samedi 20 février 2016

« Le musée d’Hitler » de Jan Lorenzen et Hannes Schuler

Arte diffusa Le musée d’Hitler (Sonderauftrag Führermuseum), documentaire de Jan Lorenzen et Hannes Schuler (2005). Pour illustrer le pillage par les dirigeants nazis d’œuvres d’art majeures destinées à constituer le fonds du musée désiré par Hitler à Linz (Autriche) et la stratégie des Alliés pour contrer ces spoliations artistiques, ce film enquête sur le périple suivi par L'adoration de l'agneau mystique, célèbre retable des frères Van Eyck, lors de la Seconde Guerre mondiale. 
Livres, documentaires, expositions, articles de presse… Depuis quelques décennies, les enquêtes se sont multipliées sur le pillage par les nazis des œuvres d’art européennes admirables des collections publiques (musées) et privées : celles de galeristes, marchands d’art, collectionneurs.

C’est la stratégie des Alliés et de la résistance qui inspire Le Train, de John Frankenheimer (1964), et The Monuments Men  de George Clooney (2013).

Ce documentaire s’intéresse particulièrement à l’enquête visant L’Adoration de l'Agneau mystique, célèbre et convoité retable des frères Hubert (Hubrecht ou Hubertus) Van Eyck (v.1366-1426), de l'école des primitifs flamands du XVe siècle, et Jan Van Eyck (v.1390-1441), portraitiste.

Le « musée idéal » d’Hitler
Peintre sans talent, Hitler nourrissait le rêve de fonder à Linz (Autriche), où il avait un musée monumental “témoin de sa grandeur” et de celle du IIIe Reich, et preuve de la supériorité de l’art aryen, classique. Pièce maitresse de ce futur musée : L’Adoration de l'Agneau mystique. Sans oublier les chefs d’œuvre de Léonard de Vinci, Raphaël, Bruegel, Rembrandt…
Il en a dessiné les plans et durant la guerre, œuvra à son édification en “organisant le pillage des plus grandes œuvres de ce qu'il appelait "l'art véritable" (par opposition à l'"art dégénéré" de la modernité)”.
“Quitte à rappeler à l'ordre le fidèle Goering , dont la voracité de collectionneur fit parfois de l'ombre à l'entreprise”.

Dès 1938, Hans Posse, galeriste à Dresde, est désigné responsable du projet. Il dressse une “liste idéale” d’œuvres dont beaucoup sont introuvables ou à l’étranger.

Deux historiens d’art allemands sont mandatés pour chercher dans les fonds et entrepôts de musées français et néerlandais les œuvres d’arts susceptibles de combler le Führer et de la culture germanique.

En quelques semaines, ils dressent des listes de chefs-d'œuvre à dérober dans les grands musées européens - et dans les châteaux de la famille royale britannique.

Le résultat de ce travail : un mémoire d’une centaine de pages comportant la liste d’œuvres artistiques qui depuis le Moyen-âge auraient été prises indûment en Allemagne. Parmi ces œuvres : le retable au prix inestimable.

L’Adoration de l'Agneau mystique ou Autel de Gand (en néerlandais : Het Lam Gods, ou L'Agneau de Dieu), est un polyptyque peint sur bois. Il a été commandé par Joost Vijdt, riche marguillier de l’église Saint-Jean, devenue la cathédrale Saint-Bavon de Gand, pour la chapelle privée de son épouse. Commencé par Hubert van Eyck, le polyptyque est achevé en 1432 par Jan van Eyck après la mort de son frère en 1426. Il est installé le 6 mai 1432 sur l’autel de la chapelle du commanditaire, dans l’église Saint-Jean. Pour des raisons de sécurité, il est placé dans la chapelle principale de la cathédrale.

En France, à l'été 1939, Jacques Jaujard, directeur des musées nationaux, “organise l'évacuation du Louvre et la mise en lieu sûr des collections, par exemple au château de Chambord”.

Après la défaite française, l’occupant allemand nazi transforme le musée du Jeu de paume (angle de la rue de Rivoli et de la place de la Concorde à Paris) en entrepôt central pour leur précieux butin constitué en particulier des collections privées de familles Juives arrêtées ou en fuite. Rose Valland (1898-1980), attachée de conservation au musée du Jeu de Paume, répertorie secrètement les toiles et transmet les informations à la Résistance…

En Belgique, “quelques jours avant l'invasion de mai 1940, on envoie vers le Sud le grand trésor national, L'adoration de l'agneau mystique, retable des frères Van Eyck”, chef-d'œuvre de la peinture des primitifs flamands. Direction : le Vatican, afin de placer l’œuvre sous la protection du Pape Pie XII.

Mais l’Italie entre en guerre, le “convoi est surpris par l'offensive allemande et s'achemine vers le château de Pau, avec l'accord du gouvernement français”.

Malgré ses réticences, le gouvernement de Vichy remet le retable aux autorités allemandes. Ce retable rejoint d’autres chefs d’œuvres enfouis dans une mine de sel à Altausse (Autriche), et est retrouvé par les Alliés.

Il « est finalement revenu en Belgique dans sa cathédrale d'origine, Saint-Bavon à Gand, mais l'un de ses dix panneaux n'a pas été retrouvé à ce jour ».

Nourri d’images d’archives et d’interviews de témoins – Frédérique Hébrard - et d’historiens – Christine Desroches Noblecourt, Birgit Kirchmayr, Peter Schmidt -, ce documentaire a été sélectionné pour le FIPA  (Festival International de Programmes Audiovisuels) à Biarritz, en 2006, dans la sélection Grands reportages et faits de société.

Les 21 et 25 février, 2, 4, 8, 14 mars 2016, Histoire diffusera A la recherche de l'art perdu. Les Monuments Men, documentaire de Cal Saville : "Dès l'arrivée d'Hitler au pouvoir, les spoliations se sont multipliées en Allemagne. Pendant toute la guerre, les nazis se sont servis dans les collections des pays européens qu'ils soumettaient. Hitler et Goebbels ont littéralement pillé l'histoire de l'art. Aussi, dès 1943, les Monuments Men, experts d'art, se donnèrent pour mission de parcourir l'Europe à la recherche des œuvres manquantes pour les recenser et les rendre à leurs propriétaires. Des mines souterraines aux châteaux isolés qui les abritaient, ils ont tout fait pour sauver les oeuvres. Les recherches continuent encore aujourd'hui, l'ensemble du trésor volé des nazis n'ayant pas été intégralement localisé".

Le musée d’Hitler  (Sonderauftrag Führermuseum), de Jan Lorenzen et Hannes Schuler
France, Allemagne, Pays-bas, 2005, 94 min
Sur Arte le 25 février 2014 à 8 h 55
Visuels : © Ottonia/Films à Trois/T. Butzmann/E. Mädler/M. Erdenberger/S. Osswald

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Les citations proviennent du communiqué de presse. Cet article a été publié le 24 février 2014.

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