vendredi 5 juin 2015

« Israël et le tabou de la bombe », par Dirk Pohlmann


Arte diffusera les 5 et 17 juin 2015 « Israël et le tabou de la bombe » (Israel und die bombe. Ein radioaktives tabu), documentaire par Dirk Pohlmann. Une stratégie dissuasive israélienne résumée par "Israël ne sera pas le premier pays à introduire l'arme nucléaire au Proche-Orient".


A la différence des puissances nucléaires – Etats-Unis (1945), Russie, Grande-Bretagne (1952), France, Chine, Inde, Pakistan, Corée du Nord -, l’Etat d’Israël, marqué par la Shoah, a choisi de ne jamais déclarer s’il avait ou non la bombe atomique, et de ne pas adhérer au TNP (Traité de non prolifération). Pour adhérer au TNP, l'Afrique du sud a supprimé son arsenal nucléaire.

Le documentaire montre les actes Juifs sionistes en Eretz Israël sans mentionner la violence des Arabes en Palestine mandataire.

"Plus jamais ça". Attaqué dès 1948 par les Etats arabes, Israël compte sur lui pour assurer sa défense. Le Premier ministre Ben Gourion lance un programme dotant le nouvel Etat d'un arsenal.

Israël a signé le traité Atoms for Peace proposé par le président Eisenhower en 1953.

Directeur au ministère de la Défense, Shimon Peres est chargé d'accéder au programme français d'acquisition de la bombe atomique. Dès 1954-1955, il dispose d'un bureau au ministère français de la Défense. Une alliance tactique entre la France et Israël ayant tous deux un ennemi commun : le général Nasser, dirigeant de l'Egypte. La Grande-Bretagne, la France et Israël lancent une offensive en 1956 - guerre de Suez -, à laquelle ils mettent un terme sous la pression des Etats-Unis et de l'Union soviétique.

La Grande-Bretagne fournit à ses alliés l'eau lourde et l'uranium. La France construit un complexe d'armement nucléaire dans le Néguev. Ce qu'observent les Etats-Unis, notamment à Dimona, par leurs avions. Guy Mollet et Maurice Bourgès-Maunoury, respectivement Premier ministre et ministre de la Défense, mènent ce programme sans en informer le Parlement.

Avner Cohen décrit un Shimon Peres déterminé, capable d'antidater un document : "Pour lui, la fin justifiait les moyens". Autre artisan majeur :  David Bergman, chimiste Juif israélien ayant fui l'Allemagne nazie, directeur du Commissariat à l’énergie atomique israélien fondé en 1952 et dépendant du ministère de la Défense.

Dino A. Brugioni évoque les mensonges officiels d'Israël.

Un an et demi après son arrivée au pouvoir, le général de Gaulle est informé de cette collaboration franco-israélienne. Et y met fin. L'Allemagne se substitue à la France : prêt, etc.

Les dirigeants israéliens souhaitent se doter de missiles pour ses armes.

Le réacteur nucléaire suscite un intérêt croissant.

En 1961, le soutien américain fléchit sous le président John F. Kennedy qui exige l'accès à Dimona d'une inspection, menace de suspendre l'aide américaine, et veut mettre un terme à la course aux armements. La tension est forte. Israël accepte une inspection du réacteur de recherche par les Américains. Il "monte une salle de commandes sans rapport avec la réalité", commente Pierre Péan, journaliste.

Kennedy fournit des armes non nucléaires - missiles anti-aériens -  à Ben Gourion, dans l'espoir qu'Israël cesse son programme. Israël installe ces missiles américains autour de Dimona.

Nouvelles exigences de l'URSS de démantèlement du programme israélien.

En 1965, l'URSS assure les Etats arabes, qui songent à une attaque préventive, de son soutien en cas d'attaque israélienne nucléaire.

Les ogives nucléaires à base de plutonium sont produites en sous-sol dans le complexe de Dimona.

1967. l'URSS change de tactique. Isabella Ginor décrit l'action soviétique. Des avions sous cocardes arabes sont stationnés en URSS. La riposte israélienne est fulgurante. "Les missiles soviétiques étaient prêts à s'abattre sur Israël", indique Gideon Remez.

L'attaque du navire Liberty demeure un sujet controversé. Israël dément une attaque délibérée et un plan secret entre Jérusalem et Washington. "Les Américains voulaient que le Liberty coulent", indique Peter Hounam, reporter britannique.

Le nucléaire israélien ? Un sujet tabou. Premier ministre israélien,"Lévi-Eshkol et le Président Johnson se sont mis d'accord : "Vous Israéliens ne dites rien, nous Américains ne savons rien", résume Martin van Creveld, historien militaire.

Sous la présidence de Richard Nixon, les Etats-Unis signent un acte acceptant que l'Etat Juif se dote de la bombe atomique.

Lors de la guerre du Kippour (1973), l'Etat d'Israël attaqué refuse, sur l'insistance de Golda Meir, d'utiliser l'arme atomique. Ses bombardiers atomiques sont capables d'attaquer Odessa (Ukraine). Les tactiques d'intimidation israéliennes fonctionnent. Les Etats arabes et l'URSS entament des négociations.

1979. Les Etats-Unis sont informés d'une explosion au large des côtes d'Afrique du sud. Le résultat du partenariat entre Pretoria, qui fournit le minerai d'uranium et veut la bombe à hydrogène, et Jérusalem qui dispose du savoir-faire. Le président Carter exprime sa colère : il oeuvre à la signature d'un traité de paix entre l'Egypte et l'Etat Juif.

Londres 1986. Mordechai Vanunu, ingénieur travaillant sur le plutonium dans le complexe de Dimona, propose au Sunday Times des informations sur le programme nucléaire israélien. Reporter dans ce quotidien britannique, Peter Hounam est sceptique, puis est convaincu de la réalité des informations et publie un article sur ce programme militaire nucléaire israélien.

Riposte d'Israël : il kidnappe cet informateur à Rome. Hounam enquête, et remonte la piste qui le mène vers Cheryl Bentov, Israélo-Américaine agent du Mossad. Vanunu est  condamné à 18 ans de prison pour espionnage et haute trahison.

« Je ne suis ni un traître, ni un espion. J’ai seulement voulu faire connaître au monde ce qui se passait. Je ne regrette rien car j’ai agi selon ma conscience », a déclaré Mordechai Vanunu après sa sortie de prison lors d'une interview télévisée en avril 2004. Et ce quinquagénaire de demander  que « le réacteur de Dimona soit détruit comme le fut le réacteur irakien Osirak » situé près de Bagdad, et bombardé par l’aviation israélienne en juin 1981. Il considérait qu’ « il ne devrait pas y avoir d’Etat juif ; qu’il devrait y avoir un Etat palestinien ; que les Juifs et les Palestiniens devraient pouvoir vivre où ils veulent ; que le judaïsme et l’islam sont des religions retardataires ». Converti au christianisme, ce marocain d’origine qui a purgé toute sa peine, a du respecter "d’importantes restrictions imposées après sa sortie de la prison de Shikmah, dans le sud d’Israël. Selon son frère Meir, il ne pourra pas donner d’interviews, se rendre dans un aéroport, un port, une ambassade étrangère. Le ministre de l’intérieur, Abraham Paraz, lui interdit de se rendre pendant un an à l’étranger. Il ne pourra posséder un téléphone cellulaire, ni utiliser Internet. Le ministre des relations avec le parlement, Gidéon Ezra, a suggéré de le placer en régime de détention administrative." (Le Monde, 21 avril 2004)

"Un tel traitement a été jugé inadmissible par Amnesty International qui demande à Israël de « ne pas violer ses droits fondamentaux ». D’autant, comme l’affirme le journaliste du Sunday Times qui, en 1986, avait publié ses révélations, qu’il n’a plus rien à dévoiler sur Dimona. En plus, comme le dit l’intéressé lui-même, en raison des avancées technologiques, « je ne crois pas que les Américains ou les Européens aient besoin d’un Vanunu pour leur faire des révélations ». Son ancien avocat, Avigdor Feldman, estime que « cet acharnement relève de la paranoïa » Mais l’Etat hébreu semble encore craindre cet homme qui a toujours refusé les arrangements pour prix de son silence ou de sa libération. sa libération doit être saluée par des pacifistes et des antinucléaires venus du monde entier et qui ont déjà dû se frotter aux interrogatoires du Shin Beth, la sécurité intérieure." (Le Monde, 21 avril 2004)

"Apparemment, Mordehaï Vanunu n’a pas l’intention de se soumettre au régime que l’on veut lui imposer. Une nouvelle « affaire Vanunu » pourrait donc naître. Elle sera sans doute beaucoup moins entourée de mystères que celle de ce technicien nucléaire qui a commencé avec son entrée à la centrale de Dimona en 1976. Son engagement contre la guerre du Liban en 1982 et ses positions pacifistes éveillent les soupçons. Il doit changer de département, avant d’être licencié en 1985. Il quitte Israël en janvier 1986 avec dans ses poches les photos clandestines du site. Avec son indemnité, il entreprend de faire le tour du monde, se rend au Népal, en Australie, où il se convertit au christianisme et rencontre un journaliste du Sunday Times de Londres auquel il accepte de raconter toute son histoire. La publication, en septembre 1986 dans l’hebdomadaire provoque la colère des israéliens, qui décident d’attirer « le traître » dans un piège vieux comme le monde : une femme qui tombe dans ses bras à Londres et l’emmène à Rome. Cindy, de son vrai nom Cheryl Hanin Bentov, est un agent du Mossad. Drogué, il est embarqué dans un yacht qui le conduira en Israël en quelques jours. Un enlèvement qu’il fera connaître au monde, le 21 décembre 1986, lorsque, conduit au tribunal, il trompe la vigilance de ses gardiens en montrant la paume de sa main sur laquelle il a écrit « Mordehaî Vanunu, enlevé à Rome, le 30 septembre 1986 à 21 heures ». (Le Monde, 21 avril 2004)

"Au terme d’un procès à huis clos, il sera condamné à dix-huit ans d’emprisonnement, le 27 mars 1988, pour espionnage et trahison. Il risquait la prison à vie. On ne saura jamais rien des soixante pages du jugement restées secrètes. L’importance des informations dont il disposait a été minimisée par les experts internationaux. Les dépositions des responsables israéliens ont été frappées du secret défense. Le seul commentaire des autorités israéliennes a toujours été : « Nous ne serons pas les premiers à introduire l’arme atomique au Proche-orient ». La question est tabou même s’il ne fait pas de doute qu’Israël, qui n’a pas adhéré au traité de non-prolifération nucléaire, possède l’arme atomique. L’Etat hébreu détiendrait de 100 à 200 têtes nucléaires. Shimon Pérès est considéré comme le principal initiateur du programme, lancé dans les années 1950 avec l’aide de la France." (Le Monde, 21 avril 2004)

1991. La première guerre du Golfe éclate. Saddam Hussein envoie des missiles Scud vers Israël, à Tel Aviv et ses environs. Les dirigeants israéliens critiquent l'aide européenne, militaire et chimique, à l'Iraq de Saddam Hussein. Ils soulignent l'aide allemande. Le chancelier Kohl propose alors des sous-marins à des conditions avantageuses.

"Une fois de plus, Israël utilise la mauvaise conscience des non-Juifs. Je la trouve humiliante", marmonne un orateur. Choquant quand on connait l'aide allemande à Hussein, et son arsenal chimique.

Puis, l'Allemagne livre à Israël deux sous-marins missiles Cruise portant des ogives nucléaires.

Selon des experts, l'arsenal militaire nucléaire israélien compterait 100 à 400 armes militaires aux systèmes ultra-modernes : bombes à neutrons, missiles de croisières...

"L'objectif est d'entretenir la crainte par une certaine ambiguïté. C'est le propre de la dissuasion", affirme Avi Primor.

« En cas d'attaque nucléaire, l'État hébreu prévoit de répliquer avec ce qu'il appelle l'option « Samson », en référence au personnage de la Bible qui se suicide en entraînant dans la mort ses ennemis ».

A l'heure où le régime iranien des ayatollahs poursuit son programme militaire nucléaire menaçant Israël, l'Europe et une partie l'Orient, il est curieux qu'Arte diffuse ce documentaire. Le comble de ce documentaire, qui milite pour qu'Israël déclare détenir l'arme atomique, est qu'il omet sciemment d'évoquer la menace atomique iranienne.


« Israël et le tabou de la bombe  », par Dirk Pohlmann
Allemagne, 2012, 52 min
Sur Arte les 3 juin à 2 h 30, 5 juin à 10 h 20 et 17 juin à 8 h 50

Visuels
© Kawom/Leif Kähler
© Auswärtiges Amt
© ZDF
© Kawom/Leif Kähler

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1 commentaire:

  1. Je viens de regarder ce documentaire allemand, il est ouvertement anti-israélien. Il laisse clairement entendre que le nucléaire israélien ne menace pas que le monde arabe mais le monde entier. Je passe sur la vision exclusivement complotiste de l'USS Liberty et le jugement moral défavorable sur les juifs qui sous-tend tout le long du documentaire.

    Pour paraphraser un célèbre écrivain allemand : "à Arte rien de nouveau"...

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