mercredi 27 février 2019

« Les Croisés, une brève histoire de la Terre sainte »


Arte diffusa sur son site Internet, dans le cadre d’Invitation au voyage (Stadt Land Kunst), « Matisse en Bretagne / Terre sainte / Floride  » (Matisses Bretagne / Das Heilige Land / Die Florida-Keys) par Fabrice Michelin. Visible sur Internet, « Les Croisés, une brève histoire de la Terre sainte » évoque, avec un vocabulaire biaisé, le royaume latin de Jérusalem (1099-1291).
Linda Lorin invitait à découvrir « trois lieux qui appartiennent à notre patrimoine artistique, culturel et naturel ». 

Dans ce volet : « En Bretagne, Matisse libère le fauve - Les croisés, une brève histoire de la Terre sainte - L’incontournable : en Floride, les Keys ».

En 1078, les Turcs seldjoukides conquièrent Jérusalem.

« À la fin du XIe siècle, alors que les Seldjoukides interdisent aux chrétiens l’accès au tombeau du Christ, le pape Urbain II lance l’ordre de conquérir Jérusalem ».

La Première croisade (1096-1099) se déroule en réponse à l’appel du pape Urbain II au concile de Clermont (27 novembre 1095) pour aider l’empereur byzantin Alexis Ier Comnène ainsi que les chrétiens d’Orient et libérer la Terre Sainte.

Le 15 juillet 1099, les croisés s'emparent de Jérusalem. Sont fondés les États latins d’Orient qui disparaissent en 1291 avec la chute d'Acre. Ce royaume chrétien institué en Orient était constitué d'un domaine royal et de quatre fiefs principaux ; tous cinq avaient des vassaux. Les principaux fiefs du royaume de Jérusalem étaient le comté de Jaffa - la seigneurie d'Ascalon, la seigneurie d'Outre-Jourdain, ou de Montréal, la principauté de Galilée, ou de Tibériade, et le comté de Sidon.

Cette « première croisade donne naissance au royaume latin de Jérusalem, lequel a façonné la Terre sainte pendant près d’un siècle ».

Hugues de Payns part s’installer à Jérusalem. Il y fonde en 1118-1120, un quart de siècle après la conquête de la ville par les chrétiens, la confrérie des « pauvres chevaliers du Christ et du Temple de Salomon », chargée d’assurer la sécurité des pèlerins ». Son seigneur, le comte de Troyes Hugues Ier, le rejoint rapidement, et devient templier.

Assurés du soutien de Bernard, le célèbre abbé de Clairvaux, les frères du Temple constituent en 1129 le premier ordre religieux-militaire de la chrétienté. « Moines et soldats, faisant vœu de pauvreté, de chasteté et d’obéissance, ils vouent leur existence à la défense de la Terre sainte, jusqu’à la mort ». La mission que s’est fixé l’Ordre : protéger les pèlerins qui se dirigent vers l’Orient, les Lieux saints. Au service du roi de Jérusalem, l’Ordre défend les chrétiens. Les templiers participent aux batailles des croisades.

Contrôlé par les chrétiens durant les croisades (1044-1187 et 1191-1291), Akko ou Saint-Jean-d'Acre est alors une cité-port carrefour par où "transitent pèlerins et commerçants", notamment italiens qui disposent de leur quartier. Des découvertes archéologiques ont mis en valeur la ville souterraine des Croisés - les Mamelouks avaient détruit les niveaux supérieurs pour construire leur ville. Après la chute de Jérusalem (1187), Acre devient le siège du "royaume de Jérusalem".

Les "Croisés ont appris l'utilisation des échalotes de la ville d'Ashkelon, l'utilisation des tapis. Savons, oranges et épices garnissent les marchés européens".

Ce film retrace, grâce à des illustrations médiévales et une carte, ce que fut ce Royaume chrétien doté de châteaux, des forteresses au système militaire élaboré, notamment près du lac de Tibériade, pour protéger les plaines des attaques musulmanes, et ses héros, dont Godefroy de Bouillon, premier souverain de ce royaume chrétien et avoué du Saint-Sépulcre, et le roi Richard Cœur de Lion.

Il évoque, sur le même plan, les massacres des juifs dans les synagogues et ceux des musulmans, conquérants ayant imposé la dhimmitude et interdit aux chrétiens tout accès à leurs lieux saints (Saint-Sépulcre) à Jérusalem, en 1099. De manière erronée et anachronique, il évoque une "Palestine médiévale" (?!) et présente Jérusalem comme un lieu sacré pour les trois religions monothéistes. Il élude le djihad.

En outre, il s'attarde sur l'échoppe à Jérusalem d'un commerçant effectuant des tatouages, une "tradition ancestrale dont les Croisés ont fait la renommée". Le judaïsme interdit le tatouage. 

On peut regretter que les auteurs du film n'aient pas évoqué l'origine du vin blanc Chardonnay : les Croisés auraient rapporté de Jérusalem ce cépage dénommé « Porte de Dieu » (Cha’ar – porte, Adona’ï – Dieu). 


« Matisse en Bretagne / Terre sainte / Floride   » par Fabrice Michelin
France, Elephant Doc, 2018, 39 min
Sur Arte le 28 décembre 2018 à 16 h 40, sur le site Internet du 28/12/2018 au 25/02/2019
Visible sur Internet 

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Les citations sont d'Arte et du reportage.

Les Juifs dans l’orientalisme



Le musée d’art et d’histoire du Judaïsme (mahJ) a présenté l’exposition éponyme assortie d’une catalogue magnifique et passionnant. Un parcours dans la peinture orientaliste montrant la « représentation et l'imaginaire du Juif comme « oriental » dans l'art, de 1832 à 1929 ». Eclairée par des quêtes spirituelles, identitaires et artistiques ainsi que par les découvertes archéologiques et les périples en Orient, une présence picturale complexe où se mêlent fascination, curiosité, sensualité, essentialisation, stéréotypes, sensibilité, fantasmes, etc. Le 27 février 2019, de 14 h à 16 h, le mahJ propose "Les artistes et l’Orient", atelier pédagogique pour enfants de 8 à 12 ans. 

Les Orientales
L’Orient des peintres. Du rêve à la lumière
Les Juifs dans l’orientalisme 
Une passion pour Delacroix : la collection Karen B. Cohen 
De Delacroix à Matisse. Dessins du musée des Beaux-arts d'Alger 

L’orientalisme vise les œuvres artistiques ayant pour thématique commune l’Orient, vaste espace allant de l’Afrique à l’Asie. Un courant mêlant politique et culture : littérature, peinture, sculpture, photographie, etc. et qui connaît un plein épanouissement au XIXe siècle.

Eugène Delacroix, Théodore Chassériau, Alfred Dehodencq, Jean Lecomte du Nouÿ, Wilhelm Gentz, Charles Cordier, Lucien Lévy-Dhurmer, David Roberts, Thomas Seddon, Jean-Léon Gérôme Gustav Bauernfeind, Alexandre Bida, Gustave Moreau, Alexandre Cabanel, Horace Vernet, Lawrence Alma-Tadema, William Holman Hunt, James Tissot, Maurycy Gottlieb, Lesser Ury, Zeev Raban, E.M. Lilien, Abel Pann, Reuven Rubin, Nahum Gutman… Au MAHJ, les œuvres de ces artistes, nourris aussi parfois de leurs lectures des Mille et une nuits – traduction au XVIIIe siècle - et d’auteurs, romantiques ou non, ayant visité l’Orient, de Chateaubriand à Victor Hugo et Pierre Loti.

La représentation du Juif comme Oriental
Ces oeuvres illustrent la curiosité, l’attrait, l’influence, les recherches spirituelles, identitaires et artistiques, les inquiétudes ou les enthousiasmes face à cet Orient - « monde arabe et empire Ottoman ») – que ces artistes explorent.

Et la « présence picturale des Juifs au sein de l’orientalisme du XIXe siècle, au miroir des voyages, de la littérature et de la critique d’art ». Un orientalisme revisité par  Joann Sfar dans les cinq volumes du Chat du rabbin par son évocation de l’Algérie des années 1920, comme le relève avec pertinence Christine Peltre.

L’orientalisme désigne une discipline scientifique dans laquelle les Juifs ont tenu un rôle majeur de pionniers. Puis, après la publication du livre Orientalism d’Edward Saïd (1978, Vintage Books), ce terme est devenu polémique. Les thèses « de l’universitaire américain Edward Saïd… glorifiaient la supériorité et la tolérance de la civilisation islamique et infligeaient un sentiment de culpabilité aux Européens qui s’en délectaient » (Bat Ye’or). Le livre d’Edward Saïd a suscité de vives critiques.

Du début du XIXe siècle à l’aube du XXIe siècle, les Juifs « se sont distingués par le regard à la fois novateur et dépourvu de préjugés qu’ils portaient sur les différents aspects d’une culture avec laquelle ils surent entrer en dialogue intime. Dans cet Orient qu’ils découvrent, parcourent, dont ils exhument les textes et les coutumes, les Juifs jouent au jeu des ressemblances et des différences ».

« Les traits de cet Orient singulier qui fut celui des savants, explorateurs et historiens juifs, aussi éloigné de l’image fantasmée de l’Orient rêvé ou diabolisé du XIXe siècle que de la conception d’un Orient dominé politiquement, comme dans les représentations produites par le XXe siècle ».

Une présentation à nuancer. Certes, des Juifs pro-islamiques ont forgé au XIXe, avec une finalité précise, siècle le mythe de la « coexistence interreligieuse pacifique sous domination musulmane », mais la dhimmitude, avec ses séries de persécutions antisémites, a limité ce dialogue.

Cette belle exposition suscite des critiques sur son absence de rigueur lexical et des interrogations.

Il conviendrait de mettre entre guillemets l’expression « terre d’islam » et, mieux respecter les règles de typographie françaises : « islam » est dépourvu, comme les autres religions de majuscule, alors que les noms de peuples débutent par une lettre capitale.

De plus, l’exposition évoque « le monde arabe » comme s’il était homogène et uniforme, en omettant les Berbères, indigènes distincts des conquérants arabes.

Curieusement, la bibliographie de l’exposition élude le livre incontournable L’exil au Maghreb, la condition juive sous l’islam (1148-1912) de David G.Littman et Paul B. Fenton.

La découverte des Juifs en « terre d’islam »
Au début du XIXe siècle, les artistes européens parcourant l’Orient découvrent les diverses communautés Juives des contrées du pourtour méditerranéen.

Une rencontre surprenante qui « offre un visage pittoresque à cet Orient souvent rêvé avant d'être visité ». Un choc devant le chatoiement et la profusion des couleurs, les costumes – turban, toge, keffieh, etc. - la lumière si éblouissante.

« Eugène Delacroix au Maroc, Theodore Chassériau en Algérie, emplissent leurs carnets d'esquisses de figures Juives, qui nourriront de grandes toiles, en particulier la Noce juive de Delacroix (1841) ». En 1834, Zulayka Hajwal (Solika Hatchuel), belle Juive de Tanger enlevée pour être convertie à l’islam, mais restée fidèle à sa foi, est exécutée à Fès (Maroc) pour apostasie. Cette tragédie inspire au peintre français orientaliste Alfred Dehodencq (1822-1882), qui séjourna au Maroc, son tableau L’exécution de la Juive (1861).

Ignorés en France et en Europe, ces Juifs constituent un « groupe identifiable, car ségrégué » en Afrique du Nord. Ils sont généralement soumis au statut humiliant et cruel de la dhimmitude. Les conquêtes française ou italienne les émanciperont.

« Sans doute sont-ils plus accessibles aux voyageurs, en raison des liens familiaux, ou des réseaux, qu'ils peuvent entretenir avec l'Occident. Peut-être sont-ils moins rétifs au portrait. Ils sont des intercesseurs privilégiés du monde arabe ». Par leurs activités commerciales, artisanales ou financières, ils s’avèrent des intermédiaires privilégiés.

La « synagogue, le cimetière, le Shabbat se prêtent à la mise en scène d’une dévotion traditionnelle, mais c’est sans doute la noce qui cristallise le plus l’attention. Le faste de la célébration, les danses, la richesse des costumes fascinent ». Alfred Dehodencq se caractérise par la « variété des peintures que lui inspirent les Juifs du Maroc, notamment ceux de Tanger et Tétouan dont il livre une vision passionnée et vibrante ». Ces peintres du XIXe siècle, restituent dans leurs tableaux les somptueux costumes ou habits d’apparat de velours tramés de fils d’or produits par les artisans Juifs du Maroc, d’Algérie et de Tunisie.

« L’arrière-plan militaire de cette présence française en Afrique du Nord favorise cependant les considérations radiologiques » qui se développent au XIXe siècle ; si « le sculpteur Charles Cordier contredit avec ses portraits algériens une ethnologie hiérarchisante des peuples, l’antisémitisme de quelques artistes prolonge des schémas européens anciens ».

Le voyage en Terre sainte
« L’affaiblissement de l’Empire ottoman, les intrusions militaires françaises et anglaises sur le pourtour de la Méditerranée ouvrent les portes de l’Orient à l’Europe. Dans ce « Grand Tour » des voyageurs occidentaux, célébré par les écrivains autant que par les peintres, qui les mène de l’Egypte à la Turquie, la Terre sainte occupe une place à part ».

Le retour sur les sites du récit biblique répond fréquemment à des « aspirations religieuses. Cependant, un nouveau désir de connaissance guide les études philologiques et les fouilles archéologiques entreprises du pays des Pharaons jusqu’à la Mésopotamie. L’Occident poursuit là une quête de ses origines ».

La Jérusalem « révélée par les artistes est empreinte d’une grande charge symbolique. Les visions romantiques et théâtrales de Louis de Forbin ou de David Roberts traduisent l’éclat mythique de la ville et la mélancolie qu’inspire son long abandon. Si les commentaires des voyageurs sont parfois peu amènes sur le quartier Juif, le spectacle du Mur des lamentations suscite plus d’empathie ».

Alexandre Bida ou Vassily Vereshchagin « livrent des descriptions attentives et sensibles avant tout à la spiritualité du lieu. C’est une même vision spirituelle qui hante les paysages » de Thomas Seddon, et un même souci d’exactitude chez Gustav Bauernfeind dans ses portraits des Juifs de Jérusalem.

La Bible est née en Orient
Une "meilleure connaissance des pays d’Orient et de leurs populations conduit à une évolution remarquable de l’iconographie biblique, où se mêlent étrangement les empreintes des mondes juif, musulman et chrétien, tout en prétendant à davantage d’authenticité".

Cette « quête de vérité ne s’embarrasse pas toujours de perspective historique et semble postuler que les coutumes et les costumes orientaux seraient demeurés figés dans le temps. En particulier, la difficulté à identifier des vestiges liés aux Hébreux et des royaumes d’Israël et de Judée génère d’improbables synthèses ».

Ainsi, Horace Vernet, « imaginant Abraham tel un Bédouin contemporain, ouvre un nouveau chapitre de la représentation du monde de la Bible en opérant une « arabisation » pittoresque, mais discutée ».

Grâce aux découvertes de l’archéologie en Egypte et en Mésopotamie des peintres, tels Lawrence Alma-Tadema ou Edward Armitage, illustrent les épisodes de la vie de Joseph ou l’histoire d’Esther à la cour du grand roi des Perses et des Mèdes dans de talentueuses mises en scène; William Holman Hunt, qui « place Jésus dans une synagogue au milieu de Juifs dont il a fait le portrait lors d’un voyage à Jérusalem, témoigne d’une autre manière de ces télescopages temporels propres à perpétuer des visions imaginaires ».

Les éditions illustrées de la Bible suscitent un engouement notable ; dans le sillage de Gustave Dore, James Tissot « donne chair aux récits bibliques à travers un très large ensemble d’aquarelles nées d’une observation rigoureuse de la Terre sainte autant que du savoir le plus récent sur l’Orient antique ».

La « confrontation avec la réalité de l’Orient ne parvient cependant pas à effacer les fantasmes s’exprimant à travers la figure récurrente de la belle Juive, héroïne guerrière ou femme fatale. Salomé, qui hante les artistes à la fin du siècle, résume à elle seule toute la dangereuse séduction de l’Orient faite femme ».

Une vision érotisée de l’Orient illustrée par ces héroïnes bibliques – pécheresse primitive (Eve), vierges bafouées (Suzanne, Bethsabée, la Sulamite du Cantique des Cantiques, Thamar), séductrice castratrices (Salomé, Hérodiade, Judith, Dalila) - qui fascinent les peintres français du XIXe siècle, quels que soient les mouvements artistiques : orientalisme romantique, symbolisme, etc. Des figures bibliques qui incarnent un amour parfois mortifère, et l’éternel féminin.

Au-delà de l'Afrique du Nord, le « périple en Terre sainte est porteur d'enjeux plus symboliques. Mus par des aspirations religieuses et une nouvelle curiosité archéologique, qui s'applique de l'Egypte à la Mésopotamie, l'Occident poursuit au Proche-Orient une quête de ses origines ». En témoignent les vues de Jérusalem de peintres comme David Roberts ou Thomas Seddon.

Les « empreintes des mondes Juif, arabe et chrétien se fondent alors dans une peinture biblique renouvelée. Un Bédouin devant sa tente incarne une belle figure d'Abraham chez Horace Vernet, tandis qu'une synagogue de Jérusalem abrite un Jésus prêchant chez Tissot ou Hunt ».

L'« orientalisation » de la Bible est « particulièrement sensible dans l'illustration d'épisodes ayant pour cadre l'Egypte (Joseph) ou la Perse (Esther), et tire parti des connaissances acquises sur l'Antiquité ».

À la recherche d’une histoire juive ?
Dans un contexte où « est échue à la peinture la mission d'écrire l'histoire nationale, l'œuvre de quelques artistes Juifs européens s'inscrit aussi dans une problématique identitaire ».

Quelques artistes juifs européens « célèbrent les grandes heures et les tragédies de leur histoire ». Exemple : réinterprété, le thème de l’exil à Babylone devient emblématique de la dispersion Juive et inspire des compositions académiques à Henri-Léopold Levy et à Eduard Bendemann ; celui-ci « réalise un tableau inspiré qui devient rapidement une référence incontournable de l’imagerie juive ». Edouard Moyse « aborde plus directement les scansions d’une histoire plus proche – Inquisition, Révolution, Empire – et s’attache à leur donner une hauteur classique, dans un espace intemporel mêlant Orient et Occident ».

Les peintres Juifs, qui « jouent leur intégration dans la sphère artistique » au XIXe siècle, sont soucieux de reconnaissance générale et préoccupés par leur histoire dans une période de fort activisme des nationalismes.

L’émancipation politique induit aussi un questionnement sur « l’articulation entre judaïsme et christianisme », et se décline en peinture, en raison du poids des thématiques religieuses dans les diverses traditions européennes.

L’œuvre du Polonais Maurycy Gottlieb « constitue le plus fascinant exemple de relecture de la douloureuse relation entre judaïsme et christianisme, et se nourrit des avatars littéraires de cette concurrence ou de cette détestation pour inverser la perspective et mettre en évidence l’histoire partagée des Juifs et des chrétiens, dans une vision universaliste. Maurycy Gottlieb, interroge l'histoire Juive à travers sa représentation littéraire, ou issue du christianisme, en peignant » un Jésus affrontant ses juges ».

Les « nouveaux Hébreux »
Conséquence de l’affaire Dreyfus et de l’antisémitisme vivace en Europe, le sionisme prôné par Theodor Herzl revendique la création d’un « Etat des Juifs » susceptible de mettre un terme à un exil de plus en plus dramatique.

Le mouvement politique se conjugue rapidement d’une dimension culturelle et artistique : élaborer un art national.

Des 1906, s’ouvre à Jérusalem, sous la direction d’artistes européens (Boris Schatz, Abel Pann, Zeev Raban et Ephraim Moses Lilien), une école d’art et d’artisanat « portant le nom de Bezalel – celui-là même qui dans la Bible fut désigné pour construire le sanctuaire du désert –, ayant pour mission d’établir une continuité entre l’Israël antique, l’antiquité biblique, et sa résurrection dans l’Orient contemporain avec une « identité Juive orientale ».

Le projet national et le retour aux sources, conjugués à l’influence des mouvements artistiques alors à la mode – mouvement esthétique, Jugendstil et symbolisme parmi d’autres –, confèrent aux productions artistiques et artisanales de l’école un style qui se veut authentiquement « hébreu ».

Ce style original trouve un nouvel élan avec l’esprit pionnier animant les artistes du « foyer national Juif » dans les années 1920. Ainsi nait « une peinture volontiers teintée de primitivisme, célébrant l’harmonie avec la terre et le paysage, et une paix rêvée entre les hommes, tous attachés à un nouvel Orient ».

Un « art sioniste nait en quête d’une identité hébraïque » (Ygal Zalmona) ou un « sionisme culturel » (Chaïm Weizmann et Martin Buber).

Le musée des Beaux-Arts de Bordeaux a présenté l'exposition Orientalismes. Collections du musée des Beaux-Arts (26 avril-23 juin 2014). 

Le 4 janvier 2018, de 14 h à 16 h, le musée d'art et d'histoire du Judaïsme (mahJ) proposa Les artistes et l’Orient, un atelier pour enfants 8-12 ans : "Sur les traces des voyageurs (peintres, écrivains, hommes de science, commerçants, pèlerins…), les enfants partent à la découverte des collections provenant d’Orient. Un carnet à la main, ils relèvent les motifs de tissus, de bijoux, de céramiques qu’ils réinterpréteront ensuite pour réaliser un croquis à l’aquarelle".


Le musée d'art et d'histoire du Judaïsme (mahJ) organisa des ateliers pédagogiques/stages les 23, 24 et 25 octobre 2018, de 14 h à 16 h, destinés aux adolescents de 12-15 ans et intitulés "Cliché ! La photographie orientaliste revisitée".  "À partir des collections d’Afrique du Nord conservées au mahJ – peintures, photographies, tenues traditionnelles –, les jeunes participants sont invités à reconstituer des images de l’Orient entre fiction et réalité. Reportage photographique dans le musée, studio, retouche, montage, autant d’activités pour revisiter et actualiser avec humour la photographie orientaliste du XIXe et du début du XXe siècle."

Le 27 février 2019, de 14 h à 16 h, le mahJ propose "Les artistes et l’Orient", atelier pédagogique pour enfants de 8 à 12 ans. "Sur les traces des voyageurs (peintres, écrivains, hommes de science, commerçants, pèlerins…), les enfants partent à la découverte des collections provenant d’Orient. Un carnet à la main, ils relèvent les motifs de tissus, de bijoux, de céramiques qu’ils réinterprèteront ensuite pour réaliser un croquis à l’aquarelle."

Artistes présentés dans l’exposition

Lawrence ALMA-TADEMA (Dronrijp, Pays-Bas, 1836 – Wiesbaden, 1912)

Edward ARMITAGE (Londres, 1817 – Tunbridge Wells, Kent, 1896)

Gustav BAUERNFEIND (Sulz am Neckar, 1848 – Jerusalem, 1904)

Eduard Julius Friedrich BENDEMANN (Berlin, 1811 – Dusseldorf, 1889)

Ateliers de BEZALEL, École d’art et d’artisanat, Jérusalem

Alexandre BIDA (Toulouse, 1823 – Buhl, Haut-Rhin, 1895)

Félix BONFILS (Saint-Hippolyte-du-Fort, 1831 – Ales, 1885)

Alexandre CABANEL (Montpellier, 1823 – Paris, 1889)

Théodore CHASSERIAU (Sainte-Barbe-de-Samana, Saint-Domingue, 1819 – Paris, 1856)

Charles CORDIER (Cambrai, 1827 – Alger, 1905)

Alfred DEHODENCQ (Paris, 1822 – 1882)

Eugène DELACROIX (Charenton-Saint-Maurice, 1798 – Paris, 1863)

Louis Nicolas Philippe Auguste DE FORBIN (La Roque d’Antheron, 1777 – Paris, 1841)

Arieh EL-HANANI (Poltava, Russie, 1898 – Tel-Aviv, 1985)

J. GARRIGUES

Wilhelm GENTZ (Neurippen, 1822 – Berlin, 1890)

Jean-Léon GÉRÔME (Vesoul, 1824 – Paris, 1904)

Marcin GOTTLIEB (Drohobycz, Empire austro-hongrois, actuelle Ukraine, 1867 – Etats-Unis, 1936)

Nahum GUTMAN (Teleneşti, Russie, 1898 – Tel-Aviv, 1980)

John Evan HODGSON (Londres, 1831 – Coleshill, 1895)

William Holman HUNT (Londres, 1827 – 1910)

Jean-Pierre-Marie JAZET (Paris, 1788 – 1871)

Frantisek KUPKA (Opocno, Boheme, 1871 – Puteaux, 1957)

Charles LALLEMAND (?, 1826 – ?, 1904)

Charles LANDELLE (Laval, 1821 – Chennevieres-sur-Marne, 1908)

Jean Jules Antoine LECOMTE DU NOUŸ (Paris, 1842 – 1923)

Henri LEHMANN (Kiel, 1814 – Paris, 1882)

Jean-Baptiste Auguste LELOIR (Paris, 1809 – 1892)

Alexandre LEROUX (Beziers, 1836 – Alger, 1912)

Henri-Léopold LÉVY (Nancy, 1840 – Paris, 1904)

Lucien LEVY-DHURMER (Alger, 1865 – Le Vesinet, 1953)

Ephraïm Moses LILIEN (Drohobycz, Pologne, 1874 – Badenweiler, 1925)

Pinchas LITVINOVSKY (Novo Georgievsk, Russie, 1894 – Jerusalem, 1985)

James MCDONALD (?, 1822 – ?, 1885)

Princesse MATHILDE (Mathilde Letizia Wilhelmine Bonaparte) (Trieste, 1820 – Paris, 1904)

Émile MARQUETTE (Douai, 1839 – ?, apres 1889)

Gustave MOREAU (Paris, 1826 – 1898)

Aimé-Nicolas MOROT (Nancy, 1850 – Dinard, 1913)

Félix-Jacques MOULIN (Paris, 1802 – 1875)

Édouard MOYSE (Nancy, 1827 – Paris, 1908)

Israel PALDI (Berdiansk, Russie, 1892 – Tel-Aviv, 1979)

Abel PANN (Kreslawka, Russie, 1883 – Jerusalem, 1963)

Zeev RABAN (Lodz, 1890 – Jerusalem, 1970)

David ROBERTS (Stockbridge, 1796 – Londres, 1864)

James ROBERTSON (?, 1813 – ?, 1888)

Reuven RUBIN (Galaţi, Roumanie, 1893 – Tel-Aviv, 1974)

Auguste SALZMANN (Ribeauville, 1824 – Paris, 1872)

Boris SCHATZ (Varniai, Lituanie, 1867 – Denver, Etats-Unis, 1932)

Thomas SEDDON (Londres, 1821 – Le Caire, 1856)

Jacques Joseph, dit James, TISSOT (Nantes, 1836 – Chenecey-Buillon, 1902)

Lesser URY (Birnbaum, aujourd’hui Międzychod, province de Poznan, 1861 – Berlin, 1931)

Vassily VERESHCHAGIN (Tcherepovets, Russie, 1842 – pres de Port-Arthur, 1904)

Horace VERNET (Paris, 1789 – 1863)

George Washington WILSON (Aberdeen, 1823 – ?, 1893)


Les Juifs dans l’orientalisme. Musée d’art et d’histoire du Judaïsme et Skira-Flammarion, 2011. 200 pages. ISBN : 978-2081277120. 35,50 €


Jusqu’au 8 juillet 2012
Hôtel de Saint-Aignan
71, rue du Temple. 75003 Paris
Du dimanche au vendredi de 10 h à 18 h, nocturnes les mercredis jusqu’à 21 h
Les citations sont extraites du dossier de presse.

Visuels :
Affiche
Théodore Chassériau, Juives d’Alger au balcon
1849
Musee du Louvre
c Daniel Arnaudet, RMN, Paris

Félix-Jacques Moulin, Juif et Juive de Constantine
Algerie, 1856
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie
Eugène Delacroix, Mariée juive au Maroc
1852 [?]
Collection Ethel LeFrak et la famille LeFrak
c Adam Reich / Collection Ethel LeFrak et famille LeFrak

Jean-Léon Gérôme, Vieux marchand juif et Arabes
Avant 1883
Amsterdam, Stedelijk Museum, depot de longue duree au Amsterdams Historisch Museum

Lesser Ury, Moïse regarde la Terre Promise avant sa mort
1828
Judisches Museum Berlinc Jens Ziehe / Judisches Museum Berlin

Lawrence Alma-Tadema, Joseph gardien des greniers de Pharaon
1874
New York, Dahesh Museum of Art

Gustave Moreau, Salomé
Vers 1874-76
Musee national Gustave-Moreau, Paris
c Christian Jean / Réunion des musées nationaux, Paris

Maurycy Gottlieb, Le Christ devant ses juges
1877-79
The Israel Museum, Jerusalem
c Elie Posner / The Israel Museum, Jerusalem

Reuven Rubin, Les Vendeurs de légumes
1923
Tel-Aviv, Phoenix Collection



Articles sur ce blog concernant :








Monde arabe/Islam 
Cet article a été publié le 5 juillet 2012, puis les 24 avril et 22 juin 2014, 4 janvier et 23 octobre 2018.


lundi 25 février 2019

Milton H. Greene (1922-1985)


Milton H. Greene (1922-1985) était un photographe américain juif de mode, de célébrités et a créé une société de productions de films avec Marilyn Monroe. La Galerie de l'Instant présente une exposition de photographies de Marilyn Monroe,  d’Elisabeth Taylor, d’Audrey Hepburn, de Marlene Dietrich et d’Alain Delon par Milton H. Greene.


Milton H. Greene (1922-1985) est né à New York dans une famille juive américaine.

Intéressé par la photographie depuis son adolescence, il débute comme assistant de Louise Dahl-Wolfe, photographe de mode pour Harper’s Bazaar, portraitiste et créatrice de la photographie de mode « environnementale ».

Il réalise des photographies de mode avec les célèbres mannequins Suzy Parker et Fiona Campbell-Walter et est publié par Harper’s Bazaar et Vogue.

A Los Angeles, il vit une histoire d’amour avec Marilyn Monroe, qu’il rencontre en 1953 pour un reportage destiné à Look.. Tous deux noueront ensuite une amitié. Milton H. Greene la convainc de quitter la Fox et la Fox avec laquelle la star était en contrat, de s’installer à New York et de créer tous deux une société de production qui offrira à la comédienne des rôles dramatiques dans Bus Stop (1956) et The Prince and the Showgirl (1957).

Elizabeth Taylor, Frank Sinatra, Audrey Hepburn, Grace Kelly, Ava Gardner, Sammy Davis, Jr., Catherine Deneuve, Marlene Dietrich, Judy Garland… Milton H. Greene a créé des oeuvres iconiques de ces artistes.

La Galerie de l'Instant présente une exposition de photographies de Marilyn Monroe,  d’Elisabeth Taylor, d’Audrey Hepburn, de Marlene Dietrich et d’Alain Delon par Milton Greene.

Le « photographe américain, Milton H. Greene est principalement connu pour sa relation unique et son travail avec Marilyn Monroe dans les années 50… La célèbre série au tutu en 1954, le magnifique « Black Sitting » à New York en 1956, avec une Marilyn débridée, en collant résille et chapeau melon, ou encore la série autour de Bus Stop à Hollywood…toutes ces images figurent parmi les plus belles de la star… »

« Mais la galerie de l'Instant souhaitait aussi présenter d’autres images, peut être moins connues, mais non moins belles… Par exemple, cette sublime série en 1952 avec la grande Marlene Dietrich, d’une féminité bouleversante ; ou bien cette image de Sophia Loren, prise en Italie en 1963 dans un décor de rêve, lui donnant un air de Vénus sortie des eaux…ou encore Romy Schneider à Monte Carlo en 1963 aussi, toute jeune, mais déjà d’une troublante sensualité, laissant présager la femme qu’elle deviendra ».

« Toutes ces photographies ont en commun une approche réaliste des artistes photographiés, et même si les femmes sont d’une beauté et d’un glamour affolant, elles ne doivent pas ce glamour aux robes, maquillages ou scénographie les entourant, mais bien à leur personnalité, et leur grâce qui transparaît de ces portraits. C’est là que réside à mon sens le talent de Milton H. Greene, ce mélange de beauté et de sincérité. Il est évident qu’il respectait ses modèles, et en faisait ressortir le meilleur, c’est-à-dire la profondeur, l’intensité et le plus important : l’émotion, qui finalement est ce qui nous marque le plus en regardant ces images extraordinaires ! »


Du 12 décembre 2018 au 27 février 2019
A la Galerie de l'Instant 
46, Rue De Poitou. Paris 75003
Tél. : +33144549409
Le lundi de 14 h à 19 h. Du mardi au samedi de 11 h à 19 h et le dimanche de 14 h 30 à 18 h 30
Visuels :
MARILYN MONROE,
THE BALLERINA SITTING
NEW YORK,
1954
(©MILTON H. GREENE, COURTESY GALERIE DE L’INSTANT, PARIS)

MARILYN MONROE,
THE BLACK SITTING
NEW YORK,
1956
(©MILTON H. GREENE, COURTESY GALERIE DE L’INSTANT, PARIS)

RICHARD BURTON ET ELIZABETH TAYLOR, LONDRES, 1964
(©MILTON H. GREENE, COURTESY GALERIE DE L’INSTANT, PARIS)

MARLENE DIETRICH,
NEW YORK
1952
(©MILTON H. GREENE, COURTESY GALERIE DE L’INSTANT, PARIS)

MARIA CALLAS,
PARIS,
1958
(©MILTON H. GREENE, COURTESY GALERIE DE L’INSTANT, PARIS)

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Les citations sont extraites du communiqué de presse.