Pratiquant une magie, la sorcière a été, durant des siècles - notamment au Moyen-âge et à l'époque moderne -, perçue de manière négative : se déplaçant en volant sur son balai, elle agissait durant des sabbats, était soupçonnée de jeter des sorts, de deviner l'avenir... Elle a été condamnée à mort et exécutée, et a hanté l'imaginaire collectif, tout en inspirant des écrivains, des réalisateurs... Elle est réhabilitée par Jules Michelet dans son livre La Sorcière (1862), « hymne à la femme, bienfaisante et victime ». Avec l'essor du féminisme dans les années 1960-1970, son image est présentée de manière positive, et victimaire : objet de réprobation d'une société matriarcale. Arte diffusera le 18 octobre 2055 à 20 h 55 « Sorcières : chronique d’un massacre », documentaire de Marie Thiry. Le musée de Pont-Aven fête ses 40 ans par l’exposition « Sorcières ! 1860-1920 Fantasmes, savoirs, liberté ».
Magie. Anges et démons dans la tradition juive
Sorcières, mythes et réalités
« Possédé par un djinn » par Dalia Al-Kury
Sa figure est réhabilitée durant les années 1970, à travers les mouvements féministes. La sorcière est un personnage récurrent dans l'imaginaire contemporain, à travers les contes, romans, films et masques des fêtes populaires. Son pendant masculin, le sorcier, ou magicien a une symbolique différente.
"Sorcières, mythes et réalités"
En 2012, le musée de La Poste a présenté l’exposition "Sorcières, mythes et réalités" qui vise à faire « découvrir quelle réalité se cache derrière la construction du mythe de la sorcière. Une approche historique de la sorcellerie où art, sociologie et ethnographie se rencontrent pour comprendre l’évolution des mentalités et des pratiques ». Un panorama artistique des représentations des sorcières, femmes détenant des pouvoirs multiples, magiques – dons divinatoires - ou ordinaires (connaissance des vertus des plantes), qu’elles utilisent de manière positive pour guérir ou négative pour envoûter ou jeter un sort. Des sorcières « présentées comme suppôts des diables et démons de l’Enfer ».
« Pourquoi
les sorcières et non les sorciers ? Parce que le mal – c’est bien connu – est
féminin. Un dicton populaire sans ambiguïté nous le rappelle « Entre femme et
diable, choisis… mais réfléchis ! » L’Histoire confirme cette identité entre
femme et diabolisme : 80% des procès en sorcellerie des XVIe et XVIIe siècles –
haute période épidémique en fait de sorcellerie – mettent en cause des femmes.
« Un sorcier, dix mille sorcières » écrivait Michelet. Rappelons, à toutes fins
utiles, que les juges étaient des hommes… Ceci explique cela. Quant au
machiavélisme dont les magistrats firent preuve dans l’instruction des
affaires, il échappe à tout entendement ».
La « sorcellerie
n’est pas une relique du passé. Si les pratiques magiques, dont la sorcellerie
n’est qu’un des aspects, existent depuis « la nuit des temps », elles n’ont pas
disparu avec le siècle de la Raison et ont traversé les siècles, insensibles au
progrès des sciences. Elles se greffent sur des croyances populaires
millénaires immuables, transmises par tradition orale. Les mythes et le
sentiment religieux ont donc la vie dure ».
L’exposition
est composée de deux parties : l’imaginaire de la sorcellerie qui s’achève
par l’espace interactif Es-tu sorcier, puis les pratiques
magiques.
L’imaginaire de
la sorcellerie
La
première partie est dédiée à l’imaginaire de la sorcellerie que révèlent les tableaux de peintres du
XVIIe au XXe siècle, de David Téniers et Léonard Bramer (1596-1674) à
Jean Aujame (1905-1965) en passant par les artistes du XIXe siècle.
A
la différence des artistes modernes qui ont créé des œuvres résultant de leur
imagination, « leurs aînés avaient le sentiment de représenter des scènes réalistes.
Ainsi le sabbat, cette réunion nocturne des sorciers que tout le monde, ou
presque, considérait comme un fait réel. Les scènes font frémir : infanticide,
anthropophagie, licence sexuelle… »
Cet
espace présente aussi celles qui étaient apparentées à des sorcières :
hystériques et devineresses. En effet, sous le règne du roi Louis XIII, celles
qui prédisait l’avenir étaient poursuivies et condamnées comme les sorcières.
Quant aux femmes énervées, elles étaient réputées possédées par le démon à une
époque qui ignorait le fonctionnement du cerveau, l’inconscient.
Quant
au cinéma, il s’est emparé de ce personnage féminin. En témoignent les affiches
de films réalisés sur la
sorcellerie et qui rencontrent un succès auprès d’un public intéressé par les
productions fantastiques. Exemples : le film documentaire (Heksen,
1920), le film narrant un fait ou un personnage historique, parfois des
métaphores sur l’intolérance et la bigoterie - Les sorcières de Salem de Raymond Rouleau d’après la pièce de
théâtre d’Arthur Miller, 1956 ; le curé d’Ars (Le sorcier du ciel,
1949 -, le film de fiction entre comédie (Ma femme est une sorcière de René Clair, 1942) et horreur (Satan,
mon amour). Sont également présentées des maquettes de films du début du
XXe siècle, le Faust de Murnau (1926), un diable dessiné par Georges Méliès pour
son film La damnation de Faust (1909). Un extrait du film muet du Danois
Benjamin Christensen Heksen (ou Häxan) réalisé en 1920 est projeté
dans l’espace vidéo.
Dans
l’espace historique, sont instruits des procès qui menèrent de nombreux accusés
sur le bûcher. En 18 tableaux peints en 1938 pour le musée basque de Bayonne,
le peintre espagnol José de La Peña raconte les procès en sorcellerie dirigés
par Pierre de Lancre en 1609 dans le pays du Labourd (province du Pays basque).
Le conseiller au Parlement de Bordeaux fit exécuter une centaine de personnes,
essentiellement des femmes et notamment les épouses des marins partis à la
pêche sur les bancs de Terre-Neuve.
Gravures
et papiers anciens « sur les affaires de possession diabolique dans les couvents
à Loudun en 1632, à Louviers au milieu du XVIIe siècle, témoignent de sordides
condamnations de prêtres désignés par les moniales comme étant à l’origine de
leur trouble ».
A
la fin du XVIIe siècle, « il n’y a plus guère de procès de sorcellerie :
un édit du roi de 1682 interdit les poursuites judiciaires dans ce domaine. Au
fil des siècles, le diable ne fait plus peur et devient un sujet de dérision.
Très présent dans l’instruction des procès de l’Ancien Régime, il est rarement
invoqué dans les pratiques magiques en usage aux XIXe et XXe siècles ».
Au
XVIIe siècle, les juges cherchaient les preuves de sorcellerie chez l’accusée. On
rasait sorcières ou sorciers pour repérer sur leur corps la marque de Satan :
une forme de crapaud, une patte de grenouille ou d’araignée. L’autre preuve s’effectue
par la pesée : la sorcière capable de voler pour se rendre au sabbat était
forcément légère. Deux reproductions de gravures anciennes représentent la
pesée de la sorcière et la preuve par l’eau : « la présumée sorcière
était jetée à l’eau. Selon la même logique de légèreté, si la sorcière
flottait, elle était à coup sûr une sorcière. Si elle coulait, preuve était
faite qu’elle n’avait pas pactisé avec le diable. Dans les deux cas, son destin
était scellé… »
Les pratiques magiques
La plupart des pièces présentées ont été recueillies par
des ethnographes.Les
« sorcières d’aujourd’hui ne sont plus inquiétées car elles ne mettent plus
en péril l’ordre social. Il n’y a plus de démonologues, mais des pouvoirs
publics qui poursuivent les adeptes du satanisme. L’opinion courante réduit la
sorcellerie à des pratiques d’envoûtement, de conjuration et d’exorcisme. Mais
celles-ci n’auraient pas d’existence sans la mentalité magique qui en constitue
le terreau ».
Dans
cet « univers de croyances matérialisé par des objets détournés de leur
fonction première. Par exemple, le joug de bœuf, pièce d’attelage des animaux
de trait, repousse le sorcier quand il est placé au-dessus de la porte. Les
objets du quotidien paysan peuvent être utilisés à des fins maléfiques.
L’agression à distance met en œuvre le principe du transfert. Ainsi, le fléau
ne sert pas seulement à battre le blé mais, frappant le vêtement ravi au jeteur
de sort supposé, il le fera souffrir jusqu’à ce qu’il demande son pardon ».
Dans
la maison du sorcier, grimoires et ustensiles de son art distingue ce logement
de la demeure paysanne : crâne
humain et ossements, serpents dans des bocaux, sel conjurateur… « Cet
intérieur est un véritable concentré de superstitions. Ainsi une horloge couverte
d’un drap noir dont on a arrêté les aiguilles afin que l’occupant qui vient de
passer de vie à trépas ne continue pas à hanter les lieux. Une baratte à beurre
dont le sorcier se servait pour provoquer des orages en y battant de l’eau
conjurée ».
La « religion est très présente. Dans les cas de maléfices ou de
possession, le prêtre est sollicité pour exorciser les êtres et les lieux. Dans
le quotidien, on invoque les saints pour guérir de ses maux ou attirer leurs
faveurs. Les reliquaires de saints répondent aux souhaits de leur possesseur.
Par analogie de noms, saint Vital confère la vitalité, saint Just la justice,
sainte Lucide la lucidité… »
Pour
protéger le corps du sort jeté par un sorcier, il est paré de talismans et amulettes portées au cou ou
dans la poche.
« Quelles
sont les recettes appliquées par le sorcier pour maléficier ou conjurer le mal
? Si le sorcier a reçu un don, transmis par un ascendant, il lui faut aussi posséder
des livres de recettes. Ce sont les grimoires tels que le Grand Albert et le
Petit Albert, véritables manuels de médecine populaire qui contiennent des
recettes de charmes et de sortilèges. Y sont développées les vertus «
médicinales » des plantes, des animaux et des minéraux. On utilisait ainsi des
plantes dont bon nombre étaient narcotiques, stupéfiantes ou hallucinogènes
comme la belladone, la jusquiame, le datura ou le redoutable ergot du seigle
qui, utilisé comme abortif, pouvait engendrer la gangrène et entraîner la mort.
La belladone, aussi toxique soit-elle, pouvait aussi augmenter le charme des
dames. Son jus, instillé dans les yeux, dilatait la pupille et attirait ainsi
le regard des hommes. Animal très apprécié du sorcier : le crapaud. Placé à des
fins maléfiques sous la pierre du seuil de l’étable, il fait périr le bétail.
Le bouillon du batracien passe pour ôter la volonté de celui qui le boit ».Quant
aux minéraux, ils ont aussi leurs « vertus. Les pierres dites pierres à
venin qui ressemblent à la peau du serpent peuvent servir à guérir les parties
malades par application. Les pierres de tonnerre – pour la plupart des haches
polies du néolithique retrouvées dans les champs – sont un remède souverain
contre la maladie des ovins. On fait boire l’eau où elles ont trempé aux brebis
malades, ou bien on en frotte avec un linge la partie enflée ».
Le
sorcier peut aussi fabriquer ses instruments, par exemple des « dagydes,
ces figurines humaines ou animales piquetées d’aiguilles ou de clous, destinées
à l’envoûtement ou encore des représentations de phallus entourés de fils afin
de brider la virilité de la victime ».
Autres
objets utilisés pour la divination présentés : tarots, baguettes de sourcier,
pendule… et un miroir.
Enfin,
l’exposition se termine chez Madame P.
Cette femme qui habitait dans un petit hameau de la Creuse au début du XXe
siècle pratiquait l’envoûtement et le désenvoûtement. Réputée pour ses services,
elle était surnommée la sorcière. Pour pratiquer son art, elle « faisait
fabriquer par des artisans locaux des terres cuites à l’effigie du diable ».
Apprendre
le respect de soi et de l’autre, identifier et comprendre les processus qui
amènent à la discrimination. Tels sont les objectifs d’un atelier pour les plus
jeunes afin « d'interroger les clichés et les stéréotypes pour initier une
réflexion sur la différence et la construction des préjugés ». Histoires
de sorcières et ateliers pour les enfants afin d’apprendre le respect de soi et
de l’autre.
Le dossier de presse ne mentionne pas d’éventuels liens avec le judaïsme – pourquoi le mot sabbat ? -, l'antisémitisme et les juifs, et les sorcières dans l'islam.
Antisémitisme
Parmi les œuvres antisémites évoquant les sorcières, le tableau La convocation au sabbat de José de la Peña (1938) présente en
premier plan un personnage masculin répondant aux stéréotypes antijuifs (nez
proéminent). « Il y a une relation incontestable, me semble-t-il, entre le mot sabbat et le shabbat juif. Le sabbat est aussi appelé "synagogue". Mais les persécuteurs n'ont pas cherché à retrouver les sorcières et les sorciers chez les Juifs qui avaient, du reste, leur propre persécuteurs depuis bien longtemps », m'a écrit Patrick Marchand, commissaire de l'exposition et auteur du catalogue, le 26 mars 2012.
Et d'ajouter : « Quant à l'exposition, le choix a été de la limiter à l'espace français. L'étendre au monde entier aurait exigé des espaces plus importants et un temps de préparation considérable. Bien sûr, on condamne pour sorcellerie encore un peu partout dans le monde ».
Israël
Israël
Lors de l'opération Bordure protectrice, alors que défilait la "rue islamique", Christophe Barbier, directeur de la rédaction de L'Express, a titré a chronique biaisée Les nouveaux Baal-Zebud (5 août 2014). Il a révélé l'immensité de son ignorance historique ("colonisation excessive"), sa méconnaissance dramatique de la situation des Français Juifs, la prégnance des clichés négatifs accolés aux Juifs - "lâcheté", "désertion" - et son incompréhension des enjeux actuels. L'absence du mot "musulman" à elle-seule trahit ses tabous et sa peur de se retrouver en première ligne face aux islamistes si ses concitoyens Juifs quittaient la France. Et qualifier l'Etat d'Israël d'"ailleurs qui n'est nulle part" discrédite ce journaliste. "L’éditorialiste d’un grand magazine s’estime fondé à traîner les Juifs dans la boue, dans leurs sentiments, leurs comportements, leur identité", déplore Shmuel Trigano. Et cet essayiste de critiquer le dossier de cet hebdomadaire : "Le constat que démontre ce dossier est très simple : les victimes d’agression sont fustigées et les agresseurs exemptés de toute critique... On n’y trouve de façon stupéfiante aucun article sur la furie islamique ni sur les dessous de manifestations organisées simultanément dans plusieurs villes de France, ce qui suppose une vraie stratégie. C’est au fond un trait classique de l’antisémitisme. Au Moyen âge les Juifs étaient assassinés parce qu’ils pratiquaient le « meurtre rituel ». Sous le nazisme ils étaient pourchassés parce qu’ils étaient « responsables de la guerre », etc. Les Juifs sont responsables des agressions dont ils sont l’objet. Ils ont effectivement le tort d’exister. Et c’est ce que nous voyons de façon encore plus magistrale avec l’Opération « Bordure protectrice » quand la légitime défense contre une entité fasciste (je pèse ce mot) est qualifiée de « crime de guerre ». Et Shmuel Trigano souligne l'importance du titre de cet éditorial : "Cette diabolisation trouve justement à se cristalliser dans le titre même et la fin de l’éditorial, sous le signe de « Baal Zebub » (« Les nouveaux Baal-Zebub »), qualifié ailleurs de « démon ». On touche ici au plus grand comique, à la fois dans l’orthographe pseudo-scientifique de cette figure qui se dit simplement en français « Belzébuth », soit le personnage du diable. Sans doute C. Barbier a-t-il lu un livre savant, qu’il a mal assimilé, sur l’origine de ce nom : Baal Zevuv, le « Seigneur des mouches », un dieu cananéen que la Bible évoque. Mais qui sont donc les nouveaux diables ? Qui invoque ce dieu païen ? Les Juifs français qui n’écoutent pas « ceux qui conseillent aux Juifs de France d’emprunter une autre direction (et qui) leur font courir de grands périls », « ceux qui consultent les nouveaux Baal Zebub pour apaiser leur crainte »… Voilà C. Barbier qui se prend pour une prophète !"
Espagne
Le samedi 25 juillet 2015, dans le cadre de A la Carta, Desde el infierno - El pueblo judío: propagador del culto a Satán (De l'enfer - Le peuple Juif : Propagateur du culte de Satan), émission d'environ trente minutes de la radio publique espagnole de télévision RNE (Radio Exterior), qui fait partie du groupe public RTVE, a accusé les Juifs d'avoir "propagé le culte de Lucifer dans plusieurs sociétés secrètes sataniques. A travers la magie noire, les Israélites ont appelé les pouvoirs de l'obscurité". Comme dans l'affaire al-Dura, c'est un media public qui a diffusé l'antisémitisme. Sur le site Internet de l'émission, de nombreux commentateurs croient en cette allégation fausse et infamante. Le texte introductif allègue que les Juifs ont fondé et dirigé de manière occulte la franc-maçonnerie", évoque l'ésotérisme...
Le 19 août 2015, Porte-parole de l'Agence Juive et ancien porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Yigal Palmor a critiqué RTVE sur Twitter : “Pero como puede un ente publico dar tribuna a este tipo de racismo crudo, cretino y asqueroso? Vuelve la Santa Inquisicion" (Mais comment une entité publique peut-elle donner une tribune à ce type de racisme cru, crétin et dégoûtant. La Sainte Inquisition est de retour).
Le 27 août 2015, le directeur de la RNE a annoncé le retrait de cette émission radiophonique de son site Internet. Elle a aussi présenté ses excuses.Chargé des relations avec la presse au sein de RNE, Carlos Garrido a souligné que cette émission relevait du genre de la "fiction radiophonique et en aucun cas d'une rubrique d'information".
Islam
Le samedi 25 juillet 2015, dans le cadre de A la Carta, Desde el infierno - El pueblo judío: propagador del culto a Satán (De l'enfer - Le peuple Juif : Propagateur du culte de Satan), émission d'environ trente minutes de la radio publique espagnole de télévision RNE (Radio Exterior), qui fait partie du groupe public RTVE, a accusé les Juifs d'avoir "propagé le culte de Lucifer dans plusieurs sociétés secrètes sataniques. A travers la magie noire, les Israélites ont appelé les pouvoirs de l'obscurité". Comme dans l'affaire al-Dura, c'est un media public qui a diffusé l'antisémitisme. Sur le site Internet de l'émission, de nombreux commentateurs croient en cette allégation fausse et infamante. Le texte introductif allègue que les Juifs ont fondé et dirigé de manière occulte la franc-maçonnerie", évoque l'ésotérisme...Le 19 août 2015, Porte-parole de l'Agence Juive et ancien porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Yigal Palmor a critiqué RTVE sur Twitter : “Pero como puede un ente publico dar tribuna a este tipo de racismo crudo, cretino y asqueroso? Vuelve la Santa Inquisicion" (Mais comment une entité publique peut-elle donner une tribune à ce type de racisme cru, crétin et dégoûtant. La Sainte Inquisition est de retour).
Le 27 août 2015, le directeur de la RNE a annoncé le retrait de cette émission radiophonique de son site Internet. Elle a aussi présenté ses excuses.Chargé des relations avec la presse au sein de RNE, Carlos Garrido a souligné que cette émission relevait du genre de la "fiction radiophonique et en aucun cas d'une rubrique d'information".
Le 10 octobre 2010, Layla, Marocaine homosexuelle âgée de 18 ans, a été brûlée à mort lors d’une séance d'exorcisme à Anvers (Belgique). Elle faisait de nombreux cauchemars, et perdait du poids. Ses parents étaient persuadés qu'elle était "possédée par des esprits, appelés aussi "jins" au Maroc", et ont "décidé de la « soigner » par la roqya", consistant "en des rites de désenvoûtement avec récitation de versets du Saint Coran" et "souvent accompagnés de pratiques occultes telles la magie ou sorcellerie". Sur les conseils de voisins, ils ont recouru à "un imam connu dans la région, un certain Othman G." Celui-ci a allégué que la jeune fille "était possédée par neuf démons. L’exorcisme a duré trois jours. Le dernier jour, l’imam s’est enfermé avec Layla dans la salle de bain, et lui a versé "de l’eau bouillante sur le corps, alors qu’elle n’était couverte que d’un pyjama". "Les trois prévenus, l’exorciste et les deux parents", ont nié "toute implication dans la mort de Layla". Lors de l'enquête qui a duré cinq ans, un collège de psychiatres a considéré que Layla souffrait d'une légère schizophrénie. "Une demi-sœur de Layla s’est portée partie civile contre les parents et l’exorciste. Elle voulait que les faits soient qualifiés de tortures et non de coups et blessures ayant entraîné la mort. Ce qui aurait impliqué un procès d’assises". En 2012, à Bruxelles, la "Cour d’assises avait jugé six personnes pour le désenvoûtement mortel de Lafifa, 23 ans, morte de quasi-noyade, de coups multiples et de manœuvres d’étranglement pour "chasser les djinns en elle". Les peines s’étalaient entre 3 et 9 ans de prison, pour tortures".
La sorcellerie est punissable actuellement dans certains pays : arrêtée en avril 2009, Amina bent Abdelhalim Nassar, a été décapitée au sabre le 12 décembre 2011 en Arabie saoudite qui aurait exécuté 73 personnes accusées de sorcellerie l’an dernier selon Amnesty International. « Nous ignorons les faits que les autorités accusaient cette femme d’avoir commis mais savons que l’accusation de sorcellerie a fréquemment été utilisée en Arabie saoudite pour punir, généralement à l’issue d’un procès inique, des personnes ayant simplement exercé leur droit à la liberté d’expression ou de religion ». Pour l’ONG, il s’agit de « dénoncer les exécutions ainsi que l’iniquité des procès qui aboutissent à la condamnation des individus ». En août 2013, le journal The Atlantic a publié un article sur la guerre de l'Arabie saoudite contre la sorcellerie.
La sorcellerie est punissable actuellement dans certains pays : arrêtée en avril 2009, Amina bent Abdelhalim Nassar, a été décapitée au sabre le 12 décembre 2011 en Arabie saoudite qui aurait exécuté 73 personnes accusées de sorcellerie l’an dernier selon Amnesty International. « Nous ignorons les faits que les autorités accusaient cette femme d’avoir commis mais savons que l’accusation de sorcellerie a fréquemment été utilisée en Arabie saoudite pour punir, généralement à l’issue d’un procès inique, des personnes ayant simplement exercé leur droit à la liberté d’expression ou de religion ». Pour l’ONG, il s’agit de « dénoncer les exécutions ainsi que l’iniquité des procès qui aboutissent à la condamnation des individus ». En août 2013, le journal The Atlantic a publié un article sur la guerre de l'Arabie saoudite contre la sorcellerie.
Le 22 mai 2012, Harun Yusuf Zindani, Yéménite Juif âgé de 50 ans, a été mortellement poignardé, dans le dos, par un de ses concitoyens musulmans, qu'il ne connaissait pas, à Sanaa (Yémen). L'assassin, qui accusait sa victime de sorcellerie, a crié lors de l'agression : " Toi le juif, tu as nui à mon commerce avec ta sorcellerie ". Il a été interpellé par la police.
Au printemps 2013, un dirigeant et un site Internet iraniens ont accusé à tort les Juifs d'utiliser la sorcellerie contre l'Iran.
Le 7 mai 2014, The Daily Beast a indiqué que, sur la chaîne publique iranienne IRIB (Islamic Republic of Iran Broadcasting), Valiollah Naghipourfar, mollah et professeur de l’université de Téhéran, a allégué que les Juifs utilisent des djinns, « créatures surnaturelles » qui « sont le Mal », pour espionner et miner la république islamique et que le judaïsme est particulièrement expert en magie noire : « Les Juifs ont toujours été associés à la sorcellerie et aux djinns. Vraiment, beaucoup de sorciers sont Juifs. Ceux qui sont en contact avec les djinns sont souvent Juifs… Même le Coran condamne les Juifs, appelant le prophète Salomon un infidèle et l’accusant de sorcellerie… Le Juif est très expérimenté en sorcellerie ». Il a acquiescé à la question de savoir si « les problèmes actuels en Iran proviennent de la sorcellerie et la magie, par des forces surnaturelles ». Il a estimé possible qu’un « gouvernement soit manipulé par les djinns en Israël, mais pas en Iran ». La vidéo a été postée le 4 juillet 2014 sur Youtube.
En février 2015, un fqih et son assistant ont été jugés pour meurtre avec préméditation et sorcellerie par un tribunal pénal d'Agadir (Maroc). Ils étaient accusés de la mort d'une jeune mariée lors d'une séance d'exorcisme à Anza, près d’Agadir. La famille de la victime, "prise d’une "crise de folie" interprétée comme un acte de « l’esprit qui habitait en elle », donc selon elle "possédée par le démon", avait recouru à un fqih. Lors d'une des séances d'exorcisme, le fqih a frappé la jeune femme de 22 ans, tout en lisant des passages du Coran et disant « Sors fils de Satan, tu ne veux pas sortir ? », l'a étouffée.
En novembre 2015, le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération a interdit par circulaire aux Marocaines de travailler en Arabie Saoudite comme employées de maison, et ce, afin de leur épargner de vivre des « situations compliquées ». La décision entrera en vigueur dès le 7 décembre 2015. Selon des statistiques du ministère marocain des Affaires étrangères, l’effectif des MRE résidant en Arabie Saoudite s’élevait en 2012 à 35 724 personnes dont 15 153 femmes recrutées notamment comme employées de maison, infirmières, baby-sitters, soit 42,41%. Des domestiques marocaines ont dénoncé les violences que leur infligeaient leurs employeurs saoudiens. Les Marocaines "qui travaillent dans ce pays font l’objet depuis 2013 d’une campagne de dénigrement notamment de la part des Saoudiennes. Le cliché de « sorcière » marocaine qui serait une « voleuse d’hommes mariés » est omniprésent dans les médias et sur les réseaux sociaux. Selon une page de Yahoo, "en 2012, 600 actes de mariage ont été conclus entre des Marocaines et des Saoudiens dont 18 ont provoqué la dislocation de plusieurs familles saoudiennes suite au départ de maris". Le Maroc "a signé plusieurs accords organisant l’entrée de la main-d’œuvre en Arabie Saoudite et le suivi de leur application est du ressort des départements d’Anis Birou et de son collègue Abdeslam Seddiki qui n’ont pas réussi jusqu’à présent à améliorer la situation de la main-d’œuvre marocaine dans les pays du Golfe où le système de la Kafala (parrainage) porte atteinte aux droits de l’émigré qui se trouve contraint de se mettre sous la protection de son Kafil ; lequel se porte garant de lui et répond, en lieu et place, à toute question relevant de la loi et du droit. Dans ces contrées, l’embauche directe n’est pas de nature à formaliser la relation de travail entre l’employeur et son employé. Ce qui laisse la porte grande ouverte à des situations allant jusqu’à la traite, notamment pour les femmes. La question de la main-d’œuvre marocaine dans les pays du Golfe restera donc tabou parce que peu de responsables osent s’aventurer à la remettre en question. Les Philippines et l’Indonésie, principaux pourvoyeurs de Riyad en main-d’œuvre domestique, qui ont interdit l’envoi de bonnes vers l’Arabie Saoudite en 2011".
En novembre 2012, la chaîne satellitaire émiratie Abou Dhabi al Oula a diffusé un reportage sur l’arrestation de jeunes Marocaines accusées de pratiquer la sorcellerie aux Emirats Arabes Unis (EAU). Ce qui a suscité l'ire des Marocains vivant aux EAU. "D’après le présentateur du programme, les "sorcières" (terme employé par le journaliste) faisaient faire leurs potions et autres grigris au Maroc, pour les recevoir ensuite par la poste. Ces actes de magie auraient, selon le journaliste, détruit plusieurs couples émiratis. Mohamed Aït Ouali, ambassadeur du Maroc aux Emirats, a envoyé une copie de l’enregistrement au ministère des Affaires étrangères, accompagnée d’une note explicative.
Le diplomate a même contacté le rédacteur en chef de la chaîne de télévision pour dénoncer le manque de professionnalisme, les jeunes femmes apparaissant en effet à visage découvert. Les expressions utilisées pendant le programme ont quant à elles été qualifiées deracistes et d’insultantes par beaucoup de Marocains sur les réseaux sociaux".
En mars 2015, la fille d’un milliardaire marocain a accusé "une arnaqueuse de l’avoir délestée de plus de 20 millions de dirhams en usant de sorcellerie et de magie noire". Selon le journal al Akhbar, les faits datent d'août 2014. Le tribunal de Casablanca a condamné cette arnaqueuse à trois ans de prison ferme et 10 millions de dirhams de dommages et intérêts au profit de la victime. "Cette dernière en proie a une dépression a fait une confiance aveugle à une femme en lui donnant plus de 20 millions de dirhams pour « la soigner » de toutes les maladies dont elle disait souffrir". Elle "devait organiser des « veillées de transe » dans plusieurs mausolées, notamment ceux de Moulay Driss Zerhoun, Zaouyat Lhej à Tanger et Chamharouch dans la région de Marrakech, s’automutiler et se flageller lors de ses fameuses soirées. La mainmise était telle que la victime s’est dite « sous l’emprise » de cette sorcière et la seule façon de s’échapper était de payer encore et encore. Finalement la « sorcière arnaqueuse » a été condamnée à trois ans de prison ferme et 10 millions de dirhams. Mystère sur les autres dix millions de dirhams donnés par la milliardaire.
En mars 2015, Faycal Wyllinck, défenseur des animaux, a déclaré à l’agence EFE, que "les singes marocains se vendent illégalement et sont dressés dans l’unique but de satisfaire les touristes, comme sur la fameuse Place Jamaa El Fna, alors que d’autres sont utilisés en tant que cibles par certains chasseurs pour tester leurs armes. Certaines personnes les utiliseraient même pour faire de la sorcellerie. Selon Faycal Wyllinck, chasseurs vendraient ainsi des tripes de singes ou encore leurs cervelles à des femmes faisant de la sorcellerie. Des singes en voie de disparition : on comptait 20 000 en 1984 contre 5 000 en 2015. Leurs lieux de vie : dans les montagnes du Rif, dans le Moyen-Atlas, dans la région d’Azrou ou d’Ifrane.
En décembre 2015, selon une agence de presse proche du gouvernement provisoire libyen, la branche libyenne de l'Etat islamique (ISIS) a décapité, en place publique, à Syrte (Libye) une Marocaine accusée de « sorcellerie et de magie noire ».
"Soumettre la population par la peur et la sanctionner lourdement pour le moindre écart reste le fondement du pouvoir" de l’Etat islamique. "Outre les exécutions publiques quotidiennes de « traîtres », « renégats », « espions » ou « sorcières », les sanctions les plus fréquentes varient en nombre de coups de fouet ou de jours de prison. Après l’exécution de deux femmes accusées de sorcellerie dans la ville de Mayadine, au sud de Deir el-Zor" (Syrie), le diwan (ministère, Ndr) de la Justice de l'Etat islamique "a présenté des excuses à leurs familles en leur payant une compensation du sacrifice". (Libération, 1er décembre 2015)
En décembre 2015, selon une agence de presse proche du gouvernement provisoire libyen, la branche libyenne de l'Etat islamique (ISIS) a décapité, en place publique, à Syrte (Libye) une Marocaine accusée de « sorcellerie et de magie noire ».
Arte
Les 21 août 2019 à 11 h 20 et 2 septembre 2019 à 11 h 35, Histoire diffusa "Sorcières, la chasse meurtrière" (Witch Hunt: A Century of Murder), docu-fiction en deux parties. "Les îles britanniques, il y a 400 ans. Les procès et exécutions font rage dans tout le pays. La raison de ce chaos et de cette violence ? Les sorcières. Les populations sont convaincues qu’elles sont à l’origine de naufrages, de famines, de maladies, qu’elles mutilent et qu’elles tuent. L’historienne Suzannah Lipscomb revient sur les origines de ce phénomène". ("In this drama-documentary series, Dr. Suzannah Lipscomb goes in search of the origins of the deadly craze of witch hunts and trials that infected the British Isles 400 years ago. Through original documents and powerful drama, Suzannah uncovers the fears that drove the persecutors to such lengths and what it was like for the innocent victims tortured and executed for crimes they didn't commit")
Le 11 août 2019, Arte diffusa, dans le cadre d'"Un air de déjà-vu", "Les sorcières" ("Die Hexen") par Philippe Collin. "Philippe Collin retrace la généalogie artistique de notre saison culturelle. Dans ce numéro : Xavier Dolan n'a pas peur de jouer avec les références pour se raconter - "La figure de la sorcière hante le théâtre, les séries, le cinéma et la musique" - "Les écrivaines au cinéma, de Colette à Karen Blixen, des sœurs Brontë à Françoise Sagan". "Le retour des sorcières : La figure de la sorcière hante le théâtre, les séries, le cinéma et la musique. Enquête, auprès de ceux qui étudient la figure de cette femme diabolique, pour comprendre comment elle a fait de la traditionnelle oppression féminine un pouvoir."
Arte diffusa le 22 avril 2020, dans le cadre de "Square Idée", "Le retour des sorcières" (Der Rückkehr der Hexen). "Splendeur et misère des sorcières, persécutées à la Renaissance et devenues aujourd'hui porte-étendards des féministes, notamment depuis la publication du livre de Mona Chollet, "Sorcières – La puissance invaincue des femmes" (La Découverte, 2018)." Le film souligne des visions cherchant les points communs entre sorcières et Juifs féminisés victimes d'antisémitisme.
"C'est abusivement qu'on associe la chasse aux sorcières au Moyen Âge. Car si les femmes qui échappaient un tant soit peu au carcan patriarcal ont commencé à être rejetées à cette époque, c'est à la Renaissance que cette persécution s'intensifie, avec la multiplication des procès et des bûchers. En 1968, les féministes s'emparent de la figure de la sorcière qui devient un symbole de résistance et de revendication. Au XXIe siècle, la troisième vague du féminisme et ses luttes contre la domination masculine et les féminicides la remettent sur le devant de la scène, notamment après la publication du livre de Mona Chollet, Sorcières – La puissance invaincue des femmes (La Découverte, 2018)."
"Qu’elles vendent des grimoires sur Etsy, postent des photos de leur autel orné de cristaux sur Instagram ou se rassemblent pour jeter des sorts à Donald Trump, les sorcières sont partout. Davantage encore que leurs aînées des années 1970, les féministes actuelles semblent hantées par cette figure. La sorcière est à la fois la victime absolue, celle pour qui on réclame justice, et la rebelle obstinée, insaisissable. Mais qui étaient au juste celles qui, dans l’Europe de la Renaissance, ont été accusées de sorcellerie ? Quels types de femme ces siècles de terreur ont-ils censurés, éliminés, réprimés ? Ce livre en explore trois et examine ce qu’il en reste aujourd’hui, dans nos préjugés et nos représentations : la femme indépendante — puisque les veuves et les célibataires furent particulièrement visées ; la femme sans enfant — puisque l’époque des chasses a marqué la fin de la tolérance pour celles qui prétendaient contrôler leur fécondité ; et la femme âgée – devenue, et restée depuis, un objet d’horreur. Enfin, il sera aussi question de la vision du monde que la traque des sorcières a servi à promouvoir, du rapport guerrier qui s’est développé alors tant à l’égard des femmes que de la nature : une double malédiction qui reste à lever."
Le 19 août 2018, France 2 diffusa Dark Shadows, réalisé par Tim Burton.
"Le retour des sorcières"
France, 2020, 27 min
Sur Arte le 22 avril 2020 à 06 h 45
Disponible du 11/04/2020 au 10/04/2021
"Xavier Dolan / Les sorcières / Les écrivaines au cinéma" par Philippe Collin
France, 2019
Sur Arte le 11 août 2019 à 19 h 10
Visuel :
Des manifestants en costumes de sorcière tiennent des pancartes suite à une marche du " Rassemblement pour la liberté d' expression" le 19 août 2017 à Boston
© Scott Eisen / Getty Images
Au printemps 2013, un dirigeant et un site Internet iraniens ont accusé à tort les Juifs d'utiliser la sorcellerie contre l'Iran.
Le 7 mai 2014, The Daily Beast a indiqué que, sur la chaîne publique iranienne IRIB (Islamic Republic of Iran Broadcasting), Valiollah Naghipourfar, mollah et professeur de l’université de Téhéran, a allégué que les Juifs utilisent des djinns, « créatures surnaturelles » qui « sont le Mal », pour espionner et miner la république islamique et que le judaïsme est particulièrement expert en magie noire : « Les Juifs ont toujours été associés à la sorcellerie et aux djinns. Vraiment, beaucoup de sorciers sont Juifs. Ceux qui sont en contact avec les djinns sont souvent Juifs… Même le Coran condamne les Juifs, appelant le prophète Salomon un infidèle et l’accusant de sorcellerie… Le Juif est très expérimenté en sorcellerie ». Il a acquiescé à la question de savoir si « les problèmes actuels en Iran proviennent de la sorcellerie et la magie, par des forces surnaturelles ». Il a estimé possible qu’un « gouvernement soit manipulé par les djinns en Israël, mais pas en Iran ». La vidéo a été postée le 4 juillet 2014 sur Youtube.
En février 2015, un fqih et son assistant ont été jugés pour meurtre avec préméditation et sorcellerie par un tribunal pénal d'Agadir (Maroc). Ils étaient accusés de la mort d'une jeune mariée lors d'une séance d'exorcisme à Anza, près d’Agadir. La famille de la victime, "prise d’une "crise de folie" interprétée comme un acte de « l’esprit qui habitait en elle », donc selon elle "possédée par le démon", avait recouru à un fqih. Lors d'une des séances d'exorcisme, le fqih a frappé la jeune femme de 22 ans, tout en lisant des passages du Coran et disant « Sors fils de Satan, tu ne veux pas sortir ? », l'a étouffée.
En novembre 2015, le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération a interdit par circulaire aux Marocaines de travailler en Arabie Saoudite comme employées de maison, et ce, afin de leur épargner de vivre des « situations compliquées ». La décision entrera en vigueur dès le 7 décembre 2015. Selon des statistiques du ministère marocain des Affaires étrangères, l’effectif des MRE résidant en Arabie Saoudite s’élevait en 2012 à 35 724 personnes dont 15 153 femmes recrutées notamment comme employées de maison, infirmières, baby-sitters, soit 42,41%. Des domestiques marocaines ont dénoncé les violences que leur infligeaient leurs employeurs saoudiens. Les Marocaines "qui travaillent dans ce pays font l’objet depuis 2013 d’une campagne de dénigrement notamment de la part des Saoudiennes. Le cliché de « sorcière » marocaine qui serait une « voleuse d’hommes mariés » est omniprésent dans les médias et sur les réseaux sociaux. Selon une page de Yahoo, "en 2012, 600 actes de mariage ont été conclus entre des Marocaines et des Saoudiens dont 18 ont provoqué la dislocation de plusieurs familles saoudiennes suite au départ de maris". Le Maroc "a signé plusieurs accords organisant l’entrée de la main-d’œuvre en Arabie Saoudite et le suivi de leur application est du ressort des départements d’Anis Birou et de son collègue Abdeslam Seddiki qui n’ont pas réussi jusqu’à présent à améliorer la situation de la main-d’œuvre marocaine dans les pays du Golfe où le système de la Kafala (parrainage) porte atteinte aux droits de l’émigré qui se trouve contraint de se mettre sous la protection de son Kafil ; lequel se porte garant de lui et répond, en lieu et place, à toute question relevant de la loi et du droit. Dans ces contrées, l’embauche directe n’est pas de nature à formaliser la relation de travail entre l’employeur et son employé. Ce qui laisse la porte grande ouverte à des situations allant jusqu’à la traite, notamment pour les femmes. La question de la main-d’œuvre marocaine dans les pays du Golfe restera donc tabou parce que peu de responsables osent s’aventurer à la remettre en question. Les Philippines et l’Indonésie, principaux pourvoyeurs de Riyad en main-d’œuvre domestique, qui ont interdit l’envoi de bonnes vers l’Arabie Saoudite en 2011".
En novembre 2012, la chaîne satellitaire émiratie Abou Dhabi al Oula a diffusé un reportage sur l’arrestation de jeunes Marocaines accusées de pratiquer la sorcellerie aux Emirats Arabes Unis (EAU). Ce qui a suscité l'ire des Marocains vivant aux EAU. "D’après le présentateur du programme, les "sorcières" (terme employé par le journaliste) faisaient faire leurs potions et autres grigris au Maroc, pour les recevoir ensuite par la poste. Ces actes de magie auraient, selon le journaliste, détruit plusieurs couples émiratis. Mohamed Aït Ouali, ambassadeur du Maroc aux Emirats, a envoyé une copie de l’enregistrement au ministère des Affaires étrangères, accompagnée d’une note explicative.
Le diplomate a même contacté le rédacteur en chef de la chaîne de télévision pour dénoncer le manque de professionnalisme, les jeunes femmes apparaissant en effet à visage découvert. Les expressions utilisées pendant le programme ont quant à elles été qualifiées deracistes et d’insultantes par beaucoup de Marocains sur les réseaux sociaux".
En mars 2015, la fille d’un milliardaire marocain a accusé "une arnaqueuse de l’avoir délestée de plus de 20 millions de dirhams en usant de sorcellerie et de magie noire". Selon le journal al Akhbar, les faits datent d'août 2014. Le tribunal de Casablanca a condamné cette arnaqueuse à trois ans de prison ferme et 10 millions de dirhams de dommages et intérêts au profit de la victime. "Cette dernière en proie a une dépression a fait une confiance aveugle à une femme en lui donnant plus de 20 millions de dirhams pour « la soigner » de toutes les maladies dont elle disait souffrir". Elle "devait organiser des « veillées de transe » dans plusieurs mausolées, notamment ceux de Moulay Driss Zerhoun, Zaouyat Lhej à Tanger et Chamharouch dans la région de Marrakech, s’automutiler et se flageller lors de ses fameuses soirées. La mainmise était telle que la victime s’est dite « sous l’emprise » de cette sorcière et la seule façon de s’échapper était de payer encore et encore. Finalement la « sorcière arnaqueuse » a été condamnée à trois ans de prison ferme et 10 millions de dirhams. Mystère sur les autres dix millions de dirhams donnés par la milliardaire.
En mars 2015, Faycal Wyllinck, défenseur des animaux, a déclaré à l’agence EFE, que "les singes marocains se vendent illégalement et sont dressés dans l’unique but de satisfaire les touristes, comme sur la fameuse Place Jamaa El Fna, alors que d’autres sont utilisés en tant que cibles par certains chasseurs pour tester leurs armes. Certaines personnes les utiliseraient même pour faire de la sorcellerie. Selon Faycal Wyllinck, chasseurs vendraient ainsi des tripes de singes ou encore leurs cervelles à des femmes faisant de la sorcellerie. Des singes en voie de disparition : on comptait 20 000 en 1984 contre 5 000 en 2015. Leurs lieux de vie : dans les montagnes du Rif, dans le Moyen-Atlas, dans la région d’Azrou ou d’Ifrane.
"Soumettre la population par la peur et la sanctionner lourdement pour le moindre écart reste le fondement du pouvoir" de l’Etat islamique. "Outre les exécutions publiques quotidiennes de « traîtres », « renégats », « espions » ou « sorcières », les sanctions les plus fréquentes varient en nombre de coups de fouet ou de jours de prison. Après l’exécution de deux femmes accusées de sorcellerie dans la ville de Mayadine, au sud de Deir el-Zor" (Syrie), le diwan (ministère, Ndr) de la Justice de l'Etat islamique "a présenté des excuses à leurs familles en leur payant une compensation du sacrifice". (Libération, 1er décembre 2015)
En décembre 2015, selon une agence de presse proche du gouvernement provisoire libyen, la branche libyenne de l'Etat islamique (ISIS) a décapité, en place publique, à Syrte (Libye) une Marocaine accusée de « sorcellerie et de magie noire ».
Le vendredi 17 octobre 2025, s'est ouvert le procès de Dahbia Benkired, 27 ans, devant la cour d’assises de Paris. La prévenue, Algérienne Tiktokeuse, entrée en France en 2016 avec un titre de séjour d'étudiante pour rejoindre sa mère, visée par une OQTF (Obligation de quitter le territoire français), est jugée pour avoir violé, torturé et assassiné Lola Daviet, enfant âgée de 12 ans, le 14 octobre 2022, à Paris, avant de mettre son cadavre dans une malle, puis de transporter cette malle dans un café où elle s'est entretenue avec un homme. "Très peu de ses proches avaient accepté de collaborer avec l’enquêtrice. Pas même ses deux sœurs, qui auraient pourtant pu fournir de précieux éléments... Dahbia Benkired semble entretenir un rapport distancié avec la vérité". Plusieurs pistes ont été envisagées par la police : "celle d’une vengeance contre les parents de Lola, gardiens de l’immeuble où Dahbia Benkired logeait chez sa sœur", celle "d’un meurtre sur fond de sorcellerie", et celle "d’une absurde vengeance sentimentale".
"L’enquêteur raconte avoir entendu un témoin rapporter une discussion, à Pornic, entre Dahbia Benkired et des amis autour du thème du zéro et de la mort, au cours de laquelle elle aurait évoqué une coutume algérienne. Selon cette coutume, aurait-elle raconté, pour trouver un trésor, il faut tuer un enfant blond .- enfant dit « zouhri » - et lui couper la tête afin d’observer le sens d’écoulement du sang. Glaçant, quand on sait que Lola était blanche, blonde et que par ailleurs deux chiffres ont été inscrits par la meurtrière présumée sur se plantes de pieds à l’aide d’une peinture rouge comme le sang : 0 et 1. D’autres éléments viennent encre nourrir cette piste : Dahbia aurait déclaré avoir prélevé le sang de Lola dans une bouteille et l’avoir bu, et des recherches sur son téléphone portaient sur les « sacrifices à faire pour être riche ».
"Ces éléments n’ont cependant pas convaincu les enquêteurs, qui y voient plutôt la marque, sinon d’une confusion mentale, du moins d’une volonté de brouiller les pistes. Dahbia Benkired n’a en tout cas montré aucun remords après son interpellation, semblant même prendre un certain plaisir à visionner les images du corps supplicié de Lola. Elle paraissait d’ailleurs tellement indifférente à ses actes, que le responsable de l’enquête racontera à la barre avoir un instant cru s’être trompé de cible. Dans sa carrière criminelle, confiera-t-il, il n’a jamais vu cela."
"Selon ses avocats, Dahbia Benkired n’avait pas seulement fumé du cannabis avant les faits, elle aurait également pris des médicaments psychotropes. En résumé, sous l’emprise de médicaments, elle aurait donc vrillé, et se serait vengée d’un ancien compagnon sur une fillette de 12 ans… A ce stade, cette thèse semble tout aussi farfelue que les autres... Dans cette sordide affaire, un complice échappe en revanche à toutes ses responsabilités: l’Etat français, impuissant à maitriser ses frontières et à faire appliquer les nombreuses OQTF délivrées. Dahbia Benkired, comme bien d’autres, se sentait plus libre en France, avec une OQTF, qu’en vivant dans son pays, l’Algérie, a-t-elle expliqué à l’audience… Malgré une OQTF délivrée en juin 2022, elle restera sur le territoire pendant plusieurs mois, jusqu’à croiser la route de la petite Lola.".
"Ils m'ont haï sans raison"
Le 23 mars 2017 à 19 h, l'Institut Universitaire Européen Rachi de Troyes proposa la conférence de Jacob Rogozinski, professeur de philosophie et auteur de Ils m'ont haï sans raison. De la chasse aux sorcières à la Terreur. "Qu’est-ce que la haine ? Comment cet affect individuel peut-il animer des persécutions collectives ? Jacob Rogozinski interroge le phénomène de la chasse aux sorcières qui s’est déchaînée de la Renaissance aux Lumières. Il décrit les techniques mises en oeuvre pour désigner, puis anéantir ses cibles. Les mêmes dispositifs se retrouveront sous d’autres formes, dans d’autres circonstances, de la Terreur jacobine aux procès de Moscou, et sous-tendent encore les récentes "théories du complot". En étudiant ces expériences historiques, en repérant leurs différences et leurs similitudes, Jacob Rogozinski montre comment l’on passe de l’exclusion à la persécution. Ses analyses nous éclairent ainsi sur les dispositifs de terreur de notre temps".
« Sorcières ! 1860-1920 Fantasmes, savoirs, liberté »
Le musée de Pont-Aven fête ses 40 ans en présentant, en partenariat avec le musée d’Orsay, l’exposition « Sorcières ! 1860-1920 Fantasmes, savoirs, liberté ».
« Ô bienfaisante sorcière !... Esprit d’en bas, soyez béni ! »
La Sorcière, Jules Michelet (1862)
« - Es-tu une sorcière ? Oui ou non ?
Je soupirai :
- Chacun donne à ce mot une signification différente. Chacun croit pouvoir façonner la sorcière à sa manière afin qu’elle satisfasse ses ambitions, ses rêves, ses désirs… »
Moi, Tituba sorcière, Maryse Condé (1986)
« Au coeur de notre imaginaire collectif, les sorcières ont longtemps incarné l’allégorie de la vieillesse, de la mort, du vice et du mal. Elle sont associées au surnaturel, à la nature, à ce qui fait peur et que l’on ne maîtrise pas. Mais 1862 marque une rupture avec la publication de La Sorcière de l’historien Jules Michelet : la sorcière devient alors à la fois un emblème de révolte, de connaissance et d’harmonie avec les éléments naturels, posant les bases de l’éco-féminisme. »
« Réenchantée, elle devient le symbole de la lutte des opprimés contre l’arbitraire. Ambivalente, la sorcière cristallise les fantasmes masculins sous forme d’icône érotisée dotée d’une éternelle jeunesse s’opposant ainsi à la vieille femme laide des contes et illustrations. Pour des artistes majoritairement masculins, la sorcière évoque l’autre et l’inconnu, avec sa part d’attraction et de menace. Dans une société patriarcale où la femme est considérée comme mineure, la sorcière personnifie la femme forte, qui menace l’ordre établi et deviendra un modèle et un symbole pour les féministes au cours du siècle suivant. Elle incarne la résistance face aux pouvoirs dominants. »
« L’exposition fait dialoguer les arts au sein d’un parcours qui fait la part belle aux arts graphiques, à la peinture, à la sculpture, aux objets d’art, à la photographie, au cinéma ainsi qu’à la musique, la danse et la littérature. »
Le Commissariat est assuré par Leïla Jarbouai, conservatrice en cheffe, musée d’Orsay, assistée d’Emma Dechorgnat, doctorante en histoire de l’art, et par Sophie Kervran, conservatrice en cheffe, Musée de Pont-Aven, assistée de Camille Armandary, responsable des expositions.
Avant-propos
« L’engouement pour la figure de la sorcière n’a jamais tari depuis plusieurs décennies et est plus que jamais d’actualité. Depuis les années 1970, cette figure longtemps mal aimée est devenue un mythe cristallisant les revendications des féministes, un emblème de la résistance contre le patriarcat. Les personnes accusées de sorcellerie, en majorité des femmes, ont été les victimes d’un crime imaginaire, boucs émissaires brûlés et pendus par dizaines de milliers dans l’Europe de la Renaissance. Superstitions, règlements de comptes et volonté de contrôle politique, déguisés sous des prétextes moraux et religieux sont toujours en cours dans certains pays qui continuent de pratiquer, en plein XXIe siècle, d’autres formes de chasse aux sorcières. Le sous-titre de l’exposition est un hommage discret au slogan « Femme, Vie, Liberté » adopté par les iraniens en lutte contre l’intolérance et l’obscurantisme religieux du gouvernement de leur pays, suite à l’assassinat d’une femme qui avait osé montrer sa chevelure. »
« Les militantes féministes se sont emparées de l’image de femmes persécutées pour leur savoir et leur différence, incarnant pouvoir et indépendance, loin de la réalité historique où les victimes en première ligne étaient souvent des femmes faibles et sans ressources. Vu l’immensité et la richesse du sujet, l’exposition se limite à l’Europe occidentale, en particulier à la France, au Royaume-Uni et à la Belgique. Les sorcières extra-occidentales ne seront pas abordées, et le monde germanique de manière limitée, pour des raisons de place et de choix nécessaires. »
« Ce mythe moderne puisse ses sources dans le XIXe siècle, et en particulier le second XIXe siècle avec le tournant amorcé par la publication de La Sorcière de Jules Michelet en 1862. Comme l’écrit Karl-Joris Huysmans dans Là-Bas, son roman d’exploration des formes modernes de sorcellerie, « peu importait (…) que Michelet eût été le moins véridique des historiens, puisqu’il en était le plus personnel et le plus artiste ». Reprenant ce postulat, l’exposition ne vise pas une réalité historique des sorcières mais s’intéresse à l’imaginaire suscité par cette figure ambiguë et ambivalente, à la manière dont les artistes ont exploré les fantasmes liés à la sorcière et aux nouvelles images qu’ils ont créées. Ce n’est pas une exposition ethnographique, sociologique, sur la réalité des sorcières au XIXe siècle, mais un parcours à travers des représentations artistiques de sorcières qui contribuent à l’imaginaire de la sorcière telle qu’elle est encore vivace aujourd’hui. »
Avec Michelet, la sorcière devient la première des féministes, et c’est en hommage à l’écrivain que les féministes des années 1970 nomment la revue Sorcières (1975-1982). L’historien fait de la sorcière l’incarnation du peuple et plus largement du monde « d’en-bas », réhabilitatrice du corps et du désir ; elle défie les pouvoirs religieux et patriarcaux.
Elle est associée à la création, caractérisée par la « puissance de la conception solitaire » (Michelet), ainsi qu’à la nature, dont elle fait pleinement partie, qu’elle respecte et dont elle connaît les secrets, jetant les bases de l’éco-féminisme moderne. Le livre de Michelet a un grand succès et relance le mythe de la sorcière.
« En lien avec le coeur des collections du Musée de Pont-Aven centrées sur la fin du XIXe siècle, et avec celles du musée d’Orsay, partenaire exceptionnel du projet, l’exposition se concentre sur la période 1860-1920, en particulier sur la période du tournant du siècle. Elle donne cependant une place à Goya, incontournable pour la représentation des sorcières qui constituent une part importante de son oeuvre. »
« L’exposition propose une ouverture sur notre époque avec une sélection d’une vingtaine d’oeuvres récentes de onze artistes contemporaines qui interrogent dans leur travail, à la fois la figure de la sorcière et l’art du XIXe siècle. Ces oeuvres de femmes offrent un dialogue, un contrepoint et une réflexion sur un univers artistique du XIXe siècle très majoritairement masculin où la sorcière est particulièrement révélatrice de la violence des rapports de genre et d’une véritable « bataille des sexes » (Simone de Beauvoir), incarnée dans les arts notamment à travers la figure omniprésente de la femme fatale, mythe qui reprend plusieurs caractéristiques de la sorcière. »
« Cette dernière est en effet au coeur des contradictions de la fin du XIXe siècle. C’est une époque où la femme n’a pas de droits civiques et est une éternelle mineure sous la coupe des différents hommes de son entourage, père, frère, mari, employeur, et où la société attend d’elle qu’elle soit avant tout une épouse et une mère, prêtresse domestique, et c’est en même temps un moment où se développent les mouvements féministes et où les revendications des militantes commencent à progressivement porter leurs fruits. Ces décennies sont également marquées par une exploitation accrue des ressources naturelles et une opposition très forte entre nature et culture, qui rejette « la » femme du côté de la nature, au moment où se développent les mouvements de préservation de la nature et de protection et défense des animaux. Enfin, et ce n’est pas le moindre paradoxe de cette époque, « c’est juste au moment où le positivisme bat son plein, que le mysticisme s’éveille et que les folies de l’occulte commencent » (Huysmans). Rien de surprenant dès lors que la sorcière, personnage central de l’occulte, soit véritablement omniprésente dans l’art du tournant du XIXe siècle, sous des formes nouvelles, ambivalentes comme l’époque, jusqu’à se confondre avec un féminin fantasmé, à tel point qu’autour de 1900, la sorcière se dilue, perd ses attributs folkloriques, devient une forme d’image tutélaire de femme, mystérieuse, oscillant entre une version animale, dangereuse, prédatrice, et une version végétale, prêtresse de la nature aux marges des évolutions de la civilisation. »
Contre l’anthropocentrisme à l’oeuvre dans la société occidentale moderne, la sorcière incarne des formes de liens alternatifs au monde : aux « invisibles » (Maryse Condé), aux éléments, aux animaux, aux végétaux, aux forces vives de la nature dont l’humain fait pleinement partie. Elle est une figure des marges, de la transgression et de la part maudite de la modernité. N’ayant pas perdu sa force subversive, le mythe de la sorcière remet en cause les hiérarchies, les normes, les limites, et ne cesse de nourrir l’imaginaire. Elle est à la fois une figure de transgression et de réenchantement du monde. »
Questions aux commissaires de l’exposition
Leïla Jarbouai (LJ), conservatrice en cheffe au musée d’Orsay et Sophie Kervran (SK), conservatrice en chef, directrice du Musée de Pont-Aven
« Pourquoi traiter ce sujet d’exposition au Musée de Pont-Aven ?
Sophie Kervran : Conformément au projet de territoire de Concarneau Cornouaille Agglomération qui met en exergue un musée citoyen, le Musée de Pont-Aven a déjà consacré plusieurs expositions à la place des femmes dans l’histoire de l’art au XIXe et dans la première moitié du XXe siècle (« Artistes voyageuses, l’appel des lointains » en 2023, « Anna Boch, un voyage impressionniste » et « Femmes chez les Nabis, de fil en aiguille », en 2024).
Nous avons la chance que le musée d’Orsay soit, par convention, un partenaire exceptionnel et quand j’ai discuté avec Leïla Jarbouai, conservatrice en chef, d’une éventuelle collaboration, nous sommes facilement et rapidement tombées d’accord sur une exposition évoquant la figure de la sorcière au XIXe siècle. Cette thématique forte – parfaite pour fêter les 40 ans du musée - nous permet d’explorer un sujet inédit, de montrer des oeuvres assez incroyables (prêts de la Tate à Londres notamment), ainsi que de faire des liens avec notre société actuelle : le retentissement de l’ouvrage de Mona Chollet, Sorcières, la puissance invaincue des femmes (2018) en est la preuve la plus flagrante.
La Bretagne est par ailleurs une terre de légendes et de croyances. Nous n’abordons pas frontalement dans cette exposition la place des sorcières, guérisseuses et autres diseuses de bonne aventure dans le quotidien du XIXe siècle : d’autres avant nous l’ont fait (« J’y crois, j’y crois pas. Magie et sorcellerie » au musée de Bretagne en 2018) mais c’est une piste encore à approfondir (on pense à la sorcière Naïa de Rochefort photographiée et décrite par Charles Géniaux). La Bretagne reste néanmoins présente dans plusieurs oeuvres présentées comme les Lavandières de la nuit de Yan’ Dargent, La Légende bretonne d’Edgard Maxence ou encore La Sorcière de Robert Wylie que nous sommes très fiers d’avoir obtenue du musée de Bradford en Grande-Bretagne car Wylie est l’un des premiers peintres américains à avoir séjourné à Pont-Aven en 1864 et a été très proche de Julia Guillou qui accueillait dans son hôtel les artistes étrangers.
Qu’est-il prévu autour de l’exposition ?
S.K. : Cette exposition s’adresse bien entendu à toutes et tous ! Même s’il ne s’agit pas d’une exposition où ne serait évoquée que la figure de la sorcière gentille ou rigolote de la littérature jeunesse (Hermione Granger chez Harry Potter ou Cornebidouille !) – l’art du XIXe siècle propose des représentations beaucoup plus ambivalentes – les médiatrices culturelles ont imaginé un parcours jeune public autour des tableaux les plus accessibles qui donnent aux enfants l’opportunité de développer leur imagination.
Ce thème est l’occasion de faire franchir le seuil de notre musée aux jeunes générations et à un public peut-être moins habitué aux Beaux-Arts : nous organisons un afterwork philo, une journée d’échanges avec des journalistes et écrivaines comme Céline Du Chéné et Isabelle Sorente, des conférences…
C’est un thème porteur : Quimperlé communauté, territoire proche de CCA, propose à partir d’octobre 2025 plusieurs animations sur la sorcière dans le cadre de sa politique de parité femmes-hommes, le Château des ducs de Bretagne à Nantes ouvre une exposition plus large chronologiquement et plus historique en février 2026 et le musée d’Aquitaine de Bordeaux explore la figure de Pierre de Lancre dans une approche de la sorcière plus territoriale en octobre 2026. Le Musée de Pont-Aven ouvre le bal ou… le sabbat !
En quoi cette nouvelle exposition consacrée aux sorcières est-elle inédite ? Que nous apprend-elle de nouveau ?
Leïla Jarbouai : Cette exposition est inédite car elle se concentre sur un moment particulier de l’histoire des représentations qui n’avait pas donné lieu à une exposition spécifique. Il y a eu des expositions centrées sur les archives et l’histoire des sorcières et de leur répression durant la Renaissance, mais pas d’exposition qui explore plus en profondeur ce tournant que constituent la seconde moitié du XIXe et le début du XXe siècle qui posent les jalons de notre modernité et des expositions trans-chronologiques sur les sorcières de l’Antiquité à nos jours. On remarque que les ouvrages sur les sorcières utilisent abondamment l’iconographie de la fin du XIXe siècle et que Michelet est souvent présent en filigrane. Notre exposition aborde les oeuvres du XIXe sous le prisme des études de genre et du regard critique sur le « male gaze » porté sur les femmes par les artistes de cette période, sans pour autant tomber dans un moralisme enfermant : nous plaçons les oeuvres dans un contexte et lançons des pistes de réflexion à partir d’elles. Le parcours apporte des contrepoints féministes contemporains. C’est une exposition qui décloisonne et ouvre des perspectives : ainsi, non seulement des oeuvres du XXIe
siècle dialoguent avec le XIXe siècle, mais nous ouvrons également le propos à tous types de techniques, sans hiérarchie (peinture, mais aussi arts graphiques de tous genres : dessins, aquarelles, estampes, livres, photographies, sculptures, objets d’arts, bijoux…) et incluons des productions d’artistes peu connus mais très intéressants aux côtés d’artistes beaucoup plus célèbres.
Quelles résonances, quelles filiations y a-t-il entre ces représentations de sorcières du XIXe siècle et l’engouement contemporain pour cette figure ?
L.J. : L’engouement contemporain pour la sorcière puise en partie ses racines dans la création d’un mythe, polymorphe, de la sorcière cosmique et rebelle, par Michelet. Dans la culture occidentale, c’est lui qui fait de la sorcière un symbole de révolte et de savoir alternatif, une herboriste, homéopathe, connaisseuse des secrets des plantes, une femme en harmonie avec la nature. Il en donne une image positive et puissante, qui nourrit encore les représentations contemporaines des sorcières souvent liées à l’écoféminisme. L’image de la sorcière belle et oeuvrant pour le bien (telle que développée dans la série populaire des années 1990-2000 Charmed par exemple) vient du XIXe siècle. La figure de la vieille femme repoussante et méchante a été supplantée par une figure séduisante. L’image négative demeure dans la culture populaire, dans les contes, mais c’est surtout l’image de la femme puissante et révoltée, qui a une force subversive et remet en cause l’ordre social, que l’on retient à la suite du XIXe siècle.
Comment avez-vous procédé pour établir une sélection d’oeuvres la plus représentative ?
L.J. : Avec Emma Dechorgnat et Camille Armandary nous avons établi une liste idéale, avec les œuvres incontournables, qui est devenue de plus en plus longue vu l’ampleur du sujet. Certaines n’ont pu être localisées ni obtenues, mais finalement les prêteurs ont été globalement très généreux et enthousiasmés par le projet. Nous avons même dû décliner des propositions, pourtant très intéressantes, pour des raisons de manque de place (320m2) ! Nous nous sommes également laissées guider par l’imprévu, au fil des rencontres avec les collectionneurs, des personnes passionnées et érudites et des découvertes dans les collections explorées lors de nos recherches. Nous avons ainsi ajouté des artistes moins connus et des oeuvres plus marginales, mais ces marges nous semblaient en adéquation avec le sujet, car les sorcières sont avant tout des marginales. Les représentations les plus pertinentes se trouvent d’ailleurs dans les arts dits « mineurs », qui offrent plus d’espace à la liberté, en raison de leur destination : les tableaux de Salon étaient plus contraints par les attentes supposées du public. Nous avons souhaité inclure autant que possible des oeuvres produites par des femmes, même si ce n’était pas évident vu que ce sujet n’a pas été beaucoup traité par des femmes à l’époque. Le Musée de Pont-Aven a ainsi consacré un budget conséquent pour obtenir le tableau Le Philtre d’amour d’Evelyn de Morgan (conservé à la De Morgan Foundation en Grande-Bretagne).
Dans un souci écologique, nous avons souhaité ne pas emprunter d’oeuvres qui viendraient en avion, et donc limité les emprunts à l’Europe et tenté de grouper les provenances, en nous concentrant sur la France, l’Angleterre, la Suisse et la Belgique.
Quelles sont vos trois oeuvres préférées ?
L.J. : C’est difficile de citer trois oeuvres seulement dans l’exposition, qui est foisonnante, avec un grand nombre d’artistes et des genres très divers.
Peut-être que pour commencer, je peux citer une oeuvre contemporaine. Je remercie beaucoup les artistes qui ont accepté de contribuer à l’exposition. Le choix était difficile tant il y a d’artistes qui travaillent sur la figure de la sorcière et s’intéressent au XIXe siècle (les deux critères qui ont présidé au choix de ces artistes en plus évidemment de la qualité de leur travail). La plupart sont elles-mêmes des sortes de sorcières, qui manipulent la matière pour créer une forme de magie, mais nous n’avons pas creusé cette piste car alors ce serait une exposition en soi !
Parmi ces artistes, Kiki Smith est l’une de celles dont j’admire particulièrement le travail. Elle tisse des liens entre les univers : entre le corps, l’esprit, la terre, le ciel, tous les vivants, elle relie microcosme et macrocosme. Dans Winter Twilight, la constellation étoilée qui part des hiboux, animaux traditionnellement associés aux sorcières, est aussi une galerie souterraine comme un terrier qui mène aux racines du végétal. C’est tout à fait le travail des sorcières : tisser des liens entre les mondes.
Parmi les œuvres du XIXe siècle, j’aimerais citer Le Nuage de Léon Spilliaert, un artiste très présent dans l’exposition.
Cette oeuvre nous est prêtée par un collectionneur particulier. C’est pour moi l’une des pièces les plus fortes de l’exposition car elle est poétique et laisse une part au spectateur et à son interprétation. L’image naît en partie de la souplesse de la matière utilisée, l’encre de Chine, qui permet une profondeur, un mystère, une liberté totalement en adéquation avec le sujet et qui résume le fait que la sorcière ne peut pas se laisser enfermer dans une forme fixe.
On peut la lire comme une version moderne de la sorcière, libérée des accessoires : une femme menaçante (elle apporte l’orage), libre (elle est libérée des contraintes de pesanteur), serpentine (elle ondoie telle une vague ou un serpent).
Le Philtre d’amour d’Evelyn de Morgan fait partie des incontournables que j’aimerais citer, notamment en raison du chat noir, qui est à l’origine du projet ! En effet, c’est en travaillant sur la représentation des animaux dans l’art que je suis arrivée au projet « Sorcières ». Le chat noir est un emblème du XIXe siècle, du chat noir érotique d’Olympia de Manet au chat noir anarchiste de Théophile-Alexandre Steinlen. C’est un animal lié à la liberté, aux marges et à une forme de rébellion. Historiquement, il a été victime de massacres comme les sorcières, en raison des superstitions qui l’associaient à Satan. Ce grand tableau préraphaélite donne une image positive de la sorcière, présentée comme une savante qui fabrique une potion, dans son studiolo empli de livres. »
Parcours de l’exposition
Le feu des bûchers, « la sorcière hurlante et rôtie » (Michelet) : des victimes transformées en coupables, des boucs émissaires
« Le parcours s’ouvre avec un saisissant tondo de Gustave Moreau présentant une femme à la fois victime et accusatrice, prêt exceptionnel du musée Gustave-Moreau. Est ensuite évoquée la réalité historique de la chasse aux sorcières en Europe, qui a battu son plein, non au Moyen Âge comme le XIXe siècle l’a cru, mais en plein épanouissement de l’humanisme, entre entre le milieu du XVIe siècle et la fin du XVIIe siècle. On évalue le nombre de victimes réelles entre 60 000 et 90 000 personnes, dont deux tiers de femmes. Aucune classe sociale n’est épargnée, les victimes étaient souvent des femmes âgées et stériles (ménopausées), accusées de détruire la fertilité des femmes et des récoltes. Un exemplaire parmi les premières éditions du Marteau des Sorcières (Malleus Maleficarum), effroyable best-seller publié en 1486 avec le soutien du Pape, traité de démonologie indiquant de quelle manière reconnaître et persécuter les sorcières, ouvre le parcours. »
« Parmi les dizaines de milliers de victimes condamnées pour sorcellerie, certaines sont passées à la postérité. L’exposition s’attache à deux figures historiques : Sidonia von Bork, qui inspire les Préraphaélites et Jeanne d’Arc, brûlée comme une sorcière, dont la canonisation est demandée en 1869 et qui cristallise les passions politiques, en véritable mythe national. »
« Un ensemble de dessins de Victor Hugo évoque les forces en présence lors des procès en sorcellerie, et est mis en lien avec des illustrations de Notre-Dame de Paris, centrées sur Esmeralda, bouc émissaire, marginale, que la xénophobie et la logique patriarcale conduisent au bûcher. Esmeralda inaugure une figure positive de la sorcière romantique, éloignée de l’image de vieille femme mauvaise et terrifiante jetant des maléfices, et met en avant la peur de l’étranger à l’oeuvre dans la figure de la sorcière, que l’on retrouve chez les femmes fatales. »
« Le parcours se déploie ensuite en trois grandes sections qui forment un cercle, la première section rejoignant la dernière : la nuit, le corps, le savoir. »
« Ces trois grandes sections s’articulent autour de la notion de transgression et de désir :
- Le feu de la nuit : la nuit, domaine de la liberté, de l’imaginaire et des possibles, des débordements des frontières, des métamorphoses.
- Le feu au corps : le corps féminin, territoire de l’immensité du désir, de la sexualité qui fascine et effraie, support des fantasmes.
- Le feu du savoir, qui est l’une des sources de la peur que la sorcière inspire : un savoir à la fois occulte et organique, une communication avec l’invisible et une connaissance de la nature, qui lui donne un pouvoir de vie et de mort sur les naissances et les récoltes. »
Le feu de la nuit
« Dans l’imaginaire, les sorcières réalisent leurs maléfices la nuit. Instruments de Satan, elles se livrent au sabbat où elles se rendent en volant sur un balai. La nuit est le domaine du Mal, mais aussi celui de la poésie et de la voyance, où les frontières se brouillent et où le champ des possibles s’agrandit. Les métamorphoses ont lieu dans le mystère de la nuit. C’est le lieu de rencontre des vivants et des morts. »
« Différents moments scandent la nuit : le vol nocturne et la libération des contraintes physiques du corps ; le sabbat et ses rituels démoniaques autour de Satan ; la protection d’Hécate, déesse de la magie, déesse tutélaire des sorcières et associée à la lune ; les métamorphoses animales notamment en animaux nyctalopes telles la louve, la chatte, la chouette et la chauve-souris. »
« Les sorcières de Macbeth, la ronde du sabbat, les chevauchées fantastiques, la nuit de Walpurgis, la légende de Faust, les légendes bretonnes… autant de thèmes ayant largement inspiré les artistes du XIXe siècle sont évoqués dans cette section, réunissant notamment des oeuvres de Goya, Delacroix, Louis Boulanger, Chassériau, Yan’ Dargent, Edgard Maxence, Émile Bernard, Max Klinger et Léon Spilliaert, avec des contrepoints contemporains de Kiki Smith et Sophie Lecomte entre autres. Des objets d’art, bijoux, statuettes et oeuvres insolites associés à l’univers des sorcières seront réunis dans un ensemble évoquant les cabinets de curiosités, la beauté bizarre d’un monde de toutes les possibilités et de métamorphoses. »
« Une sélection musicale autour de la nuit de Walpurgis (nuit des sorcières, symbolique de la fin de l’hiver et du début du printemps) accompagne le parcours de la nuit. »
« La section comporte un espace dévolu aux contes, intitulé « Au coin du feu » : avec des oeuvres graphiques et des livres illustrés. Un coin lecture invite les visiteurs à lire des contes de fées et sorcières, et à en écouter des extraits. La Baba Yaga, la Fée Carabosse et la Fée Mélusine s’y côtoient, avec des échos contemporains de Rebecca Dautremer et de Katia Bourdarel. »
Le feu au corps : vieilles peaux, chair fraîche et allumeuses fatales
« Cette section pose l’ambivalence de la réhabilitation de la sorcière par les Romantiques et par Michelet. La sorcière peut être positive, mais elle doit alors être jeune et belle, conforme aux exigences du désir masculin. Dans l’art, la femme âgée continue à être monstrueuse, d’une laideur terrifiante, dans la continuité des incarnations médiévales de l’Envie ou image de Haine comme chez Carlos Schwabe. Dans ses deux facettes, la sorcière s’oppose à la mère : soit elle n’est pas encore mère, soit ne peut plus l’être ; cette vision est en lien avec la réalité des sorcières, souvent des femmes sans enfants, célibataires – dans un contexte où la maternité hors mariage était taboue – et ménopausées. »
« Ainsi, ce second grand mouvement de l’exposition s’ouvre par un moment dédié à la peur des vieilles femmes, représentées en « vieilles peaux » non désirables et nécessairement repoussantes et effrayantes, dans la tradition des sorcières folkloriques et populaires. La face vieillissante n’est que le revers d’un même corps, dans la tradition des vanités et des allégories de la mort, la jeune femme étant destinée à périr et pouvant aussi être le leurre de la mort pour mieux attirer ses proies. »
« Michelet ne cache pas son désir pour la sorcière à la sexualité sauvage et libre et n’est pas sans se complaire dans la description sadique des tortures infligées à sa chair par les bourreaux du passé. Ce regard désirant et voyeur sur le corps des femmes est omniprésent dans l’art de la seconde moitié du XIXe siècle. Sadisme et liberté créatrice permise par les fantasmes et la puissance de l’imaginaire se mêlent dans des oeuvres dont la qualité ne peut occulter la violence dans la manière dont est appréhendée la femme. »
« À cet égard, cette phrase d’Octave Mirbeau dans Lilith (1892) est significative de la pensée dominante de l’époque : « La femme n’est pas un cerveau, elle est un sexe, rien de plus. Elle n’a qu’un rôle dans l’univers, celui de faire l’amour. » Félicien Rops, Martin Van Maele, illustrateur de Michelet, ainsi que Valère Bernard transforment la sorcière en objet érotique, plient et recomposent sa chair fraîche, ferme et pulpeuse selon leurs fantasmes. Inversement, les fantasmes des femmes ne sont pas pris en compte par l’art de l’époque, ces sujets restant totalement tabous pour les artistes femmes. »
« Le corps féminin est à la merci des hommes, et une autre forme de mise à disposition est celle qui prend pour prétexte la science. La fin du XIXe siècle, avec la naissance de la gynécologie, de la sexologie et de la psychiatrie, pathologise le corps de la femme. Le mal qui s’emparait de la sorcière par l’entremise de Satan devient désormais physiologique. Les représentations modernes d’hystériques et hystérico-épileptiques croisent celles des femmes damnées possédées par le Diable et victimes d’attaques démoniaques. Les scènes médicales, où le corps de femmes conforme aux canons de beauté de l’époque est analysé par des assemblées d’hommes sérieux, rejoignent des images de tortures qui, sous prétexte de reconstitution historique, flattent le désir du public. Cet aspect est abordé dans l’exposition à travers quelques tableaux académiques et des pages illustrées de livres scientifiques de l’époque. Le corps racisé, rebelle et libre peint par Dalila Dalléas Bouzar forme un contrepoint aux corps blancs, corsetés, ligotés et camisolés des sorcières des artistes du XIXe siècle. »
« Au coeur de l’exposition, le dernier mouvement de cette section sur le corps des sorcières est consacré à l’archétype de la femme fatale. L’ambivalence entre peur des vieilles et désir de chair fraîche se rejoint dans l’image des « allumeuses fatales » (Mario Praz), qui relient Eros et Thanatos. Circé, la magicienne qui transforme les hommes en porcs, en est l’une des figures mythiques revisitées au XIXe siècle, dont Félicien Rops crée une saisissante image moderne intitulée Pornocratès. La sorcière se fond dans les mythes antiques et bibliques, de Méduse à Salomé en passant par les sirènes, femmes ou monstres féminins disposant de pouvoirs magiques et pouvant jeter des maléfices, dont la principale ambition est de séduire les hommes par leur beauté et de les amener ainsi à la mort, telle Nana de Zola, prostituée apportant la syphilis et la ruine à ceux à qui elle fait tourner la tête et les sens. Des ensembles de tableaux de Gustave Adolphe Mossa, de lithographies d’Odilon Redon et d’estampes d’Aubrey Beardsley, jusqu’à une Salomé de Picasso, donnent un aperçu de la richesse du mythe de la femme fatale et de ses liens avec celui de la sorcière. Une sorcière issue de la série consacrée à cette figure en 2024 par Jade Boissin dialogue avec l’humour acide d’un Rops mais y apporte un regard féministe et décalé. »
Le feu du savoir : puissance de vie et de mort, médiation de l’invisible, âme de la forêt
« La Petite Fadette, personnage de George Sand inspiré par son travail sur la paysannerie du Berry, pourrait incarner la sorcière emblématique de cette section : celle qui substitue intelligence et savoirs à la conformité physique aux stéréotypes, qui assume son désir de manière positive sans détruire ce qui en fait l’objet, contrairement à la femme fatale. Les sorcières ne sont plus caractérisées par leur âge, leur rapport à la fertilité ni au désir masculin qu’elles suscitent, mais par leurs connaissances et savoirs, en lien avec des puissances invisibles, qu’ils soient surnaturels (la médiation avec l’au-delà) ou naturalistes (l’herboristerie). »
« Un premier temps est consacré au « feu de l’action » : sorcières autour du feu, en train de concocter des potions, autour de chaudrons, avec un grand ensemble d’oeuvres de Paul Ranson. »
« Une partie est dévolue à l’occultisme, autour du calendrier magique de Manuel Orazi, avec un ensemble exceptionnel de dessins prêtés par la Fondation de l’art brut de Lausanne. »
« Des artistes femmes du XIXe siècle revisitent les traditions, en jouant avec l’image du chat noir, associé à la sorcellerie mais aussi à la luxure supposée des femmes, et en montrant des femmes sachantes et indépendantes. Parmi elles sont réunies La Devineresse de Clémentine Dondey, Sita et Sarita de Cécilia Beaux et Le Philtre d’amour d’Evelyn de Morgan. Ces sorcières sous l’égide de Saturne offrent également des images de Mélancolies modernes, à la suite de la célèbre Mélancolie de Dürer (1514). »
« Les attributs et instruments de médiation pour communiquer avec l’invisible se rejoignent dans Le Cercle magique de Waterhouse, prêt exceptionnel de la Tate (Londres) et dans un ensemble de photographies du musée d’Orsay qui mettent en scène des femmes mystérieuses accompagnées de boules de cristal, de sphères, de coupes et autres accessoires évoquant des rituels magiques pouvant verser la mort. À la fin du siècle, la frontière entre sorcière et magicienne s’estompe dans la représentation de femmes ayant accès à des savoirs supérieurs pas nécessairement maléfiques, sortes de prêtresses échappant désormais à la moralisation et au lien satanique avec un christianisme inversé, par-delà le Bien et le Mal. »
« Ces femmes s’incarnent dans des figures réalistes de rebouteuses, peintes par Brascassat dans le Sud-Ouest de la France, et par Robert Wylie en Bretagne.
Guérisseuses, maîtrisant des savoirs alternatifs à la médecine moderne monopolisée par les hommes (les femmes n’avaient pas le droit d’étudier ni d’exercer la médecine au XIXe siècle), elles sont représentées en train d’officier. »
« Cette section se termine par le lien nouveau affirmé entre sorcière et nature, en écho à La Sorcière de Michelet où « il met en lumière les conséquences du christianisme sur le sort des femmes, dans la mesure même où celles-ci sont rangées dans la catégorie du naturel » (Paule Petitier). L’association des femmes à la chair, au péché, à Satan, découlerait de l’aversion du christianisme pour la nature. La sorcière – anticipant la pensée de Philippe Descola – réinscrit l’humain au sein de la nature, comme partie intégrante du macrocosme, un vivant parmi d’autres, et elle l’explore dans un rapport autre que celui de l’exploitation. Le savoir des sorcières propose une médecine alternative, fondée sur une « connivence avec la nature » (Paule Petitier). Alors que les historiens ont relevé dans les archives des procès qu’une proportion minime de femmes accusées de sorcellerie étaient sages-femmes et qu’on trouvait les avorteuses bien plus dans le monde de la prostitution que dans l’univers de la sorcellerie, le mythe moderne de la sorcière en a fait une composante importante, associant sorcières aux mises aux mondes et aux interruptions de grossesse. Ce mythe trouve en partie ses racines dans le XIXe siècle et en particulier chez Michelet. »
« Dans l’art, ce savoir associé à la nature apparaît dans des oeuvres qui associent la sorcière aux lieux sauvages et reculés, aux marges de la civilisation, telle la Circé de Gustave Moreau dans l’escarpement rocheux de grottes matricielles, ou la forêt, domaine par excellence de la sorcière. Elle est la mère de Caliban, monstre sauvage créé par Shakespeare, devenu une image de révolte contre la société productiviste et patriarcale dans l’essai féministe Caliban et la sorcière de Silvia Federici dont la pensée reprend des éléments en germe chez Michelet. »
« Au tournant du siècle, se développent les images de femmes déambulant voire flottant dans des forêts, sortes d’hamadryades ésotériques, circulant dans les bois au rythme d’incantations magiques et cueillant les plantes secrètes pour en extraire les potions de vie et de mort. Les sorcières ne sont plus associées au Mal mais à une nature primitive que les artistes cherchent à voir d’un oeil nouveau, tel Paul Sérusier peintre de L’Incantation, dit aussi Le Bois sacré. La sorcière est l’antithèse de la fragile et sophistiquée femme-fleur de l’art nouveau : elle est au contraire la femme puissante qui s’enracine avec l’arbre, père du feu, et parle le secret des plantes sauvages et des herbes folles. »
De la scène à l’écran, sorcières bien-aimées
« De Sarah Bernhardt à Wicked, du théâtre au cinéma, en passant par la danse, les séries télévisées et la musique, les sorcières sont une figure importante du spectacle et de la culture populaire. Des extraits de la danse de la sorcière de Mary Wigman et de films de Georges Méliès sont projetés, ainsi que d’Häxan, film de 1922 du Dano-norvégien Benjamin Christensen, qui trouve ses racines dans le livre de Michelet. »
Artistes exposés :
« L’exposition comprend une grande variété d’oeuvres : peintures, arts graphiques (dessins, estampes, livres), photographies, sculptures, objets d’arts, extraits de films, installations…
Parmi les artistes exposés :
l Cécilia Beaux
l Aubrey Beardsley
l Valère Bernard
l Ivan Bilibine
l Arnold Böcklin
l Antoine Bourdelle
l Louis Maurice Boutet de Monvel
l Anne Brigman
l Edward Burne-Jones
l Julia Margaret Cameron
l Théodore Chassériau
l Harry Clarke
l Yan’ Dargent
l Eugène Delacroix
l Evelyn De Morgan
l Clémentine Dondey
l Agnès de Frumerie
l Ernest Gayac
l Eugène Grasset
l Kate Greenaway
l Francisco de Goya
l Victor Hugo
l Max Klinger
l Fernand Khnopff
l Edgard Maxence
l Gustave Moreau
l Gustave-Adolphe Mossa
l Manuel Orazi
l Pablo Picasso
l Arthur Rackham
l Paul-Elie Ranson
l Odilon Redon
l Félicien Rops
l Paul Sérusier
l Carlos Schwabe
l Léon Spilliaert
l Edward Steichen
l Franz von Stuck
l Jean Veber
l John William Waterhouse
l Robert Wylie »
AInsi que 11 artistes contemporaines :
l Giulia Andreani
l Jade Boissin
l Katia Bourdarel
l Arianne Clément
l Dalila Dalléas Bouzar
l Rebecca Dautremer
l Odonchimeg Davaadorj
l Laurie Karp
l Sophie Lecomte
l Kiki Smith
l Anaïs Ysebaert »
Chronologie
» 1796-1799 : série des Caprices (Los Caprichos) de Goya
» 1831 : Notre-Dame de Paris de Victor Hugo
» 1849 : La Petite Fadette de George Sand
» 1857 : Fleurs du mal de Charles Baudelaire
» 1862 : La Sorcière de Jules Michelet
» 1870 : Jean-Martin Charcot donne sa première leçon sur l’hystérie /
Création de l’Association pour le droit des femmes par Léon Richer et Maria Deraismes
» 1874 : Les Diaboliques de Jules Barbey d’Aurevilly
» 1878 : le psychiatre allemand Richard von Krafft-Ebing introduit le concept de « psychose hystérique » /
Premier congrès international des droits de la femme, à Paris
» 1880 : Nana d’Émile Zola
» 1881 : Hubertine Auclert fonde le journal La Citoyenne, qui revendique la libération féminine /
» 1881 : Fondation de l’Union des femmes peintres et sculpteurs
» 1884 : À Rebours de Joris-Karl Huysmans
» 1885-1886 : Sigmund Freud effectue un voyage d’étude dans le service de la Salpêtrière dirigé Jean-Martin Charcot
» 1886 : Psychopathia Sexualis du psychiatre allemand Richard von Krafft-Ebing
Publication du manifeste du symbolisme par Jean Moréas dans Le Figaro
» 1888 : création du Conseil international des femmes (International Council of Women) aux États-Unis
» 1887 : Démoniaques dans l’art de Paul Richer et Jean-Martin Charcot
» 1891 : Là-bas de Joris-Karl Huysmans / Création de la Fédération française des sociétés féministes
» 1893 : première publication de Salomé d’Oscar Wilde, en français
» 1897 : Marguerite Durand fonde le journal féministe La Fronde / Les femmes sont admises à l’École des beaux-arts
» 1898 : création de Médée de Catulle Mendès, interprétée par Sarah Bernhardt au théâtre de la Renaissance / Mort d’Aubrey Beardsley, Gustave Moreau, Félicien Rops et Edward Burne-Jones
» 1900 : Magicien d’Oz (The Wizard of Oz) de Lyman Frank Baum / Publication de L’Interprétation du rêve (Die Traumdeutung) de Sigmund Freund
» 1901 : Création du Conseil national des femmes françaises, affilié au Conseil international des femmes
» 1903 : Les femmes sont autorisées à participer au Prix de Rome / Création de La Sorcière de Victorien Sardou, interprétée par Sarah Bernhardt au théâtre Sarah-Berhnardt
» 1909 : Jeanne d’Arc est béatifiée (canonisée en 1920)
» 1911 : Édition illustrée par Martin van Maele de La Sorcière de Michelet
» 1914 : Mary Wigman réalise la Danse de la sorcière (Hexentanz)
» 1945 : Les femmes obtiennent le droit de vote en France »
Les 21 août 2019 à 11 h 20 et 2 septembre 2019 à 11 h 35, Histoire diffusa "Sorcières, la chasse meurtrière" (Witch Hunt: A Century of Murder), docu-fiction en deux parties. "Les îles britanniques, il y a 400 ans. Les procès et exécutions font rage dans tout le pays. La raison de ce chaos et de cette violence ? Les sorcières. Les populations sont convaincues qu’elles sont à l’origine de naufrages, de famines, de maladies, qu’elles mutilent et qu’elles tuent. L’historienne Suzannah Lipscomb revient sur les origines de ce phénomène". ("In this drama-documentary series, Dr. Suzannah Lipscomb goes in search of the origins of the deadly craze of witch hunts and trials that infected the British Isles 400 years ago. Through original documents and powerful drama, Suzannah uncovers the fears that drove the persecutors to such lengths and what it was like for the innocent victims tortured and executed for crimes they didn't commit")
Le 11 août 2019, Arte diffusa, dans le cadre d'"Un air de déjà-vu", "Les sorcières" ("Die Hexen") par Philippe Collin. "Philippe Collin retrace la généalogie artistique de notre saison culturelle. Dans ce numéro : Xavier Dolan n'a pas peur de jouer avec les références pour se raconter - "La figure de la sorcière hante le théâtre, les séries, le cinéma et la musique" - "Les écrivaines au cinéma, de Colette à Karen Blixen, des sœurs Brontë à Françoise Sagan". "Le retour des sorcières : La figure de la sorcière hante le théâtre, les séries, le cinéma et la musique. Enquête, auprès de ceux qui étudient la figure de cette femme diabolique, pour comprendre comment elle a fait de la traditionnelle oppression féminine un pouvoir."Arte diffusa le 22 avril 2020, dans le cadre de "Square Idée", "Le retour des sorcières" (Der Rückkehr der Hexen). "Splendeur et misère des sorcières, persécutées à la Renaissance et devenues aujourd'hui porte-étendards des féministes, notamment depuis la publication du livre de Mona Chollet, "Sorcières – La puissance invaincue des femmes" (La Découverte, 2018)." Le film souligne des visions cherchant les points communs entre sorcières et Juifs féminisés victimes d'antisémitisme.
"C'est abusivement qu'on associe la chasse aux sorcières au Moyen Âge. Car si les femmes qui échappaient un tant soit peu au carcan patriarcal ont commencé à être rejetées à cette époque, c'est à la Renaissance que cette persécution s'intensifie, avec la multiplication des procès et des bûchers. En 1968, les féministes s'emparent de la figure de la sorcière qui devient un symbole de résistance et de revendication. Au XXIe siècle, la troisième vague du féminisme et ses luttes contre la domination masculine et les féminicides la remettent sur le devant de la scène, notamment après la publication du livre de Mona Chollet, Sorcières – La puissance invaincue des femmes (La Découverte, 2018)."
"Qu’elles vendent des grimoires sur Etsy, postent des photos de leur autel orné de cristaux sur Instagram ou se rassemblent pour jeter des sorts à Donald Trump, les sorcières sont partout. Davantage encore que leurs aînées des années 1970, les féministes actuelles semblent hantées par cette figure. La sorcière est à la fois la victime absolue, celle pour qui on réclame justice, et la rebelle obstinée, insaisissable. Mais qui étaient au juste celles qui, dans l’Europe de la Renaissance, ont été accusées de sorcellerie ? Quels types de femme ces siècles de terreur ont-ils censurés, éliminés, réprimés ? Ce livre en explore trois et examine ce qu’il en reste aujourd’hui, dans nos préjugés et nos représentations : la femme indépendante — puisque les veuves et les célibataires furent particulièrement visées ; la femme sans enfant — puisque l’époque des chasses a marqué la fin de la tolérance pour celles qui prétendaient contrôler leur fécondité ; et la femme âgée – devenue, et restée depuis, un objet d’horreur. Enfin, il sera aussi question de la vision du monde que la traque des sorcières a servi à promouvoir, du rapport guerrier qui s’est développé alors tant à l’égard des femmes que de la nature : une double malédiction qui reste à lever."Arte diffusera le 18 octobre 2055 à 20 h 55 « Sorcières : chronique d’un massacre », documentaire de Marie Thiry.
« Quels mécanismes ont conduit à la plus meurtrière chasse aux sorcières en France au Pays basque en 1609 ? Cette enquête saisissante plonge au cœur de la pensée démonologique, une doctrine profondément misogyne, qui fit des milliers de victimes en Europe du XVe au XVIIIe siècle. »
« En 1609, dans la province basque du Labourd, se déroule le dernier et le plus sanglant épisode de chasse aux sorcières en France. Quatre-vingts personnes, principalement des femmes, sont brûlées à l’issue d’un procès itinérant de quatre mois, mené par Jean d’Espagnet, président au parlement de Bordeaux, et le juge Pierre de Lancre. »
« Mandatés par Henri IV, ils étaient initialement chargés d’apaiser un simple conflit local autour des revenus du nouveau port de Ciboure. Mais cette querelle dégénéra rapidement en une vague d’accusations de sorcellerie. »
« De village en village, leur tribunal alimente et amplifie les dénonciations populaires, déformées par l’imaginaire démonologique. Pour faire avouer les prétendues sorcières, ils recourent à la délation et à la torture, en s’appuyant sur les grands traités de démonologie, comme le célèbre Malleus Maleficarum ("Marteau des sorcières"), publié en 1486 et largement diffusé grâce à l’imprimerie. »
« Alors que dans la plupart des régions d’Europe ce sont surtout les femmes âgées qui sont victimes des chasses aux sorcières, au Labourd, des jeunes filles sont principalement visées. »
« Pierre de Lancre, obsédé par l’idée de leur copulation avec le diable lors du "rituel du sabbat", laisse libre cours à ses fantasmes et transgresse toutes les limites du droit. Il instrumentalise des centaines d’enfants, contraints à témoigner contre leurs proches. »
« Ce zèle fanatique finit par susciter des résistances. Le retour des marins pêcheurs partis à Terre-Neuve et l’intervention de l’évêque de Bayonne, soucieux de protéger les familles des notables, abrègent cette effroyable mécanique d’accusations. »
« Convoquant les témoignages éclairés de spécialistes de la chasse aux sorcières (historiens, archivistes, anthropologues...) de Bayonne à Lausanne en passant par Strasbourg et Pampelune, et également l'essayiste Mona Chollet, autrice de l'essai best-seller Sorcières – La puissance invaincue des femmes (éd. La Découverte), cette enquête saisissante décrypte les mécanismes cruels, irrationnels et misogynes qui conduisirent quatre-vingts personnes à la mort. »
« Grâce à un habile montage d'entretiens, de reconstitutions tirées du film Les sorcières d’Akelarre (2020) de Pablo Agüero, et de séquences animées, la réalisatrice Marie Thiry (Le chevalier au dragon – Le roman disparu de la Table ronde) souligne à quel point les autorités religieuses et politiques s'en prirent aux femmes, mais aussi aux traditions païennes et aux rites dévolus aux solstices d'été et d'hiver, dont serait issu le fameux balai de la sorcière. »
« Nourrie d’extraits du film La sorcellerie à travers les âges de Benjamin Christensen (1922) et de gravures, animées à partir de celles ornant le livre publié par Pierre de Lancre en 1612, cette étude rigoureuse d'une des faces les plus sombres de la Renaissance rend aussi justice à toutes celles que la folie religieuse et misogyne de cette époque a voulu effacer. »
« Comment expliquer l’existence de chasses aux sorcières qui, dans l’Europe de la Renaissance, firent des dizaines de milliers de victimes, en grande majorité des femmes ? L’épisode tragique de la province basque du Labourd en 1609 éclaire trois aspects de la question. Par Marie Gérard. »
« Un contexte propice
Tout comme au Labourd, région française jouxtant les royaumes d’Espagne et de Navarre, les chasses aux sorcières se déroulent en majorité dans des zones frontalières : Flandres, duché de Lorraine et surtout Suisse, pays où ces traques ont commencé. Dans ces contextes instables, les femmes sont les cibles toutes désignées de conflits locaux ou religieux exacerbés – c’est l’époque de la Réforme protestante – qui s’expriment à travers des accusations de sorcellerie. Souvent, plusieurs langues cohabitent sur un même territoire (on parle le basque au procès du Labourd, en 1609, alors que les juges ne s’expriment qu’en français ou en espagnol), favorisant l’incompréhension et l’ignorance face à des identités régionales fortes. Au Pays basque ou en Norvège, les femmes forment de surcroît des communautés plus autonomes et libres, en l’absence des hommes partis en mer pour des campagnes de pêche de six mois.
Haro sur l’indépendance des femmes
L’essor de la figure de la sorcière malfaisante intervient à la fin du XVe siècle, époque où la population européenne a été décimée par la peste noire, la guerre de Cent Ans et la famine. En réaction, des penseurs religieux fanatiques, les démonologues, propagent l’idée qu’une secte satanique, majoritairement composée de femmes, serait responsable de tous ces maux. Dans leurs discours, ils incriminent la femme mûre forte de son expérience, la guérisseuse et en particulier la sage-femme, qui aide à l’accouchement et pratique aussi l’avortement. Ils réussissent peu à peu à convaincre les souverains que toutes celles qui échappent à la tutelle masculine – la célibataire indépendante, la veuve – constituent une menace pour leur pouvoir. La célibataire indépendante, non assujettie à l’homme, devient une menace existentielle.
Stigmatisation de l’âge
Si les procès en sorcellerie du XVe au XVIIe siècle ont condamné à plus de 80 % des femmes, c’est principalement en raison des préjugés misogynes propagés par la religion, catholique comme protestante. Descendantes d’Ève la tentatrice, toutes les femmes sont supposées faibles et capables de céder au diable si aucun homme ne les surveille. Le stéréotype de la femme âgée, ménopausée et veuve, aussi repoussante qu’inutile à la société, réactualisée par la lecture des penseurs de l’Antiquité, s’impose dans les esprits comme l’incarnation type de la sorcière. Au Labourd, c’est à l’inverse la beauté des jeunes femmes qui est vue comme un piège de Satan, ainsi que le mystère du plaisir féminin, au cœur de l’obsession masculine pour le sabbat, cette fantasmatique union sexuelle avec le Malin à laquelle se rend la sorcière, juchée sur son balai. »
Place Julia. 29930 PONT-AVEN
Tél. : 02 98 06 14 43
Ouvert tous les jours de 10h à 18h sauf le lundi
Visuels :
Affiche
Evelyn de Morgan
The Love Potion [La Potion d’amour]
1903, Huile sur toile, H. 104 ; l. 99 cm
Guildford, The De Morgan Foundation
© Photo Artvee
Kate Greenaway
Under the Window: Pictures and Rhymes for Children,
Londres, Frederick Warne & Co.,
1879, in-4°, Bibliothèque du MAD : U 330
© droits réservés
John William Waterhouse
Le Cercle magique
1886, Huile sur toile , H. 182 ; l. 127 cm
Londres, Tate
© Tate, Londres, Dist. Grand Palais Rmn / Tate Photography
Paul-Elie Ranson
Sorcière au chat noir
1893, Huile sur toile, H. 90 ; l. 72,2 cm
Paris, Musée d’Orsay
© Musée d’Orsay, Dist.Grand Palais Rmn / Patrice Schmidt
Louis-Maurice Boutet de Monvel
La Leçon avant le sabbat
1880, Huile sur toile
Cadre : H. 183 ; l. 155.5 ; P. 5.5 cm
Nemours, Château-Musée
© Grand Palais Rmn / Philippe Fuzeau
Clémentine Dondey
Devineresse étudiant un livre de nécromancie
1847, Huile sur toile, H. 98,5 ; l. 82,2
Dijon, Musée des Beaux-arts
© Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay
« Sorcières : chronique d’un massacre » de Marie Thiry
France, Espagne, 2025, 89 min
Coproduction : ARTE France, Bellota Films, Lamia Producciones
Auteures : Marie Thiry, Hind Saïh et Flore Kosinetz
Conseiller historique : Robert Muchembled
Sur Arte les 18 octobre 2055 à 20 h 55, 29 octobre 2025 à 9 h 25, 1er novembre 2025 à 15 h
Sur arte.tv du 11/10/2025 au 16/12/2025
Visuels :
© Sorgin Films / Kowalski Films / Lamia Producciones
© Bourne Gallery / Bridgeman Images
"Le retour des sorcières"France, 2020, 27 min
Sur Arte le 22 avril 2020 à 06 h 45
Disponible du 11/04/2020 au 10/04/2021
Grande-Bretagne, Channel 5, 2015
Sur Histoire les 21 août 2019 à 11 h 20 et 2 septembre 2019 à 11 h 35
France, 2019
Sur Arte le 11 août 2019 à 19 h 10
Visuel :
Des manifestants en costumes de sorcière tiennent des pancartes suite à une marche du " Rassemblement pour la liberté d' expression" le 19 août 2017 à Boston
© Scott Eisen / Getty Images
Patrick Marchand, Sorcières, mythes et réalités. Musée de La Poste/LVE,
2011. 160 pages. ISBN : 978-2-36214-008-2
Jusqu’au 31 mars 2012
Au Musée de La Poste Galerie du Messager
34 boulevard de Vaugirard. 75015 PARIS
Tous les jours de 10 h à 18 h sauf dimanche et jours fériés. Nocturne le jeudi jusqu'à 20 h
Tél. : 01 42 79 24 24 ; reservation.dnmp@laposte.fr
Visuels de haut en bas :
AfficheLa leçon avant le sabbat (Huile sur toile)
Louis Maurice Boutet de Monvel - 1880
Nemours, château-musée
© Photo RMN, René Gabriel Ojéda
© Adagp, Paris, 2011
La Dame de Martiabalsarena danse
José de la Peña - 1938
Musée Basque et de l'histoire de Bayonne
Naïa, la sorcière
Rochefort-en-Terre (Morbihan)
Carte postale - Début XXe siècle
Coll. H. Berton/ SEREST
Le sorcier du village
Les fascinés de la Charité (Huile sur toile)
Georges Moreau de Tours - 1889Musée des Beaux-Arts de la ville de Reims
© Photo C. Devleeschauwer
Méphistophélès, Maquette de costume pour le film La damnation du
docteur Faust
Dessin de Georges Mélies - 1904Encre de chine et mine de graphite
Coll. Cinémathèque Française
Les trois sorcières (Huile sur toile)
Jean Claude Aujame - Avant 1957Musée des Beaux-Arts de Rouen
© Agence Albatros, 2011
© Adagp, Paris, 2011
Naïa, la sorcière
Rochefort-en-Terre (Morbihan)
Carte postale - Début XXe siècle
Coll. H. Berton/ SEREST
Un sorcier guérisseur
Carte postale - Début XXe siècleColl. H. Berton/ SEREST
Dagyde
Conçue à partir d’une marionnetteBois, fer, tissu
Fin XIXe - début XXe siècle
Coll. Daniel Pouget
© Photo Michel Fischer
La convocation au sabbat
José de la Peña - 1938Musée Basque et de l'histoire de Bayonne
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al-Dura/IsraëlAviation/Mode/Sports
Cet article a été publié pour la première fois le 22 mars 2012 et modifié le 21 mars 2017.






















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