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« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
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vendredi 13 septembre 2024

« Les chevaux de Géricault »

Le Musée de la Vie romantique présente l’exposition « Les chevaux de Géricault ». 
« Depuis ses débuts, Géricault observe ces équidés, les monte et réalise des centaines de dessins et de tableaux dans lesquels il explore l’anatomie, le mouvement, sans jamais oublier les émotions de l’animal. Du champ de bataille au four à plâtre et de l’écurie au champ de course, la centaine d’œuvres exposées témoigne chez Géricault d’une véritable passion pour le monde équestre. Elle révèle aussi l’importance du cheval dans la vie quotidienne au XIXe siècle, et la faculté pour tout artiste de l’étudier et de l’utiliser dans ses œuvres. »

« À l’occasion du bicentenaire de la mort du peintre Théodore Géricault (1791­1824), le musée de la Vie romantique présente une exposition inédite qui explore le thème du cheval, un motif puissant et omniprésent dans l’œuvre de l’artiste. Réunissant une centaine d’œuvres exceptionnelles, l’exposition propose un nouveau regard sur ce peintre romantique qu’est Géricault. »

« Cheval antique, cheval anglais, cheval militaire, courses de chevaux, portraits de têtes, de croupes, portraits équestres... Les multiples visages du cheval sont abordés dans cette exposition. Une centaine d’œuvres exceptionnelles, provenant de collections publiques et privées, permettent la redécouverte picturale de cet animal intrinsèquement associé à Géricault. À ce propos, le poète Théophile Gautier écrira en .... « depuis les frises du Parthénon, où Phidias a fait défiler ses longues cavalcades, nul artiste n’a rendu comme Géricault l’idéal de la perfection chevaline. »

« Depuis sa formation chez Carle Vernet puis dans l’atelier de Pierre Guérin, Géricault observe ces équidés, les monte et réalise des centaines de tableaux et des milliers de dessins dans lesquels il explore l’anatomie, le mouvement, l’expressivité, sans jamais oublier les émotions de l’animal. »

Cette exposition bénéficie du label « Olympiade culturelle ». Une programmation culturelle pluridisciplinaire associée à l’exposition est mise en place en lien avec les Jeux Olympiques et Paralympiques.

Le commissariat de l'exposition est assuré par Gaëlle Rio, directrice du musée de la Vie romantique, et Bruno Chenique, historien de l’art, spécialiste de Géricault.


LE PARCOURS DE L’EXPOSITION

LES CHEVAUX DE GÉRICAULT
« À l’occasion du bicentenaire de la mort de Théodore Géricault (1791-1824), le musée de la Vie romantique rend hommage à ce peintre, ami et voisin d’Ary Scheffer – qui vécut dans cette maison –, en présentant cette exposition consacrée aux chevaux. »

« Depuis sa formation chez Carle Vernet puis dans l’atelier de Pierre Guérin, Géricault observe ces équidés, les monte et réalise des centaines de tableaux et des milliers de dessins dans lesquels il explore l’anatomie, le mouvement, l’expressivité, sans jamais oublier les émotions de l’animal. »

« Grâce à une centaine d’œuvres exceptionnelles, on découvre les multiples visages du cheval, ainsi que les fascinantes représentations de têtes, de poitrails (poitrines) ou de croupes (derrières). Du champ de bataille au four à plâtre et de l’écurie au champ de course, cette diversité d’images témoigne chez Géricault d’une véritable passion pour le monde équestre, développée depuis l’enfance. Elle révèle aussi l’importance du cheval dans la vie quotidienne au XIXe siècle, et la faculté pour tout artiste de l’étudier et de l’utiliser dans ses œuvres. »

« L’exposition invite dans un parcours décliné en cinq sections – intitulées Le cheval politique, L’écurie sanctuaire, À Rome : la Course de chevaux libres, À Londres: prolétaires et dandies, et La mort du cheval –, tout en suivant la vie du peintre. »

1 - Le cheval politique
Le saviez-vous ?
« En juillet 1814, Théodore Géricault s’engage dans le corps des mousquetaires du roi Louis XVIII, avec une partie de la jeunesse française soucieuse de soutenir la paix européenne. »

« Théodore Géricault naît à Rouen pendant la Révolution, en 1791, et grandit au rythme des batailles napoléoniennes sous l’Empire. Dispensé de rejoindre l’armée de Napoléon grâce à son statut social et à son aisance financière, il se voue à la peinture. En 1812, alors qu’il n’a que 21ans, Géricault expose au Salon du Louvre son premier tableau: le Portrait équestre de M.D. [Dieudonné], pour lequel il a multiplié les études préparatoires. Cette peinture monumentale consacre le romantisme de Géricault, nourri de mélancolie et d’opposition politique. »

« Alors qu’il est engagé dans le corps des mousquetaires du roi Louis XVIII, avec une partie de la jeunesse française soucieuse de soutenir la paix européenne, l’artiste réalise pour le Salon de 1814 son Cuirassier blessé, quittant le feu. Dans ce tableau où le motif du cheval est central, Géricault manifeste son empathie pour les vaincus de l’histoire. »

« Tandis qu’il prépare son grand Radeau de la Méduse (1818-1819), Géricault se tourne à nouveau vers les malheurs et les atrocités des guerres napoléoniennes. » 

« Il représente le champ de bataille avec de jeunes soldats blessés et des chevaux, à l’impressionnante force musculaire, exténués. Il évoque aussi les mouvements d’indépendance des peuples d’Amérique du Sud et la guerre menée par les affranchis de Saint-Domingue contre l’armée napoléonienne venue rétablir l’esclavage. »

« Dans ces tableaux historiques et politiques, l’artiste accorde une importance particulière à tous les types de chevaux, petits et grands, glorieux et vaincus, blessés et morts. »

Cheval cabré dit Tamerlan
, 1814, Rouen, musée des Beaux-arts 
« Tamerlan, ce cheval blanc cabré et richement paré, parfaitement exécuté dans la représentation de sa force, sa musculature et la vivacité de son mouvement, incarne l’essence même du cheval chez Géricault. Afin de saisir le mouvement de l’animal, le peintre a fait de nombreuses recherches pour capter son énergie, sa toute puissance et son caractère majestueux de cheval impérial, favori de l’empereur. »
« Il cherche son cheval, il le cherche dans la rue, sur les routes, chez l’oncle Caruel, propriétaire d’une magnifique demeure à Versailles et de plusieurs attelages.
Toujours à Versailles dans les écuries de l’Empereur, il peint les étalons célèbres : Tamerlan, Néron. Mais en vérité ce cheval, son cheval est en lui, le bel animal, c’est lui. »
Denise Aimé-Azam,
La Passion de Géricault, 1970

2 - L’écurie sanctuaire
« Destiné par son père avocat au même métier que lui, Théodore Géricault, passionné de chevaux, entre en 1808 dans l’atelier de Carle Vernet grâce à la complicité de son oncle. Célèbre peintre de batailles, Vernet est aussi connu pour son intérêt pour ces équidés. Son fils, Horace, alors âgé de 19 ans, devient l’ami et le compagnon de chevauchées de Théodore. »

« À la fin de l’année1810, Géricault entre dans l’atelier de l’artiste néoclassique Pierre Guérin, pour se préparer à son futur métier de peintre d’histoire. Il continue son exploration du monde équestre sous toutes ses formes. Très peu encouragé par Guérin et lassé de l’atelier, il se rend aux casernes de Courbevoie pour faire des études de chevaux. Il profite aussi de ses séjours au château du Grand-Chesnay, propriété de son oncle, et de la proximité des écuries impériales à Versailles pour observer les différences de race, d’âge, de force, de robe et de poil de ses modèles, qu’il peint d’après nature. »

« Tout au long de sa vie, Géricault ne cesse de représenter des chevaux à l’écurie et en liberté. Au-delà du simple motif animalier, il défend l’idée que cet animal exprime la diversité de la psychologie humaine ainsi que la puissance des passions et des sentiments. Le peintre restitue de la sorte la trivialité du quotidien dans les scènes de soin du cheval, de tendresse et de monte. L’écurie devient pour Géricault l’annexe de son atelier et le creuset de son inspiration. »

Cinq chevaux vus par la croupe dans une écurie,
1811-1812,
Paris, Musée du Louvre
« Ici, l’artiste ne prend plus ses modèles de chevaux dans les parades militaires mais va les chercher dans les écuries. Géricault peint ses croupes ou ses poitrails sur le motif, d’après nature. Avec ses croupes, il innove totalement, non seulement par l’angle peu conventionnel qu’il choisit pour représenter les chevaux mais par le réalisme presque scienti.que de ses observations. »

3 - À Rome.: la Course de chevaux libres
« Après sa tentative infructueuse au concours du prix de Rome du mois de mars 1816, Théodore Géricault décide de se rendre en Italie à ses frais. Il traverse la Suisse, séjourne à Genève, passe par Florence puis arrive à Rome à la mi-novembre 1816. » 

« Fasciné par l’Antiquité et par Michel-Ange, il s’intéresse à la vie romaine. À la manière d’un reporter, il dessine des scènes quotidiennes de la rue, de la proche campagne, des réjouissances publiques, de la vie religieuse et politique. »

« En février 1817, il s’inspire du célèbre carnaval romain pour un projet de tableau monumental. Il représente ainsi une course de chevaux sauvages qui a lieu entre la Piazza del Popolo et la Piazza Venezia en passant par la Via del Corso. À cette occasion, la rue devient le théâtre d’une course acharnée où les accidents mortels sont fréquents. Les principaux moments ayant retenu l’attention du peintre sont ceux où les palefreniers, la tête couverte d’un bonnet rouge, essayent de retenir (la mossa) ou de rattraper (la ripresa) des chevaux frénétiques et martyrisés pour les besoins de la fête. Géricault érige ici de véritables héros devant faire face aux corps puissants et convulsés de chevaux, symboles d’une liberté entravée. » 

« Géricault rapporte de Rome d’innombrables dessins et une vingtaine d’esquisses peintes de la Course de chevaux libres, tableau inachevé aujourd’hui disparu. »

La Course des chevaux libres sur le Corso à Rome
(La mossa), 1817, Genève, Fondation Marie Anne Poniatowski Krugier
« Dans ce dessin préparatoire au projet de tableau monumental, Géricault représente des palefreniers menant une douzaine de chevaux au départ de la course (la mossa), place du Peuple à Rome. Ce lieu est matérialisé par une tribune d’apparat, où siègent les notables, que l’on devine en haut de la composition. Retenus avec force, les coursiers s’impatientent derrière une corde avant de s’élancer, nus et libres, dans la poussière sur le pavé rugueux. Le peintre se réfère à l’Antiquité en représentant, en frise, des corps d’athlètes à la nudité héroïque tentant de dompter des bêtes sauvages. »

4 - À Londres.: prolétaires et dandies
« Au lendemain du grand succès obtenu par Le Radeau de la Méduse, présenté au Salon de 1819 à Paris, Géricault, faute d’avoir vendu son tableau monumental à l’État, décide de l’exposer à Londres en 1820. De retour en Angleterre l’année suivante, il découvre deux visions opposées du monde équestre : les chevaux laborieux et les chevaux de course. »

« Géricault commence la publication d’une série de lithographies dites « anglaises », Various Subjects, éditée par Hullmandel, l’un des meilleurs imprimeurs de l’époque. »

« Ces treize lithographies sont consacrées aux acteurs et aux victimes de la révolution industrielle à Londres, capitale économique alors noyée dans une épaisse fumée de charbon. De retour en France en 1822, il s’intéresse au développement de l’industrialisation et au rôle de la force motrice des chevaux dans les mines. »

« Grâce au marchand de chevaux Adam Elmore, qu’il rencontre à Londres, Géricault fréquente la haute société anglaise. Il étudie les .ns chevaux de course, souvent d’origine arabe, les garçons d’écurie, les jockeys et les propriétaires avides de remporter des courses prestigieuses leur procurant gloire et prospérité. Plusieurs dessins et aquarelles décrivent ce monde privilégié fait de promenades équestres où semblent régner la splendeur des chevaux de race, mais aussi la mode et le luxe des étoffes, telles les robes des amazones. »

Étude préparatoire pour le Derby d’Epsom
, 1821, New-York, Courtesy of Kristin Gary Fine Arts
« C’est en compagnie du marchand Adam Elmore, que le peintre se rend sur l’hippodrome d’Epsom, à une dizaine de kilomètres du centre de Londres, pour assister aux courses. Véritable phénomène social, l’événement rassemble 200 000 personnes chaque année.
Mais en réalité, ici, Géricault n’a pas peint Le Derby d’Epsom de 1821, ni même la victoire du champion de son commanditaire, il a peint l’arrivée d’une course qui vaut pour toutes les courses. C’est une oeuvre universelle, en l’honneur du sport hippique. »
« Ce tableau peint à l’anglaise comme une aquarelle, est une image fantastique où lévitent sous un ciel d’orage des coursiers longilignes aux allures irréelles. »
« Ces chevaux ne galopent pas mais volent; l’artiste cherche le moment de la fusion du cheval et de l’espace. »

5 - La mort du cheval
« Les guerres napoléoniennes (1803-1815) entraînent la mort d’un million de militaires et civils français, ainsi que de centaines de milliers de chevaux. Géricault s’intéresse au cheval blessé, agonisant sur le champ de bataille, victime innocente de la folie des hommes. »

« À Londres, lors de ses séjours de 1820 et 1821, l’artiste est confronté à une tout autre mort, celle, lente et cruelle, des chevaux laborieux, force de travail indispensable à la révolution industrielle. Il représente des carcasses, abandonnées à terre ou transportées chez l’équarrisseur, comme un dernier convoi funèbre. De retour en France en 1822, Géricault consacre encore plusieurs de ses études aux dépouilles de chevaux. Avec sa lithographie du Cheval mort, il revient au champ de bataille napoléonien, où des corbeaux tournoient au-dessus des restes de l’animal. » 

« Il explore aussi une lutte à l’issue fatale, celle d’un corps-à-corps cruel entre un lion et un cheval. »

« Dans un tableau envoûtant et quasi testamentaire, Géricault s’inspire du poète romantique anglais Byron pour peindre le héros légendaire Mazeppa, un jeune page polonais devenu l’amant de la femme de son maître. Condamné à être fouetté puis attaché nu sur le dos d’un cheval sauvage lancé dans une course éperdue, Mazeppa échappe en définitive à la fin atroce qui lui était réservée tandis que le cheval meurt d’épuisement. »

Cheval blessé sur un champ de bataille
, 1814, Paris, collection particulière 
« Fortement marqué par les souffrances et massacres des guerres napoléoniennes, Géricault questionne la représentation des animaux blessés. Ici, il peint un cheval à l’agonie sur le champ de bataille victime de la guerre. L’animal, en occupant l’ensemble du tableau, évoque à lui seul les malheurs de la guerre et renforce le sentiment de chaos et de vacuité des événements. »


Gaëlle Rio, directrice du musée de la Vie romantique et Bruno Chenique, historien de l’art, spécialiste de Géricault

« En quoi Géricault incarne-t-il l’artiste romantique et quels étaient ses liens avec les autres artistes romantiques ?*
Bruno Chenique  : Il faut avant tout distinguer deux formes de romantisme : celui, incarné par Géricault, qui se veut politique et révolutionnaire et celui qui s’exprimera après les désillusions de la révolution de 1830 – portant le roi Louis Philippe à la tête de la monarchie de Juillet – avec le concept de l’art pour l’art, sans engagement politique.
Né pendant la Révolution (en 1791), Géricault a connu les grands bouleversements européens: avènement de Napoléon, défaite de Waterloo et retour sur le trône de la dynastie des Bourbons en 1815. Son art est à l’écoute de ces profonds changements de la société française.
Géricault avait un cercle d’amis très vaste dont la plupart étaient politiquement très engagés, aussi bien royalistes, bonapartistes que républicains. Ses liens avec des peintres romantiques comme Ary Scheffer, Horace Vernet et Eugène Delacroix sont bien documentés. Tous ont été influencés par sa personnalité, sombre et lumineuse, et par ses audaces esthétiques.

Pourquoi le thème du cheval est-il obsessionnel chez le peintre ?
Bruno Chenique : À l’époque de Géricault, le cheval joue un rôle bien évidemment central dans la vie quotidienne des Français mais aussi sur les champs de bataille et au cœur des activités économiques. Né à Rouen dans une famille normande, le jeune Géricault passe toutes ses vacances à Mortain (près du Mont-Saint-Michel).
Son père, avocat, est un excellent cavalier. Géricault se prend naturellement de passion pour le monde équestre. S’il fut l’élève de Pierre Guérin dans l’objectif de devenir un peintre d’histoire, il étonne aussitôt son maître et ses amis en allant peindre des croupes de chevaux à la caserne de Courbevoie. Le succès d’estime est immédiat et, dès lors, il ne cesse d’explorer toutes les étapes de la vie du cheval (de la naissance à la mort, en passant par la tendresse et la sexualité) en l’associant à sa vision hautement poétique, humaniste et sociale du monde.

Comment avez-vous conçu le parcours de l’exposition et des cinq parties qui la composent ?
Gaëlle Rio : Nous sommes partis du constat que le motif ou le thème du cheval irrigue toute la vie de Géricault, de son enfance à sa carrière d’artiste, en passant par sa formation, ses voyages à Rome et à Londres. Géricault ne cesse de représenter des chevaux tout au long de sa vie. Sa fascination pour les chevaux se développe au cours de ces villégiatures dans le bocage normand ainsi qu’à Rouen et à Paris. Géricault commence par être un très bon cavalier pour ensuite dessiner le cheval, le sculpter, l’ausculter dans les moindres recoins de sa chair. Ainsi, il nous a semblé pertinent de présenter les différents visages du cheval selon les moments importants de la vie du peintre.
Nous avons opté pour un parcours thématique qui permet de classer les différentes images de chevaux selon le contexte dans lequel elles s’inscrivent, qu’il soit militaire, festif, industriel ou sportif. Nous avions au départ une vingtaine de thématiques que nous avons regroupé en cinq sections intitulées Le cheval politique, L’écurie sanctuaire, À Rome : la Course de chevaux libres, À Londres: prolétaires et dandies, et La mort du cheval.

Cette exposition est bien plus qu’une exposition animalière, qu’y a-t-il au-delà de la représentation du cheval ?
Gaëlle Rio : Le cheval chez Géricault est bien autre chose que l’animal. Si l’artiste fait des chevaux les protagonistes les plus importants de ses peintures, il serait réducteur de le considérer comme un simple peintre animalier. Ses chevaux sont présents dans des peintures d’histoire et des scènes de genre. Géricault introduit aussi le portrait dans le genre équestre, caractérisé par une individualité et l’expression d’émotions quasiment humaines.
Le peintre porte ainsi sur le cheval un regard différent, politique voire psychanalytique. Le cheval est vu par Géricault comme le représentant de l’homme, comme une amplification de son moi. N’oublions pas que le cheval est le seul animal que l’on décrit avec le vocabulaire humain. On vante sa robe et ses jambes. Le cheval dans l’art de Géricault c’est aussi et surtout l’âme de l’homme, ses instincts, sa douceur, sa violence, ses pulsions sexuelles et mortifères.

Pouvez-vous expliquer ce que l’exposition apporte de nouveau sur la connaissance de l’oeuvre de Géricault ?
Bruno Chenique : Depuis 1991, date de l’exposition au Grand Palais pour marquer le bicentenaire de sa naissance, les connaissances sur Théodore Géricault ont considérablement augmenté. Il est intéressant, pour le bicentenaire de sa mort, de tenter une nouvelle approche en dialoguant avec ses chevaux pour mieux comprendre ce que Géricault a voulu nous dire à travers eux. Une telle exposition, curieusement, n’avait jamais été osée. Si cette dernière a bénéficié de prêts prestigieux notamment de la part du musée du Louvre, du musée des Beaux-arts de Rouen, un nombre important de collections privées ont répondu favorablement à notre appel. On peut ainsi revoir le fabuleux Mazeppa, d’après Byron, mais encore quelques œuvres inédites ou très rarement montrées comme le grand paysage anglais (offert par Géricault à Horace Vernet) et ceux des chevaux morts.
La sélection a été rigoureuse afin de montrer au public l’incroyable diversité de son art. Géricault, comme tous les grands génies, n’a pas un style, une manière de dessiner et de peintre, mais des dizaines. Cette exposition servira à de nouvelles recherches sur un peintre qui n’a pas .ni de nous étonner et nous fasciner. 

* En 1813, Géricault et son père déménagent au 23 rue des Martyrs dans un quartier en marge de la capitale qui prendra dix ans plus tard le nom de Nouvelle Athènes; non loin de la demeure d’Ary Scheffer (actuel Musée de la vie romantique) »



« - 26 septembre 1791 : naissance de Théodore Géricault à Rouen, fils de Georges Géricault, avocat et entrepreneur dans le tabac, et de Louise Caruel.
- 1797-1808 : études de Géricault à Paris, en pension rue de Babylone, puis au collège Stanislas et au lycée Louis-le-Grand (Lycée impérial).
- 1808 : Géricault entre dans l’atelier du peintre Carle Vernet, peintre d’histoire et de batailles et célèbre pour ses tableaux de chevaux. Il y étudie jusqu’en mars 1810.
- Novembre 1810 : Géricault entre dans l’atelier du peintre néoclassique Pierre Guérin qu’il fréquente jusqu’en 1816. Il y rencontre plus tard en 1815-1816 le jeune Eugène Delacroix.
- 1812 : Géricault expose pour la première fois au Salon du Louvre et présente le Portrait équestre de M. D*** [Dieudonné], pour lequel il obtient une médaille d’or.
- Automne 1813 : orphelin de mère depuis 1808, Géricault emménage avec son père au 23 rue des Martyrs dans le quartier de la Nouvelle Athènes à Paris, où il est voisin d’Horace Vernet ainsi que des familles du colonel Bro et de l’architecte Dedreux.
- 1814 : Géricault s’engage en mars dans la Garde nationale à cheval puis en juillet dans la Compagnie des Mousquetaires du roi. Il expose au Salon du Louvre Le cuirassier blessé, quittant le feu.
- 1816 : Après avoir échoué au concours du Prix de Rome de l’École des Beaux-arts, Géricault se rend à ses frais en Italie et y reste jusqu’en novembre 1817. Il séjourne à Rome et visite Naples et Florence.
- Février 1817 : Géricault assiste au carnaval romain au cours duquel se tiennent les traditionnelles courses de chevaux sauvages sur le Corso.
- Mars 1818-juillet 1819 : Géricault réalise des études et esquisses pour préparer Le Radeau de la Méduse.
- 1819 : Géricault présente Le Radeau de la Méduse au Salon du Louvre, sous le titre de « Scène de naufrage ».
- Mars 1819  : Géricault effectue son premier voyage à Londres en compagnie d’Horace Vernet.
- Avril 1820 : Géricault effectue son deuxième voyage à Londres, avec Nicolas-Toussaint Charlet pour présenter son Radeau de la Méduse.
- 1821 : Géricault séjourne toute l’année à Londres et publie des lithographies en association avec l’imprimeur Charles Hullmandel.
- 1822 : Trois chutes de cheval compromettent gravement sa santé.
- 26 janvier 1824 : Géricault meurt à l’âge de 32 ans après un alitement prolongé à la suite de plusieurs chutes de cheval au printemps 1822.
- 28 janvier 1824 : cérémonie funéraire de Géricault à Notre-Dame-de-Lorette, à Paris, suivie de son inhumation au cimetière du Père-Lachaise.
- 2 et 3 novembre 1824 : vente après décès de l’atelier de Géricault. Le musée du Louvre achète Le Radeau de la Méduse. »

Rappel historique 

« - 1792 : Première république
- 1795 : Directoire
- 1799 : Consulat
- 1804-1815 : Premier Empire
- 1815-1824 : Restauration avec Louis XVIII »


Du 15 mai au 15 septembre 2024
16 rue Chaptal, 75009 Paris
Tél. : 01 55 31 95 67
Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h. Fermé les lundis et certains jours fériés
Entrée libre dans les collections
Visuels :
Théodore Géricault, Cheval cabré dit Tamerlan, Rouen, musée des Beaux-Arts
© RMN-Grand Palais / image RMN-GP

Théodore Géricault, Cinq chevaux vus par la croupe dans une écurie, 1811-1812, Paris, musée du Louvre
© GrandPalaisRmn (musée du Louvre) / Philippe Fuzeau

Théodore Géricault, La Course de chevaux libres sur le Corso à Rome (la ripresa), 1817, Lille, Palais des Beaux-Arts Photo © RMN-Grand Palais (PBA, Lille) / Philipp Bernard

Théodore Géricault, Étude préparatoire pour le Derby d’Epsom, 1821, New-York, Courtesy of Kristin Gary Fine Arts

Théodore Géricault, Cheval blessé sur un champ de bataille, 1814, Paris, collection particulière


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