Citations

« Le goût de la vérité n’empêche pas la prise de parti. » (Albert Camus)
« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
« Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. » (Vladimir Jankélévitch)
« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

lundi 30 juin 2014

« L’Europe et le spectre du califat » de Bat Ye’or


Le 29 juin 2014, l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) ou en anglais Islamic State of Iraq and al-Sham (ISIS) - al-Sham désignait la province de Syrie dans les précédents califats - a annoncé le rétablissement du  califat aboli en 1924, et sera désormais dénommé « Etat islamique » (EI). Ce  califat sunnite sera dirigé par le chef de cet Etat islamique, Abou Bakr al-Baghdadi, qui devient donc le nouveau calife, "successeur du prophète dans l’exercice du pouvoir politique". Il s'étend "d'Alep, au nord de la Syrie, à Dyiala, dans l'est de l'Irak". Il est le plus riche mouvement djihadiste : sa fortune d'environ 2,3 milliards de dollars lui permet notamment de rémunérer 60 000 terroristes pendant un an et provient d'aides financières de l'Arabie saoudite, des butins de guerre - pétrole -, des pillages en particulier des banques dans les régions contrôlées, de l'"impôt révolutionnaire", des rançons versées notamment par des Etats occidentaux pour récupérer leurs ressortissants, de la jizya, impôt infligé aux chrétiens à Mosul (deuxième ville d'Iraq), etc.
Le 5 juillet 2014, Abou Bakr Al-Baghdadi est apparu pour la première fois dans une vidéo non identifiée et postée sur des sites djihadistes, réclamant, lors d'un prêche dans une mosquée importante de Mossoul, ville située au nord de l'Iraq, l’allégeance de tous les musulmans. "Portant une longue barbe, une abaya et un turban noirs, Bagdhadi affirme aux fidèles être « le wali (leader) désigné pour [les] diriger ». « Obéissez-moi tant que vous obéissez à Dieu en vous », a-t-il martelé".

Sous domination islamique, les indigènes non-musulmans - juifs, chrétiens, hindous, bouddistes, zoroastriens, etc. - vaincus à la suite du jihad se trouvent confrontés à cette douloureuse alternative : soit la conversion à l’islam, soit la reprise du jihad, soit la dhimmitude, un statut cruel et inégalitaire réservé aux non-musulmans (cf. lexique infra).
Universaliste, l’islam vise à appliquer la sharîa et à établir le califat, la gouvernance islamique mondiale à la fois politique, religieuse et législative.

Tel est le dessein de l’Organisation de la conférence islamique (OCI), une organisation transnationale faîtière qui regroupe 56 pays et entité musulmans ou à majorité musulmane et 1,3 milliard de musulmans.

Un but avoué par les islamistes et dont ont pris conscience des responsables de l'administration Bush comme Dick Cheney, alors vice-président, et Donald Rumsfeld, alors Secrétaire à la Défense.

Dès les années 1970, l’OCI bénéficie d’une conjoncture favorable (cf. chronologie infra).

Forte d’avoir su unifier un continent européen en paix, l’Union européenne a cependant réduit la souveraineté de ses Etats membres et imposé les décisions de sa bureaucratie.

Après le double choc pétrolier et l’afflux des pétrodollars, en croyant assurer sa sécurité menacée par le terrorisme islamiste, marquée par l'alliance entre les dirigeants nazis et leurs homologues du monde arabe ou/et musulman ainsi que de l'adhésion enthousiaste de foules arabes pour le Führer et l'idéologie antisémite du IIIe Reich, elle s’est rapprochée du monde arabe, dont elle partage nombre d’idées, pour former Eurabia.

Ce faisant, elle sacrifie l’Etat d’Israël et les chrétiens d’Orient persécutés sur l’autel de ses intérêts et de ses faiblesses. Occulte son histoire. Néglige son identité. Impose une terminologie « politiquement correcte » qui imprègne aussi des médias...

Dialogue euro-méditerranéen, multilatéralisme, multiculturalisme, Alliance des civilisations (UNAOC), dialogue des cultures… Tels sont les instruments promus par une Europe négligeant son passé ou par une ONU (Organisation des Nations unies) influencée par une majorité automatique incluant les Etats et entité membres de l’OCI.

Les buts ? Affaiblir les Etats-Unis, superpuissance leader du monde occidental ; imposer des concessions unilatérales et sans réciprocité à un Occident culpabilisé par son passé colonial ; instiller la sharîa (finance islamique, interdiction du blasphème), etc.

Ainsi, à l’insu des populations européennes, et à des siècles de distance, des mécanismes institutionnels et des réseaux œuvrent au rétablissement du califat universel aboli par Atatürk en 1924. Un califat dont le siège serait à Jérusalem, ville définie comme la capitale de la « Palestine ». Ce qui révèle la volonté de détruire l'Etat Juif.

Par cet essai documenté, au style clair, synthèse augmentée et mise à jour de ses précédents travaux, déjà publié en italien (2009) et prochainement édité aux Etats-Unis, Bat Ye’or, essayiste qui a forgé le terme dhimmitude, offre des clés pour comprendre le monde contemporain et ses enjeux.

Un livre passionnant dont les analyses ont été involontairement validées par le refus de François Descoueyte, directeur du CAPE (Centre d’accueil de la presse étrangère) d'une conférence de presse de Bat Ye'or et le silence de média sur les faits analysés.


AddendumAhmet Davutoglu, ministre turc des Affaires étrangères, a déclaré les 3 et 4 mars 2013 : "Le Yémen et Skopje ont fait partie du même pays voici 110 ans... Les peuples qui ont historiquement vécu ensemble dans cette région ont été séparés au siècle dernier... Le siècle dernier a été seulement pour nous une parenthèse [que] nous allons fermer. Nous le ferons sans guerre, sans appeler quiconque ennemi, sans être irrespectueux des frontières. Nous allons de nouveau relier Sarajevo à Damas, Benghazi à Erzurum à Batumi. C'est le cœur de notre puissance... Quand nous disons ceci, c'est appelé le "nouvel Ottomanisme".

Bat Ye'or, L'Europe et le spectre du califat. Editions Les Provinciales, 2010. 215 pages.  ISBN : 978-2-912833-22-8

QUELQUES REPERES CHRONOLOGIQUES

587 avant l'ère commune. Le roi Nabuchodonosor II détruit le Premier Temple qui avait été construit à Jérusalem par le roi juif Salomon, au Xe siècle, pour abriter l’Arche d’Alliance.

70. Reconstruit (19 av. JC-63) par Hérode 1er, roi de Judée, le Deuxième Temple est détruit par les Romains.

380. L’édit des empereurs Théodose et Gratien (édit de Thessalonique) impose le christianisme comme seule religion officielle et obligatoire de l’empire romain

628.  Le traité signé à Hudaybiya par Mahomet et la tribu de Quraysh, qui contrôle la Mecque, établit une trêve de dix ans.

630. Alléguant une infraction des Hudaybiya, Mahomet brise ce traité et s'empare de La Mecque.

632. A la mort de Mahomet, Abou Bakr est nommé calife.

661. Califat des Omeyyades, dont la capitale est Damas, jusqu’en 750.

717. Le Pacte d'Omar fixe la dhimmitude, statut des non-musulmans (juifs, chrétiens) sous domination islamique.

732. Bataille de Poitiers au cours de laquelle Charles Martel, maire du Palais du royaume franc, victorieux, met un terme à l’expansion musulmane en France.

750. Califat des Abbassides, dont la capitale est Bagdad, jusqu’en 1258.

1095. La première des neuf Croisades permet l’accès des pèlerins à Jérusalem.
Création des Etats latins d’Orient qui disparaissent en 1291.

1261. Califat des Fatimides, dont la capitale est Le Caire.

1453, 29 mai. Constantinople est prise par les troupes ottomanes menées par le sultan Mehmet II. C'est la fin de l'empire byzantin.

1492. Les rois catholiques espagnols achèvent la Reconquista de l’Espagne sous domination maure depuis 718.
         
1492-1492. al-Maghîlî, docteur tlemcénien, fixe le système de la dhimma "dont l'autorité est encore invoquée par le ulémas marocains au XIXe siècle".

1517. Califat ottoman qui s’étend sur une partie de l’Asie, de l’Afrique et une partie de  l’Europe de l’Est, et sera aboli en 1924 par Atatürk, président turc.

1529. Soliman II le Magnifique échoue à s’emparer de Vienne.

1571. Bataille victorieuse à Lépante de la flotte de la Sainte-Ligue contre celle ottomane.

1683. Vienne résiste victorieusement aux Turcs qui lèvent leur siège de la ville.

1801-1805. Première des deux guerres barbaresques gagnées par les Etats-Unis contre les Etats barbaresques en Méditerranée afin de n’avoir plus à payer de tribut pour la sécurité de leurs navires. La seconde guerre barbaresque se déroule en 1815. En mars 1794, le Congrès américain a adopté l'Act to provide a Naval Armament pour se doter de l'US Navy.

1924. Mustafa Kemal Atatürk, président turc, abolit le califat ottoman institué en 1517.

1933. Mohammad Amin al-Husseini, grand mufti de Jérusalem, exprime son soutien au nazisme triomphant en Allemagne. Il devient un collaborateur efficace et rémunéré des nazis.

1945. 8 mai. La capitulation de l'Allemagne nazie marque la fin en Europe de la Seconde Guerre mondiale pendant laquelle six millions de juifs ont été exterminés (Shoah ou Holocaust). Des nazis fuient vers l’Amérique latine et vers des pays arabes dont l'Egypte et la Syrie.

1948. 14 mai. Restauration de l’Etat d’Israël.
Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par les Nations unies dont le principal rédacteur est René Cassin.

1973. Guerre du Kippour : alors que l’Etat d’Israël est attaqué par des armées arabes, l’Europe ferme son espace aérien aux avions américains le ravitaillant.
Premier choc pétrolier : en quelques mois, le prix du baril de pétrole triple. Boycott arabe (OPEC ou OPEP, Organisation des pays exportateurs de pétrole) contre les pays amis de l’Etat juif.

1975. Publication de l’opuscule Eurabia.

1979. Deuxième choc pétrolier qui se traduit par une hausse considérable du prix du pétrole.

1989. Auteur des Versets sataniques (1988), Salman Rushdie est visé par la fatwa de l’ayatollah iranien Khomeiny l’accusant de « propos blasphématoires » envers l’islam.

1990. Déclaration du Caire des droits de l’homme en islam fondée sur la sharîa.

2001. 11 septembre. Attentats terroristes islamistes perpétrés par al-Qaïda aux Etats-Unis.

2004. Un islamiste tue le réalisateur néerlandais Théo van Gogh, co-auteur avec Ayaan Hirsi Ali, du film Soumission, dénonçant la condition des femmes sous l’islam.

2005. Le journal danois Jyllands-Posten publie 12 dessins sur Mahomet. Ce qui suscite l'ire de musulmans et des menaces de mort pour les auteurs de ces oeuvres, notamment Kurt Westergaard.

2006. Le Figaro publie Face aux intimidations islamistes, que doit faire le monde libre ? du philosophe Robert Redeker, qui est alors menacé de mort.

2008. Le politicien néerlandais Geert Wilders réalise Fitna, film critique sur l’islam. Menacé de mort, il vit sous protection policière.
Le Conseil onusien des droits de l’homme adopte une résolution sur La lutte contre la diffamation des religions.

2009. 29 novembre. Vote majoritaire en Suisse contre la construction de nouveaux minarets. Réactions négatives de la communauté internationale.

2010. 21 octobre. Le Conseil exécutif de l'UNESCO (Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture) adopte cinq résolutions dont l’une islamise et palestinise deux sites juifs - le Tombeau des Patriarches à Hébron et la Tombe de Rachel à Bethléem - et demande à Israël de les retirer de sa liste des sites du patrimoine national.

2013. 25 juin. Inauguration de la Mission de l'OCI auprès de l'Union européenne. De nombreux dirigeants ont participé à la cérémonie officielle à Bruxelles (Belgique).

2014. 29 juin. L'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) ou en anglais Islamic State of Iraq and al-Sham (ISIS) - al-Sham désignait la province de Syrie dans les précédents califats - a annoncé le rétablissement du  califat et sera désormais dénommé « Etat islamique ». S'étirant "d'Alep, au nord de la Syrie, à Dyiala, dans l'est de l'Irak", ce  califat sunnite sera dirigé par le chef de cet Etat islamique, Abou Bakr al-Baghdadi, qui devient donc "le successeur du prophète dans l’exercice du pouvoir politique".

LEXIQUE

Blasphème : en islam, il détermine la condamnation des « infidèles » et des musulmans qui, accusés de ce délit, peuvent être condamnés à mort et même assassinés.

Califat : territoire gouverné par le calife conformément à la sharîa.

Coran : parole incréée d’Allah, révélée à Mahomet par l’ange Gabriel.

Da’wa : appel de l’islam ; prédication, propagation universelle de l’islam.

Dar al-islam : territoire sous gouvernance musulmane. Il se différencie du dar al-harb (domaine de la guerre), territoire visé par le jihad afin de le soumettre à l’islam et y appliquer la sharîa.

Dhimmi : non musulman soumis par les armées du jihad, il cède au calife sa terre et sa souveraineté en échange d’une protection contre le jihad. Cette protection lui assure une sécurité relative et conditionnée à des prescriptions et des discriminations avilissantes.

Eurabia : titre d’une revue et nom donné à un nouveau continent unissant l’Europe et le monde arabe par les tenants de cette idéologie.

Fiqh : jurisprudence islamique.

Frères musulmans : mouvement islamiste fondé par Hassan al Banna, en 1928, en Egypte.

Hadith : relation des actes et propos du prophète Mahomet. Un des deux fondements de l’islam avec la Coran.

Jihad : guerre obligatoire non abrogeable contre les infidèles.

Jizya : taxe coranique obligatoire pour les non musulmans dhimmis et qui doit être perçue avec humiliation (Cor. 9, 29).

Sharîa : gouvernance fondée sur le Coran et la Sunna.

Sunna : compilations des hadiths et traditions se rapportant à Mahomet. Source avec le Coran de la juridiction islamique.

Théologie de la libération palestinienne : elle vise à extraire le christianisme de sa matrice juive.

Wakf : bien appartenant à Allah ou de mainmorte et géré au bénéfice de la communauté islamique ou d’œuvres charitables.


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Cet article a été publié le 14 décembre 2010, puis le 23 mars 2013,
- le 22 mai 2013 à l'approche de la diffusion sur France 3, à 21 h 55, de La Confrérie de Michaël Prazan ;
- le 28 juin 2013 et le 26 juillet 2013 alors que Rached Ghannouchi, chef du mouvement islamiste Ennahdah,  a annoncé l'avènement du califat et d'une "constitution islamique", et alors que  "Le long de la route du Califat des Omeyyades" est un projet qui "conçoit des itinéraires culturels à travers sept pays. Ce programme financé par l'UE de coopération transfrontalière méditerranéenne (CTMED) vient de lancer un nouveau projet visant à promouvoir l'héritage culturel des Omeyyades". Cette "première dynastie islamique a laissé dans les différents pays méditerranéens un patrimoine culturel et architectural extraordinaire, qui, malheureusement, a souvent été sous-estimé d'un point de vue touristique". Le "projet UMAYYAD (Amélioration de la cohésion territoriale méditerranéenne à travers la mise en place d’un itinéraire touristico-culturel) concevra et lancera un circuit touristique couvrant, à travers" sept pays - Egypte, Espagne, Italie, Jordanie, Liban, Portugal, Tunisie -, "l'extension initiale de l’empire allant de l'Atlantique au Proche Orient". La réunion de lancement a eu lieu à Grenade (Espagne), du 25 au 27 juin 2013, et "a rassemblé tous les partenaires du projet" ;
- 25 janvier 2014. Bat Ye'or est l'une des oratrices du colloque L'Union européenne et les nouvelles formes de la "question juive", organisé par l'Université populaire du judaïsme, le 26 janvier 2014 à Paris.

samedi 28 juin 2014

Orna Ben-Ami : « La douceur du fer »


La Galerie Claude Samuel a présenté en 2006 une trentaine de sculptures en fer soudé de Orna Ben-Ami. Cette artiste israélienne sculpte des objets de la vie quotidienne, suggérant des êtres humains et leurs traits de caractères dans une réflexion sur les paradoxes. Légèreté, souplesse, expressivité, ludisme, ironie et mystère se conjuguent dans ces objets si familiers et métalliques. Une œuvre qui laisse la place à l’imaginaire du spectateur…


Dans son atelier à Rishpon, Orna Ben-Ami découpe les plaques métalliques, les plie, les perfore, les assemble, les soude, les polit, les patine. Mieux, elle anime d’expressivité ce matériau rigide, dur, parfois froid, à l’aspect souvent granuleux. 

Ironiquement, elle a nommé une œuvre « I can’t paint » (Je ne sais pas peindre). Elle ne dessine pas. Puisant dans son imagination ou dans ses observations, elle crée directement en travaillant le fer : elle lutte contre le fer, ou coopère avec lui. 

Quel parcours mène à la sculpture en fer soudé ? Pour Orna Ben-Ami, c’est un peu le hasard.

Dans sa famille nomade, seule une de ses grands-mères créait des sculptures figuratives – des êtres humains - en terre cuite. De sa prime jeunesse, Orna Ben-Ami se souvient avoir écrit des poèmes et composé la musique les accompagnant. Elle sentait que l’art lui permettrait d’exprimer ses sentiments.

Cependant, elle s’oriente vers des études en histoire et science politique à l’université hébraïque de Jérusalem. Elle débute comme journaliste sur une radio israélienne. Un métier où elle a du aiguiser son sens de l’observation.

Voici près de vingt ans, elle suit à Jérusalem des cours de design en bijouterie et se forme au département artistique de l’université de Tel-Aviv, puis de sculpture à la Corcoran School of Art de Washington (Etats-Unis). En créant ces bijoux fantaisie, elle découvre son « attrait pour les métaux. C’est un grand défi de créer des sculptures douces, féminines, à partir du fer. Mettre des émotions dans ce matériau incroyablement dur est un défi qui me séduit », reconnaît Orna Ben-Ami.

Les artistes qu’elle admire ? « Le sculpteur espagnol Julio Gonzales qui, le premier, a créé des œuvres en fer soudé. Son contact du fer était empreint d’une grande sensibilité. Il savait comment sculpter des œuvres petites et délicates à partir d’un métal lourd », m'a indiqué Orna Ben-Ami.

La force de l’évocation suggérée
Elle expose ses œuvres aux Etats-Unis, en Italie, en France et en Israël. Pour Jérusalem, elle a conçu « le mur immense de sculptures de la gare centrale des bus. J’ai choisi de montrer la diversité des gens dans cette ville unique en sculptant 11 énormes chapeaux de personnes différentes, notamment par leur religion. Par un objet usuel, je montre une personne et j’apprends sur sa personnalité, plus qu’en créant son visage », précisait Orna Ben-Ami. 

Nul buste, nul corps n’est représenté dans son œuvre. Mais une profusion d’objets anodins qui renvoient à nos souvenirs intimes. « Je raconte une histoire et j’exprime des sentiments en sculptant des objets simples. Une valise avec des racines peut évoquer toute l’histoire de ma famille, de mon peuple et d’autrui, sans besoin d’explication. La simplicité peut tout exprimer, bien mieux que de nombreux détails. La relation est plus aisée avec des objets de la vie quotidienne. Ceux-ci nous rappellent des situations et des gens qui nous manquent. Certains trouveront un sens de l’humour dans mes sculptures, d’autres beaucoup de douleur », m'a expliqué Orna Ben-Ami.

Ces objets faits par et pour l’homme symbolisent un monde, notre vie. Autant de témoignages de notre société ou de vestiges d’une société représentée dans un loisir ou dans un instant de la sphère privée. 

Cette exposition s’apparente à une promenade allusive dans notre enfance et évocatrice de souvenirs personnels ou familiaux, mais partagés par un grand nombre. La « Poupée de chiffon » porte une robe à l’ourlet festonné et ajouré. Assise, comme fatiguée, presque démantibulée, sans main, elle révèle l’attachement de la petite fille à ce jouet qu’elle s’est appropriée, puis son abandon par l’enfant qui a grandi. 

Soulignant une allure, une pose, une ondulation, Orna Ben-Ami table sur la force de la suggestion et l’imaginaire du visiteur. Elle lui laisse la liberté d’investir ses œuvres de son vécu. 

Par la subtilité de la suggestion, la finesse du regard, la puissance de l’évocation, elle offre une réflexion sur le temps qui passe. Carnet et feuilles sont empilés et empalés par une pique pointe vers le haut (« Souvenirs »). Comme si l’intégrité était impossible, le temps les altérant, l’homme les déchirant.

Une incongruité dérange l’ordre apparent. Un élément bizarre vient dénaturer ou connoter différemment l’objet initial, et à s’interroger. Ainsi, la « Broderie » inachevée aux larges points réguliers, mais lâches, surprend par ce fil sans aiguille sur la toile tendue par le tambour à broder. On cherche du regard l’aiguille, le dé, les échevettes colorées, la paire de ciseaux. On subodore la méticulosité et l’attention de la brodeuse. 

Orna Ben-Ami nous invite à une méditation sur les contraires : absence/présence (« L’album photos »), enfermement/libération (« Liberté de l’individu »), découvert/caché (« L’Orange » partiellement pelée qui orne le Jardin de la résidence du président d’Israël).
Cette valise fermée du fond duquel sortent de multiples racines symbolise le voyage et l’enracinement, deux besoins ou deux contraintes contradictoires. Ce bagage est-il posé avant un départ ou après l’arrivée ? C’est peut-être aussi la vie qui continue dans sa complexité.

Du sac à dos d’un élève (« Seize heures quinze »), Orna Ben-Ami donne l’’impression qu’il vient d’être suspendu et que le temps passe. « Ce sac suspendu seul comme si quelqu’un avait oublié de venir le chercher au jardin d’enfant conte l’histoire de la solitude et mon enfance. Je suis ravie qu’on se souvienne de sa propre histoire en regardant cet objet simple », m'a confié l’artiste.

Un joli catalogue accompagne cette exposition intrigante.

Orna Ben-Ami, « Sculptures en fer ». Galerie Claude Samuel, 2006. 38 pages

Visuels :
« Deux tables, deux verres », « Poupée de chiffon » et « Broderie »
© Orna Ben-Ami

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Cet article a été publié par Guysen.

jeudi 26 juin 2014

« Un devoir de mémoire » de Michel Gurfinkiel


Juriste polonais Juif, Raphael Lemkin est né le 24 juin 1940. Il a forgé en 1943 le vocable "génocide" et a été l'artisan de l'adoption par l'Assemblée générale de l'ONU de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (CPRCG), le 9 décembre 1948.
L’annonce par le Président de la République Nicolas Sarkozy lors du dîner du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) le 13 février 2008 de charger chaque enfant de CM2 de la mémoire d’un des 11 000 enfants juifs déportés de France a profondément troublé Michel Gurfinkiel, historien, journaliste et président de l'Institut Jean-Jacques Rousseau.

L'enfance de... Boris Cyrulnik
Le destin d’Anne Frank : Une histoire d’aujourd’hui
« Destins d’enfants juifs et de leurs sauveurs » de Kirsten Esch
« Une enfance volée : l’affaire Finaly » de Fabrice Génestal
Au cœur du génocide. Les enfants dans la Shoah 1933-1945
C’étaient des enfants. Déportation et sauvetage des enfants juifs à Paris
« Les larmes de la rue des Rosiers » d'Alain Vincenot
« Carnets de mémoire Enfances cachées 39-45 », par Michèle Rotman

Michel Gurfinkiel écrivit alors un article émouvant exprimant ses réserves - l’un de ces enfants est son frère Charles, assassiné à Auschwitz en 1942, à l’âge de neuf ans - et son loyalisme républicain. Encouragé par des lecteurs, il approfondit sa réflexion sur la Shoah dans ce livre, à la fois autobiographie émouvante et essai étayé d’arguments convaincants.

Il y brosse avec amour et pudeur le récit des histoires familiales, paternelle et maternelle, marquées par la Shoah. Emergent la figure admirée du père Szyja (Josué), tailleur et modèle de rigueur dans la vie professionnelle et personnelle du fils, et le souvenir de Charles, dont l’une des trois photos, longtemps présente sur l’atelier du père, est posée sur le bureau du journaliste-écrivain.

Celui-ci détaille aussi les actions menées par des Juifs, lors de la tentative d’annihilation les visant, pour informer sur la Shoah des dirigeants Alliés, et « la loi du silence » qui s’instaura « pour des motivations entremêlées : raison d’Etat, impératifs stratégiques, antisémitisme ».

Il décrit aussi l’occultation puis l’émergence de la Shoah dans les consciences collective et politique et les histoires nationales, ainsi que la lente progression du devoir de mémoire. Il analyse enfin les « fluctuations sémantiques » - génocide (vocable forgé par Raphael Lemkin), Shoah, Holocauste, démocide - et les évolutions jurisprudentielles, tout en soulignant la singularité de la Shoah.

Tout au plus, pourra-t-on regretter un bref jugement négatif à l’égard du président Truman, car celui-ci a révélé sa stature face aux défis de l’Histoire, et une allusion trop elliptique à l’affaire du timbre sur les Justes parmi les nations en 2007.

En annexes, le discours du Président Nicolas Sarkozy et l’article Silence et conscience du professeur Israël Goldberg.

Michel Gurfinkiel, Un devoir de mémoire. Ed. Alphée Jean-Paul Bertrand. 187 pages. 18,90 €. ISBN : 978-2753803534


Conférence de Michel Gurfinkiel et Danielle Guerrier intitulée Juifs et Chrétiens. Connaissance de l’autre, similitude et contenu spirituel des fêtes
Le 20 novembre 2012, à 20 h 30
Organisée par l’Amitié judéo-chrétienne de France (AJCF)-Groupe de Boulogne.
Au Carré Bellefeuille
Salle 406, 60 rue de la Belle feuille, 92100 Boulogne-Billancourt.
Buffet convivial dès 19 h 30
P.A. F. : 5 €

Cet article a été publié en une version plus concise par L’Arche dans son numéro de décembre 2008-janvier 2009, et sur ce blog le 25 octobre 2009 et 20 novembre 2012, et 28 avril 2013 en cette Journée nationale du souvenir des victimes de la déportation..

mercredi 25 juin 2014

« Du Panthéon à Buenos Aires » de René Goscinny


A l'occasion des trente ans de la disparition de René Goscinny (1926-1977), IMAV éditions ont publié Du Panthéon à Buenos Aires, chroniques illustrées. Un recueil de 16 chroniques de l’humoriste génial, publiées entre 1964 et 1976 dans divers magazines, et illustrées par des dessinateurs amis, d’hier et d’aujourd’hui. Préfacé par sa fille, Anne Goscinny, ce livre réunit des nouvelles savoureuses croquant avec finesse nos travers. La Mairie du IVe arrondissement de Paris présenta l'exposition Les vacances du petit Nicolas consacrée au travail de Jean-Jacques Sempé et Goscinny sur ce personnage enfantin.


On ouvre ce livre avec la joie et l’émotion de retrouver une figure familière, un ami d’enfance qui n’aurait pas changé, mieux se serait bonifié, et que l’on retrouve à l’âge adulte. Et la certitude de passer un bon moment. Et on n’est pas déçu.

Voici donc 16 textes parus entre 1964 et 1976 dans « le magazine culte de la bande dessinée », Pilote, dans Le Figaro littéraire ou Paris Match, et lus publiquement lors de l’hommage rendu à René Goscinny par la ville de Cannes (29 juin-1er juillet 2007).

Pour illustrer ces nouvelles, les éditions IMAV ont fait appel à des dessinateurs d’horizons variés : de Cabu à Zep, via la génération Pilote - Gotlib, Druillet, Lauzier, Mézières, Giraud, Juillard - les amis de toujours, comme Tibet, et ceux d'aujourd'hui comme Margerin, Barral, Mourier, Cestac, Tebo, Bertrand, Achdé ou Boucq ».

Avec talent et humilité, ces dessinateurs demeurent fidèles au texte, sans généralement rajouter du sens, tout en gardant leur originalité.

Vis Comica (Le pouvoir de faire rire)

Le titre de ce recueil aux accents autobiographiques reprend celui de la première nouvelle.

René Goscinny naît en 1926 dans le Ve arrondissement de Paris, près du Panthéon, dans une famille d’immigrés juifs ukraino-polonais qui s’installe en Argentine en 1928.

Après une scolarité brillante, âgé de 19 ans, René Goscinny va à New-York où il se lie d’amitié avec Harvey Kurtzman, premier rédacteur du magazine de bandes dessinées Mad.

Au début des années 1950, Goscinny retourne en France.

De son imagination féconde, de son immense culture, de sa vive curiosité, de ses collaborations avec des dessinateurs doués – Uderzo, Morris, Sempé, Tabary, Gotlib -, naissent la revue légendaire Pilote, des personnages et des albums qui font le délice de générations d’enfants - le public le plus difficile -, d’adolescents et d’adultes : Astérix, Lucky Luke, le petit Nicolas, Iznogoud, les Dingodossiers... Et fusent aussi des expressions entrées dans le langage courant, comme autant de clins d’œil d’aficionados : « être calife à la place du calife », etc.

Cet humoriste génial décède à 51 ans d’un malaise cardiaque, le 5 novembre 1977, à Paris. Par un cruel et absurde concours de circonstances.

« Avec 500 millions de livres et d’albums vendus, traduits dans plus de 130 langues et dialectes, René Goscinny est l’un des auteurs les plus lus dans le monde ».

« Des pépites d’humour »

Ces récits sont malheureusement et heureusement non datés : si leur année de publication ne figure pas, force est de constater que ces chroniques pourraient être écrites de nos jours, sans rien biffer, tant elles ne sont pas anachroniques.

Tout inspire Goscinny doué pour tous les genres, dont la science fiction comique (Suivez le guide) : les success stories des self made men, les best-sellers historicisants dont il démonte les stéréotypes, la prétention des auteurs abscons et de leurs louangeurs, la French way of life urbaine, la vacuité de longs déjeuners d’affaires, l’hypocrisie des gourmands abonnés aux régimes amaigrissants…

Ce fin observateur et psychologue s’inspire surtout des travers humains (Tous des méchants), de nos défauts, pour nous tendre un miroir de nos âmes. Il dépeint nos comportements avec une ironie qui ne l’épargne pas. Il croque les situations de la vie quotidienne et souligne une caractéristique comme un caricaturiste exagère un trait de visage.

Il loue le professionnalisme (Je suis prêt), pousse une situation jusqu’à l’absurde (Les feux de la rampe), et laisse deviner le gastronome derrière l’écrivain, et la souffrance des auteurs comiques populaires et à succès ignorés ou méprisés par l’intelligentsia (Je suis un compris).

La politique ? Elle n’intéresse Goscinny qu’au prisme d’un caractère, d’un type à portraiturer dont il décrit la vie de faux-semblants, souligne l’écart entre son apparence conservatrice et ses convictions révolutionnaires, entre sa réussite professionnelle et l’échec de sa vie affective, et finalement l’extrême solitude d’un homme psychologiquement malade (Le PDG dans le fruit). Perce alors la gravité de Goscinny.

L’une des nouvelles, Rumeurs, fait songer aux dessins Gossip du peintre et illustrateur américain Norman Rockwell.

« Quand on n’aime pas le rire, il n’y a pas de guérison possible »

En lisant ces 16 chroniques brèves, on entend la voix de Goscinny nous conter ces historiettes et on sourit bien souvent.

Agrémenté d’une courte biographie et d’une bibliographie, ce recueil se lit vite, et se savoure. On reconnaît autrui et soi dans cette galerie de personnages, de choses vues et entendues.

Goscinny, c’est l’esprit parisien fait de finesse et de légèreté, un regard empreint d’humanité, une douce et tendre ironie, une psychologie subtile, la justesse du trait, le refus de la vulgarité, un humour dénué de méchanceté, l’élégance de la simplicité, une sensibilité pudique, un soin de concision, l’art de l’accroche et de la chute. Le goût du calembour affleure rarement (Je suis un compris).

Comment caractériser brièvement le nouvelliste ? Un style simple, une inspiration puisée dans la nature humaine, une expression limpide, une complicité avec le lecteur. Bref, les secrets de l’éternité littéraire.

Pour ceux qui lisent l’hébreu, signalons la parution en Israël du tome 1 des Histoires inédites du petit Nicolas, dont le co-auteur est un autre humoriste, Jean-Jacques Sempé.

Le 6 novembre 2010, un farbrenguen (réunion de Hassidim qui discourent et chantent pour l'élévation morale) à la mémoire de René Avraham ben Sim'ha Goscinny, fils et petit-fils de rabbins polonais a eu lieu à la grande synagogue du 770, siège du mouvement Loubavitch à New York. Pour la huitième année consécutive, après l'office du chabbat au matin un kiddouch a réuni 3 500 membres du mouvement pour la Hazkara (anniversaire du décès). Des agapes offertes par Anne Goscinny.


René Goscinny, Du Panthéon à Buenos Aires, chroniques illustrées. Préface d’Anne Goscinny. IMAV Editions. Paris, 2007. 110 pages. ISBN : 2 915732 11 6

Site officiel consacré à l’œuvre de René Goscinny :

Cet article a été publié sur Guysen, et sur ce blog le 25 mars 2010.

Lisa Seror « Sud-Nord » / Peintures


Dans le cadre du Festival de culture Juive de Cracovie (27 juin-6 juillet 2014) en Pologne, le Palac Sztuki-Palais des Arts invite Lisa Seror à exposer ses toiles « Les Chaises vides », "travaux porteurs du questionnement"  « Où est notre place ? ».  Les toiles de Lisa Seror sont marquées par l’exode familial de la Tunisie natale et la nostalgie d’une convivialité idéalisée et révolue. Vernissage le 26 Juin 2014 à 17 h.

« Le monde choisit notre destin, puis nous reproche notre destinée… »

Celui de la peintre Lisa Seror est marqué par l’exode, le départ de sa Tunisie natale, de La Goulette, port et agréable cité balnéaire près de Tunis, et dont une large part de la population était Juive. L’été, les Tunisois y passaient leur villégiature, déjeunaient sur les plages de sable fin… Lien ferroviaire : le Tunis-Goulette-Marsa (TGM). Ya Hasra ! (Il fut un temps, jadis, en arabe)

C’est la nostalgie qui guide les pinceaux de la blonde Lisa Seror, primée par la Médaille de la Ville de Paris, et imprègne ses soirées musicales mensuelles à son domicile parisien.

De ses premières œuvres, on remarque des scènes fleurant bon l’orientalisme par la représentation théâtralisée de silhouettes aux costumes bariolés dans un patio vers lequel convergent les regards de spectateurs à leurs balustrades.

Les paysages sont rares, mais imprégnés d’une atmosphère quasi-onirique, émergeant ou se fondant dans le ciel azur ou la mer étale.

L’artiste a évolué vers u

n style accordant une place essentielle, quasi-exclusive aux chaises. Des sièges en déséquilibre, bancals, sur des fonds sombres ou ternes. Signes et témoins d’une absence douloureuse, d’un vide perdurant, d’un départ soudain. Vestiges d’un monde disparu.

Ces tableaux, Lisa Seror les griffe comme pour s’agripper dans un passé figé, conférer l’éternité artistique au temps révolu, écrire par la peinture des bribes d’une histoire révolue, parfois idéalisée.

Elle surprend par des rehauts surgissant de couches fines comme des souvenirs tourmentés affleurent soudainement la conscience, et parfois émaillés de lettres hébraïques surgissant d’un fond sombre, semblant brise un voile grège pour avancer, poursuivre leur chemin en faisant entendre leurs mots sur une histoire occultée (Prière).

En 2012, la Galerie Daniel Besseiche a présenté l’exposition « En quête de place… » de la peintre Lisa Seror.

Dans le cadre du Festival des cultures Juives, le Cercle Bernard Lazare a présenté en juin 2013 l’exposition-installation "Oeuvres picturales Tunis-Paris" de la peintre Lisa Seror.

Dans le cadre du Festival de la culture juive de Cracovie (27 juin-6 juillet 2014), le Palac Sztuki- Palais des Arts invite Lisa Seror à exposer ses toiles « Les Chaises vides », "travaux porteurs du questionnement"  « Où est notre place ? ».  


Du 27 juin au 27 juillet 2014
Au Palac Sztuki
Plac Szczepanski 4.  Krakow 31-011. Poland
Tel.: (0-12) 422-66-16, 423-12-55
Vernissage le 26 Juin 2014 à 17 h 

Du 9 au 24 juin 2013
Au Cercle Bernard Lazare
10, rue Saint-Claude. 75003 Paris
Tél. : 01 42 71 68 19
Vernissage le 9 juin 2013 à 16 h 30 avec un intermède musical.

Jusqu’au 24 novembre 2012
33, rue Guénégaud. 75006 Paris
Tél. : +33 (0) 1 40 46 08 08
Du mardi au samedi de 11 h à 19 h

 Visuels :
El Ghriba
Chevauchée ou le pourquoi pas
Egalité des chances (97 x 195)
Technique mixte acrylique-pigments-papiers-de-soie marouflés

Articles sur ce blog concernant :

Cet article a été publié le 21 novembre 2012, puis le 6 juin 2013. Il a été actualisé le 24 juin 2014.

jeudi 19 juin 2014

Internet s’est imposé dans les campagnes électorales désignant le grand rabbin de France


Depuis 2008, année d'élection de Gilles Bernheim à cette fonction, Internet s'est imposé dans les élections consistoriales désignant le grand rabbin de France. Médias communautaires, mais surtout blogueurs et réseaux sociaux apparaissent comme des vecteurs privilégiés de candidats à cette fonction spirituelle suprême française. Haïm Korsia a été élu grand rabbin de France le 22 juin 2014.


Quelles différences entre les campagnes 2008 et 2014 ? La réduction des budgets, l'inflation du nombre de candidats, les effets de deux scandales et le changement de générations.

Les points communs ? Les rabbins candidats se situent dans le courant orthodoxe consistorial. Nombre d'entre eux ont des enfants vivant en Israël.

Certes, le programme et la personnalité d'un candidat seuls importent. Mais dans une ère de communication et à une époque de stigmatisation du judaïsme, il s'avère impératif qu'un grand rabbin de France sache communiquer et s'entourer de communicants compétents.

Mais surtout, nul ne s'interroge sur la pertinence de la fonction de grand rabbin de France à l'aube du XXIe siècle. L'empereur Napoléon Ier a institué les Consistoires israélites en 1808. Or, depuis cette date, le judaïsme français institutionnalisé a évolué profondément. Il s'est doté d'associations ou de fédérations entamant le monopole de la représentation des Français juifs, tels le Conseil représentatif des institutions Juives de France (CRIF) dont les Consistoires ne sont pas membres, le FSJU (Fonds Social Juif Unifié), le BNVCA (Bureau national de vigilance contre l'antisémitisme), etc. Il est irrigué par des mouvements juifs divers : l'Union libérale israélite de France (ULIF) fondée en 1907 et "plutôt "Reform" (UK) ou "Conservative" (USA)", le Mouvement Juif libéral de France (MJLF) créé en 1977, le judaïsme Massorti ("conservateur ou conservative"), le mouvement 'Habad-Loubavitch. Dès lors, combien de Français Juifs représente le Grand rabbin de France ? La moitié de ses coreligionnaires ? Plus ?  Moins ?

Deux candidats en 2008
Blogs de campagne, groupes de soutiens sur le réseau social Facebook, vidéos sur MySpace ou Dailymotion, sites Internet reflétant un débat à l’instar d’une disputatio médiévale et assorti de commentaires de lecteurs… Les diverses opportunités du web ont été particulièrement prisées par les équipes des deux candidats - les grands rabbins Gilles Bernheim et Joseph-Haïm Sitruk - à l’élection du grand rabbin de France (GRF) le 22 juin 2008.

A contrario, les candidats à la présidence du Consistoire central de France ont alors privilégié des médias traditionnels.

Pourquoi ? Plusieurs facteurs explicatifs peuvent être avancés : la plus grande visibilité/proximité de la fonction rabbinique auprès des membres de la communauté, l’alignement sur le recours à Internet lors des campagnes en vue des élections présidentielles et législatives en 2007, l’atout de présenter une image peaufinée du candidat, et les avantages du réseau : modernité, interactivité, rapidité, réactivité, utilisation aisée et ubiquité.

Peut-être aussi la volonté de proches du grand rabbin Gilles Bernheim de contourner un appareil présumé acquis au grand rabbin de France Joseph-Haïm Sitruk pour sensibiliser la base afin qu’elle influe sur les quelques 300 électeurs.

Autre originalité : pour suivre les élections aux deux instances suprêmes du Consistoire central de France, Jack-Yves Bohbot assurait dans son blog un suivi curieux, honnête et de l’intérieur : ce blogueur est en effet vice-président de ce Consistoire. Une initiative critiquée par certains, étonnés par une pratique qui relatait de manière inédite des épisodes et rebondissements de ces campagnes… Quant au blog http://electionsrabbiniques.blogspot.com, il se voulait un observateur neutre et anonyme.

Le grand rabbin Gilles Bernheim articulait sa communication autour de sa figure d’auteur prolifique (http://www.unrabbindanslacite.fr), du site de son groupe de soutien http://www.avenirdujudaisme.fr créé en janvier 2008 et qui éditait une newsletter hebdomadaire, et de son blog de campagne http://www.gillesbernheim2008.fr, densifié par des textes, des vidéos, son programme, un chat, la diffusion en direct d’une soirée d’études parisienne… Le film 24 heures dans la vie du grand rabbin Bernheim (environ 25 minutes) inclus dans l’un des deux DVD envoyés aux électeurs, a été mis sur Internet.

Le grand rabbin de France Joseph-Haïm Sitruk bénéficiait du site http://www.lesamisdugrandrabbin.com, un espace sans connotation électorale et qui proposait les vidéos des cours, conférences, discours et interviews du grand rabbin de France, sans mentionner ses livres ou sa candidature à l’élection du GRF. Ce site était dépourvu de texte et ne listait pas les réalisations du GRF. Un acte volontaire visant à dénoter une absence de vanité et à laisser les Internautes établir ce bilan. Internet était utilisé sur un registre affectif : les personnes attachées au grand rabbin de France Joseph-Haïm Sitruk étaient invitées à y exprimer ce qu’elles ressentaient. Un direct de Jérusalem par satellite au Kotel a eu lieu lors d’une « fête de l’unité » au Zénith.

Selon le blog Electionsrabbiniques2008, les trois groupes de soutien à ce candidat (2 495 membres) devançaient le 6 juin ceux de son rival (895 membres).

Interrogés par L’Arche, des proches des deux candidats indiquaient que cette campagne a suscité un fort engouement qui, pour l’un d’eux, aurait rayonné au-delà de la communauté Juive française.

Espérons qu’une réflexion suivra cette campagne émaillée de graves accusations, parfois véhiculées via sites ou courriels, concernant ces deux candidats et ayant concerné aussi les relations entre juifs et chrétiens.

Peut-être songera-t-on alors à créer une instance de régulation, indépendante et temporaire, pour assurer un meilleur déroulement des campagnes dans le respect de la neutralité de l’institution consistoriale et dans une plus grande transparence ou modération financières afin de ne pas décourager certaines candidatures ou prêter le flanc à des attaques.

Le 12 juin 2008, Raphy Marciano, directeur du Centre communautaire de Paris et de la campagne du grand rabbin Gilles Bernheim, a annoncé que celui-ci publiera ses comptes de campagne.

Six candidats en 2014
Dès le 24 février 2014, Philippe Meyer publiait sur son site Internet une lettre adressée à Joël Mergui, président des Consistoires de Paris Ile-de-France et de France, et signée d'administrateurs du Consistoire ainsi que de rabbins et grands rabbins (Haïm Korsia, Laurent Berros, André Elkiess, Moché Lewin, Mendel Samama, Alain Sénior, etc.), afin que ce président fixe rapidement la date de l'élection du Grand rabbin de France.

Le 3 mai 2014, dix candidats, souvent quarantenaires ou cinquantenaires, étaient candidats à la fonction de grand rabbin de France dont  l'élection aura lieu le 22 juin 2014 : Raphaël Banon, grand rabbin de Toulouse, chef d'entreprise de la société Bara et ayant défendu son droit à porter la kippa devant la Cour d'appel de Paris malgré les menaces choquantes du juge Marcel Foulon, Laurent Berros, rabbin depuis dix ans de Sarcelles (Val d’Oise) - une des deux communautés avec Créteil les plus importantes de la région Ile-de-France - et proche de l’ancien grand rabbin de France, Joseph Sitruk, Elie Elkiess, un des responsables de la cacherout au Consistoire israélite de Paris, Bruno Fiszon, grand rabbin de Metz et de Moselle et vétérinaire spécialiste de l’abattage rituel (che'hita) qu'il défend dans les instances européennes contestant cette pratique, Olivier Kaufmann, rabbin de la synagogue de la place des Vosges à Paris, directeur du Séminaire israélite de Paris depuis janvier 2013 et co-grand rabbin de France par intérim au côté du grand rabbin de Paris, Michel Gugenheim, depuis la démission de Gilles Bernheim en 2013, Haïm Korsia, aumônier des armées depuis 2007, ancien rabbin de Reims auquel a été consacré un documentaire, collaborateur des deux précédents grands rabbins de France, et défenseur du droit pour les étudiants Juifs de ne pas passer leurs examens lors de Chabbat et de fêtes juives, Yoni Krief, rabbin de Nantes et aumônier régional des prisons, Meïr Malka, qui a été actif dans les conversions au consistoire de Paris, Alain Senior, grand rabbin de Créteil depuis environ vingt ans, et ancien secrétaire particulier de Joseph Sitruk, et David Shoushana, rabbin de Nice, de Martinique et maintenant de Charenton-le-Pont (Val de Marne).

Après le retrait du rabbin Bruno Fiszon, puis d'autres candidats, restent six candidats : Laurent Berros, Olivier Kaufmann, Haïm Korsia, Meïr Malka, Alain Senior et David Shoushana. Tous six rabbins franciliens. Comme si les rabbins de province étaient exclus de facto de toute candidature.

Parmi ces six rabbins, certains sont médiatisés, tel Haim Korsia qui a participé dès 2006, et pendant plusieurs années, sur Direct 8,  avec le père Alain de La Morandais et  l'anthropologue Malek Chebel, à l’émission télévisée Les enfants d’Abraham et auquel le réalisateur avait consacré un documentaire en 1999. Le visage d'Olivier Kaufmann est familier des téléspectateurs car ce rabbin officie lors de cérémonies télévisées telles celle du souvenir diffusée sur France 2 le dernier dimanche avant Rosh HaChana (Nouvel an juif) et celle à la mémoire des victimes des rafles et d'hommage aux Justes de France. Il est vraisemblablement le rabbin ayant le carnet d'adresses dans le Tout-Paris, politique, médiatique, artistique, militaire, religieux le plus densément rempli.

Quant à Raphaël Banon et Alain Senior, ils s'étaient déjà présentés à l'élection au grand rabbinat de Paris en 2012 et avaient été interviewés par des médias et blogs communautaires, dont celui créé par l'association Avenir du judaïsme  médiatisée lors de la polémique récente sur le guet.

Certains sont issus de lignées familiales rabbiniques : tels les rabbins Olivier Kaufmann, petit-fils du grand-rabbin Henri Schilli (1907-1975), ancien directeur du Séminaire israélite de France et grand rabbin de France par intérim avec le grand rabbin Jacob Kaplan (1952-1955), et Alain Chlomo Senior (quatre générations de rabbins).

Mais beaucoup de rabbins candidats exercent en province ou en banlieue et sont donc inconnus ou méconnus de la majorité des Français Juifs lambda. Aussi, ils se sont rendus dans les communautés Juives de la province française, et ont répondu aux interviews de médias communautaires - journaux, radios - et de blogueurs.

Sur la fréquence francilienne, RCJ, Radio J, Radio Shalom et Judaïques FM ont consacré un temps important à interviewer des candidats. Sur Radio Shalom, Olivier Gandus a obtenu l'acquiescement du rabbin Olivier Kaufmann sur l'autorisation donnée à un imam de parler à la bimah (estrade de lecture dans la synagogue). Mais aucun des deux ne s'est intéressé au discours qui serait tenu par cet imam. A l'instar du candidat à la Présidence de la République François Hollande, c'est par une anaphore que le rabbin Olivier Kaufmann a présenté son programme sur RCJ. Les candidatures de ces rabbins de province intéressent la presse locale : ainsi, Maville Nantes interroge le rabbin Yoni Krief.

Actualité juive hebdo a couvert cette élection par un dossier sur le mode d'élection, la nature et la pertinence de la fonction de grand rabbin de France, par quatre questions/quatre réponses de huit candidats, car le rabbin Raphaël Banon n'a pas souhaité s'exprimer, par la republication d'un éditorial de son fondateur Serge Benattar relatif à la précédente élection du grand rabbin de France et un article sur certaines vidéos des candidats. Des articles disponibles sur le site Internet du journal.

De même, Hamodia informe sur les qualités attendues du grand rabbin, ainsi que sur les parcours et les professions de foi des candidats.

Manque de temps ou ignorance concernant la création de blogs et de comptes sur les réseaux sociaux et l'importance de la communication digitale, peu de candidats ont utilisé Internet, même s'ils sont présents sur LinkedIn ou Video.

Comptes sur FacebookLaurent Berros. Pour un souffle nouveau (1 580 J'aime) - et Twitter (79 abonnés), site Internet éponyme avec revue de presse et vidéos, chaîne YouTube avec une dizaine de vidéos... La campagne numérique du rabbin Laurent Chalom Berros s'avère exhaustive, et suppose une équipe particulièrement dynamiqueC'est également sur YouTube que Laurent Chalom Berros a publié le 6 mai 2014 son message officiel de campagne - 2 959 vues - dans lequel il revient sur son parcours - rabbin à Montpellier, puis à Sarcelles - "petite Jérusalem avec ses 27 synagogues, ses huit écoles, ses 26 commerces cacher, son Kolel" et "modèle de réussite et d'unité" - dans le département du Val d'Oise qui "à lui seul compte 30 000 Juifs". Le Parisien consacre un article à ce "rabbin de proximité" tant la communauté Juive de Sarcelles est importante. Ce candidat arrive en tête d'un sondage d'Actualité juive.

C'est le chroniqueur judiciaire Clément Weill-Raynal sur France 3 et pour Actualité juive qui a alerté son ami le grand rabbin Olivier Kaufmann sur les erreurs concernant les diplômes obtenus figurant sur la page de ce rabbin sur Wikipedia. Des erreurs rectifiées, et objets de rumeurs d'autant plus graves après le scandale de l'agrégation de philosophie attribuée à tort au grand rabbin Gilles Bernheim. Youtube héberge cinq vidéos postées tardivement, dans les derniers jours de la campagne, dont trois interviews du candidat : l'une sur RCJ par Shlomo Malka (195 vues), l'autre par la journaliste médicale du Figaro Martine Perez (276 vues) et la troisième sur Radio Shalom. Posté le 19 juin 2014, le clip de campagne du rabbin Olivier Kaufmann a été vu 1 657 fois. Une communication digitale tardive.

C'est cependant par une vidéo réalisée à la fin d'une conférence à Nancy le 30 avril 2014 et  publiée le 1er mai 2014 sur Youtube que le rabbin Haïm Korsia a annoncé sa candidature (1 071 vues). Le  2 mai 2014, ce membre du Conseil d'administration de l'OSE (Oeuvre de Secours aux enfants) a reçu sur Facebook le soutien de Roger Fajnzylberg, précédent directeur général de l'OSE, délégué général de la Fondation OSE MES (Mémoire Enfance Solidarité) et signataire en 1996 d'un appel contre « la judaïsation de Jérusalem-Est » qu'il n'a pas renié publiquement. Le rabbin Haim Korsia n'a pas été interrogé sur ce soutien problématique dont il ne s'est pas distancé.

Ce candidat a aussi créé sa page Facebook intitulée Haïm Korsia Grand Rabbin de France (1 204 J'aime). Il alimente Youtube en interview, notamment celle "Je suis prêt" dans laquelle il est interviewé par Olivier Lerner, présenté comme "journaliste", alors qu'il s'agit d'un "ancien journaliste sur France 2 (1984-2001)" et actuel directeur d'Olivier Lerner Conseils, "formation et coaching pour les interventions orales des dirigeants" dont les  clients sont l'ENA, Sciences Po, des écoles de journalisme, etc.

Le rabbin Haïm Korsia a publié sur son compte Twitter des informations sur sa campagne et ses positionsEn 2004, il avait déclaré vouloir inviter l'humoriste controversé Dieudonné au camp d'Auschwitz, car ce dernier est « l'un des rares à pouvoir parler à ces jeunes désocialisés qui insultent des Juifs. Bien malgré lui, il est devenu l'icône de ceux qui veulent s'opposer aux Juifs. Je suis certain qu'il peut avoir un impact positif sur ces jeunes qui peuvent avoir un rejet du judaïsme ». Devant la réprobation générale, notamment celle du grand rabbin de France Joseph Sitruk dont il était le conseiller, le rabbin Haïm Korsia avait abandonné son projet. Par sa proximité avec le grand rabbin Sitruk, c'est un habitué des campagnes consistoriales. Il est curieux que le Séminaire israélite n'ait pas prévu des cours idoine afin de remédier aux problèmes d'élocution de rabbins qui souffrent, comme le rabbin Haïm Korsia d'une articulation insuffisante. Ce qui rend l'écoute de ses discours souvent ardue.

Très peu de médias l'ont interrogé sur les accusations de plagiats visant deux de ses livres : "Être juif et français. Jacob Kaplan le rabbin de la République (2006) et La Kabbale pour débutants (2007). "Dans le premier cas, les emprunts à un ouvrage de 1990 sur les institutions juives sous Vichy, L'étoile et la francisque, de Maurice Moch et Alain Michel, vont de quelques lignes à une page entière", relève le site Fait-Religieux (4 juillet 2014). Sur un ton un brin agacé, le rabbin Haim Korsia a indiqué avoir utilisé un logiciel concluant au très faible pourcentage des similitudes. Mais sans indiquer le pourcentage, sans communiquer tous les résultats de cet examen.

Le 2 juin 2014, le rabbin Meyer Malka a publié sa vision du grand rabbin de France en étant filmé assis, devant une bibliothèque (732 vues). Une des onze vidéos diffusées sur sa chaîne Youtube et sur son site Internet. Celui-ci présente son CV, son programme, etc. Il a annoncé le retrait de sa candidature le 21 juin 2014 au soir, après chabbat.

En plus de son compte Facebook, le rabbin Alain Senior dispose d'une page Facebook dédiée à sa candidature et appelée Bâtir ensemble l'avenir de notre communauté. Election du grand rabbin de France 22 juin 2014. A noter le drapeau tricolore à gauche de son affiche de campagne. Le 13 mai 2014, il a publié sur Youtube la vidéo expliquant sa candidature (1 570 vues). Il "a expérimenté ses projets dans la communauté de Créteil" et évoque ses contacts aux plus hauts niveaux politiques. Son site Internet comprend son programme, des vidéos, une revue de presse, etc. Dans le bureau de cette "belle synagogue" de Créteil, il est interviewé par Michel Zerbib, rédacteur en chef de Radio J.

C'est aussi Youtube que le rabbin David Shoushana, ancien étudiant en aéronautique au Technion, a choisi pour y publier son clip de campagne le 1er juin 2014 dans lequel témoignent des fidèles (2  268 vues). Son compte Facebook (756 vues). Après avoir officié en Martinique, à Toulouse, Grenoble et Nice, David Shoushana est le rabbin de  Charenton-le-Pont, une "communauté dynamique, jeune". Son slogan : "Insufflons une nouvelle énergie pour le judaïsme".

Finalement, ce sont des blogs ou médias électroniques - JSSNews a interviewé le rabbin David Shoushana - qui ont publiés les articles les plus intéressants sur Internet. Le professeur de Sciences politiques et droit Raphaël Drai est l'auteur d'une tribune publiée par Actualité juive et sur son blog. A noter que Bernard Musicant a publié sur son blog du Jérusalem Post sa série remarquable d'interviews de six candidats.

Si certains candidats ont émis des propositions intéressantes - adoption de mesures préconisées par la Conférence des rabbins européens sur le guet (divorce religieux), présence permanente d'un représentant du Consistoire israélite de France dans les instances européennes pour prévenir les actions hostiles au judaïsme, etc., d'autres se sont contentés de promesses vagues, notamment en évoquant le combat contre l'antisémitisme et le dialogue judéo-musulman sans en préciser la teneur. Pourtant celle-ci est liée étroitement à celui-là.

En outre, la crise affectant la fonction rabbinique en France est largement occultée et non entièrement résolue par l'application des mesures préconisées par des candidats (reconnaissance à l'international des rabbins formés en France, délocalisation à Strasbourg du Séminaire israélite formant les rabbins).

Par ailleurs, l'aspect financier de cette fonction est largement occulté. Un communiqué de Sammy Ghozlan, membre du Conseil d'administration du Consistoire central de France, avait révélé le 28 février 2014, et sur Facebook, que le "montant mensuel total du salaire et des services" du Grand rabbin de France "s'élèvent à plus de 25 000 euros", et "à 34 000 euros par mois, si on rajoute son staff". Un communiqué guère repris par les médias communautaires... 

Enfin, Akadem s'est interrogé A quoi sert un grand rabbin de France ?, l'association Avenir du judaïsme, qui s'était indignée de modifications apportées sur la liste des électeurs, a publié le 19 juin 2014 sur son site Internet et via sa newsletter l'article Quel Grand Rabbin... pour la France ? sur cette élection cruciale, et le 20 juin 2014, a réagi aux explications de la Commission électorale du Consistoire centrale justifiant ces modifications par une actualisation liée aux résultats des élections consistoriales de l'automne 2013. Des arguments qui n'ont pas convaincu  l'historien Claude Nataf qui, interviewé sur Judaïques FM le 23 juin 2014, a déclaré que Joël Mergui lui avait dit avoir choisi de retenir parmi les grands électeurs les seuls présidents de communautés. Or, Claude Nataf a relevé parmi ces électeurs les noms de membres, et non de présidents, de communautés, souvent proches de Joël Mergui.

Trois cent quinze électeurs représentant les communautés Juives françaises, consistoriales et associées, ont voté le 22 juin 2014.

Au second tour de scrutin, Haïm Korsia, aumônier des Armées âgé de 51 ans, a été élu grand rabbin de France par 131 voix contre 97 pour le rabbin Olivier Kaufmann, âgé de 47 ans. Son mandat dure sept ans.

On peut s'étonner que le ministre de l'Intérieur chargé des Cultes, alors Manuel Valls, dont la parole avait été déterminante pour convaincre in extremis Gilles Bernheim de se mettre en congé de la fonction de Grand rabbin de France, soit resté silencieux malgré les rumeurs de plagiats visant Haïm Korsia.

Campagne 2021
Le 13 juin 2021, sera élu le Grand rabbin de France.

Au 7 février 2021, Haïm Korsia n'a pas annoncé publiquement s'il se représenterait. Aucun rabbin n'a exprimé officiellement sa volonté de présenter sa candidature. Trop tôt.

En février 2021, le grand rabbin Haïm Korsia s'est retrouvé au cœur d'un débat sur l'antisémitisme en France et le choix de l'exil, principalement l'aliyah, de Français Juifs. 

Dans le n° 1583 d'Actualité Juive (14 janvier 2021), Ariel Kandel, directeur général de Qualita, a réagi, dans sa tribune, au dossier de la précédente édition de l'hebdomadaire sur "La grande solitude des juifs de France". Il a écrit : "Il est en effet peut-être temps de dire tout haut ce que certains pensent tout bas. La France est dépassée. Elle est dépassée dans la lutte contre le Covid, dans la distribution des vaccins mais aussi dans la lutte contre l'islam radical et l'antisémitisme."

Il a poursuivi : 
"Les forces de l'ordre sont dépassées et ne peuvent sécuriser l'immense majorité des sites de la communauté juive. Les tribunaux sont dépassés dans la façon de juger et de condamner les terroristes. Quant à la double allégeance, elle n'existe pas, elle n'existe plus, elle n'a peut-être jamais existé. Certes, il y a plus de 200 ans, les responsables communautaires avaient répondu "Oui ! Jusqu'à la mort" à la question qui leur était posée par Napoléon : "Les juifs nés en France et traités par la loi comme citoyens français regardent-ils la France comme leur patrie ? Ont-ils l'obligation de la défendre ?" Mais avaient-ils le choix de dire "non" vu qu'ils n'avaient pas où aller ? Ils l'ont d'ailleurs payé au prix fort, de leurs vies, des dizaines de milliers d'entre eux tombèrent pour la France durant la Première Guerre mondiale. 
Aujourd'hui, les choses ont bien changé. Les juifs vivent en France pour des raisons pratiques, aimant la culture française mais soutenant au mieux la France... lorsqu'elle joue au football. Il y a trente ans, j'ai pris la décision définitive de faire mon Alyah exactement pour cette raison. Des années plus tard, à la question d'un journaliste de France 2 sur les motivations de mon Alyah, je lui répondis qu'à chaque fois que je me faisais "emmerder" dans le métro, personne ne bougeait, y compris aux heures de pointe... Il est temps de comprendre que les proches des juifs vivant en Israël, les enfants de responsables communautaires et les anciens grands rabbins de France qui y vivent également ne sont pas un simple hasard. Il est temps de faire plus, il est temps de faire mieux. On ne peut pas se contenter d'avoir la larme à l'œil lorsque Macron se rend au Kotel. Le sondage de 2015 de l'IFOP commandité par François Hollande sur la communauté des juifs de France avait déjà révélé que 43% d'entre eux souhaitaient faire leur Alyah  : 200 000 personnes. Ce qui voudrait dire que presque tous les juifs dits communautaires en France penseraient à la Alyah. Comment transformer ce souhait en réalité ?
Pour les jeunes, c'est plus simple et les programmes d'intégration Massa sont là pour cela. Pour les parents, c'est plus dur. Ce sera un des défis du prochain gouvernement israélien et nous feront tout pour que ce souhait devienne réalité, pou permettre à nos frères d'aller vivre "là-bas".
Le n° 1584 d'Actualité juive (21 janvier 2021) a publié un long texte du Grand rabbin de France, membre de l'Institut, Haïm Korsia. Celui-ci a répondu : 
"Je laisse de côté le fait que monsieur Kandel professe forcément un point de vue biaisé, eu égard à son activité professionnelle de responsable de l'association Qualita, un organisme très actif pour aider nos concitoyens à s'intégrer le mieux possible en Israël, car chacun sait les difficultés de langue, d'insertion et d'ancrage sans la si vivante et bouillonnante société israélienne.
Mais je ne peux partager cette vision si amère et la description caricaturale d'une société...
Ceux qui sont morts au front, et ne particulier mon arrière-grand-oncle Abraham Korsia le 22 août 1914 en Belgique, comme des millions de leurs compatriotes, sont morts parce que Français, non parce que Juifs ! Comme il y a plus de 200 ans, les Juifs de Tsarfat, cette si belle occurrence du prophète Abdias, regardent la France comme leur patrie. Et je ne porte pas ceci uniquement parce que j'ai servi dans les armées, mais j'ai consulté les dirigeants de toutes les grandes institutions communautaires sur cette réaction et ils partagent mon point de vue. Notre amour et notre engagement pour Israël sont absolus, et nul n'est besoin de déprécier la France pour aimer plus encore Israël.
C'est le sens de la prière pour la République que nous récitons dans nos synagogues, c'est le sens de l'injonction biblique à ne jamais mépriser l'Egyptien, car, malgré tout, nous avons séjourné en Egypte. J'aime cette idée profondément juive qu'on remercie toujours. Et s'il est toujours concevable, compréhensible et estimable que des membres de la Diaspora aient le projet de s'installer en Israël, sur la terre de nos ancêtres, pour y construire un autre avenir et d'autres espérances, ce projet, que nous aidons en enseignant dans nos synagogues et nos institutions un sionisme et un amour d'Israël aussi sincères qu'inconditionnels, pour être fructueux, ne peut être négatif, c'est-à-dire seulement fondé sur la fuite et la détestation d'un ailleurs. S'installer en Israël est un choix de vie, un choix spirituel, un choix idéologique, un choix libre et positif . Jamais un choix par défaut. Et je sais que les Juifs français qui se sont installés dans le pays où coulent le lait et le miel y ont emmené une partie de l'esprit de la France, de la culture de la France, et qu'ils y reviennent avec tendresse en y conservant toujours des racines fortes.
La France, dans un siècle de mondialisation, est confrontée aux mêmes difficultés et travers que les autres nations ; elle les affronte avec lucidité et, sans qu'il soit question ici de politique, elle porte le souci de la protection de ses citoyens, de tous ses enfants, quelles que soient leurs origines, leur religion ou leur couleur. Les policiers et les militaires devant nos synagogues et nos écoles en sont la parfaite illustration.
La communauté juive de France, certes confrontée à des difficultés spécifiques et victime d'agressions insupportables et tragiquement répétées, est solide, fermement ancrée dans ses valeurs et dans celles de la République, à qui elle a donné et continue de donner de grands serviteurs. Si, depuis le début des années 2000 jusqu'en 2015, nous avons pou souffrir d'une indifférence peut-être plus coupable que tout, les temps ont changé car, enfin, le mal de notre société est nommé. Nous luttons tous, oui, tous, contre l'islamisme radical, celui qui tue en France, et en Israël, ainsi qu'ailleurs dans le monde et nous devons être unis pour affronter cet ennemi commun. Si la communauté juive de France se pose légitimement des questions, comme tous les Français, elle a confiance en son devenir au sein de la Nation, où elle peut affirmer sa spécificité et son talent. Et cet avenir, comme toujours, elle le construira.
J'ai toujours considéré comme un privilège de pouvoir, en ma qualité de grand rabbin de France, l'accompagner dans cette voie".
Le 24 janvier 2021, dans un long post intitulé "Le sens de l'Histoire" sur Facebook, Me Nili Naouri, avocate israélienne à Jérusalem, a fustigé la tribune du Grand rabbin de France Haïm Korsia :
"Décidément, les propos du Grand rabbin de France, le Rabbin Korsia, me scandaliseront toujours. Il a prouvé une fois de plus dans un papier publié sur ActuJ le 21/01 qu’il ne comprend rien ni à la réalité, ni au sens de l’Histoire, ni à la Torah. Et je pèse mes mots !
La réalité est que la France, gangrénée par l’islam qui l’a choisie car cible facile, n’est plus à même d’assurer la sécurité de la communauté juive. C’est une simple constatation objective. La France n’est ni « lucide » ni « courageuse » ! La France pense bien faire en se soumettant à l’électorat musulman beaucoup plus nombreux que l’électorat juif, et qui sait se montrer violent en cas de non satisfaction contrairement aux citoyens juifs qui ont pour règle de toujours respecter les lois du pays qui les accueille. Non seulement la France ne se mobilise pas pour ses juifs assassinés, mais elle relaxe leurs assassins !
Oui, Israël est aussi confronté aux attentats. La différence fondamentale est que la politique appliquée face au terrorisme est aux mains d’un gouvernement juif et que la sécurité est assurée par Tsahal, nos policiers juifs et par les citoyens eux mêmes qui considèrent comme un frère celui qui est en danger et qui sont capables de risquer leur vie pour lui !
Le sens de l’Histoire est que nous vivons le Retour du Peuple juif sur sa Terre ancestrale ! Le Rabbin cite avec fierté ces juifs qui ont donné leur vie pour « leur pays » (lire : « la France »…) durant la 1ere Guerre Mondiale « morts parce que français, non parce que juifs ». Faut-il lui rappeler ces scènes horribles lorsqu’un soldat juif allemand tirait sur un soldat juif français et qu’il l’entendait réciter le shema Israel en agonisant, et inversement ?! Faut-il lui rappeler que durant la Seconde Guerre Mondiale, les juifs de France sont morts parce que juifs, et menés vers les camps de la Mort par les autorités françaises ?!
Les communautés juives à l’extérieur d’Israël ne constituent pas une « Diaspora », comme l’expliquait mon père, Jacques Kupfer ZAL : C’est un Exil auquel il est grand temps de mettre fin. « Liquidez la Galout, ou la Galout vous liquidera » avait déjà prévenu Zeev Jabotinsky à la veille de la Shoah. L’assimilation et le regain terrible d’antisémitisme prouvent que cette phrase est toujours d’actualité.
Que ce ne soit pas évident pour tout un chacun de manière immédiate de faire son Alyah est tout à fait compréhensible. Mais s’installer en Israël n’est pas un « choix de vie » ! C’est comprendre le Destin de la Nation Juive. Ce n’est pas un « choix spirituel » ! Quelle conception chrétienne de notre identité ! Certes, pas étonnant de la part de quelqu’un qui « se sentait chez soi à Notre Dame de Paris »…
Toute notre Torah a pour axe Eretz Israel. Le don de cette Terre a été le sujet de la Promesse faite à nos Patriarches Abraham, Isaac puis Jacob. Le récit biblique relate la sortie de l’exil de l’Egypte jusqu’à l’entrée en Eretz Israël. Nos prophètes ont rapporté le temps de l’Exil après la destruction du Temple mais ils ont rapporté aussi le temps du Retour à la Patrie avec des détails que nous voyons se réaliser chaque jour sous nos yeux. Le Ramban englobe toutes les mitzvot dans la mitzva de s‘implanter en Israël. Ne pas en avoir conscience est une incompréhension totale de notre Foi au mieux, une infamie au pire.
Le Rabbin Korsia affirme que les responsables communautaires partagent son avis. Pourquoi ne suis-je pas surprise ? Les Explorateurs envoyés par Moshe, à la demande du Peuple, sont revenus en affirmant qu’il était impossible de conquérir Eretz Israel. Il s’agissait pourtant de hauts notables, des responsables de chaque Tribu. Le problème est, d’après nos commentateurs, qu’ils craignaient perdre leur statut de chef de tribu une fois en Israël. Il est temps que la Communauté juive de France ouvre les yeux : si aujourd’hui, les rabbins et responsables communautaires n’encouragent pas, dans leur majorité (D merci il y a des exceptions) à quitter l’Exil c’est qu’ils veulent garder leur titre de président, de vice-président, de rabbin de la communauté x ou y etc… ; c’est qu’ils craignent que leurs ouailles quittent le navire et qu’ils se retrouvent seuls ; c’est qu’ils craignent, s’ils font leur Alyah, de perdre leur titre !
Ces responsables feraient bien de lire l’œuvre « Em Habanim Semeh’a » du Rav Teichtal, rav antisioniste d’avant-guerre, qu’il avait rédigée dans une cage d’escaliers se cachant des nazis, et dans laquelle il se repent ouvrant les yeux sur le destin de la Galout, se rallie à la cause sioniste, émettant une critique virulente contre les rabbins qui avaient exhorté leurs fidèles à ne pas quitter leur pays de résidence pour Israël alors qu’ils auraient pu être sauvés s’ils l’avaient fait.
Contrairement à ce que pense le Rabbin Korsia, je suis intimement persuadée que la communauté juive ne croit plus en son Avenir en France car elle est lucide !
Juifs de France, je sais que quitter la vie que vous avez construite, votre carrière professionnelle, votre environnement social, vos habitudes, vos facilités n’est pas chose aisée. Il faut s’y préparer. Je sais que tourner la page de la France et en recommencer une nouvelle en Israël n’est pas chose facile et peut effrayer. Mais ce sera une page exaltante et qui vous inscrira dans le sens de l’Histoire juive qui aujourd’hui s’écrit en Israël." 
Le 29 janvier 2021, Tribune juive a publié la réponse de Mikael Journo, rabbin de la communauté de Chasseloup-Laubat à Paris (75015), aumônier général israélite des Hôpitaux de France, secrétaire général de l'association des Rabbins français, conseiller auprès du Grand rabbin de Paris, au Grand rabbin de France Haïm Korsia : 
"Cher Haïm Korsia, Cher Monsieur le Grand Rabbin de France,
Dans l’hebdomadaire Actualité juive daté du 21 janvier, vous ouvrez un débat fondamental sur la place des Juifs en France et leur rapport à Israël. Où sont-ils chez eux ? Doivent-ils choisir entre ces deux pays ? Pour quelles raisons l’Alyah est-elle justifiée ? Pour lesquelles ne l’est-elle pas ?
Vous mettez en garde contre une “Alyah par défaut“, qui ne résulterait pas d’une adhésion à un projet spirituel ni même à un “choix idéologique”, mais qui serait fondée sur le rejet du pays que l’on quitte.
J’aimerais, en tant que Rabbin d’une communauté parisienne, Chasseloup-Laubat, vous rappeler la grande détresse que vivent nombre de membres de nos communautés et qui justifie de ne pas porter de jugement sur ceux inquiets de leur condition de Juif en France.
Reprenons vos propres arguments de ces “difficultés spécifiques” : Ces “agressions insupportables et tragiquement répétées” que subit la communauté juive en ce début du XXIe siècle et “aggravées depuis le début des années 2000 jusqu’en 2015” et qui ont mis en évidence cette “indifférence peut-être plus coupable que tout“.
Peut-on porter un jugement sur ceux qui pensent pouvoir plus facilement accomplir leur judaïsme en Israël ? Ceux qui partent pour pouvoir porter la kippa dans la rue, respecter le  shabbat sans difficultés, offrir une éducation à leurs enfants sans se sentir en danger ?
Qu’il s’agisse de l’antisémitisme, de la pratique des Mitzvots, ou de toute autre raison, il est de notre responsabilité, en tant que dirigeants religieux, de ne pas accabler ceux qui décident de partir et de les accompagner, quelles que soient leurs raisons. 
Dans cette tribune, vous réaffirmez aussi votre appartenance au “franco-judaïsme“, ce courant qui mêle patriotisme français et fidélité religieuse qui fut la doctrine officielle du Consistoire jusqu’en 1940. Vous rappelez à juste titre que le patriotisme des Juifs français ne repose pas seulement sur la Révolution française, mais sur un enracinement exceptionnel.
Nous sommes d’accord pour rappeler que les Juifs font partie intégrante de la Gaule puis de la France depuis deux mille ans. Ils ont servi Julien II, empereur romain, à Lutèce, les rois mérovingiens dans leurs palais de Neustrie et d’Austrasie. Charlemagne les respectait tout particulièrement et envoya un ambassadeur juif à Bagdad. Rashi, les Tosafistes, les sages de Provence, étaient français au point de gloser parfois la Torah dans le langage du pays. Cerf-Berr n’a pas attendu 1789 pour équiper les armées de Louis XV et de Louis XVI. Et en 1940, au moment-même où le piège de Vichy se refermait sur le “franco-judaïsme”, les “Israélites” auto-émancipés redevenus Juifs étaient au premier plan de la France libre et des maquis.
Or, et cela fait aussi partie de notre histoire, le maréchal Pétain a aussi livré aux nazis les soldats et officiers juifs qui avaient servi la France sous ses ordres à Verdun. La Shoah a structurellement refondé ce rapport : pour nombre de Juifs français dont je suis, la collaboration est une tâche indélébile, une preuve de la faillite et de l’abandon de l’Etat.
Depuis cette époque, la plupart de nos coreligionnaires se méfient de ce “franco-judaïsme” qui a mené une telle tragédie notamment en cessant de se qualifier d’ “Israélites”, et en reprenant au contraire le terme franc de “Juifs”. Ils ont renversé la charge de la preuve.
Israël est inscrit dans l’histoire de tous les Juifs du monde qui peuvent y trouver refuge à tout moment. Pour résumer, certes “Sans les Juifs, la France ne serait pas elle-même“, comme l’ont dit un Premier ministre et un Président de la République au cours des dernières années. De même, sans l’horizon d’Israël et l’accompagnement des dirigeants communautaires dans leurs démarches, s’ils le souhaitent, les Juifs ne seraient pas eux-mêmes.
Je vous prie de recevoir, cher Haïm Korsia, cher Monsieur le Grand Rabbin de France, l’expression de mes salutations respectueuses.
Mikael Journo"
Le 29 janvier 2021, sous le titre "Haim Korsia-Mikaël Journo : la controverse (2)", Tribune juive publiait ce texte rédigé en écriture inclusive par Paul Levy, Président du Consistoire régional du Centre Ouest, historien et éditeur :
"Cher.e.s Ami.e.s
Le texte publié par le rabbin Mickaël Journo répondant à la tribune du grand rabbin de France, Haïm Korsia, démontre, de toute évidence, une lecture superficielle, voire tendancieuse, du texte qu’il incrimine.
Son auteur a voulu instrumentaliser les trois principales préoccupations des Juifs français en les sortant de leur contexte historique et politique, lorsqu’il aborde l’antisémitisme, la France sous Vichy et l’Alyah en Israël.
Si son regard avait été quelque peu averti, il aurait pu constater que l’antisémitisme qui sévit en France reste essentiellement le fait de l’islamisme radical qui a frappé aussi bien les enfants de Toulouse, les clients de l’Hypercacher que les journalistes de Charly-Hebdo et les spectateurs du Bataclan. Toute la société française, voire européenne, est touchée par ce fléau. Ces attentats ne sont pas la conséquence de l’antisémitisme traditionnel de l’extrême droite. Il s’agit avant tout du rejet des principes républicains et de la volonté de créer un particularisme islamiste.
Cependant, les gouvernements français tiennent compte de la spécificité des attaques antijuives en protégeant nos écoles, nos synagogues et nos institutions. La création d’une délégation interministérielle de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, la DILCRAH en liaison avec le Bureau de vigilance, le BNVCA, permet d’inventorier les agressions antisémites et de poursuivre leurs auteurs. Enfin, la loi sur les séparatismes, actuellement débattue, va tenter de limiter les atteintes islamistes aux valeurs et aux principes de notre société.
Autre confusion qui est sans doute due à sa méconnaissance de la réalité historique, lorsque le rabbin Mickaël Journo évoque le rôle de Vichy. Fait indéniable, le gouvernement de Vichy a collaboré avec l’Occupant. Cependant, dans son remarquable discours du 16 juillet 1995, le président Jacques Chirac nous a rappelé que la : « France, une certaine idée de la France, droite, généreuse, fidèle à ses traditions, à son génie. Cette France n’a jamais été à Vichy ». La France que nous aimons et pour laquelle nous avons combattu se trouvait à Londres et dans la Résistance intérieure. Après les déportations les plus importantes de l’été 1942, le pasteur Boegner de l’Eglise Réformée, Mgr Saliège, archevêque de Toulouse, Mgr Théas, évêque de Montauban et bien d’autres forces spirituelles et politiques se sont dressées contre les persécutions antijuives, menées par Vichy et les Nazis.
Grâce à leurs actions de sauvetage, c’est en France que nous trouvons le plus grand nombre de Justes de l’Europe occidentale. Deux tiers des Juifs qui vivaient en France ont été sauvés grâce au courage, « au péril de leur vie », de ces hommes et de ces femmes. Contrairement aux Pays-Bas où hélas, les 75 % de la population juive a disparu.
Autre question instrumentalisée par le rabbin Mickaël Journo, car il sait, combien elle nous est chère, à nous Juifs de France ! En dramatisant volontairement la situation des Juifs français, mêlant confusément évènements récents et histoire passée, il a voulu nous faire croire que le grand rabbin Haïm Korsia nous mettait en garde contre l’Alyah. Bien au contraire, si sa lecture avait été un peu plus attentive, il aurait pu lire ces lignes écrites par le grand rabbin qui soulignait l’importance de l’Alyah : « ce projet que nous aidons en enseignant dans nos synagogues et dans nos institutions un sionisme et un amour d’Israël ». De même lorsqu’il évoque une Alyah consciente : « un choix de vie, un choix spirituel, un choix idéologique, un choix libre et positif ».
Autrement dit, Cher.e.s Ami.e.s, je trouve excellent le texte du Grand Rabbin de France, qui répond clairement à nos interrogations de Juifs français. Quant au texte du rabbin Mickaël Journo, en y introduisant des confusions, que je n’ose croire volontaires, il crée des divisions entre nous, Juifs de France, au lieu de nous réunir. Ne serait-ce pas le rôle d’un rabbin que de rassembler ?"
Curieusement, cet éditeur écrit de manière erronée le titre "Charlie hebdo" et qualifie les Français juifs de "Juifs de France". Une question se pose : l'unité devrait-elle s'établir dans le suivisme silencieux ou thuriféraire envers le Grand rabbin de France Haïm Korsia ? Que serait le Judaïsme sans questionnements ?

Selon Makor Rishon (31 janvier 2021), important journal israélien créé en 1997, rappelle avec ironie que le Grand rabbin de France Haïm Korsia, qui reproche à Ariel Kandel sa partialité, reçoit son salaire de l'Etat, que les forces de l'ordre ne protègent plus visiblement les synagogues, et que le rabbin Mikael Journo souligne que, sans le soutien de l'Etat d'Israël aux Français juifs, "leur situation ne serait pas la même". Il souligne que le Grand rabbin de France Haïm Korsia "souhaite continuer à occuper ses fonctions et a envoyé son texte aux 330 « électeurs » votant à l'élection du Grand rabbinat, et que le rabbin Mikael Journo songerait à se présenter à cette élection.

Pour Dov Maimon, responsable pour l'Europe du Jewish People Policy Institute, le Grand rabbin de France proposerait "d'aimer Israël à distance, littérairement aliéné de lui. Il est tombé amoureux de sa galout [exil].”

Le 7 février 2021, Tribune juive a publié le texte "A Monsieur le Grand-Rabbin de France par Michel Gurfinkiel", éditorialiste, essayiste et signant cette lettre en avançant ses fonctions consistoriales : administrateur du Consistoire Central et administrateur du Consistoire de Paris
"Monsieur le Grand-Rabbin de France,
Le 25 janvier dernier, vous avez adressé par courriel un « Message » à divers Grand-Rabbins et Rabbins, à des Présidentes et Présidents de Communauté, et à d’autres personnes – notamment, je le suppose, des membres du Conseil du Consistoire Central -, que vous qualifiez plus simplement de « Chers Amis ».
Un « Message du Grand-Rabbin de France », acheminé sous le sceau du Consistoire Central, c’est a priori quelque chose de rare et donc de solennel. En tout cas, le simple membre du Conseil du Consistoire Central et Ami que je suis n’en a pas souvent reçu (exception faite des déclarations ou communiqués cosignés avec le président du Consistoire Central).
Je m’attendais donc à un texte particulièrement important dans l’ordre thoranique ou halakhique. Lorsque j’ai ouvert votre « Message », je n’ai rien trouvé de tel, hélas, mais menue polémique.
M. Ariel Kandel, le directeur de l’organisation francophone israélienne Studio Qualita, venait de publier une opinion sur l’aliyah des juifs français dans le journal Actualité juive. Vous en désapprouviez la teneur, ce qui est votre droit. Vous aviez fait parvenir votre propre opinion, fort différente, au même journal, ce qui peut ou ne peut pas être votre droit : car le Grand-Rabbin de France a tout de même un rang à tenir, bien au dessus d’un duel d’ op-ed. Mais ce qui est plus discutable encore, c’est que vous ayez ensuite diffusé votre texte de façon officielle, ex cathedra, par le biais de votre secrétariat. En affirmant que « beaucoup d’entre nous » partageaient votre « stupéfaction » devant le billet de M. Kandel.
M. Kandel dit assurément des choses dures sur la France, ou sur son déclin. Mais est-ce interdit à un Israélien d’origine française ? Et est-il interdit à un juif français de 2021 de partager un tel diagnostic, partiellement ou entièrement ? Au nom de quelle police de la pensée, de quel « politiquement correct » parfaitement étranger – pour le coup – aux traditions profondes de ce pays ? Tout le monde en France s’interroge actuellement sur la France, sans concession ni ménagement, de même que tout le monde en Amérique redoute ou constate un déclin américain. Pourquoi les juifs n’auraient-ils pas le droit de prendre part à de tels débats ?
M. Kandel observe que la condition juive en France, qui n’a jamais été parfaite, semble se détériorer. Là encore, consultez les médias, personne (parmi les observateurs de bonne foi) ne le nie plus : ni juif, ni gentil.
Enfin, M. Kandel conclut en donnant raison aux juifs français, nombreux, qui ont fait leur aliyah, et à ceux, non moins nombreux, qui envisagent de la faire. Il n’est pas seulement dans son rôle professionnel, comme vous le notez cavalièrement. Il est dans la droite ligne de tous ses engagements personnels puis qu’il avait fait lui-même fait ce choix dans sa jeunesse.
Je veux bien admettre que votre ardent patriotisme ait été froissé. Mais – la chose est assez étrange – vous souscrivez en fait à la plupart des propos que vous prétendez réprouver. Vous parlez longuement des réussites morales et matérielles du sionisme, de « l’amour absolu » des juifs pour Israël. Et vous énumérez tout aussi longuement les raisons que les juifs français ont eu, depuis l’an 2000, de douter de leur avenir. S’il fallait procéder à une analyse statistique de votre texte, les phrases ou paragraphes qui confirment M. Kandel l’emporteraient sur ceux qui l’infirment.
Dès lors, où voulez-vous en venir ? Pourquoi accabler un interlocuteur dont vous n’êtes pas si loin ? Que reprochez-vous réellement à M. Kandel ? Peut-être de ne pas souscrire à un narratif qui vous est cher, et qui, de l’an II à l’an Quarante, fut en effet cher à tous les Israélites français : celui d’une fusion entre le Décalogue et les Droit de l’Homme, d’un amalgame entre le messianisme biblique et le messianisme républicain, d’une assimilation qui serait en même temps une fidélité. Je suppose que ce ne sont pas seulement les grâces vintage de ce narratif qui comptent pour vous, mais que vous y voyez aussi un modèle qui pourrait, dans une France du XXIe siècle, être repris par d’autres communautés et contribuer à apaiser de graves tensions. Il est fort possible que vous en parliez autour de vous – à l’Institut, par exemple – et qu’on vous écoute attentivement.
Malheureusement, comme le suggère M. Kandel (et comme, en définitive, vous en convenez aussi) ce narratif ou ce modèle n’a pas apporté, en son temps, tout ce qu’on attendait de lui. Il n’a empêché ni l’affaire Dreyfus, ni les lois de Vichy. De telle sorte que la grande majorité des juifs français lui préfèrent aujourd’hui un narratif plus large, où s’inscrit également le sionisme. C’est peut-être contre-intuitif, mais c’est ainsi : « Dieu écrit droit sur des lignes courbes », disait Paul Claudel. Les juifs français ont découvert qu’ils étaient plus pleinement français, et plus profondément respectés par leurs concitoyens, depuis la restauration d’un Etat juif en Terre Sainte.
Vous attachez beaucoup d’importance à la chose militaire, à juste titre. Les juifs français ont été de bons et de grands soldats français tout au long des XIXe et XXe siècle ; et ce sont des ingénieurs juifs qui, souvent, ont forgé les meilleures des armes françaises, notamment dans l’aviation et la marine. Mais on a longtemps persisté, ce nonobstant, à douter de leurs capacités guerrières ou de leur loyauté. C’est la saga de Tsahal, à partir de 1948, qui a rendu son plein honneur sur ce plan, ou son plein prestige, au peuple juif tout entier et aux juifs français en particulier.
De même, vous le savez ou devriez le savoir, les efforts du Rabbinat dit concordataire, ou post-concordataire, n’ont pu empêcher, jusqu’aux années 1950, un dépérissement du judaïsme en tant que religion. C’est Israël, à travers la résurrection de l’hébreu et le retour à l’Etude, qui nous a rendus à notre foi. Et qui a accru notre légitimité, notre éclat, parmi les familles spirituelles françaises.
Je suis sûr, Monsieur le Grand-Rabbin de France, que vous voudrez remonter de l’arène où vous n’auriez pas du descendre, et employer vos talents, qui sont grands, à la défense et illustration du judaïsme traditionnel de notre pays et de Klal-Israël. Il vous faudra aussi, à cette fin, empêcher tels ou tels de vos amis de mal vous défendre en attaquant urbi et orbi le rabbin Mickaël Journo, qui a voulu s’exprimer à sa manière sur l’affaire Kandel. Sans quoi vous n’empêcherez pas nombre de juifs français d’attribuer d’autres motivations, infiniment plus prosaïques, à votre indignation et à la leur. Ce qui n’est pas ni ne saurait être.
Veuillez agréer, Monsieur le Grand-Rabbin de France, et cher Ami, l’assurance de mon profond respect.
Administrateur du Consistoire Central
Administrateur du Consistoire de Paris"
Ce débat public montre que l'antisémitisme en France et le devenir des Français juifs - en France, en Israël, voire ailleurs ? - se trouvent déjà placés au centre de cette élection. Et que, débutée dans un hebdomadaire communautaire, cette controverse s'est close par un média électronique.

Le discours du Grand rabbin de France Haïm Korsia s'avère classique, régulièrement réitéré par lui, mais déconnecté de la réalité : une France qui a supprimé le service militaire et rogné sur ses dépenses militaires face à un djihad mondial, a accepté de croissants abandons de sa souveraineté nationale au profit de l'Union européenne, est dirigée par des politiciens médiocres ainsi que par une alliance entre le "gouvernement des juges" et le quatrième pouvoir (médias) "politiquement corrects", ne sait/peut/veut enrayer ses déclins - économiques, moraux, éducatifs, etc. - et assimiler des immigrants, principalement musulmans - une partie d'entre eux refusent l'assimilation, etc. Et durant la Première Guerre mondiale, ces "Fous de la République" ont eu à cœur de prouver aussi que, contrairement aux stéréotypes antisémites, ils n'étaient pas couards ou traîtres, mais de courageux et fervents patriotes. 

Interrogé par Actualité juive (n° 1593, 25 mars 2021), Alexis Blum, ancien rabbin de la synagogue de la rue Ancelle, à Neuilly (banlieue huppée située à l'ouest de Paris) qui a fait son aliyah, a qualifié le grand rabbin Haïm Korsia, de dernier des "patriotes républicains". "Pas la peine de creuser, il n'aime pas les conflits. On ne sait jamais s'il est ironique", commente la journaliste Eve Boccara. Alexis Blum a aussi déclaré : "En Israël, vivent nos trois enfants et nos douze petits-enfants, nous pourrons les voir grandir. Et puis, on trouve aujourd'hui plus de rabbins français en Israël qu'en France". 

Haïm Korsia a éludé les questions fondamentales soulevées par Ariel Kandel, en particulier les faiblesses de la France dans la lutte contre l'antisémitisme, la peur de nombreux coreligionnaires face à cette violence antisémite non jugulée, la décision de nombreux dirigeants communautaires français, dont les grands rabbins de France René-Samuel Sirat et Gilles Bernheim, de faire leur alyah ou d'acheter des appartements en Israël... Des centaines de milliers de Juifs ont été contraints de quitter leur pays d'origine, des Etats musulmans, pour faire leur aliyah, car l'Etat d'Israël était l'un des rares, voire le seul, à les accueillir. Et je connais peu de Juifs français ayant fait leur aliyah qui reviennent en France ou parlent de ce pays "avec tendresse".

Dans deux articles du journaliste Cnaan Liphshiz, JTA et The Jerusalem Post m'ont citée, en particulier sur mes remarques concernant la distance entre des dirigeants communautaires français juifs, préservés de la violence antisémite, émanant généralement de musulmans, et leurs coreligionnaires/concitoyens lambdas. Des dirigeants souvent perçus plus comme des porte-paroles du pouvoir politique auprès de leurs coreligionnaires, que l'inverse. L'effet d'une vingtaine d'années d'agressions anti-juives.

En 2018, le devenir des Français juifs avait déjà été abordé par un rabbin et un président d'une communauté juive parisienne consistoriale proche de la Grande synagogue de la rue des Victoires. Et en termes directs. Preuve que cette question existentielle taraude nombre de Français juifs déstabilisés et inquiets par les mutations de leur pays.

Dans le calendrier israélite 2018-2019 de la synagogue consistoriale Berith Chalom, le regretté Salomon Malka, alors son rabbin, avait écrit : 
"L'Europe n'a pas de mémoire. Elle a vécu l'impensable et puis la guerre finie, elle a juré "plus jamais cela". Elle croit se rattraper par une politique conciliatrice avec les migrants et continue à se laisser ronger par un antisémitisme qui ne se cache plus. Les juifs réfléchissent sur leur devenir et sont plus nombreux à opter pour d'autres destinations plus clémentes. Quelque part nous faisons partie de ces biscornus qui par paresse et parfois par inconscience pensons à des lendemains meilleurs parce que le pouvoir en place offre une parole agréable sans aucune garantie sur le futur. Il reste Kippour et son lot d'espoir. Les sages pourtant avertissent que la partie est loin d'être gagnée. La prière n'est qu'un palliatif". 
Le calendrier israélite 2019-2020 de la synagogue Berith Chalom s'ouvrait sur un texte de Sam Attia, président de cette synagogue : 
"Les actes antisémites qui se sont produits ces dernières années ne trouvent pas la qualification exacte qui s'impose. Y-a-t-il une volonté de la part de la justice de taire cette évidence, ou bien est-ce nous qui semblons être frappés de paranoïa ?
Les faits sont bien là. La population juive se replie sur elle-même dans les quartiers les plus sûrs de la capitale pour échapper à une communauté hostile. Devrons-nous éternellement vivre dans la crainte ? Devrons-nous déployer plus de moyens pour simplement protéger nos enfants durant leur trajet qui les mènent au collègue ou au lycée ? L'antisémitisme est-il si difficile à combattre en France ou y-a-t-il une incapacité à le faire ? Beaucoup de questions qui attendent des réponses. Les instances communautaires, certains intellectuels et certains hommes politiques font tout leur possible pour lutter contre ce fléau.
Pour l'instant il ne nous reste qu'à compter sur nous-même et faire preuve d'une extrême vigilance en attendant un climat meilleur".
Le regretté rabbin Salomon Malka avait déploré :
"On conteste le droit à la Mila parce qu'on prétexte défendre le droit de l'enfant. On nie le droit à la Cacherout parce qu'on croit protéger le droit de l'animal. Bientôt on n'aura pas le droit au repos du Chabbat parce qu'on se distinguerait des autres donc danger dans la demeure. On oublie l'entourloupe du port de la kippa, affaire classée parce que désignée signe ostentatoire, et la double nationalité, problème prétendu de non respect et infidélité. Pour le moment à cause probablement d'autres urgences, comme les contestations étudiantes et surtout les manifestations hebdomadaires engendrant des casseurs de tous bords, on laisse tous ces interdits futurs en suspens. 
Cette année a été marquée par la recrudescence des actes antisémites et leurs banalisations. Bien que les pouvoirs publics et à leur sommet le Chef de l'Etat ont condamné fermement ces abominations, il paraît difficile de trouver les moyens efficaces pour les annihiler. Il y a une sorte de démission au nom de la sacro-sainte devise de la démocratie qui autorise la libre opinion et le droit d'expression. La seule alternative de notre communauté se focalise à sa migration vers des frontières plus clémentes, notamment en Israël.
Lorsque l'année 5780 est annoncée, l'être se met à espérer que les coups reçus devront cesser pour laisser place à un meilleur comportement. On croit au pouvoir de changement des femmes et des hommes raisonnables. Mais faut-il au moins reconnaître les blessures commises pour les empêcher de se reproduire. Faisons confiance à notre optimisme cette année encore même s'il n'a plus l'intensité des décennies antérieures. Le rapport avec D. étant constant, l'année nouvelle garante et ses promesses sont une évidence céleste".
Décédé du coronavirus Covid-19 au printemps 2020, le rabbin Salomon Malka a été enterré en Israël.


[2] https://twitter.com/lbrdsv
[3] https://www.youtube.com/channel/UCzMSpOAqopy_Z3LxQ-644lg/videos
[4] https://www.youtube.com/watch?v=mLPDnj7EjWU
[5] https://twitter.com/OlivierKaufmann
[6] https://www.youtube.com/watch?v=CLL_BikQcJE
[7] https://www.youtube.com/watch?v=cKLxtC0e9HY
[8] https://www.youtube.com/watch?v=zbcfI4NgNUs
[9] https://www.facebook.com/pages/Haim-Korsia-Grand-Rabbin-de-France/525538530889561
[10] https://twitter.com/HaimKorsia
[11] https://www.youtube.com/watch?v=JJGl3l6ThfQ
[12] https://www.youtube.com/watch?v=Ba8dpglKAoo
[13] http://rabbinmalka.free.fr/MeyerMALKA/appel-du-18-juin-2014.html
[14] https://www.facebook.com/profile.php?id=100008305621192&fref=ts
[15] https://www.facebook.com/events/1503511629879818/
[16] https://twitter.com/RabbinSenior
[17] https://www.youtube.com/watch?v=qTWYQCPXcAY
[18] http://rabbinsenior.over-blog.com/
[19] https://www.facebook.com/ravshoushanacgrf?fref=ts
[20] https://www.youtube.com/watch?v=vFtqb0CAZvY

Sources du tableau synoptique des soutiens des deux candidats au 6 juin 2008 : http://www.jackyvesbohbot.fr/mon_weblog/2008/05/le-net-sinvite.html et http://electionsrabbiniques.blogspot.com)
  

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Cet article a été commandé en 2008, mais non publié, par L'Arche.
Il a été republié le 5 juin 2013 à l'approche de mon interview par Radio Chalom Nitsan le 6 juin 2013 vers 13 h 30-13 h 40. J'y ai évoqué notamment le scandale lié aux plagiats du Grand Rabbin Gilles Bernheim, le diner du CRIF en 2013 et j'ai rendu un bref hommage à Elie Szapiro (1939-2013).
Il a été actualisé le 7 février 2021.