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dimanche 1 septembre 2024

John Heartfield (1891-1968)

John Heartfield (1891-1968) était un photographe, peintre allemand, illustrateur de livres (Upton Sinclair) juif renommé pour ses photomontages (couvertures, illustrations de livres) dadaïstes. Artiste communiste, il a consacré une partie importante de son travail à créer des affiches et tracts fustigeant la montée du nazisme et illustre, dès 1930, les couvertures du journal ouvrier allemand Arbeiter Illustrierte Zeitung (AIZ). Arte diffusera le 5 septembre 2024 à 00 h 45 « John Heartfield - L’art est une arme » de Katrin Rothe.

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John Heartfield (1891-1968) est né Helmut Herzfeld, dans une famille juive allemande socialiste. Condamné à une peine de prison pour blasphème en 1895, son père, poète, choisit l'exil en Suisse, puis à Salzbourg (Autriche).

En 1899, à la mort de leurs parents, les quatre enfants Herzfeld sont élevés par un oncle.

En 1905, Helmut Herzfeld  étudie pour devenir libraire, et artiste. De 1908 à 1911, il suit les cours à l'Ecole d'arts appliqués de Munich, gagne sa vie en 1912 comme graphiste publicitaire à Munich. Par souci d'indépendance et pour se perfectionner, il entre à l'École des arts et de l'artisanat de Berlin-Charlottenbourg, où il suit l'enseignement du professeur Ernst Neumann-Neander.
   
En 1914, il effectue son service militaire et rencontre George Grosz.

En 1916, opposé au nationalisme allemand et à « Gott strafe England ! » (Que Dieu punisse l'Angleterre), il adopte un pseudonyme britannique « John Heartfield ». 

Avec son frère Wieland Herzfelde, qui ajoute un « e » à son nom patronymique, il crée la maison d'édition Malik-Verlag à Berlin et s'enthousiasme pour le mouvement dada. 

En 1918, avec Richard Huelsenbeck, Raoul Hausmann et Hannah Höch, John Heartfield crée le club Dada de Berlin.
 
Il adhère au Parti communiste d'Allemagne - son frère Wieland en est membre aussi - et il devient, dès 1928, selon Aragon, le « prototype de l'artiste antifasciste ». 

A la différence de nombreux artistes Dada, sauf Grosz et son frère Wieland, John Heartfield met son art au service de son militantisme, et veut « utiliser la photographie comme une arme » contre le racisme et le nazisme, contre les atrocités de la guerre, pour dénoncer la complicité du capitalisme et des forces destructrices, et annoncer l'avènement d'une future société meilleure. Il maîtrise le photomontage : "agrandissement, rupture d'échelles, de reproduction et de diffusion", contrastes... 

John Heartfield participe en 1919 à des tournées comme « monteur-dada » avec Johannes Baader, George Grosz, Raoul Hausmann et  Richard Huelsenbeck et à la Première foire internationale Dada à Berlin en 19202.

Dès 1920, il collabore avec Max Reinhardt : conception de décors, projections de films pour Erwin Piscator. Il rencontre Bertolt Brecht au Deutsches Theater de Berlin.

A partir de 1921, pour divers éditeurs dont la maison d'édition Malik, il recourt à la technique de photomontage pour concevoir des jaquettes et premières de couverture de livres. En 1929, il illustre le livre de Kurt Tucholsky, Deutschland, Deutschland über alles, avec des photographies et photomontages. Sa technique est commentée en Union soviétique, en 1931-1932. 

Grâce à l'héliogravure, les photomontages de John Heartfield sont distribués en 1932 et 1933 en format poster dans les rues de Berlin. « Les nouveaux problèmes politiques exigent de nouveaux moyens de propagande. Pour cela, la photographie dispose du plus grand pouvoir de persuasion  », déclare-t-elle.

De 1930 à 1933 en Allemagne, puis jusqu'en 1938 à Prague (alors en Tchécoslovaquie), il travaille comme illustrateur d'Arbeiter Illustrierte Zeitung (Journal ouvrier illustré, AIZ), hebdomadaire communiste allemand dont 237 photomontages de John Heartfield figurent en couverture du journal.

A l'arrivée au pouvoir du nazi Adolf Hitler à la chancellerie de la république de Weimar en 1933, John Heartfield fuit en Tchécoslovaquie. À Prague, il travaille pour Malik-Verlag et AIZ. En 1934, ses œuvres sont présentées à l'exposition internationale de caricatures du Cercle artistique Mánes. Le 1er novembre 1933, cet opposant politique juif allemand est déchu de sa nationalité.

« De son héritage dadaïste, Heartfield garde un humour subversif, une ironie mordante : Hitler, qui se prétend encerclé d'ennemis, est représenté en 1936 sous les traits d'un enfant boudeur qui crie au loup parmi ses soldats de plomb. Mais le rire, chez Heartfield, est toujours grinçant. Et nombre d'images font montre d'une grande violence, en écho aux discours de l'époque. "Vous n'avez plus de beurre ni de lard ?, demande Goebbels à la population. Vous pouvez bien manger vos juifs !" Et Heartfield, aussitôt, de lui faire une tartine. A l'époque, les photomontages antifascistes d'Heartfield lui assurent un succès retentissant. Ils sont repris dans Picture Post en Grande-Bretagne ou, en France, dans le magazine du PCF Regards, tandis que le tirage d'AIZ atteint 500 000 exemplaires », a observé Claire Guillot (Le Monde, 10 avril 2006).. 

En 1938, lors de l'annexion des Sudètes par l'Allemagne nazie, il se réfugie en Angleterre. En 1939, il contribue à l'exposition One man’s war against Hitler à l'Arcade Gallery à Londres. 

Durant la Deuxième Guerre mondiale, de 1940 à 1942, il est interné comme « étranger ennemi » et, en août 1942, il participe à l'exposition Allies Inside Germany à Londres.

Bénéficiaire d'un permis de travail en 1943, il travaille comme dessinateur indépendant, et pour des éditeurs anglais.

Le 31 août 1950, il revient en République démocratique allemande (RDA). Il s'installe à Leipzig jusqu'en 1956. Avec son frère, il collabore avec des théâtres (Berliner Ensemble, Deutsches Theater), des maisons d'édition et des organisations est-allemands.

Affaiblis par deux infarctus du myocarde (1951, 1952), il se remet au travail en 1954. En juin 1954, l'écrivain Stefan Heym propose l'admission de Heartfield à l'Académie des arts.

En 1956, John Heartfield se fixe à Berlin et est élu membre de l'Académie allemande des arts, où il a le titre de professeur en 1960. 

En 1962, son frère publie John Heartfield, son œuvre et sa vie.

John Heartfield est distingué par le Prix national de la République démocratique allemande pour l'art et la littérature (1957) et l’Ordre du mérite patriotique en or. 

En 1996, Joe Lee a réalisé un documentaire sur cet artiste.

En 2006, le Musée d'art moderne et contemporain de Strasbourg a présenté une exposition d'œuvres de John Heartfield.

« John Heartfield - L’art est une arme »
Arte diffusera le 5 septembre 2024 à 00 h 45 « John Heartfield - L’art est une arme », documentaire de Katrin Rothe.

« Avec une paire de ciseaux et du papier, il a fait de son art une arme que les nazis redoutaient. Retour sur la carrière mouvementée du satiriste John Heartfield (1891-1968), pionnier du photomontage et du graphisme moderne. » 

« C'était un pacifiste convaincu. Tout jeune, Helmut Herzfeld décida de transformer son nom allemand en John Heartfield, pour protester contre la haine des nationalistes de son pays envers les étrangers pendant la Première Guerre mondiale. »

« Dans les années 1920, il créa au sein de la société de production UFA un département dédié aux films d'animation, à travers lesquels il diffusait ses idées ».

« Membre du Parti communiste, le jeune artiste se rallia au mouvement dada et signa des affiches, couvertures de livres et illustrations graphiquement novatrices, suscitant la méfiance des autorités. »

« Il dut fuir en Tchécoslovaquie en 1933, début d'un exil de dix-sept ans qui le conduisit de Prague en Angleterre. »

« Alors qu'à Londres on le soupçonnait d'espionner pour l'URSS, on l'accusa d'être un agent étranger lorsqu'il revint en RDA après la guerre. Son travail dérangeait, et le régime de Staline avait déjà interdit le photomontage, déclaré pratique subversive... »

« Existence riche et mouvementée que celle de John Heartfield, dont tous les épisodes ont pu être récemment reconstitués grâce à la déclassification de nombreuses archives administratives. »

« Pour la raconter, ce documentaire inventif utilise la technique qui fut son langage privilégié, le papier découpé, dont l'artiste se servit comme une arme politique. »

« Ses photomontages féroces, en particulier ceux qu'il a réalisés durant la période nazie, étaient autant de boulets rouges envoyés à la face des autorités. »

« Éternel rebelle mais aussi travailleur insatiable, John Heartfield a révolutionné l'iconographie protestataire en créant des images saisissantes assorties de phrases chocs, marquant l'œil et l'esprit. Leur pouvoir d'évocation opère toujours. »



Allemagne, Autriche, Suisse, 2023, 52mn
Coproduction : ARTE/RBB, SRF, SRG SSR, Hanfgarn & Ufer, Mischief Films, Dschoint Ventschr Filmproduktion
Sur Arte le le 04 septembre 2024 à 0 h 45
Sur arte.tv du 04/09/2024 au 02/12/2024
Visuels : © Hanfgarn & Ufer Filmproduktion

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