme de deux mille dollars par juif, montant les prix jusqu’à ce que Eichmann préfère l’argent à la mort. Il fut conclu qu’un transport spécial quitterait Budapest pour Bergen-Belsen, puis de Bergen-Belsen vers la Suisse. Hanna Marton fit partie de ce transport. Ce convoi constitué de 1684 Juifs échappa à une mort certaine tandis qu’au même moment 450.000 Juifs hongrois mouraient dans les chambres à gaz de Birkenau ou brûlaient vifs à l’air libre pour satisfaire la cadence imposée par les nazis.
Crédit : Synecdoche               

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Les citations sont d'Arte. Cet article a été publié le 17 janvier 2018, 22 octobre 2019.