Citations

« Le goût de la vérité n’empêche pas la prise de parti. » (Albert Camus)
« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
« Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. » (Vladimir Jankélévitch)
« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

dimanche 25 août 2024

« La loi sur l’IVG 1974 | Le discours de Simone Veil »

Les Archives nationales présentent dans leur site parisien, dans le cadre du cycle Les Remarquables, l'exposition gratuite « La loi sur l’IVG 1974 | Le discours de Simone Veil ». « Simone Veil, ministre de la Santé, est chargée du dossier. Ancienne déportée, haut fonctionnaire, ministre de la Santé, Simone Veil, a été chargée par le Président de la République Valéry Giscard d’Estaing, durant le gouvernement de Jacques Chirac, de dépénaliser l’avortement ou interruption volontaire de grossesse (IVG) présenté comme un problème de santé publique, donc de « forger un consensus au sein d’un Parlement très divisé sur la dépénalisation. Simone Veil proposa un projet de loi libéralisant l’accès à la contraception, remboursée par la Sécurité sociale, puis a défendu un texte de compromis lors de « débats longs et passionnés ». La loi a été adoptée « grâce au soutien de députés du centre et de la gauche. Simone Veil incarne cette réforme d’ampleur qui, désormais, porte son nom. » 

« Louise Weiss, une femme pour l’Europe » par Jacques Malaterre 
« Alger, la Mecque des révolutionnaires (1962-1974) » par Ben Salama 
Les mutilations génitales féminines
« La femme, la république et le bon Dieu » d’Olivia Cattan et d’Isabelle Lévy

Documentaires sur l'avortement sur Arte 

« Les Archives nationales, établissement du ministère de la Culture, sont le plus grand centre d’archives d’Europe. Mémoire de la France, elles conservent et communiquent aux publics les archives de l’État depuis le Moyen Âge, celles des notaires parisiens et des archives privées d’intérêt national. Elles contribuent à la connaissance de l’histoire et au partage des valeurs citoyennes auprès du grand public, en particulier des plus jeunes, par leurs expositions, publications et autres activités de médiation. »

« Afin de donner à voir et à comprendre ces documents symboliques de l’histoire de la Nation, les Archives nationales initièrent en septembre 2021 le cycle Les Essentiels, en partenariat avec France Culture et l’Institut national de l’audiovisuel. « Le cycle des Essentiels a été inauguré par les Archives nationales en 2021. Après la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789le décret d’abolition de l’esclavage de 1848 et l’ordonnance de 1944 accordant le droit de vote aux femmes, nous vous présentons aujourd’hui la loi d’abolition de la peine de mort de 1981, dernier volet du cycle. 

« Les Archives nationales inscrivent leur programmation dans une démarche résolument participative. Le public a voté pour les documents qu’il souhaite voir exposer dans le cadre du cycle Les Remarquables : des documents exceptionnels par leur forme, leur contenu, les acteurs et les objets auxquels ils font référence. »

« Après les Templiers, les figures de Simone Veil, Gustave Eiffel et Jeanne d’Arc seront à l’honneur, conformément au choix du public, qui, au moment même où le président de la République a souhaité constitutionnaliser la liberté des femmes de recourir à l’IVG, a plébiscité ce document à l’issue d’un vote organisé à l’été 2023. »

« À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, les Archives nationales ont inauguré le deuxième rendez-vous de leur cycle Les Remarquables, ayant débuté à l’automne 2023, et présentent le célèbre discours de Simone Veil défendant à la tribune de l’Assemblée nationale, en 1974, le projet de loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Un document emblématique de notre histoire contemporaine. »

« L’exposition, gratuite et au format volontairement resserré, invite le visiteur à découvrir le manuscrit original du discours et sa version dactylographiée, annotée de la main de Simone Veil. À travers ces deux ensembles de feuillets et les documents qui les accompagnent, c’est un moment décisif du combat pour la conquête des droits des femmes que les visiteurs peuvent (re)découvrir. » 

« Péril national depuis la Première Guerre mondiale, l’avortement devient un crime contre la sûreté de l’État, passible de la peine de mort sous le régime de Vichy. Après la Libération, les femmes recourant à l’interruption volontaire de grossesse et les personnes qui les aident encourent toujours la prison et de fortes amendes. La répression perdure jusqu’au milieu des années 1970. »

Les avortements clandestins laissaient des séquelles graves : stérilité, traumatismes, hospitalisations en urgence, parfois décès faute d'hygiène et de suivi médical.

« La loi autorise les femmes en situation de détresse à avoir recours à une interruption volontaire de grossesse dans un délai de dix semaines. Toutefois, son application s’avère lente et difficile, notamment du fait des résistances du corps médical. »

« Les militantes féministes se battent désormais pour l’accès au droit. Certains groupes continuent à pratiquer des avortements, en dehors de tout cadre médical, comme les militantes du MLAC d’Aix-en-Provence, jugées en 1977 pour exercice illégal de la médecine. »

« La loi Veil n’est, au départ, votée que pour une durée de cinq ans. Le texte est rediscuté à l’automne 1979 et adopté définitivement. » 

« Au fil des ans, la loi sur l’IVG est approfondie : l’acte est désormais remboursé par la Sécurité sociale (1982), les délais sont étendus jusqu’à douze semaines (2001), la notion de détresse est supprimée (2014). En 1993, la loi Neiertz crée le délit d’entrave à l’IVG pour répondre à la multiplication des actions des commandos anti-avortement. Délit qui est étendu au domaine numérique en 2017. »

« En 2023, après le recul du droit aux États-Unis, le président Emmanuel Macron s’engage à inscrire le recours à l’IVG dans la Constitution. Par ce texte adopté, la France est devenue le premier pays, en Europe, à inscrire la liberté de recourir à l’IVG dans sa Constitution. » En fait, la Cour suprême américaine a rappelé que les Etats fédéraux étaient compétents pour statuer en matière d'avortement.

L’exposition retrace l’histoire d’un combat « de la dépénalisation à la conquête d’un droit ». 

Mais elle ne souligne pas les enjeux politiques, médicaux et éthiques de ce combat. Si Simone Veil, ministre de la Santé, avait présenté l’avortement comme un problème de santé publique, Françoise Giroud, Secrétaire d'État chargée de la Condition féminine auprès du Premier ministre Jacques Chirac, militait pour un droit des femmes à l’avortement.

A l'Assemblée nationale, l'ancien Premier ministre Michel Debré proposa d'affirmer le principe du respect de la vie humaine « d'accueillir, de soutenir, protéger, promouvoir la maternité. La dénatalité est favorisée quand une société doute de l’avenir, quand des menaces ou des troubles la paralysent, enfin, quand des valeurs fondamentales sont abandonnées par ceux qui ont en charge de les faire respecte ». Il fustigeait ceux qui ne "mesuraient ni les conséquences individuelles, ni les suites sociales et politiques au sens le plus élevé du terme. Je souffre du mépris où est tenue la conception de la vie et l'absence d'éducation à la responsabilité en un temps où à juste titre chacun se veut responsable. Je suis scandalisé de la présentation qui nous est faite, tout ou rien, cette loi non appliquée ou une loi non applicable". 

Et au fil des décennies, la loi Veil a été dénaturée et ses garde-fous supprimés. Sans que Simone Veil ait exprimé d'indignation publique. 

En 2024, l’inscription dans la Constitution de loi garantissant la liberté pour les femmes d'avoir recours à l'avortement marque l’aboutissement de ce processus de métamorphoses qui occulte des problèmes majeurs : le nombre élevé d’avortements en France (234 300 interruptions volontaires de grossesse (IVG) en 2022), l’effondrement du système hospitalier, la disparition d’environ 8 % des centres pratiquant l'IVG en France au cours des dix dernières années, la raréfaction du nombre de médecins, les contraintes pesant sur des femmes obligées de se rendre hors de leur département d’origine pour recourir à l'avortement (environ une femme sur cinq) voire à l’étranger (de 3 000 à 5 000 femmes), la menace contre la clause de conscience prévue par un article de loi Veil (article L. 2212-8 du Code de la santé publique, CSP) - « Un médecin ou une sage-femme n'est jamais tenu de pratiquer une interruption volontaire de grossesse » -, la quasi-disparition d’une politique familiale, la part des immigrés dans les viols et donc les demandes d'IVG… 

« Emmanuel Macron  peut se réjouir de laisser derrière lui un héritage historique tangible et l'image d'un chef d'État fervent défenseur des droits des femmes. Sauf que sa propre majorité avait voté contre les propositions de loi précédentes... avant donc que le chef de l’État s'empare de la mesure. L'Histoire devrait oublier la méthode et retenir l'inscription de l'IVG dans la Constitution, mais la pilule est sûrement dure à avaler pour celles et ceux ayant porté les propositions de loi précédentes », a écrit Tanguy Sanlaville (Marianne, 05/03/2024).

Il suffit de lire le communiqué de l’Elysée sur le scellement de la loi constitutionnelle sur la liberté de recourir à l’IVG pour saisir la confusion mentale et la duperie – quel rapport avec l’égalité entre hommes et femmes ? - :
« En cette journée internationale des droits des femmes, le Président Emmanuel Macron s'est rendu au ministère de la Justice pour la cérémonie publique de scellement de la loi constitutionnelle portant sur la liberté de recourir à l’IVG.
Depuis 2017, le chef de l’État a fait de l’égalité entre les femmes et les hommes la grande cause de son quinquennat et, dès le 8 mars 2023, il avait annoncé sa volonté de garantir la liberté des femmes d’avoir recours à une IVG. 
Un an plus tard, cette avancée majeure se concrétise par le vote du Parlement du projet de loi constitutionnelle déposé au nom du Président de la République.
Cette cérémonie, ouverte au public, était l’occasion d'apposer le sceau sur la Constitution en présence des membres du gouvernement, des parlementaires et des représentants des associations qui ont permis cet aboutissement, faisant de la France la première Nation au monde à inscrire l’IVG dans sa Constitution. »
Cynisme ? Naïveté ? Ignorance ? Conviction que ni elles ni leurs proches ne seront contraintes à subir un avortement ? Des édiles souriantes, fières ont applaudi cette constitutionnalisation. Mais ce sont les femmes qui sont grugées par cette communication politique macronienne visant à redorer le bilan catastrophique des mandats présidentiels d'Emmanuel Macron.

De plus, cette manœuvre dénature la Constitution qui n'est pas une liste de droits ou de libertés. La Constitution est la "charte fondamentale qui institue les pouvoirs publics, détermine leurs attributions, règle les modalités de leur coexistence ou de leur collaboration, fixe les droits et les devoirs des citoyens" (Pierre Pactet). 

Compagnons des femmes qui avortent, les hommes sont éludés par l'exposition. Pourtant, ils souffrent eux aussi de l'avortement, d'une absence de paternité, d'enfant.

Le Commissariat scientifique de l’exposition est assuré par Charlène Fanchon, chargée d’études documentaires, département des Archives privées, direction des Fonds, Archives nationales, et Bibia Pavard, maîtresse de conférences en histoire contemporaine, Université Paris-Panthéon-Assas. Le Commissariat technique a été confié à Christophe Barret, commissaire technique, et Régis Lapasin, responsable du service des expositions, département de l’Action culturelle et éducative, Archives nationales.

Sur l’avortement, un cycle de conférences s’est tenu de mars à juin 2024, à l’hôtel de Soubise, à Paris : 
L’expérience vécue de l’avortement clandestin
Par Xavière Gauthier, écrivaine et universitaire, et Isabelle Foucrier, productrice à l’Institut national de l’audiovisuel.
"Xavière Gauthier et Isabelle Foucrier, productrice à l'Institut national de l'audiovisuel, reviendront sur le vécu traumatique de l'avortement avant sa légalisation, en 1975. Elles évoqueront les témoignages de femmes, recueillis dans le cadre de leurs travaux."

« Le septennat de Valéry Giscard d'Estaing : un tournant pour les droits des femmes »
"À l'occasion du 50ème anniversaire de l'élection de Valéry Giscard d'Estaing à la présidence de la République, la Fondation Valéry Giscard d'Estaing, en partenariat avec les Archives nationales, organise une table ronde. Le fil conducteur sera les avancées majeures en matière de libéralisation de la société et du droit des femmes, afin d'évoquer son action pour faire entrer la France dans la modernité. Pour la première fois, la lutte contre les inégalités hommes-femmes s'inscrit dans les actions prioritaires que le gouvernement décide de mettre en œuvre. Ces échanges réuniront grands témoins, compagnons de route, universitaires, élus.
•    Anne-Aymone Giscard d'Estaing,
•    Pierre Albertini, professeur d'université émérite, ancien député- maire de Rouen,
•    Anne Levade, professeur à l'Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, présidente émérite de l'Association française de droit constitutionnel,
•    Monique Pelletier, ancienne ministre,
•    Perrine Simon-Nahum, directrice du département de philosophie de l'Ecole Normale Supérieur-Ulm. Fille de Pierre Simon, médecin, conseiller technique au cabinet de Simone Veil, ministre de la santé.
Modérateur :
Chantal Brunel, ancienne députée, ancienne conseillère technique de Michel Poniatowski, ministre de la santé, puis de l'intérieur. Ancienne secrétaire générale du Conseil supérieur de l'information sexuelle et de la régulation des naissances."

Les enjeux de la constitutionnalisation de l’avortement
Par Stéphanie Hennette-Vauchez, professeure de droit public à l’Université Paris-Nanterre.
"À la tête du Centre de recherches et d'études sur les droits fondamentaux (Credof) depuis 2015, Stéphanie Hennette-Vauchez a été membre du Conseil scientifique de l'Institut Émilie du Chatelet sur les femmes, le genre et la sexualité de 2011 à 2018. Elle est l'auteure de nombreux ouvrages sur les thèmes des droits de l'Homme, du droit et du féminisme ainsi que de la bioéthique. Elle a publié récemment La démocratie en état d'urgence. Quand l'exception devient permanente (éd. Seuil, 2022). Ce travail considérable fait d'elle une parfaite connaisseuse des enjeux de l'inscription du recours à l'interruption volontaire de grossesse dans la Constitution."

Les coulisses de la construction d’un consensus : le vote de la loi Veil en 1974
Par Jean-Paul Davin, préfet honoraire et ancien chargé de mission (relations avec le Parlement) au cabinet de Simone Veil.
Il " a été le témoin privilégié de l'intense travail fourni par la ministre de la Santé pour parvenir à un accord à l'Assemblée nationale. De par ses fonctions, il a aussi joué un rôle majeur dans le ralliement de parlementaires de la majorité pour faire adopter la loi. Il remettra en perspective les longues heures de débats passionnés qui ont précédé l'adoption du projet de loi porté par Simone Veil."

Un livret est remis gracieusement. C’est « la reprise actualisée d’une note rédigée en 2014 par Bibia Pavard pour la Fondation Jean Jaurès : La loi Veil : retour sur un compromis. Avec l’aimable autorisation de la Fondation Jean Jaurès ».



« La situation actuelle est mauvaise. Je dirai même qu’elle est déplorable et dramatique » 
(Simone Veil) 

« Si l’avortement est déjà interdit par l’article 317 du Code pénal, la loi du 31 juillet 1920 renforce sa répression. Elle condamne tout à la fois « la provocation à l’avortement », la révélation de procédés contraceptifs et « la propagande anticonceptionnelle ». 

« Dans le contexte de forte angoisse démographique faisant suite à la Première Guerre mondiale, l’avortement est considéré comme un « péril national ». 

« Dans le contexte de forte angoisse démographique faisant suite à la Première Guerre mondiale, l’avortement est considéré comme un péril national »

« En 1923, le crime d’avortement est requalifié en délit pour éviter la clémence des jurys d’assises et laisser le travail de jugement aux magistrats. »

« Sous Vichy, l’avortement devient un crime d’État, passible de la peine de mort. Deux personnes –Marie-Louise Giraud et Désiré Pioge –sont exécutées pour ce motif. »

« À la Libération, la lutte contre l’avortement clandestin se poursuit, avec un pic de répression en 1946. »

« Les femmes ayant avorté, comme toutes les personnes qui les y aident, risquent la prison et de fortes amendes. »

« Dans les années 1970, environ 400 condamnations par an sont prononcées. Mais l’ampleur du phénomène est bien plus large, puisque certains estiment que plus de 500 000 avortements sont réalisés clandestinement chaque année. » 

« Le débat qui oppose les partisans de la libéralisation de l’IVG et les opposants à toute réforme prend de l’ampleur à partir de 1973. Un premier projet de réforme de l’avortement thérapeutique est discuté sous la présidence de Georges Pompidou. »

« Faute de consensus, le texte est renvoyé en commission quelques mois avant le décès de ce dernier. »

« Promulguée le 17 janvier 1975 sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing, la loi relative à l’IVG constitue une avancée sociétale majeure en France dans la conquête des droits des femmes. Simone Veil, alors ministre de la Santé et porteuse de la loi, trouve les mots pour dénoncer l’injustice qui pèse sur les femmes. » 

De la mobilisation à la dénonciation 
« Le caractère répressif de la loi de 1920 est dénoncé, dès les années 1950, par les partisans d’un accès libre aux contraceptifs modernes (diaphragmes, spermicides puis, plus tard, pilules et stérilets) afin, précisément, de prévenir les avortements clandestins et leurs dangers pour la santé des femmes. » 

« En 1956, dans un contexte de mobilisation et de dénonciation du problème de santé publique que constituent les avortements clandestins, naît le Mouvement français pour le planning familial, d’abord sous le nom de « La Maternité heureuse » à l’initiative de la gynécologue Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé. »

« Après dix ans de mobilisation, le député gaulliste Lucien Neuwirth initie la loi du 28 décembre 1967 autorise la vente de contraceptifs, mais reste restrictive sur plusieurs points. Les mineures doivent avoir une autorisation parentale pour obtenir la pilule ou le stérilet ; les pharmaciens tiennent des carnets à souches pour les contraceptifs oraux ; la Sécurité sociale ne rembourse pas les moyens de contraception... » 

« Et cela n’est pas sans contradictions puisqu’au contraire de la métropole, la « propagande anticonceptionnelle » est encouragée dans les départements d’outre-mer… »

« Dans le contexte de l’après 1968, des voix s’élèvent pour une libéralisation de l’avortement. »

« L’Association nationale pour l’étude de l’avortement (ANEA) ouvre un débat sur l’élargissement de l’avortement thérapeutique à d’autres motifs que le seul danger de mort de la femme enceinte, alors prévu par la loi. Elle veut inclure la santé de la mère, les cas de malformation foetale, de grossesses issues de violences ou de situation sociale difficile. L’association rédige une proposition de loi endossée par un député gaulliste, le docteur Peyret, ce qui engage un débat social sur le sujet. »

Parallèlement, le Mouvement de libération des femmes (MLF), qui émerge sur la scène publique à partir de 1970, porte la revendication de l’avortement libre et gratuit au nom de la libre disposition de leur corps par les femmes. » 

« Les militantes du MLF font connaître leur position dans le manifeste des 343 femmes déclarant avoir avorté, publié par Le Nouvel Observateur le 5 avril 1971. Paraphé par des femmes célèbres comme par des militantes anonymes qui ont bravé les interdits légaux et moraux, il fait figure d’événement. L’année suivante les « procès de Bobigny » deviennent les procès politiques de l’avortement. » 

« Un collectif de défense mené par l’avocate féministe Gisèle Halimi, qui a signé le manifeste des 343 et créé l’association Choisir, défend une jeune femme de 16 ans jugée pour avortement à la suite d’un viol, ainsi que sa mère et les trois autres femmes de condition modeste l’ayant aidée. Le procès met en lumière les inégalités sociales face à l’avortement clandestin, « la Suisse pour les riches et la prison pour les pauvres » dit un slogan ».

« En février 1973, 331 médecins s’accusent dans un manifeste publié par Le Nouvel Observateur : déclarant pratiquer illégalement des avortements, ils réclament le changement de la loi. Leur action est à l’origine de la création du Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception (MLAC), composé de militantes et de militants qui, partout en France, contestent ouvertement la loi en aidant les femmes à avorter en France ou à l’étranger. Pour y parvenir, ils organisant des voyages en Angleterre et en Hollande, où l’avortement thérapeutique est autorisé. »

« De plus, à partir de juin 1973, la direction du Mouvement français pour le planning familial, qui était restée sur une position de libéralisation de l’avortement dans certains cas médicaux ou sociaux précis, décide de s’engager dans la lutte pour l’avortement libre et gratuit. De nombreux groupes locaux, créés partout en France, pratiquent en toute illégalité l’avortement par aspiration. Aussi appelé « méthode Karman », elle consiste à aspirer le contenu de l’utérus avec une canule souple et une seringue en plastique. Simple, sûre, peu coûteuse et non traumatique, cette méthode réalisée dans les premières semaines de la grossesse apparaît comme une révolution médicale et politique de l’avortement. »

« Ces collectifs défient le pouvoir politique en bafouant ouvertement la loi de 1920, dans l’espoir de provoquer le changement. Ils mettent les autorités devant le fait accompli : la loi est caduque et elle n’est plus respectée. En mai 1973, la doctoresse Annie Ferrey-Martin est inculpée à Grenoble pour avoir pratiqué, au sein du groupe local de l’association Choisir, un avortement sur une mineure. Un élan de solidarité se crée autour d’elle et de nombreuses manifestations ont lieu pour affirmer la dimension collective et politique de son acte, comme le grand défilé du 12 mai 1973 à Grenoble qui réunit une dizaine de milliers de personnes. »

« Ces revendications s’opposent à un contre-mouvement qui émerge dès 1970 et refuse toute réforme de la loi au nom de la défense d’un droit sacré à la vie pour le fœtus. À la hiérarchie de l’Église catholique s’ajoute la nouvelle association Laissez-les vivre, des médecins et des juristes qui se déclarent « pour le respect de la vie ».

« Au gré des échéances électorales, la libéralisation de l’avortement devient un problème politique qui est mis à l’agenda gouvernemental et parlementaire. Entre 1970 et 1973, cinq propositions de loi, émanant de la gauche comme de la droite, sont déposées à l’Assemblée. Ces propositions ne présentent aucun consensus sur la réforme à mener, sur les cas justifiant l’avortement, sur les modalités de la prise de décision, ni sur les délais limites d’avancement de la grossesse. Dans ce contexte, en 1973, Pierre Messmer, Premier ministre de Georges Pompidou, décide de modifier la loi pour élargir l’avortement thérapeutique. Mais la mise à l’agenda parlementaire entraîne des clivages partisans : le parti communiste et le parti socialiste s’opposent au projet gouvernemental jugé trop timoré. Une majeure partie des députés de droite s’oppose également, sur le principe, au projet gouvernemental, qui n’est finalement soutenu que par la droite libérale et qui est renvoyé en commission. Alors que ce projet devait être rediscuté au printemps 1974, Georges Pompidou décède en avril et l’élection présidentielle de mai 1974 voit l’arrivée au pouvoir de Valéry Giscard d'Estaing. »

La fabrique du consensus 
Elu en 1974, « le Président de la République Valéry Giscard d'Estaing, en dépit de ses convictions personnelles, s’empare d’emblée de la question comme symbole de sa volonté de réforme, de libéraliser le pays. »

« Cependant, la tâche n’est pas évidente puisque le Parlement qui a rejeté la réforme, lui, demeure identique. Le consensus se forge d’abord autour de la personnalité de Simone Veil qui incarne la rupture et peut donc prétendre surmonter les clivages qui avaient bloqué la réforme. »

« Au moment de sa nomination à la tête du ministère de la Santé du gouvernement de Jacques Chirac, elle est haut-fonctionnaire, novice en politique et quasi inconnue du grand public. Elle peut donc se prévaloir d’une certaine neutralité de technicienne qui dépasse les conflits politiciens. Elle est, en outre, la première femme ministre de plein exercice de la Ve République. » 

« Cela la place dans une position favorable pour aborder le dossier de la réforme de l’avortement : en tant que femme, elle semble mieux à même de comprendre les enjeux que représente l’avortement qui est, depuis les mobilisations féministes, considéré comme une lutte pour la libération des femmes. Enfin, Simone Veil a survécu aux camps d’extermination nazis : la presse le rappelle de façon euphémisée, cela permet surtout de souligner sa force de caractère. » Un fait qui sera détourné contre elle.

« Avant la discussion au Parlement, la ministre de la Santé occupe le devant de la scène médiatique. Sa photographie se répand dans la presse écrite, sa voix se diffuse sur les ondes et surtout elle devient une habituée de la télévision désormais présente dans une écrasante majorité des foyers. Cette phase associe la présentation de la ministre elle-même à celle du projet de loi. Même si elle s’en défend à plusieurs reprises, le projet devient « sa loi ». Simone Veil impose sa marque sur le contenu du texte et sur la manière de convaincre le plus grand nombre. »

« Tout le travail de Simone Veil, nommée ministre de la Santé, est alors de trouver la manière de faire consensus. » 

Deux étapes
« Dans son discours qui introduit les débats à l’Assemblée nationale le 26 novembre 1974, elle justifie un nécessaire changement : « Pourquoi donc ne pas continuer à fermer les yeux ? Parce que la situation actuelle est mauvaise. Je dirai même qu'elle est déplorable et dramatique ».
 
« Il n’y a pas une mais deux lois Veil. Avant d’engager la modification de la législation sur l’interruption de grossesse, Simone Veil défend un projet pour libéraliser la loi Neuwirth de 1967 et « banaliser » la contraception en mettant en place son remboursement par la Sécurité sociale, en la rendant accessible à titre gratuit pour les mineures « désirant garder le secret », dans les centres de Protection maternelle et infantile, comme dans les centres d’éducation et de planification familiale. Le débat sur la contraception est un baptême du feu pour la ministre. Avant celui sur l’avortement, il lui permet d’évaluer les forces en présence, de tester la position des députés et sénateurs de la majorité de droite, mais aussi d’envoyer un signal fort à ceux de l’opposition de gauche qui sont acquis à cette réforme. Elle parvient à rallier une majorité en avançant des arguments techniques plus qu’éthiques et en soulignant la nécessité d’adapter la loi aux évolutions scientifiques et aux évolutions des moeurs. »
 
« La gauche la soutient dans cette réforme très libérale. La loi n°74-1026, « portant diverses dispositions relatives à la régulation des naissances », est finalement promulguée le 4 décembre 1974. Elle instaure le principe de la contraception libre et gratuite réclamée par les mobilisations féministes depuis le début des années 1970. Cette première loi Veil est souvent oubliée par les livres d’histoire, effacée par l’ombre de la loi sur l’interruption volontaire de grossesse. Elle marque pourtant un tournant majeur dans l’accès à la contraception moderne en France et fait de la régulation des naissances une mission de service public que doit assurer l’État. »

« Le débat sur l’interruption volontaire de grossesse s’annonce plus difficile. Simone Veil sait qu’elle bénéficie d’une marge de manœuvre « étroite mais cadrée », selon sa propre expression dans ses mémoires, pour obtenir un soutien à la fois de la gauche et d’une partie de la droite. Le texte est préparé en étroite relation avec l’Élysée, entre juillet et septembre 1974. L’opinion est testée par un sondage commandé à l’IFOP et les positions politiques sont évaluées par l’audition des parlementaires de la majorité ainsi que de quelques personnalités en faveur de la libéralisation comme Gisèle Halimi, qui a rédigé une proposition déposée par le groupe socialiste à l’Assemblée. Ensuite, le cabinet de Simone Veil rédige un texte de conciliation. La loi a pour objectif, comme l’affirme Simone Veil dans son discours du 26 novembre 1974, de « faire cesser l’injustice » et les drames des 300 000 femmes qui avortent chaque année clandestinement. Le texte repose sur le principe d’une libéralisation fondamentale de la législation sur l’avortement : toute femme dans les dix premières semaines de sa grossesse et qui se trouve en « situation de détresse » peut faire la demande d’un avortement auprès d’un médecin. Il ne s’agit donc pas, comme le demandent les féministes, d’une liberté sans condition mais la femme reste la seule juge de son état : elle n’est pas contrainte de passer devant une commission d’experts qui évaluerait sa condition, comme dans les cas d’une demande d’avortement thérapeutique. »

« De plus, son conjoint éventuel ne pèse pas sur la décision. »

« En revanche, le cœur libéral du texte est contrebalancé par une série de restrictions. Il s’agit ainsi d’encadrer strictement la procédure d’accès à l’avortement et de tout faire pour ne pas l’encourager. La loi prévoit toute une série de mesures dissuasives : demande par écrit, information sur les risques médicaux, information sur les procédures d’adoption d’un enfant à naître, temps obligatoire de réflexion, etc. Si le premier texte prévoyait un remboursement de l’IVG, la seconde version revient sur cette mesure afin de signifier que le gouvernement entend favoriser la contraception plutôt que l’avortement. Les professionnels de santé opposés à la pratique de l’IVG sont protégés par une réaffirmation de la clause de conscience. Enfin, le projet propose de mettre la loi à l’essai pour cinq ans afin de tester ses effets démographiques. La loi est reçue avec hostilité de la part des groupes mobilisés contre toute réforme (Laissez-les vivre ; l’Église catholique ; l’Ordre des médecins) et avec circonspection de la part des groupes mobilisés pour l’avortement libre et gratuit qui voient dans la loi une avancée limitée. » 

Le discours du 26 novembre 1974
« Le 26 novembre 1974, Simone Veil monte à la tribune de l’Assemblée nationale pour prononcer un discours resté célèbre. »

« Son texte, très travaillé, porte la marque de l’intense travail qu’elle a fourni pour parvenir à un accord. Chaque mot est pesé pour ménager les forces en présence. Ses arguments mettent en avant un certain pragmatisme : la loi n’est plus respectée et l’avortement clandestin est dangereux pour les femmes, la réforme est donc nécessaire pour résoudre une situation de crise et un problème de santé publique. »

« Elle souligne aussi l’injustice, « la solitude et l’angoisse d’un acte perpétré dans les pires conditions » qui touche des milliers de femmes chaque année « dont nous ignorons la plupart du temps la détresse et les drames ». Elle insiste aussi sur le fait que l’avortement doit rester une situation d’exception, et de manière significative, préfère le verbe « tolérer » qu’ « autoriser » dans le manuscrit de son discours. La loi, selon elle, doit servir à un meilleur contrôle de la situation par l’État. »

« Au Parlement, les débats sont passionnés. Les opposants à la réforme, situés à la droite de l’échiquier politique, prônent le respect des valeurs familiales et de la morale chrétienne, ainsi que la nécessité de préserver l’équilibre démographique national. Ils multiplient les amendements pour limiter la portée du texte ».
 
« Mais la réforme est soutenue par des parlementaires de la majorité au nom du pragmatisme (la loi n’est plus appliquée) et de l’attention portée à la détresse des femmes. »

« À gauche, communistes, socialistes et radicaux de gauche soutiennent le projet gouvernemental au nom de la liberté des femmes et des couples, en proposant cependant un certain nombre d’amendements, notamment le remboursement par la Sécurité sociale - particulièrement défendu par les députés et sénateurs communistes - ou la modification de la procédure à suivre qui apparaît comme « vexatoire » pour les socialistes. Même si aucun de leurs amendements n’est retenu, ils votent la loi qui n’est adoptée que grâce à l’apport de leurs voix. »

« La postérité a retenu la violence de certains parlementaires représentant la partie la plus radicalisée de la droite conservatrice qui n’hésitent pas à comparer avortement légal et politique nazie d’extermination des Juifs. » 

« Mais, durant les débats, nombre d’hommes et de femmes politiques soutiennent Simone Veil et louent son courage et sa force. La presse aussi souligne sa pugnacité. Ce concert d’éloges peut laisser penser qu’elle a agi seule. Son rôle est évidemment majeur mais c’est oublier que le gouvernement et le Président de la République l’ont soutenue. »

« Cela occulte également l’action réformatrice débutée dès 1973. Mais, surtout, le rôle du mouvement féministe, qui s’est mobilisé depuis 1970 pour revendiquer la libéralisation de l’avortement et qui a contribué à donner une légitimité particulière aux femmes sur cette question, est passé sous silence. Le combat d’une femme masque la lutte des femmes. »

Les devenirs de la « loi Veil » 
« Au final, le texte promulgué le 17 janvier 1975 est une loi de compromis. Elle est loin d’affirmer un « droit à l’avortement ». Son article premier, provenant d’un amendement, rappelle que « la loi garantit le respect de tout être humain dès le commencement de la vie. Il ne saurait être porté atteinte à ce principe qu’en cas de nécessité ». De manière plus globale, le recours à l’IVG est présenté comme une possibilité concédée. Les mouvements qui s’étaient mobilisés pour l’avortement libre et gratuit critiquent une loi qui produit des inégalités de classe, par l’absence de prise en charge par la Sécurité sociale, ainsi que des procédures compliquées qui réduisent concrètement la possibilité d’y avoir recours. Ainsi, les mineures doivent avoir une autorisation et les étrangères ne peuvent pas avorter en France. 

Certains groupes continuent de se mobiliser pour l’application du texte, comme l’exprime avec humour une chanson féministe de 1975 sur un air connu : « Elle court, elle court la loi Veil / La loi Veil pour nous les femmes / Elle est du bidon, la loi Veil / Elle n’est même pas appliquée / Elle est passée par ici / Elle repassera p’têt’pas / Mais nous on est là / Pour imposer nos droits ».

« D’autres collectifs de femmes, souhaitant poursuivre la lutte pour le contrôle de leur propre corps, continuent de pratiquer des avortements en dehors de tout cadre médical. Le 10 mars 1977, six femmes du MLAC d’Aix-en-Provence sont jugées par le tribunal correctionnel de la ville pour tentative, ou complicité de tentative, d’avortement et pratique illégale de la médecine, donnant lieu à un important soutien militant. La très intense mobilisation féministe culmine lors d’une grande manifestation non-mixte le 6 octobre 1979 à Paris qui rassemble environ 50 000 personnes. La loi repasse bien à l’automne 1979, mais sans aucune modification. Un double constat peut alors être dressé : la loi devient pérenne et l’identification entre la défense du droit à l’IVG et le féminisme est renforcée. Les clivages partisans sur la question sont aussi consolidés : la gauche soutient désormais clairement la liberté des femmes à disposer de leur corps tandis qu’une grande partie de la droite considère l’IVG comme un pis-aller. »

« Finalement ce sont les vies ultérieures du texte qui en font un socle légal solide. La loi actuelle est un palimpseste politique qui résulte de ses multiples approfondissements. En 1982, Yvette Roudy, ministre des droits de la femme de François Mitterrand, défend le remboursement de l’IVG par la Sécurité sociale. En 1993, la loi de Véronique Neiertz instaure un délit d’entrave à l’IVG pour empêcher les actions des commandos anti-IVG qui tentent de perturber l’application de la loi en intervenant sur les lieux où se pratiquent les avortements. Ce délit est étendu au domaine numérique en 2017. En 2001, la loi Aubry rallonge le délai à douze semaines et supprime la nécessaire autorisation pour les mineures. En 2002, un décret autorise les pharmaciens à délivrer la pilule du lendemain gratuitement aux mineures. En 2014, un amendement dans la loi sur l’égalité femmes-hommes présentée par la ministre des droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, supprime la notion de « détresse » de la loi sur l’IVG et autorise donc les femmes, sans qu’elles aient à justifier d’une raison particulière, à interrompre leur grossesse lorsqu’elles le veulent. Désormais une IVG peut être pratiquée par un médecin ou une sage-femme (depuis 2016), jusqu’à la fin de la 14e semaine de grossesse (depuis 2022), quelle que soit la méthode utilisée (depuis 2023). » Ce qui suscite des problèmes éthiques, moraux et philosophiques quand l'avortement a lieu à huit mois de grossesse et qu'il faut extraire le fœtus, un organisme humain de chair et d'os.

« Aujourd’hui, la résurgence des mobilisations anti-avortement en France, en Europe ou dans le monde montre la fragilité de ce droit. »

« Aux États-Unis, en 2022, la Cour suprême est revenue sur l’arrêt historique Roe vs Wade de 1973, qui garantissait un droit fédéral à l’interruption volontaire de grossesse, montrant la possibilité d’un recul sur ce qui semblait être un acquis. En France, le 8 mars 2023, le Président Emmanuel Macron s’est engagé à inscrire le recours à l’IVG dans la Constitution. Un projet de loi constitutionnelle a ainsi été présenté par le gouvernement, lors du Conseil des ministres du 12 décembre 2023. Ce texte étant adopté, la France est devenue le premier pays en Europe à inscrire la liberté de recourir à l’IVG dans sa Constitution. »

REPÈRES

« 1810
L’article 317 du Code pénal punit les femmes ayant recouru à l’avortement et quiconque qui par « aliments, breuvages, médicaments, manœuvres, violences ou par tout autre moyen aura procuré ou tenté de procurer l’avortement d’une femme enceinte ou supposée enceinte ».
31 JUILLET 1920
L’article 317 du Code pénal est renforcé par une loi qui condamne tout à la fois « la provocation à l’avortement », la révélation de procédés contraceptifs et « la propagande anticonceptionnelle ».
1923
Requalification du crime d’avortement en délit pour éviter la clémence des jurys d’assises et laisser le travail de jugement aux magistrats.
1956
La gynécologue Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé crée « La Maternité heureuse », ancêtre du Mouvement français pour le planning familial.
OCTOBRE - NIVEMBRE 1972
Au cours des « procès de Bobigny », cinq femmes dont une mineure violée (Marie-Claire Chevalier) sont jugées pour complicité ou pratique de l’avortement. Elles sont défendues par l’avocate Gisèle Halimi.
27 MAI 1974
Valéry Giscard d’Estaing est élu à la présidence de la République française.
26 NOVEMBRE 1974
Simone Veil, ministre de la Santé, s’exprime à l’Assemblée nationale pour défendre le projet de loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG).
28 DÉCEMBRE 1967
La loi relative à la régulation des naissances portée par Lucien Neuwirth, député gaulliste, autorise la vente de contraceptifs, mais reste restrictive sur plusieurs points.
5 AVRIL 1971
Les militantes du Mouvement de libération des femmes (MLF) font connaître leur position dans le manifeste des 343 publié par Le Nouvel Observateur en déclarant avoir avorté.
17 JANVIER 1975
La loi relative à l’IVG est promulguée pour cinq ans. 
31 DÉCEMBRE 1979
La loi portée par Monique Pelletier reconduit définitivement la loi du 17 janvier 1975.
1993
La loi Neiertz instaure un délit d’entrave à l’IVG.
2001
Le délai légal de l’IVG passe à douze semaines et l’autorisation parentale pour les mineures est supprimée.
1982
L’IVG est désormais remboursée par la Sécurité sociale.
2012
La notion de « détresse » est supprimée de la loi relative à l’IVG.
2023
Le président Emmanuel Macron s’engage à inscrire le recours à l’IVG dans la Constitution. »


Du 8 mars au 2 septembre 2024 
Site de Paris 
60, rue des Francs-Bourgeois. 75003 Paris Rambuteau
Accès gratuit 
Du lundi au vendredi : 10 h - 17 h 30
Samedi et dimanche : 14 h - 19 h
Fermeture le mardi et le 1er mai
Visuels :
Affiche
Simone Veil à la tribune de l’Assemblée nationale, le 26 novembre 1974 © AFP

Affiche du MLAC en faveur de l'avortement et la contraception libres et gratuits, sans date.
© Claire Mantey (Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand)

Affiche du Mouvement français pour le planning familial dénonçant les restrictions de la loi du 17 janvier 1975
© Centre de documentation du Planning Familial, Paris

Michèle Chevalier, Marie-Claire Chevalier et Gisèle Halimi se rendant au Tribunal pour Enfants de Bobigny, le 11 octobre 1972.
© Alain Dejean / Getty Images

Tract diffusé par l'association "Laissez-les vivre", créée en 1971 par Geneviève Poullot et le professeur Paul Chauchard, qui s'oppose à la pratique et à la libéralisation de l'IVG, 1973.
© Archives nationales de France, fonds Michel Poniatowski, 340(III) AP/164. 

Simone Veil et Valéry Giscard d'Estaing, au lendemain de l'adoption du projet de loi relatif à l'IVG par l'Assemblée nationale, 29 novembre 1974.
© Archives nationales de France, AG/5(3)/3491

Simone Veil et Edgar Faure à l'Assemblée Nationale lors des débats en vue du vote de la loi sur l'IVG / Photo, 1974 © Philippe Ledru / akg-images. 

Brouillon manuscrit du discours prononcé par Simone Veil à l'Assemblée nationale le 26 novembre 1974. 
Pages 7 et 8

Transcription page 7 :
On aurait pu songer
Il n’est pas contestable et nous 
le proclamons très fort que 
l’avortement doit être l’exception
qu’il doit être un ultime 
recours. Comment l’autoriser le tolérer 
sans qu’il devienne une règle 
sans que l’État ait l’air 
de l’encourager
Je voudrais tout d’abord 
faire une observation réflexion et je 
m’excuse de le faire devant 
cette Assemblée presque exclusivement 
composée d’hommes.
Aucune femme ne 
recourt de gaité de cœur 
à l’avortement il suffit 
d’écouter les femmes en parler

Transcription page 8 :
avec elles c’est toujours un 
drame, cela restera un drame
C’est pourquoi notre projet 
s’il accepte et s’il une situation de fait 
s’efforce d’être dissuasif et 
s’il autorise autorise certains actes c’est 
nous pensons en cela répondre 
aux vœux des femmes. 61     
ne faut pas 
pour mieux contrôler et   
surtout s’efforcer de dissuader
En dissuadant instituant des mesures les dissuadant écarter nous pensons 
répondre au désir conscient 
ou inconscient de toutes les 
femmes qui se trouveraient 
dans cette situation d’angoisse
si bien dépeinte décrite et évoquée par certains […]
© Archives nationales de France

Version dactylographiée du discours prononcé par Simone Veil à l’Assemblée nationale le 26 novembre 1974.
© Archives nationales de France


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Les extraits proviennent du dossier de presse et du livret de l'exposition.

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