mardi 24 octobre 2017

« Brooklyn Yiddish » par Joshua Z. Weinstein


 « Brooklyn Yiddish » (Menashé), réalisé par Joshua Z. Weinstein, sortira en France le 25 octobre 2017. Les efforts de Ménashé, veuf américain juif orthodoxe, pour gagner la garde de son fils. Un film sensible sur la tentative de Ménashé, veuf juif vivant dans le quartier hassidique de New York pour obtenir la garde de son fils Ruben.


« Borough Park, quartier juif ultra-orthodoxe de Brooklyn. Menashé, modeste employé d’une épicerie, tente de joindre les deux bouts et se bat pour la garde de son jeune fils Ruben. En effet, ayant perdu sa femme, la tradition hassidique lui interdit de l’élever seul. Mais le Grand Rabbin lui accorde de passer une semaine avec son fils ; l’ultime occasion pour Menashé de prouver qu’il peut être père dans le respect des règles de sa communauté ».

Cinéaste documentariste (Drivers Wanted, Flying On One Engine) né aux Etats-Unis, Joshua Z. Weinstein a beaucoup voyagé, a découvert la complexité humaine. Aime les gens. Et cela se sent. Il présente Menashé, maladroit dans son travail modeste, maladroit dans la surveillance de son fils tant aimé Ruben, mais prêt à surmonter les problèmes, les réticences de certains de ses proches, pour obtenir la garde de Ruben. Ménashé ne dissimule pas combien son mariage arrangé fut peu heureux.

Mais, dans ce film, manquent les personnages féminins – par exemple, les mères des amis d’école de Ruben qui auraient pu l'aider – et la famille de Menashé.

Le film a été distingué par le Prix du Jury à la 43e édition du Festival de Deauville en 2017.


CITATIONS DE JOSHUA Z. WEINSTEIN
(Propos recueillis à Berlin, le 13 février 2017, 
par Séverine Danflous pour La Septième Obsession)

« J’ai fait ce film parce que l’univers hassidique me semblait noble – exotique aussi – mais noble : un univers à la fois éloigné et proche. Je me disais que cela faisait partie de moi, que les hassidim sont un peu mes frères : je suis juif, ils sont juifs. Mais rien ne nous relie si ce n’est nos racines. Il y a quelques années, on aurait été dans les mêmes endroits, nos racines plantées dans le même sol, mais là, nous sommes comme déconnectés les uns des autres. Pour moi, le cinéma est un moyen de comprendre ceux qui nous semblent différents, étrangers. J’ai fait ce film pour approcher cette différence. Je pense que l’émotion que procure le cinéma donne accès à la vérité, ou bien qu’elle est une part importante de la vérité. Ce film était une façon de comprendre la société et en particulier le microcosme hassidique – auquel je suis attaché – tout en épousant des problématiques plus larges. Le but était de comprendre dans quelle société évolue Menashé, qui a un point de vue singulier, unique et très particulier, car il ne se fond pas totalement dans le milieu hassidique ».

« Dans un premier temps, je suis allé m’immerger dans le milieu hassidique, dans les cafés. Je suis allé prier avec eux, me fondre un peu dans le décor, puis j’ai expliqué assez vite que je cherchais des acteurs pour jouer dans un film. On m’a dit très vite que ce ne serait pas possible puis j’ai rencontré un ami qui fait des vidéos et des clips musicaux au sein de la communauté et qui m’a présenté Menashé. On a fait des tests avec lui devant la caméra et ça a immédiatement fonctionné. Régulièrement, il fait des animations dans les fêtes religieuses, mariages et bar-mitsva... Il était d’emblée très drôle mais j’ai vu dans son regard quelque chose d’autre : tant de peine. Il me semblait si vulnérable mais avait une présence d’une rare intensité. Il savait être présent, juste présent. Alors j’ai su que j’allais faire ce film avec lui, avec son histoire à lui. Nous avons beaucoup parlé, il m’a raconté son histoire : la mort de son épouse et la perte de la garde de son fils. C’était à la fois spécifique aux pratiques de cette micro-société hassidique et en même temps, totalement universel : la paternité, se faire arracher son fils et essayer de tout faire pour le reprendre. Dans mon esprit, cela évoquait des films de Cassavetes comme Une femme sous influence par exemple. Nous sommes partis de la vérité de cette émotion pour faire le film ».

« Je dirais que mon film est le portrait d’un homme, le plus honnête possible, qui témoigne aussi bien des aspects négatifs que des aspects positifs des personnages et du hassidisme. Il ne s’agissait pas de proposer un panégyrique. J’ai cherché à montrer des choses pénibles aussi : les femmes qui n’ont pas le droit de conduire, les abus de pouvoir… mais cela passe en arrière-plan car ce n’est pas l’histoire que je devais raconter. Cela en fait partie mais comme toile de fond car je suis conscient des aspérités du sujet. Evidemment, j’aurais pu faire un film sur les travers du hassidisme, mais il existe tant de belles histoires à raconter qu’il est dommage de ne pas le faire – et je n’avais jamais vu cette histoire racontée au cinéma. Il est important de raconter des histoires inédites,. Je me devais de raconter une histoire qu’on avait encore jamais vue au cinéma. C’est ça qui m’excitait, m’enthousiasmait ».

« Je suis très admiratif du néo-réalisme, de la Nouvelle Vague française, du Nouvel Hollywood, et je suis sûrement influencé par quelques réalisateurs comme Cassavetes, Martin Scorsese, et plus récemment par les frères Dardenne. J’aime la vérité au cinéma : j’ai adoré Toni Erdmann, de Maren Ade, que je trouve tout à fait brillant. J’aime les films qui vous font éprouver une émotion forte, non factice ou fabriquée, pas une image de façade ou artificielle, et les films qui ont une certaine distance humoristique. Ce qui m’a plu dans Toni Erdmann c’est que l’on ressent cet humour derrière des choses plus graves : c’est un humour qui témoigne de l’ironie de la vie. Je crois en fait que si vous ne riez pas des sujets un peu lourds, il y a quelque chose qui ne va pas chez vous ».

« J’aime les acteurs. Et j’aime les acteurs qui ont quelque chose d’unique. Je ne choisis pas de filmer quelqu’un parce qu’il est beau ou photogénique. Filmer des personnes juste parce qu’elles sont belles ne présente pas d’intérêt à mon sens : pour voir ces personnes il me suffit d’ouvrir un magazine de mode. Je m’intéresse à la présence, à l’évolution d’un acteur dans le cadre. J’aime voir des acteurs qui ressemblent aux gens que l’on croise dans la rue. C’est cela qui me fascine, ce pourquoi j’aime raconter des histoires et des histoires qui soient celles de véritables gens ».

« Le symbolisme de l’eau m’intéresse particulièrement. Je pense que, de manière universelle et profonde, se laver est lié à une forme de renaissance spirituelle, une purification physique et psychique. Les femmes se rendent au Mikvé afin de se purifier après leurs menstruations. Il me semble que la scène est forte car elle est liée à cela. Quelque soit votre religion ou vos coutumes, l’eau véhicule un rapport d’ordre spirituel. Il ne s’agit pas seulement d’hygiène mais de régénération spirituelle et c’est une façon de se retrouver intimement, de se ressourcer. L’esprit et le corps se confondent et ce rapport à l’eau est commun à toutes les cultures. Cette scène dans laquelle Menashé relie son corps et son esprit est l’illustration métaphorique de la réconciliation heureuse de sa spiritualité et de sa paternité ».


« Brooklyn Yiddish » par Joshua Z. Weinstein
2017, 1 h 22
Avec Menashe Lustig (Menashe), Ruben Niborski (Rieven), Yoel Weisshaus (Eizik), Meyer Schwartz (Rabbi)
Prix du Jury à la 43e édition du Festival de Deauville en 2017.
Sortie le 25 octobre 2017 en France
Le 16 novembre 2017 à 20 h 15, projection-débat organisée par la Maison de la Culture Juive au Royal Palace de Nogent-sur-Marne

Visuels
© Yoni Brook
© Shtick Film, LLC
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© Federica Valabrega
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© Robin Holland

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Les citations sont du dossier de presse.

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