jeudi 4 août 2022

Le Pakistan


Fondé en 1947, le Pakistan (« pays des purs ») est un Etat musulman situé dans le sous-continent indien, et doté de l'arme nucléaire. Longtemps soutien des Talibans d'Afghanistan, il persécute les chrétiens souvent accusés de blasphème. Son islam définissant son identité et expliquant sa création, son antisémitisme ancien et sa proximité durable avec le grand mufti de Jérusalem al-Husseini, allié des Nazis, expliquent sa diplomatie anti-israélienne. Arte rediffusera le 9 août 2022 à 23 h 40 « Pakistan - Le blasphème et la mort » (Blasphemie - Pakistans tödliches Gesetz) de Mohammed Naqvi. Arte diffusera le 10 août 2022 à 01 h 30 "Inde-Pakistan : deux femmes contre le fondamentalisme" (Indien-Pakistan: Zwei Frauen gegen den Fundamentalismus) de Sabiha Sumar.

« La manifestation du 11 janvier 2015 - Martin Argyroglo », par Rémy Burkel
« Pourquoi on tue des chrétiens dans le monde aujourd'hui ? La nouvelle christianophobie » par Alexandre del Valle 
Attentats islamistes, dont l’un antisémite, à Toulouse et Montauban par Mohamed Merah, djihadiste salafiste franco-algérien
Al-Qaeda’s French-Algerian “mujahidin” Mohamed Merah killed 7 persons in South-Western France
« Jésus et l’islam » de Gérard Mordillat et Jérôme Prieur 
Vers un « vote halal » en France, en Belgique, en Grande-Bretagne et en Israël ? 
« Humoristes et musulmans » de Frank Eggers  
« Nous, Français musulmans. Du public à l'intime » par Romain Icard 
« Des humanitaires sur le chemin d’Allah » par Claire Billet, Constance de Bonnaventure et Olivier Jobard  
« Oum Kalthoum, la voix du Caire », par Xavier Villetard 
"El Gusto" de Safinez Bousbia
« Al Musiqa. Voix et musiques du monde arabe »
« Nouvelle génération, la bande dessinée arabe aujourd’hui » 
« Riad Sattouf. L’écriture dessinée »
« La croix gammée et le turban, la tentation nazie du grand mufti » de Heinrich Billstein 
« Pour Allah jusqu’à la mort. Enquête sur les convertis à l’islam radical » par Paul Landau
L'Etat islamique 
Interview de Bat Ye’or sur le califat et l’Etat islamique/ISIS 
« Les armes des djihadistes » par Daniel Harrich 
« L'argent de la terreur »
« Alger, la Mecque des révolutionnaires (1962-1974) » par Ben Salama
« Pictures for Peace. La douleur après l’attentat - Hocine Zaourar » par Rémy Burkel 
« Cheikh Zayed, une légende arabe » par Frédéric Mitterrand
« Emirats, les mirages de la puissance », par Frédéric Compain
L’Arabie saoudite 
La Ligue islamique mondiale, de Paris à Auschwitz
L’Irak, une ex-mosaïque ethnico-religieuse 
« Iran-Irak, la guerre par l'image » par Maryam Ebrahimi
« Oman, au pays des contes » par Nadja Frenz
Le keffieh, c'est tendance !
Situé dans le sous-continent indien, la république islamique du Pakistan, dont la capitale est Islamabad, est entourée par l’Iran, l’Afghanistan, la Chine, l’Inde et la mer d'Arabie. Cette région est un carrefour de voies commerciales historiques, dont la route de la soie.

Des Empires à l'indépendance

A fil des siècles, Aryens, Perses, Indo-Grecs et musulmans ont conquis l'actuel Pakistan. S'y sont succédé la civilisation de la vallée de l’Indus, celle aryenne, qui induit le védisme à l'origine de l'hindouisme, l’Empire perse achéménide vers 543 avant l'ère commune, Alexandre le Grand en 326 avant cette ère et l’empire maurya, le royaume indo-grec créé par Demetrius de Bactria, l'ère gréco-bouddhiste. 

Jusqu'aux conquêtes musulmanes, arabe et turque, les autochtone pratiquaient l'hindouisme, le zoroastrisme, le bouddhisme et le chamanisme. 


Né dans la péninsule arabique au début du VIIe siècle, l'islam va s'étendre aussi vers l'Est, avec un coût humain tragiquement élevé - l'Hindi Kouch, génocide de 80 millions d’Hindous -, la destruction des lieux de cultes des mécréants ("kafirs"), imposition d'un statut avilissant aux non-musulmans, etc. Cette conquête se déroulent en trois étapes : en 711-712, invasion du Sind par les Arabes, puis aux XIe et XIIe siècles avec celle des Turcs et des Afghans convoitant les trésors des hindous, enfint au XVIe siècle avec l'empire moghol.


Vers le milieu du VIIe siècle, les Omeyyades vainquent l'empire perse à l'Ouest de l'Inde. En 711, la dynastie Omeyyade envoya l'armée arabe conduite par Muhammad ibn al-Qasim contre le roi du Sind, Raja Dahir. Après trois échecs, ils conquièrent le Nord-Ouest de la vallée de l'Indus, du Cachemire à la mer d'Oman. L'empire ghaznavide, le royaume Ghoride, le Sultanat de Delhi et l'Empire moghol (1526–1857) ont aussi influé sur l'histoire religieuse de ces territoires.  


A partir du XVIIe siècle, les Britanniques colonisent la partie du sous-continent indien incluant le Pakistan. Un mouvement qui s'accélère en 1849 avec l'effondrement de l'Empire sikh, État non-islamique dont la principale ville était Lahore. Dépendant de la Compagnie des Indes orientales, ce territoire revient à la Couronne britannique après la révolte des cipayes (1857), une mutinerie qui se transforme en soulèvement populaire.


Le mouvement pour l'indépendance de l'Inde se développe la charnière des XIXe et XXe siècles. Si le Congrès national indien (CNI), fondé en 1885, à visée unificatrice est majoritairement composé d'hindous, la Ligue musulmane fondée en 1906 représente les seuls musulmans. Apparaît la théorie des deux nations : hindous et musulmans constituent deux nations distinctes en Inde. Elle fonde le mouvement pour le Pakistan qui aspire à obtenir du Raj britannique un État séparé pour les musulmans et devient important dès les années 1930.


Poète, avocat et philosophe musulman, Mohamed ou Muhammad Iqbal  (1877-1938) est considéré  comme le père spirituel du Pakistan. Élu à l’assemblée législative du Pendjab en 1927, Iqbal prône un État musulman dans le Nord-Ouest du sous-continent indien et préside en 1930 la session annuelle de la Ligue musulmane qui le voit comme son théoricien. En 1932, Muhammad Iqbal assiste à la conférence de la table ronde, à Londres, afin de concevoir un projet de constitution pour l’Inde.

Publié en 1934 à Londres, son principal essai "La reconstruction de la pensée religieuse en Islam" est ainsi présentée par son éditeur, Gallimard qui l'a accompagné d'une préface de Souleymane Bachir Diagne : 
"La pensée de Mohammed Iqbal (1877-1938) commence à être identifiée comme une ressource majeure par la nouvelle génération des intellectuels musulmans en quête d’un Islam ouvert, capable de se repenser tout en contribuant de manière créative au débat désormais mondial sur le trajet de la sécularisation. Iqbal, honoré au Pakistan comme un père fondateur, a été formé à Cambridge et c’est donc en anglais qu’il publie en 1934 La Reconstruction de la pensée religieuse en Islam, son livre majeur. L’ambition de celui-ci est de «repenser le système total de l’Islam sans rompre complètement avec le passé». À cette fin, le texte coranique est ici relu en dialogue avec les philosophes occidentaux de son temps, notamment Whitehead ou Bergson. L’entreprise d’Iqbal n’a pas ainsi pour seul objet de tirer l’Islam de sa trop longue «pétrification» qu’il fait remonter à la destruction de Bagdad en 1258. Il est également de répondre aux interrogations de la civilisation contemporaine dans une perspective résolument universaliste, dont il énonce clairement le programme : « L’humanité a besoin de trois choses aujourd’hui : une interprétation spirituelle de l’univers, une émancipation spirituelle de l’individu et des principes fondamentaux de portée universelle orientant l’évolution de la société humaine sur une base spirituelle.»Cette inspiration novatrice a valu à Mohammed Iqbal le qualificatif de «Luther de l’islam», ce qui indique la vigueur de sa «reconstruction», incontournable pour l’élaboration d’une pensée islamique anti-traditionaliste. De là, l’importance de mettre une telle œuvre à la portée des lecteurs francophones, ce qui est chose faite avec cet ouvrage traduit, présenté et richement annoté par Abdennour Bidar, l’un des chefs de file en Europe de l’effort intellectuel et spirituel pour repenser l’Islam."
Pour V. S. Naipaul, Mohammed Iqbal est un musulman ayant refusé une Inde hindoue :
« Iqbal venait d'une famille hindoue récemment convertie ; et peut-être seul un nouveau converti pouvait-il parler ainsi. L'islam n'a rien à voir avec le christianisme, dit Iqbal. Loin d'être une religion de la conscience et de la pratique privées, l'islam s'accompagne de certains « concepts juridiques ». Ces concepts ont une « dimension civique » et créent un certain type d'ordre social. L' « idéal religieux » ne peut être séparé de l'ordre social. « Par conséquent, la construction d'une république sur des bases nationales [une république indienne laïque], si cela implique la disparition du principe islamique de solidarité, est tout simplement inconcevable pour un musulman. » (…) Ce que dit confusément Iqbal, c'est que les musulmans ne peuvent vivre qu'avec des musulmans.(…) Cela implique que l'univers parfait (…) est purement tribal, soigneusement découpé, chaque tribu dans son coin. Vision parfaitement chimérique. Ce qui en réalité sous-tend cette revendication d'un Pakistan et d'une république musulmane, et qui n'est pas spécifié, c'est le refus par Iqbal de l'Inde hindoue. Ses auditeurs le comprenaient assurément ; et tout comme lui ils avaient une idée concrète de ce qu'ils rejetaient.(…) Dans le discours – capital – d'Iqbal, cette république [islamique] est une abstraction poétique. Il faut l'accepter de confiance. Le nom du Prophète est même invoqué indirectement à l'appui de sa légitimité. Ce discours ne manque pas d'ironie aujourd'hui. Le Pakistan, à sa création, privait les musulmans restés en Inde de leurs droits civiques. Le Bangladesh est aujourd'hui indépendant. Au Pakistan même on ne parle que de dissolution. La nouvelle république musulmane s'est révélée semblable au système ancien, celui que connaissait Iqbal : inutile d'aller bien loin pour y trouver des gens aussi privés de parole et de représentation qu'en 1930, lorsque Iqbal prononçait son discours. » (Jusqu'au bout de la foi).

Avocat formé au droit à Londres, dirigeant de la Ligue musulmane, Muhammad Ali Jinnah (1876-1948) est né à Karachi dans une famille de commerçants chiites aisés. Initialement membre du CNI, il adhère à la Ligue musulmane en 1913. Il est considéré comme le fondateur du Pakistan et surnommé Baba Quaid-e-Azam (« Grand Leader ») et Baba-e-Qaum (« Le Père de la Nation »). Il a été le premier gouverneur général du pays, de l'indépendance en 1947 à son décès. Alors, son parti s'est divisé en factions concurrentes, puis est affaibli par des scissions successives dès les années 1960.

En 1938, lors d'un séjour à Lahore, le grand mufti de Jérusalem al-Husseini  y a rencontré Muhammad Ali Jinnah et d'autres dirigeants du mouvement pakistanais.


Salman Rasheed,consultant politique a écrit l'article "Quaid-e-Azam’s pan-Islamic vision" (News, 25 juillet 2020) :

"Notre père de la Nation Quaid-e-Azam Muhammad Ali Jinnah a partagé une vision pan-islamique avec notre fondateur idéologique Allama Muhammad Iqbal, qui a inspiré de nombreuses révolutions dans le monde musulman... Nos pères fondateurs, notamment Quaid, voulaient que le Pakistan jouent un rôle leader dans le monde musulman (cf. Discours à l'Islamia College du  Peshawar, le 12 avril 1948). Quaid envisageait que le Pakistan dirigerait une renaissance musulmane et construirait un bloc islamique. Il a expliqué sa pensée à Sardar Shaukat Hayat Khan en  1943 : "Le Pakistan ne serait ni communiste ni capitaliste mais vraiment socialiste, fondé sur les principes qui ont caractérisé le régime du calife Omar".
Durant le mouvement pakistanais, Quaid-e-Azam ne luttait pas seulement pour la liberté des musulmans du sous-continent indien, mais plaidait aussi pour la liberté de tous les musulmans combattant les puissances coloniales. Si on lit le discours présidentiel de Quaid à la Ligue musulmane lors de la session à Lahore du 23 mars 1940 après le vote de la Résolution du Pakistan, il a exhorté le gouvernement britannique à accueillir les demandes des Arabes de Palestine... Il a joué un rôle important dans la lutte des pays musulmans. Ainsi, il a fourni toute l'aide possible, diplomatique et matérielle, aux mouvements de libération en Indonésie, en Malaisie, au Soudan, en Libye, en Tunisie, au Maroc, au Nigéria et en Algérie. Ses efforts pour aider les mouvements musulmans de libération ont été reconnus par le grand mufti de Jérusalem Mohammed Amin al-Husseini, qui a écrit une lettre laudative sur Quaid-e-Azam, “Je saisis l'occasion pour la première fois de vous écrire pour vous remercier pour vos efforts valeureux et continus au service de l'islam et des musulmans, pas seulement en Inde mais aussi dans tous les pays musulmans, conformément au commandement du Dieu pour la fraternité islamique et la coopération entre les musulmans... L'ensemble du monde islamique apprécie la position de la Ligue islamique et la votre, et admire vos efforts constants et bénis au service des musulmans". Quand Quaid est mort le 11 septembre 1948, al-Husseini a qualifié son décès de "grande perte" pour le monde de l'islam...
C'est Quaid qui a décrit la création d'Israël comme “l'enfant illégitime de l'Occident” et il a blâmé la rencontre de Shaheed-e-Millat Liaquat Ali Khan avec le lobby sioniste en Amérique en mai 1950 : "Messieurs, nos âmes ne sont pas à vendre". Cependant, certains Pakistanais plaident actuellement pour la reconnaissance d'Israël par notre gouvernement contrairement à la position politique de Quaid-e-Azam et Shaheed-e-Millat, qui n'ont pas vendu leur âme et leur conscience au nom de gains matériels ou de la vie des musulmans.  Je rappelle ce que Quaid a dit sur la Palestine en octobre 1945 :
"Les Juifs souffrent aussi de la même maladie que le Congrès. Plus d'un demi-million de Juifs ont déjà été hébergés à Jérusalem contre la volonté du peuple. Puis-je savoir quel autre pays les a accueillis ? J'ai beaucoup de sympathie pour eux et je n'ai aucune mauvaise volonté contre les Juifs, mais la question est qu'ils sont entrés en Palestine avec un motif bien défini pour reconquérir Jérusalem (qu'ils ont perdue il y a 2 000 ans) avec l'aide des forces britanniques et américaines. J'espère que les Juifs ne réussiront pas dans leurs desseins malveillants et je souhaite que la Grande-Bretagne et l'Amérique s'en distancient, et je verrai alors comment les Juifs vont conquérir Jérusalem. Tous les hommes et les femmes du monde musulman mourront avant que les Juifs ne s'emparent de Jérusalem. Esclaves et sujets comme nous le sommes, nos cœurs et nos âmes sont toujours en sympathie avec ceux qui luttent pour leur liberté et espérons que les peuples de Palestine et d'Indonésie survivront à leurs épreuves. La soumission et l'exploitation, si elles sont pratiquées maintenant, n'apporteront pas la paix et la fin des guerres. Et si une telle exploitation des petites nations doit continuer même après cette guerre sanglante, alors prions Dieu d'envoyer une force plus destructrice que la bombe atomique pour faire le travail et la tâche de ce monde".
Dans son message de l'Aïd en août 1948, Quaid a appelé à l'unité pour faire face aux problèmes auxquels le monde musulman est confronté : "Mon message de l'Aïd à nos États musulmans frères est un message d'amitié et de bonne volonté. Nous traversons tous une période périlleuse. Le drame de la politique de pouvoir qui est mise en scène en Palestine, en Indonésie et au Cachemire devrait nous ouvrir les yeux. C'est seulement en faisant front commun que nous pourrons faire entendre notre voix dans les Conseils du monde".
Le combat de Mohamed Ali Jinnah "pour l’indépendance du Pakistan lui fit néanmoins prendre des initiatives à l’origine de flambées de violences. Ainsi son appel à une Journée d’Action Directe d’août 1946 mène-t-il à la Grande tuerie de Calcutta. Il est aussi directement impliqué dans la campagne de la Ligue Musulmane au Pendjab en 1947 qui lance les violences de la Partition des Indes".

Le « pays des purs » a été fondé le 14 août 1947 par la partition des Indes sous la forme d'un État musulman ayant deux parties séparées par un  territoire indien large d'environ 1 600 km.
La partition a causé le déplacement de 12,5 millions de personnes entre les deux nouveaux pays, et a induit des centaines de milliers à un million de morts. Parallèlement, les provinces du Bengale et du Pendjab ont été divisées entre les deux Etats. 
Après la guerre d'indépendance du Bangladesh (1971), le Pakistan conserve sa seule partie occidentale. 


Le Cachemire est un territoire divisé entre l'Inde, le Pakistan et la Chine. L’Inde revendique le Cachemire historique. Trois guerres ont opposé l'Inde au Pakistan pour ce territoire disputé.

Allié des États-Unis, le Pakistan a noué des relations cordiales avec la Chine.


Non signataire du Traité de non-prolifération TNP), le Pakistan s'est doté de l'arme nucléaire en lançant son programme en janvier 1972 sous le Premier ministre Zulfikar Ali Bhutto. En 1987, il parvient au nucléaire militaire ; ce qui est confirmé officiellement par le Dr. Abdul Qadeer Khan, directeur du programme. Le premier essai nucléaire souterrain du Pakistan a lieu le 28 mai 1998, nom de code Chagai-I dans des laboratoires au Baloutchistan. L'ultime essai (Chagai-II) s'est déroulé dans le désert de Kharan le 30 mai 1998. Sur les six essais nucléaires, "un était au plutonium, les autres à l'uranium enrichi".

En 2017, la population du Pakistan dépassait les 207 millions d’habitants indo-européens - indo-aryennes (80 %) et iraniennes (20 %). Ce qui plaçait le Pakistan au cinquième rang des pays les plus peuplés au monde. Après l'Indonésie, le Pakistan abrite la deuxième plus nombreuse population musulmane.


Les provinces de cette république fédérale bénéficient de "pouvoirs et d'institutions démocratiques. Les frontières des quatre provinces correspondent approximativement aux principales ethnies. L'ourdou est la langue officielle du pays, mais en réalité, la majorité de la population parle l'une des langues en usage dans les principales ethnies du pays, à savoir le pendjabi, le pachto, le sindhi et le baloutchi".


Le régime politique du Pakistan est parlementaire, mais a évolué vers un semi-présidentialisme, en particulier sous les régimes militaires.


Au Pakistan, s'opposent des chefs militaires auteurs de trois coups d’État - Ayub Khan en 1958, Zia-ul-Haq en 1977 et Pervez Musharraf en 1999 - et des forces politiques dirigées par Ali Jinnah, Ali Bhutto, sa fille Benazir et Nawaz Sharif. 


Le Président du Pakistan est Arif Alvi et le Premier ministre Imran Khan.

Le 20 novembre 2018, le discours du Premier ministre Khan a été diffusé sur 24 News HD TV (Pakistan) et sur Internet. "Dans un discours prononcé à l’occasion de l’anniversaire du prophète Mahomet, le Premier ministre pakistanais Imran Khan a déclaré qu’Allah avait bien eu d’autres prophètes que Mahomet mais qu’ « aucune mention n’est faite de Jésus dans l’histoire”. Il faut amener l’Occident à comprendre l’amour des musulmans pour le prophète Mahomet, a-t-il ajouté. Khan a annoncé que son gouvernement déployait des moyens pour encourager les autres pays à signer la « Convention internationale pour la prévention de la diffamation des religions » déclarant que l’on ne peut s’en prendre à la religion d’autrui au nom de la liberté d’expression. 


Extrait : "La [grande] civilisation d’aujourd’hui, l’Occident, a appris des musulmans d’Espagne. Ils se sont mis à lire. Les philosophies grecques et celle d’Aristote ont gagné l’Europe par le biais des musulmans, et c’est ensuite que la civilisation européenne s’est développée. […]" Ce qui est historiquement faux.

Dans les années 1980, sous le régime de loi martiale de Muhammad Zia-ul-Haq a initié une politique d'islamisation en introduisant en particulier les ordonnances Hudood sur les mœurs et la loi sur le blasphème. En 2006, est adoptée la loi de protection des femmes qui modifie ces ordonnances.


Le 29 mars 2004, le journaliste pakistanais Khawar Mehdi Rizvi "est sorti de la prison de Quetta (Sud-Ouest). Il a été accueilli par son frère, son avocat et des journalistes auxquels il a réaffirmé son innocence. Khawar Mehdi Rizvi a déclaré à Reporters sans frontières : "Je veux remercier tous ceux, et notamment mes collègues journalistes, qui se sont mobilisés pour ma libération. Je mesure maintenant l'importance de la liberté de la presse et de ce combat. Je veux continuer mon travail de journaliste avec plus de courage et plus d'exigence (…). Je n'ai pas violé la loi. J'ai seulement voulu apporter la vérité aux gens. Toutes les accusations qui pèsent contre moi sont sans fondement." Malgré sa libération sous caution par la Cour spéciale antiterroriste de Quetta, Khawar Mehdi Rizvi reste poursuivi pour "conspiration" et "sédition". Il devra se présenter à chacune des audiences du procès. Reporters sans frontières (RSF) demande au gouvernement pakistanais d'abandonner les charges qui pèsent contre le journaliste."

"Ancien joueur vedette de cricket entré en politique, Imran Khan a été renversé en avril 2022 par une motion de censure au Parlement, après avoir été accusé de mauvaise gestion économique. Il aurait aussi perdu la confiance de la puissante armée pakistanaise. Le PTI a la possibilité de contester en justice les conclusions de la Commission électorale, laquelle peut par ailleurs confisquer les fonds illégalement obtenus. Le gouvernement a également la possibilité de saisir la Cour suprême pour faire interdire le PTI, même si cette extrémité est jugée peu probable. «Politiquement, ce ne serait pas un précédent idéal pour un groupe de partis politiques de faire interdire leurs rivaux», a commenté Osama Malik, un expert en questions juridiques pakistanais". 

"La Commission électorale enquête également sur des allégations de financement étranger contre deux autres grands partis politiques, le PML-N du premier ministre Shehbaz Sharif et son allié le Parti du peuple pakistanais (PPP). Les deux formations ont nié ces accusations. Le parti de l'ancien Premier ministre pakistanais Imran Khan a accepté des millions de dollars de donations illégales provenant de l'étranger, a affirmé le 2 août 2022 la Commission électorale".

"Cette commission basée dans la capitale Islamabad a indiqué que le Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI) de Imran Khan avait utilisé 16 comptes en banque secrets et accepté des dons provenant d'Australie, du Canada, des Émirats arabes unis et des îles Caïman. L'affaire remonte à 2014, quand un membre du PTI avait accusé les dirigeants du parti d'irrégularités financières. La loi pakistanaise interdit aux partis politiques de recevoir des fonds et des dons d'entreprises ou d'individus de nationalité étrangère. La Commission électorale a également affirmé que les détails financiers fournis par Imran Khan étaient «grossièrement inexacts». Le PTI a démenti ces accusations et affirmé que les dons provenaient de Pakistanais expatriés, et non de ressortissants étrangers."

Talibans
Le Pakistan a longtemps soutenu les Talibans afghans. Affecté par l'instabilité de son voisin afghan, le Pakistan affronte une insurrection talibane venant des régions tribales du Nord-Ouest. Depuis 2004, son armée effectue des opérations militaires contre eux. Des attentats terroristes, généralement revendiquées par les talibans pakistanais, ont visé des cibles au Pakistan, généralement depuis 2007.

Le 27 mars 2004, la "Cour spéciale pour la suppression du terrorisme de Quetta a ordonné la libération sous caution du journaliste pakistanais Khawar Mehdi Rizvi. Le procureur ne s'est pas opposé à cette décision. Khawar Mehdi Rizvi reste inculpé de "conspiration" et "sédition". Il devra se présenter à chacune des audiences du procès. Mais il pourra résider à Islamabad. Reporters sans frontières se félicite de cette décision de la Cour antiterroriste de Quetta et demande au gouvernement d'abandonner les charges qui pèsent contre le journaliste. Résumé de l'affaire : Après plus de quarante jours de détention au secret et de torture aux mains des services secrets militaires, les autorités pakistanaises ont inculpé, le 25 janvier 2004, Khawar Mehdi Rizvi, collaborateur de l'hebdomadaire français L'Express, de "sédition" et "conspiration". Les autorités lui reprochent d'avoir organisé pour les journalistes français un faux reportage sur les activités de groupes armés taliban à la frontière avec l'Afghanistan. Les trois journalistes avaient été arrêtés le 16 décembre 2003 à Karachi."

Juifs, Judaïsme et Israël
La présence de Juifs au Pakistan remonte au moins à 1839.

Diverses estimations évaluent de mille à deux mille cinq cents le nombre de Juifs vivant à Karachi au début du XXe siècle, pour la plupart des Juifs Bene Israel de Maharashtra, Etat situé en Inde. Les Juifs Bene Israel vivaient essentiellement à Karachi ; ils étaient artisans ou fonctionnaires. Une communauté importante vivait à Rawalpindi. Peshawar abritait une petite communauté juive.


Architecte britannique né à Lahore dans une famille juive d'origine espagnole et irakienne, Moses Somake (1875-1947) a conçu et fait édifier la Edward House, l'immeuble du Karachi, B. V. S. Parsi High School, celui de la Karachi Goan Association, et Flagstaff House à Karachi, le Khaliq Dina Hall, la Mules Mansion dans le port de Karachi, Kiamari. Le bâtiment Flagstaff "est doté d'ouvertures en arche, de piliers sculptés, de balcons semi-circulaires et de pièces spacieuses". Moses Somake s'est installé en Angleterre vers le milieu des années 1940. La Dawood Foundation propose l'exposition en ligne sur l'architecte Moses Somake

Journaliste pour le Frankfurter Zeitung, voyageur, linguiste, diplomate, conseiller du roi saoudien Abdel Aziz Ibn Saoud et théoricien polyglotte, Muhammad Asad (1900-1992), est né Leopold Weiss dans une famille bourgeoise sioniste de rabbins à Lemberg (Lvov), actuellement en Ukraine. Il représente un talentueux intellectuel de la Mitteleuropa juive, dont la prime jeunesse est marquée par le démembrement de l'Empire austro-hongrois consécutif à la Première Guerre mondiale. Aryeh Feigenbaum (1885-1981), "un de ses oncles fondera l'ophtalmologie israélienne. Un autre créera, à New York, en 1932, The Psychoanalytic Quarterly. Leopold, lui, part à "la recherche de l'ailleurs"

Leopold Weiss est marqué par son voyage en 1922 en Eretz Israël, alors Palestine mandataire. Sur cette expérience fondatrice liée à sa découverte de l'islam, des Arabes et des musulmans, il écrit "Un Proche-Orient sans romantisme. Journal de voyage". "Son récit est emblématique d'une génération qui chercha en Orient « une vérité spirituelle du monde ». Après avoir séjourné dans des pays musulmans, Leopold Weiss se convertit à l'islam à Berlin, en 1926. 

Durant la Deuxième Guerre mondiale, Muhammad Asad est interné dans un camp en Inde ; son père, sa belle-mère et sa sœur sont tués lors de la Shoah. 


Avec le philosophe Muhammad Iqbal, Muhammad Asad contribue à la formation du futur Pakistan. Il alimente les débats et réflexions sur la future Constitution de cet Etat islamique. Directeur de la division du Moyen-Orient au ministère des Affaires étrangères, il acquiert la nationalité pakistanaise. Premier ambassadeur du Pakistan à l'Organisation des Nations unies (ONU) en 1952, il rencontre sa cousine Hemdah qui a épousé un diplomate et responsable israélien, Harry (Zvi) Zinder (1909-91) ; son discours à sa tribune est anti-israélien.Son influence a été notable sur l'islam au XXe siècle. Après avoir affronté des problèmes dans son ministère vraisemblablement en raison de ses origines, Muhammad Asad quitte le Pakistan, donne des conférences, écrit "Le Chemin de la Mecque" (1954) sur son parcours. Aidé financièrement par le secrétaire général de la Ligue musulmane mondiale (LIM), le sheikh Muhammad Sarur as-Sabban et la famille Shaya du Koweït, il s'attelle à la traduction « rationalisante et esthétisante » du Coran d'arabe en anglais. Un ouvrage publié sous le titre "The Message of the Qur'ān" à partir de 1964, et censuré par les Saoudiens. L'auteur décède en Andalousie.

Professeur expert dans le Moyen-Orient au Shalem College de Jérusalem, Martin Kramer est chercheur au Washington Institute for Near East Policy. Il est l'auteur de l'étude pertinente “The Road from Mecca: Muhammad Asad (born Leopold Weiss)” publiée dans The Jewish Discovery of Islam: Studies in Honor of Bernard Lewis (Tel Aviv: The Moshe Dayan Center for Middle Eastern and African Studies, 1999), et republiée dans Europe’s Gift to Islam: Muhammad Asad (Leopold Weiss) - ed. M. Ikram Chaghatai - (Lahore: The Truth Society and Sang-e-Meel Publications, 2006). 

Martin Kramer y souligne l'influence de "Islam at the Crossroads" (1934), "diatribe contre le  matérialisme de l'Occident" : Asad y a "développé des thèmes qui se sont répandus largement dans la pensée islamique fondamentaliste. Asad y a dressé un parallèle entre les Croisades et l'impérialisme moderne, et a blâmé les Orientalistes occidentaux pour avoir déformé l'islam. Réimprimé souvent en Inde et au Pakistan, ce livre a été publié en arabe à Beyrouth en 1946 sous le titre "al-Islam ‘ala muftariq al-turuq". On compte de nombreuses rééditions dans les années 1940 et 1950. Cette traduction a exercé une influence cruciale sur les premiers écrits du théoricien islamiste Sayyid Qutb (1906-66), qui s'est largement inspiré d'Asad pour développer son idée de “Crusaderism” (Croisadisme).

Asad "s'est complètement identifié avec la cause du Pakistan, qu'il ne considérait pas seulement comme un refuge, mais comme le cadre d'une politique islamique idéale. En 1947, Asad devient directeur du département de la reconstruction islamique du nouvel État, et il se consacre à la formulation de propositions pour sa constitution. L'objectif d'Asad est clair : il s'agit d'établir un État islamique en tant que démocratie parlementaire libérale et multipartite. Dans les années 1930 et 1940, l'idée de l'État islamique avait été présentée comme antithétique à la démocratie, et similaire aux États totalitaires d'Europe centrale. Les travaux d'Asad ont remis en question cette tendance, en trouvant des preuves dans les sources islamiques concernant les élections, la législation parlementaire et les partis politiques. Mais ses propres propositions, publiées en mars 1948 sous le titre "Islamic Constitution-Making", n'ont jamais été mises en œuvre. "Seul un petit nombre de mes suggestions, voire aucune, ont été utilisées dans la Constitution (aujourd'hui abolie) de la République islamique du Pakistan ; peut-être que seul le préambule, adopté par l'Assemblée constituante en 1949, peut faire écho à ces suggestions". Le Pakistan, a-t-il déclaré plus tard, n'a pas fonctionné comme Iqbal et lui avait espéré que ce serait le cas. Le nouvel État avait été "une nécessité historique", et sans lui, "les musulmans auraient été immergés dans la société hindoue, beaucoup plus développée et plus forte intellectuellement et économiquement". Mais "malheureusement, il ne s'est pas développé comme nous le souhaitions". 

Co-fondatrice de Harif, une association de Juifs du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord, essayiste, Lyn Julius a évoqué "l'hostilité contre les juifs en 1947 quand les réfugiés musulmans Muhadjirs ayant fui l'Inde ont saccagé des sites et lieux de culte Juifs. Ils ont brûlé la synagogue de Karachi. A chaque guerre au Moyen-Orient, les Juifs ont souffert des conséquences de ces conflits. En 1948, la plupart des Juifs ont quitté le Pakistan pour s'installer en Israël et la population a continué de se réduire. Après 1967, ne restaient que 350 Juifs. En 1988, la synagogue Magen Shalom à Karachi a été démolie sous Zia al-Huq et un centre commercial a été construit sur le site. La dernière survivante pratiquante de la communauté juive, Rachel Joseph, a lutté pour que soit reconstruite une synagogue plus petite, mais sans succès. Elle est morte en 2006 âgée de 88 ans dans une petite salle. 

Et Lyn Julius a poursuivi :

'There are no more self-identifying Jews in Pakistan although some ten families of Jewish origin who masquerade as Parsis or Muslims are still thought to exist.Fishel Benkhald is Pakistan's only self-declared Jew. He wants to restore the cemetery and rebuild the synagogue in Karachi. "My dream is to gain empathy. Later I will try and get help and start the process for a small synagogue."In 2009 he remembers feeling sick of hearing the constant anti-Semitic propaganda and conspiracy theories from the Pakistani government and media. "My political side outgrew my fear. I felt less hesitant to claim my religion more publically than I would have before," he writes. In February 2014 Fishel, whose father is Muslim but whose mother is Jewish (and therefore considered Jewish under Jewish law) planned to change his official religious status from Islam to Judaism. He said "It is dangerous, but I will go at least once to record my request so their response can be documented." Fishel tells us NADRA, the database in Pakistan which handles citizenship, denied his request to change his identity from 'Muslim' to 'Jew'.The end of the Jewish community in Pakistan has not meant the end of antisemitism.  Pakistan has joined the ranks of states without Jews who blame the Jews for everything that goes wrong. They imagine that the Jews are engaged in a global conspiracy to control the world.  Having got rid of their Jews, they think they have expelled the virus but it is they who are suffering from a pathology. Targeting minorities is a sign of a sick society. What is the cure? The cure is a healthy society, guaranteeing human and civil rights and the protection of minorities. The ethnic cleansing of minorities sets a dangerous precedent for society at large. A society that devours its Jews, or its Christians, or its Shia Muslims, ends up devouring itself."
Depuis quelques années, divers médias relatent les efforts de Fishel Benkhald, trentenaire pakistanais se présentant de mère juive et de père musulman, afin de visiter Israël.

En 2020, la majorité des Juifs Bene Israel vivent en Israël, en Inde, au Canada et aux Etats-Unis, alors que le Pakistan a une population juive très réduite numériquement. Selon des statistiques officielles, 745 familles sont enregistrées comme juives au Pakistan.


En 1947, David Ben-Gourion, futur Premier ministre d’Israël, adresse secrètement une lettre  à Muhammad Ali Jinnah, dirigeant du Pakistan, lui demandant s'il reconnaîtra l’Etat Juif  quand il sera refondé. Pas de réponse. Le Pakistan aide les Etats Arabes durant la guerre d'Indépendance d'Israël. Durant la guerre des Afghans contre l'occupant soviétique dans les années 1980, le Mossad, la CIA, le MI5 (services secrets britanniques) et l'ISI (Services secrets pakistanais) coopèrent dans le cadre de l'Opération Cyclone, afin de former les  moudjahidins (rebelles afghans) pour les aider à vaincre l’ennemi soviétique. "Israël fournit également des armes au Pakistanais pendant cette guerre ou les deux services secrets auront travaillé ensemble et échangé des informations. Un rapprochement s’opère en 2010 : un des câbles diplomatiques rendus publics par WikiLeaks fait état d’une révélation faite par le lieutenant-général Ahmad Shuja Pasha, chef du Pakistan Inter-Services Intelligence Agency au Mossad qu’il a informé que des groupes terroristes tenteraient d’enlever des Israéliens en visite en Inde. Si cette information n’a pas été confirmée par les services secrets pakistanais ou israéliens, une semaine après le jour dont date le câble WikiLeaks, Israël lançait une alerte du plus haut niveau déconseillant à ses ressortissants de se rendre en Inde ou du moins repousser leur départ de quelques jours." (Source : Guysen, 9 janvier 2012)


Journaliste juif américain pour The Wall Street Journal dont il est responsable du bureau de l’Asie du Sud basé à Bombay en Inde, Daniel Pearl (1963-2002) a été kidnappé alors qu'il enquêtait sur les liens éventuels entre Richard Reid (surnommé le "shoe bomber") et Al-Qaïda et assassiné par des terroristes islamistes d''Al-Qaïda à Karachi, au Pakistan. Des images des Gazaouis "al-Dura" prétendument visés par des soldats israéliens ont été insérées dans la vidéo de l'égorgement de Daniel Pearl. En juillet 2002, Ahmed Omar Saïd Cheikh, un Britannique d’origine pakistanaise, est condamné à mort pour le rapt et l'assassinat de Pearl. Le 2 avril 2020, la Haute Cour de la province de Sindh réduit sa condamnation à sept ans d'emprisonnement et ordonne sa libération ainsi que celle de trois de ses complices. Le lendemain, le gouvernement pakistanais annonce sa volonté d'interjet appel de ce jugement et les quatre sont interpellés. En" mars 2007, lors d’une audience militaire à huis clos au centre de détention de Guantanamo Bay à Cuba, Khalid Cheikh Mohammed déclare qu’il a décapité et découpé le corps de Pearl".

Aravindan Neelakandan est l'auteur de l'article "Jinnah, Iqbal, Mufti And Hitler: Anti-Semitism In Pakistan Is As Old As The Idea Of Pakistan Itself"(Swarajya29 mars 2016). Après avoir retracé l'histoire des Juifs au Pakistan et remonté au 1er siècle de l'ère commune, il a écrit :
"Jinnah n'a pas mâché ses mots lorsqu'il a déclaré que les musulmans parlaient la langue d'Hitler et revendiquaient une place au soleil comme Hitler l'avait fait pour l'Allemagne.Il n'est donc pas surprenant que l'antisémitisme, inhérent à l'idéologie des pères fondateurs du Pakistan, se soit manifesté non seulement dans l'idéologie mais aussi dans la nature de la politique du mouvement pakistanais. Muhammad Iqbal est considéré comme le "Père spirituel du Pakistan".Dans une lettre datée du 7 octobre 1937, portant la mention "Privé et confidentiel", Iqbal exhorte Jinnah à agir de la sorte : "La question de la Palestine agite beaucoup les esprits des musulmans. Nous avons une très belle occasion de contact de masse pour les besoins de la Ligue. Je ne doute pas que la Ligue adoptera une résolution ferme sur cette question et aussi en organisant une conférence privée des dirigeants pour décider d'une sorte d'action positive à laquelle les masses pourraient participer en grand nombre".Ce genre de mouvement de masse s'est construit avec des discours exaspérants où des parallèles ont été établis entre les hindous et les juifs dans l'Inde et la Palestine indivises respectivement. Un tel parallèle a été établi par nul autre qu'Iqbal lui-même dans ses lettres à Jinnah (par exemple dans sa lettre du 28 mai 1937).Il y parle même de "répétition de la Palestine" dans certaines régions du nord-ouest de l'Inde. En fin de compte, l'"action positive de masse" dont parlait Iqbal a permis à Jinnah de créer des scénarios de "guerre civile" réussis, comme lors des pogroms de la journée d'action directe dont on a été témoin lors du "Grand massacre de Calcutta" et de Noakhali. Cela a permis de faire en sorte que les dirigeants du Congrès, qui se méfiaient des batailles, succombent à la partition. (...)A la fin des années 1930 et au début des années 1940, le mufti [de Jérusalem al-Husseini] avait dérivé vers le nazisme, attiré par sa nature antisémite qu'il partageait également. Il a réparé la mosquée al-Aqsa en Palestine qui était jusqu'alors en ruines. Il est intéressant de noter que cela a été fait avec des fonds provenant de l'Inde. (...)Pour les cercles dirigeants du Pakistan, le mufti est resté un héros. Ainsi, en 1951, il préside une conférence islamique internationale au Pakistan à laquelle participe nul autre que le Premier ministre du Pakistan de l'époque, Liaquat Ali Khan. Le chef de l'État pakistanais a prononcé une conférence devant al-Husseini, assis sur le trône présidentiel.L'antisémitisme inhérent à l'idéologie des pères fondateurs du Pakistan se manifestait non seulement dans l'idéologie mais aussi dans la nature de la politique du mouvement pakistanais. Il a aussi rapidement éclaté dans les rues du Pakistan indépendant.Dans l'année qui a suivi l'indépendance, le gouvernement pakistanais sous Jinnah a révoqué les droits de 2000 juifs Bene Yisrael qui formaient la minuscule communauté juive du Pakistan. Cela a notamment entraîné le refus de toute représentation politique. La synagogue de Karachi, qui se trouvait depuis des décennies dans l'Inde indivise, a été incendiée et les Juifs ont été attaqués.Cela a entraîné une émigration à grande échelle de la communauté, principalement vers l'Inde. Au début des années 1950, on estime qu'il ne restait plus que 250 Juifs à Karachi.Malgré tout cela, le monde et même les médias indiens agissent souvent avec effroi face à la haine qui existe au Pakistan contre les hindous et les juifs, la haine qui palpite dans l'idéologie centrale qui a donné naissance au Pakistan. Cette haine est motivée par des raisons théologiques et a, au moins, plus d'un siècle d'existence. Et elle est bien vivante dans le nouveau millénaire également.Par exemple, en mars 2004, un porte-parole de Lashkar-e-Toiba, a été cité dans le journal Greater Kashmir comme ayant déclaré qu'ils "se vengeront en Inde car Yahud (les Juifs) et les Hindous sont les deux faces d'une même pièce". Même la position actuelle du Pakistan, qui se présente comme étant contre les talibans et Al-Qaïda, est remplie de théories de conspiration étonnantes qui visent à haïr les hindous et les juifs.L'agence de presse Reuters a rapporté que l'armée pakistanaise a largué des pamphlets au-dessus des régions tribales près de la frontière afghane, mettant en garde les membres des tribus contre les "terroristes étrangers" opérant dans la région. Jusqu'à présent, tout va bien, pourrait-on dire. Mais selon Reuters, ces pamphlets en langues ourdou et pachtou, intitulés "Warning" et signés "Well Wishers, Pakistan's Armed Forces", ont informé les membres de la tribu que les "terroristes étrangers" faisaient partie d'une conspiration hindoue et juive contre le Pakistan." Ce qui a suscité l'inquiétude de l'American Jewish Committee". (AJC)
En décembre 2018, lors de la Conférence globale "Parlementaires pour Al Quds" où étaient représentés 74 pays, Mushahid Hussain Syed, président du Comité sénatorial des Affaires étrangères, a annoncé la formation d'un Forum parlementaire pakistanais sur la Palestine, le Cachemire et les Rohingya afin de promouvoir la cause des peuples opprimés de ces régions. Il s'est référé à la vision des pères fondateurs du Pakistan, Allama Iqbal et Quaid-e-Azam Muhammad Ali Jinnah, concernant la Palestine, en se fondant sur la résolution sur cette question adoptée le 23 mars 1940, avec la Résolution Pakistan, la réunion d'al-Jinnah avec le grand mufti de Amin al Husseini, au Caire en 1946, et sa lettre au Président américain Truman cherchant la justice pour les Palestiniens". 

Mushahid Hussain Syed s'est aussi référé au rôle du Pakistan durant la guerre arabo-israélienne, le Sommet islamique de Lahore en 1974, l'entrainement des cadets palestiniens dans les institutions militaires pakistanaises et le rejet du Pakistan de la décision américaine de transférer le siège de son ambassade de Tel Aviv à Jérusalem au travers de résolutions votée par les deux chambres du Parlement et le soutien à une résolution similaire à l'Assemblée générale des Nations unies le 21 décembre l'année dernière. Disant que Jérusalem, ‘Qibla Awwal’ pour les musulmans, ne peut faire l'objet de compromis, il a cité des versets d'Allama Iqbal remontant à 90 ans réitérant la résurgence de l'Asie quand le poète-philosophe a parlé du "Soleil se levant à l'Est. Ce discours a été chaleureusement salué par les participants et la délégation pakistanaise a eu des réunions avec diverses délégations, dont celles de Palestine, Turquie, Indonésie, Egypte et des pays africains".

Invité par Hafiz Muhammad Tahir Mehmood Ashrafi, président du Conseil des oulémas pakistanais (PUC), le grand mufti de Palestine a assisté, en invité d'honneur, en février 2019 à la Conférence du message de l'islam qui présentera selon Ashrafi "un mécanisme pratique d'élimination du terrorisme, de l'extrémisme et de la violence sectaire".


Manuels scolaires

Le 30 août 2012 à Lahore, la Commission nationale pour la justice et la paix (NCJP) de l'évêque catholique a rendu publique l'étude "Eduquer ou nourrir la haine" (“Taleem ya Nafrat ki Aabiyari”). Cette étude a analysé 22 manuels scolaires des provinces du Pendjab et du Sind, situées dans la partie sur une bande à l'est et au sud-est du Pakistan, destinés à des écoliers et collégiens. Les auteurs de l'étude ont trouvé dans 55 chapitres des passages haineux envers les chrétiens, les Hindous, le Bangladesh et l'Inde : "Les Hindous ne peuvent jamais devenir de vrais amis des musulmans", les Hindous se seraient opposés à la création du Pakistan, 

Le 4 août 2017, The Daily Mail a publié l'article "'Hindu thugs massacred Muslims, confiscated their property, and forced them to leave India': How school textbooks in Pakistan teach children a very different story of Partition than what's taught in India" ("Des voyous hindous ont massacré des musulmans, ont confisqué leur propriété et les ont obligés à quitter l'Inde" : Comment les manuels scolaires au Pakistan enseignent aux enfants une histoire très différente de la Partition comparée à celle enseignée en Inde). Élève à Mumbai (Inde), Triaksh Mitra "a appris comment le Mahatma Gandhi a combattu pour une Inde unifiée indépendante de la Grande-Bretagne alors que la Ligue musulmane - la parti politique dirigé par Muhammad Ali Jinnah - a prix le parti de la puissance coloniale pour créer sa propre nation".


"Inde-Pakistan : deux femmes contre le fondamentalisme" 

"Comment la montée des extrémismes et des fondamentalismes fragilise l'Inde et le Pakistan. Un road-movie documentaire passionnant, porté par la réalisatrice Sabiha Sumar et l'actrice Kalki Koechlin."

"Août 1947. Sous la pression d'un mouvement nationaliste mené par Nehru, le secrétaire général du parti du Congrès, et le Mahatma Gandhi, le Royaume-Uni accorde l'indépendance aux territoires de l'Empire des Indes. Deux États voient alors le jour : l'Inde et le Pakistan. Tandis que l'un s'engage sur la voie de la laïcité, l'autre choisit celle de l'islam."

"Aujourd'hui, les deux pays sont divisés par la montée en puissance des fondamentalismes religieux. En Inde, le parti Bharatiya Janata (BJP), qui rêve de hisser le drapeau safran, œuvre à la création d'une nation hindoue, notamment grâce au Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS), une organisation nationaliste très influente qui compte plus de soixante mille antennes dans tout le pays. Au Pakistan, où les attaques terroristes se multiplient, la toute-puissance des grands propriétaires tribaux accroît les inégalités de richesse, engendrant de plus en plus de violences."

"Dans ce documentaire fouillé à la magnifique photographie, la réalisatrice pakistanaise Sabiha Sumar et l'actrice franco-indienne Kalki Koechlin (star de Bollywood) observent les ravages de l'islamisme au Pakistan et alertent sur les dangers du fanatisme hindou en Inde. Parcourant leurs pays respectifs, les deux femmes recueillent des témoignages précieux, donnant la parole aux élites depuis leurs palais, mais aussi à la majorité silencieuse dans les rues de Bombay, le jour de la fête des couleurs."

 
Portes ouvertes 
Créée en 1976, l’association Portes Ouvertes France "fait partie d'Open Doors, un grand réseau de 25 associations en Europe et en Amérique créé en 1955 par Frère André". Elles sont au service des chrétiens persécutés et publient un rapport annuel sur la condition chrétienne dans le monde. La principale leçon de l'Index Mondial de Persécution des Chrétiens 2019, c'est que 70 ans après la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, 1 chrétien sur 9 ne jouit pas de ce droit. L'Index Mondial de Persécution des Chrétiens nous raconte l'histoire de millions d’individus pour qui la liberté de pensée, de conscience et  de religion reste un rêve lointain."

"LES CHIFFRES DE LA PERSÉCUTION EN 2019
4 305 chrétiens tués 
3 150 chrétiens détenus 
1 847 églises ciblées 
Le nombre de chrétiens tués en raison de leur foi a augmenté de 40% et le nombre d’églises ciblées (vandalisées, fermées…) a plus que doublé entre l’index 2018 et l’index 2019".

Les cinq premiers pays sur 50 persécutant le plus les chrétiens sont la Corée du nord, l'Afghanistan, la Somalie, la Libye et le Pakistan. 

"LES TENDANCES DE LA PERSECUTION AUJOURD'HUI 

1 - Une persécution plus étendue
Le nombre de chrétiens persécutés grandit. Aujourd’hui, on estime que plus de 245 millions de chrétiens sont fortement persécutés (contre 215 millions pour l’index 2018).
2- Une persécution plus profonde
Les discriminations quotidiennes, comme l’impossibilité d’avoir un emploi, de faire des études, d’avoir accès aux besoins essentiels… parce qu’on est chrétien, grandissent : dans les 50 pays de l’index elle a crû de 16% depuis 2014.
La persécution augmente pour la 6e année de suite (+ 2,7% par rapport à l’année précédente). Elle s’implante de plus en plus profondément dans certaines cultures avec la radicalisation des sociétés.
3- Une persécution plus violente
Le nombre de chrétiens tués est lui aussi en augmentation et passe de 3 066 (index 2018) à 4 305 (index 2019)"

"Une chrétienne de 15 ans, Meerab Palous, a été victime d’un enlèvement fin juin à Faisabald (Pakistan), relate Aleteia, le 9 juillet 2022, citant une information recueillie auprès d’Asianews. Ensuite, la jeune fille a été forcée de se convertir à l’islam et de se marier à une connaissance musulmane. Les forces de l’ordre ont refusé d’enregistrer la plainte de ses parents. Naveed Walter, président de l’ONG Human Rights Focus Pakistan (HRFP), a fait savoir au média que « plus d’un millier d’incidents de ce type se produisent chaque année » au Pakistan, « selon des estimations récentes ». Et la plupart d’entre eux ne sont jamais signalés."


« Pakistan - Le blasphème et la mort »
Arte rediffusera le 9 août 2022 à 23 h 40 « Pakistan - Le blasphème et la mort » (Blasphemie - Pakistans tödliches Gesetz) de Mohammed Naqvi. « En 2018, la campagne des législatives au Pakistan a vu s’affronter partisans et détracteurs de la loi anti-blasphème. Ce documentaire éclaire les enjeux d’affaires qui ont indigné la communauté internationale ». 


Les musulmans représentent environ 94-97% de la population pakistanaise d'environ 208 millions d'habitants. L'autre composante est constituée d'hindous et de chrétiens. Si les sunnites sont majoritaires, les chiites comptent pour 10 à 20% des Pakistanais.

« Au Pakistan, quiconque est accusé de blasphème encourt la peine de mort. Alors que les militants pour les droits civiques réclament depuis des années la révision de cette loi adoptée en 1986, Khadim Hussain Rizvi, fondateur du parti intégriste islamiste Tehreek-e-Labbaik, a orchestré une campagne violente pour lui afficher son soutien. Il incite ses millions de sympathisants à attaquer eux-mêmes les personnes accusées de blasphème."

"Asia Bibi, une paysanne chrétienne condamnée à mort pour blasphème en 2010, après avoir été accusée d’avoir bu dans le même gobelet que des femmes musulmanes de son village, est ainsi devenue l'un des symboles de cette radicalisation violente. Après avoir vu sa peine confirmée en appel, elle a finalement été acquittée par la Cour suprême en 2018. Son coreligionnaire Patras Masih, accusé quant à lui d’avoir partagé sur les réseaux sociaux des propos blasphématoires, a fait comme elle l’objet d’une haine soigneusement attisée, qui a enflammé une part de la population ».

« En 2018, Mohammed Naqvi a suivi leurs procès respectifs, en pleine campagne électorale des législatives. Il montre dans ce film éclairant comment la loi sur le blasphème devient alors l’un des enjeux clés du scrutin. Si le futur Premier ministre Imran Khan, qui ne se revendique pourtant pas de l’islamisme, choisit d’afficher son soutien au statu quo, d’autres voix se font entendre avec éclat. La militante pour les droits humains Gulalai Ismail, accusée de blasphème, a ainsi décidé d’attaquer en justice ceux qu’elle dénonce comme des calomniateurs... » 

Asia Bibi
Le 31 octobre 2018, la Cour suprême du Pakistan "a acquitté en appel la chrétienne Asia Bibi, condamnée à mort pour blasphème en 2010. « Elle a été acquittée de toutes les accusations », a déclaré le juge Mian Saqib Nisar lors de l’énoncé du verdict, ajoutant qu’elle allait être libérée « immédiatement ».

"Chrétienne du Pendjab, Asia Bibi, ouvrière agricole, ramassait des baies rouges le 14 juin 2009 dans le village d’Ittan Wali, lorsqu’elle commit l’irréparable aux yeux de ses voisines : boire de l’eau dans un puits supposé réservé aux musulmans. Parce qu’elle a répondu aux femmes qui l’accusaient d’avoir sali l’eau, cette mère de cinq enfants a été accusée de « blasphème », un acte passible de la peine de mort au Pakistan".

"Aussitôt jetée en prison, Asia Bibi a été jugée en novembre 2010 et condamnée à la peine capitale par pendaison. Cette mère de famille, qui clame son innocence, avait fait appel de cette décision. Lors de l’examen de son recours, début octobre, les juges de la Cour suprême avaient semblé s’interroger sur le bien-fondé de l’accusation. « Je ne vois aucune remarque désobligeante envers le Coran dans le rapport d’enquête », avait observé le juge Saqib Nisar, tandis qu’un second juge, Asif Saeed Khan Khosa, relevait plusieurs points de non-respect des procédures."

"Son cas avait eu un retentissement international, attirant l’attention des papes Benoît XVI et François. En 2015, l’une des filles d’Asia Bibi avait rencontré le pontife argentin. Ce verdict pourrait susciter la fureur des milieux religieux fondamentalistes, qui appelaient de longue date à l’exécution d’Asia Bibi. Des islamistes radicaux avaient ces dernières semaines menacé les juges statuant sur son cas en cas de jugement favorable".

« Les musulmans pakistanais prendront les mesures adéquates face aux juges (…) et les conduiront à une fin horrible », avaient fait savoir des responsables du Tehreek-e-Labaik Yah Rasool Allah Pakistan (TLY), un groupe religieux extrémiste devenu parti politique, qui fait de la punition du blasphème sa raison d’être. « Les adorateurs du Prophète ne reculeront face à aucun sacrifice », avaient-ils lancé."

"Face à ces menaces, le Premier ministre pakistanais, Imran Khan, a appelé le 31 octobre 2018 au respect de la décision de la Cour suprême. Lors d’une intervention télévisée, le chef du gouvernement a appelé ses compatriotes à « ne pas céder » à ceux qui appellent à rejeter ce verdict car ils le font « pour leur propre intérêt politique » et « ne rendent pas service à l’islam ». Ce langage est celui « des ennemis du Pakistan », a-t-il lancé. « Ne nous forcez pas à agir », a-t-il ajouté à l’adresse de ceux qui « incitent à la violence » dans le pays."

"Le blasphème est un sujet extrêmement sensible dans ce pays très conservateur où l’islam est religion d’Etat. La loi prévoit jusqu’à la peine de mort pour les personnes reconnues coupables d’offense à l’islam. La capitale Islamabad avait été placée sous haute sécurité, avec des barrages sur les routes notamment à proximité des quartiers où vivent les magistrats et la communauté diplomatique, a constaté l’Agence France-Presse".


Des manifestations massives ont eu lieu afin de marquer l'hostilité populaire à l'égard de cet acquittement.

Le 6 novembre 2018, Le Figaro a publié "L'appel des intellectuels : « Liberté pour Asia Bibi ! » "À l'initiative du philosophe Daniel Salvatore Schiffer, plus de 40 personnalités*, dont Élisabeth et Robert Badinter, Luc Ferry, Robert Redeker, Pierre-André Taguieff ainsi que Jean-Claude Zylberstein invitent à se mobiliser pour sauver la Pakistanaise chrétienne toujours incarcérée et menacée de mort par les islamistes dans son pays... Il semble que, face à la violence des protestations, dans les principales villes du Pakistan, qui ont suivi ce verdict, le gouvernement ait finalement décidé, après avoir trouvé un supposé «accord» avec ces mêmes fondamentalistes islamistes qui l’avaient outrancièrement condamnée dès le départ, de repousser, sinon d’annuler, sa libération. Chacun comprendra donc aisément notre profonde indignation morale, en plus de notre légitime incompréhension intellectuelle, face à ce qui apparaît ainsi là, de la part du gouvernement pakistanais, comme une malheureuse capitulation. Davantage: une négation, sinon un outrage, au droit lui-même. D’autant que, comble de notre étonnement (c’est un euphémisme) devant pareille contradiction, le président et le premier ministre actuels du Pakistan sont les illustres fondateurs, dans leur pays, du «Mouvement du Pakistan pour la justice», parti qui les a portés au pouvoir".

"Ainsi, au nom de ces mêmes valeurs de justice et d’éthique que prétend défendre ce mouvement politique, demandons-nous instamment de respecter cet ultime verdict émis par la Cour suprême du Pakistan, en remettant effectivement en liberté, toutes affaires cessantes, Mme Asia Bibi. «Nous nous honorons de prôner la tolérance religieuse, la pluralité des idées et, osons-nous dire également en cette circonstance, l’égalité entre les sexes». Outre une question d’humanisme, c’est un enjeu de civilisation. Conformément à ce que nous enseignèrent les esprits les plus cultivés et charitables du siècle des Lumières, nous nous honorons de prôner, quant à nous, la tolérance religieuse, la pluralité des idées et, osons-nous dire également en cette circonstance, l’égalité entre les sexes."

La Grande-Bretagne n'a pas offert l'asile politique à Asia Bibi par craintes de potentiels troubles à l'ordre public sur le territoire britannique ainsi que d'attaques contre ses ambassades et ses civils. Idem pour la France. Asia Bibi vit au Canada avec sa famille, dans un lieu maintenu secret.

Le 16 janvier 2020, "un tribunal pakistanais a condamné plus de 80 islamistes à une peine de 55 ans de prison chacun pour leur participation à de violentes manifestations contre l'acquittement de la chrétienne Asia Bibi. Le jugement, inhabituellement sévère pour ce genre d'affaires au Pakistan, où la question du blasphème est particulièrement sensible, a été prononcé jeudi par un tribunal de Rawalpindi, a déclaré vendredi Pir Ejaz Ashrafi, un cadre du parti islamiste Tehreek-e-Labaik Pakistan (TLP). Les 86 condamnés, à l'issue d'un procès qui a duré plus d'un an, étaient membres de ce parti. Le mouvement extrémiste avait organisé de violentes manifestations à travers le pays pour dénoncer l'acquittement de la chrétienne Asia Bibi, condamnée à mort pour blasphème en 2010 puis acquittée fin 2018. Après son acquittement, des milliers de membres du TLP avaient bloqué trois jours durant les principaux axes du pays pour exiger sa pendaison. Le TLP avait appelé à assassiner les juges de la Cour suprême ayant pris la décision, et à des mutineries dans l'armée. Les autorités avaient ordonné l'arrestation du chef du parti, Khadim Hussain Rizvi, pour calmer les esprits. Il avait été remis en liberté en mai 2019".

"C'est une parodie de justice, avec des peines particulièrement lourdes", a dénoncé Pir Ejaz Ashrafi, qui a assuré que le parti allait faire appel du jugement. Le blasphème est un sujet incendiaire au Pakistan, où de simples accusations suffisent parfois à entraîner des lynchages meurtriers. Mme Bibi, ouvrière agricole d'une cinquantaine d'années et mère de famille, avait été condamnée à mort à la suite d'une dispute avec des villageoises musulmanes au sujet d'un verre d'eau. S'en était suivie une longue saga judiciaire qui avait divisé le pays et ému la communauté internationale, attirant l'attention des papes Benoît XVI et François. Après avoir passé plus de huit ans dans les couloirs de la mort au Pakistan, Asia Bibi vit désormais au Canada. Les chrétiens, qui comptent pour environ 2% de la population pakistanaise majoritairement musulmane, constituent l'une des communautés les plus déclassées du Pakistan. Ils vivent souvent dans des bidonvilles et se voient offrir des emplois peu rémunérés de balayeurs, d'agents d'entretien ou de cuisiniers".

"A l’occasion de la journée internationale de l’avocat en danger consacrée au Pakistan, le Conseil de l’ordre a attribué à l’unanimité la qualité d’avocat d’honneur du Barreau de Paris à Maître Saïf ul-Malook, l’avocat qui a défendu Asia Bibi jusqu’à son acquittement en janvier dernier. L’annonce lui a été faite de manière solennelle dans la soirée du 21 janvier 2020, dans un amphithéâtre de la Maison du Barreau de Paris, par le bâtonnier Olivier Cousi : venu témoigner dans la capitale française à l’occasion de la Journée internationale de l’avocat en danger consacrée au Pakistan, Maître Saïf ul-Malook a appris avoir été nommé à l’unanimité des membres du Conseil de l’ordre membre d’honneur du Barreau de Paris. Comme l’indique le Règlement intérieur du Conseil de l’ordre de Paris, les membres d’honneur proviennent de barreaux étrangers et sont placés sous la protection du bâtonnier de Paris, sans pour autant bénéficier des droits et être contraints aux mêmes obligations que les avocats inscrits au Tableau du Barreau. Maître Saïf ul-Malook rejoint ainsi une douzaine d’avocats de barreaux de capitales étrangères comme Tunis, Niamey, Téhéran, Istanbul ou Pékin, devenus également avocats d’honneur les années précédentes."

"Au cours du témoignage poignant qu’il a livré avec discrétion devant quelques dizaines de personnes présentes, qui ne cachaient pas leur admiration, Maître Saïf ul-Malook a notamment évoqué la personnalité d’Asia Bibi, qu’il a défendue à partir de 2014 alors qu’elle venait de perdre son procès en appel devant la Haute Cour de Lahore, confirmant sa condamnation à mort pour « blasphème ». Évoquant une personne « exceptionnelle », toujours joyeuse et confiante lors de ses rencontres avec elle en prison où elle passa dix ans, l’avocat pakistanais a évoqué la force de sa foi. « Le 10 octobre 2018, je lui ai dit qu’on avait gagné et elle m’a répondu qu’elle avait fait un rêve la nuit passée dans lequel les portes de sa cellule s’ouvraient ; c’était un rêve prémonitoire, un message du Christ. »  Rappelant que la législation pakistanaise prévoyant la peine de mort en cas de blasphème a été introduite dans les années 1980, l’avocat pakistanais a indiqué qu’il défendait aujourd’hui un autre cas similaire au Pakistan, celui d’un couple accusé d’avoir envoyé des SMS blasphématoires. Le courage de cet homme qui connaît les risques qu’il encourt mais semble prêt à sacrifier sa vie pour défendre les personnes condamnées à mort pour cette raison a été salué à plusieurs reprises par les personnes présentes. Répondant à une question de la salle sur ce sujet, il a rappelé que la grande majorité des cas de procès pour blasphème concernaient des musulmans. Enfin, Maître Saïf ul-Malook est revenu sur l’origine de son engagement, citant en exemple Salman Taseer, gouverneur du Penjab assassiné en 2011 par un de ses gardes du corps en réaction à ses propos critiques à l’égard de la législation sur le blasphème et qui avait rendu visite à Asia Bibi en prison."

Le 3 février 2020, les éditions du Rocher publieront "Enfin libre !" co-écrit par Asia Bibi, réfugiée pakistanaise chrétienne, et Anne-Isabelle Tollet, grand reporter et Secrétaire générale de l'association Comité international Asia Bibi. « Je n'ai pas la mémoire des dates, mais il y a des jours qu'on n'oublie pas. Comme ce mercredi 9 juin 2010. Je suis arrivée, avant que le soleil ne se couche, pour la première fois au centre de détention de Shekhupura, où j'ai passé trois années avant de changer de prison comme on change de maison... Mon histoire, vous la connaissez à travers les médias, vous avez peut-être essayé de vous mettre à ma place pour comprendre ma souffrance… Mais vous êtes loin de vous représenter mon quotidien, en prison, ou dans ma nouvelle vie et c'est pourquoi, dans ce livre, je vous dis tout ». Dans la République islamique du Pakistan, la chrétienne Asia Bibi a été condamnée à mort pour avoir bu de l'eau dans un puits utilisé par les musulmans. Elle a passé neuf années en prison, neuf années à être humiliée et torturée pour avoir « blasphémé ». Voici le témoignage exclusif d'une simple mère de famille devenue le symbole mondial de la lutte contre l'extrémisme religieux."

Le 25 février 2020, Anne Hidalgo, maire socialiste de Paris, a remis la citoyenneté d'honneur de la ville à Asia Bibi.

Le 28 février 2020, Asia Bibi, qui a demandé à la France le statut de réfugiée, a été reçue à l'Elysée par le Président de la République Emmanuel Macron. “Comme nous l’avons toujours dit, la France est prête à accueillir Mme Asia Bibi et sa famille en France si tel est leur souhait”, a d’ores et déjà répondu la présidence française à l’AFP, en annonçant que la Pakistanaise serait reçue à l’Élysée. “Depuis sa condamnation en 2010 pour délit de blasphème, la France a été mobilisée aux côtés d’Asia Bibi”, ajoute l’Élysée. “Nous avons plaidé pour son acquittement et agi, avec nos partenaires européens et canadiens, pour sa libération effective”.

Cette rencontre a été critiquée par "les islamistes de tous bords, qui multiplient les réactions polémiques depuis quelques jours. Parmi eux, l’un des avocats du CCIF, mais aussi un certain Idriss Sihamedi, fondateur et président salafiste de l’association humanitaire BarakaCity. Sur Twitter, cet islamiste très controversé s’est fendu d’un tweet du plus mauvais goût à propos de cette entrevue. « Une Pakistanaise vivant au Canada acquittée au Pakistan pour ‘blasphème’ reçoit une invitation du président Emmanuel Macron qui lui offre ‘l’asile politique’ comme pour la remercier de sa haine de l’islam. La France déteste profondément l’islam », a-t-il écrit. Fondateur de l’association humanitaire Barakacity, ce musulman salafiste a choqué l’opinion publique à de nombreuses reprises par ses déclarations controversées." L'eurodéputé (LR) François-Xavier Bellamy et la journaliste Caroline Fourest

« Pakistan : les religieux freinent la lutte contre le Covid-19 »
Arte diffuse sur son site Internet « Pakistan : les religieux freinent la lutte contre le Covid-19 » (Corona in Pakistan: Streit um Moscheen) de la journaliste Shahzaib Wahlah. « Parce qu'il se trouve entre l'Iran, où la situation du virus a dégénéré, et l'Afghanistan, où les derniers bilans sont très inquiétants, le Pakistan est dans une position particulièrement fragile face au coronavirus. »

« Tandis que la majorité des pays musulmans confrontés à la pandémie ont fermé les mosquées, y compris le site le plus sacré, La Mecque en Arabie Saoudite, au Pakistan la plupart des lieux de culte restent ouverts. Ce pays très islamique observe pourtant un confinement officiel ; mais les mosquées ne s'y plient pas. »

« Malgré les risques de propagation du virus, des milliers de croyants continuent d'assister aux prières quotidiennes les uns à côté des autres. A l'heure actuelle, le Pakistan compte officiellement 1571 personnes testées positives virus... Un chiffre très flou puisque que la moitié du pays est dépourvue de centres de santé. D'après les experts, les cas de contamination seraient au moins dix fois supérieurs. »


Allemagne, 2015, 59 mn
Production : Vidhi Films Sabiha Sumar
Auteurs : Nandita Das et Sabiha Sumar 
Sur Arte le 10 août 2022 à 01 h 30
Sur arte.tv du 08/08/2022 au 07/09/2022
Visuels : © Zeeshan Haider

« Pakistan - Le blasphème et la mort » de Mohammed Naqvi
Royaume-Uni, 2019
Sur Arte les 28 juillet 2020 à 23 h 30, 9 août 2022 à 23 h 40
Disponible du 27/07/2020 au 27/07/2021
Sur arte.tv du 08/08/2022 au 08/08/2023
Visuels :
© blakeway/Muhammad Sohail Rana
© blakeway/Muhammad Faryad
© blakeway/Haider Ali

« Pakistan : les religieux freinent la lutte contre le Covid-19 » de Shahzaib Wahlah
France, Allemagne, 2020, 3 min
Sur Arte du 04/04/2020 au 06/04/2023

Articles sur ce blog concernant :
Les citations sur les films proviennent d'Arte. Cet article a été publié le 27 juillet 2020.

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