jeudi 3 juin 2021

« Mein Kampf » par Adolf Hitler


Mein Kampf est un best-seller dès sa publication en Allemagne, en 1925, durant la République de Weimar. Un livre antisémite où Hitler annonçait sa diplomatie belliqueuse – guerre contre la France et l’Union soviétique, annexion de l’Autriche - et la politique qu’il mènera (1933-1945) : régime totalitaire, eugénisme, lois raciales, destruction des Juifs. Le 1er janvier 2016, Mein Kampf est entré dans le domaine public. De son enquête sur l’histoire de Mein Kampf (Mon combat) d’Adolf Hitler, Antoine Vitkine a tiré un essai passionnant Mein Kampf, histoire d’un livre (2009) et un documentaire remarquable Mein Kampf, c’était écrit (2008). Le 2 juin 2021, Fayard a publié une nouvelle traduction de ce livre sous le titre " "Historiciser le mal, une édition critique de "Mein Kampf", assorti de notes et de textes critiques l'éclairant et vendu par commande.

« Descendants de nazis. L’héritage infernal » de Marie-Pierre Raimbault et Michael Grynszpan 

C’est une enquête passionnante, et inédite pour sa partie postérieure à 1945, que nous livre Antoine Vitkine, journaliste et réalisateur de documentaires, notamment de « Ronald Reagan, l'enfance d'un chef » (2009).

De son documentaire passionnant Mein Kampf, c’était écrit, Antoine Vitkine a tiré son essai Mein Kamf, histoire d’un livre dans lequel il retrace la naissance en 1924, le succès planétaire et à ce jour et le destin de ce pamphlet allemand antisémite appelant à la destruction des Juifs. 

Un but mis en œuvre par le IIIe Reich du führer Hitler lors de la Shoah.

Un best-seller de la haine antisémite
Le documentariste retrace la trajectoire méconnue du livre écrit en 1924 par Hitler, « le chef d’un parti ultranationaliste et raciste, adepte de la violence, tribun populiste », et une équipe hétéroclite dans la cellule de la prison de Landsberg, petite ville de Bavière, après la tentative ratée de putsch de la Brasserie ou putsch de Munich (8 novembre 1923) contre la jeune démocratie allemande. Un livre publié par Eher-Verlag.

Exsudant l’obsession haineuse des Juifs, ce livre politique à l’idéologie radicale, « une conspiration en plein jour » (Alexandre Koyré), rend millionnaire Hitler et le consacre comme führer d’un parti nationaliste raciste.

Son succès – environ 290 000 exemplaires vendus dès avant 1933 année de l’avènement du nazisme en Allemagne - est lié aux difficultés politiques et économiques de l’Allemagne de Weimar, dans une population choquée par la défaite militaire en 1918. Hitler « formule un vrai projet politique dément... Il appelle à la destruction des Juifs » rendus responsables de tous les échecs de l'Allemagne et des siens.

Si des intellectuels manifestent une rare clairvoyance, des églises, partis politiques et syndicats privilégient des lectures ciblées, sans vue d’ensemble, s’en désintéressent, le sous-estiment ou se perdent en spéculations : Hitler fera-t-il ce qu’il a écrit ?

De 1925 à 1945, Mein Kampf est diffusé à 12,45 millions d’exemplaires en Allemagne, soit un foyer sur deux - remis aux jeunes mariés par les mairies, son achat conseillé aux bibliothèques publiques et aux fonctionnaires, cité dans les manuels scolaires, distribué par les usines Krupp aux bons ouvriers - et à des centaines de milliers dans une vingtaine de pays, dont ceux du monde musulman. Et traduit en 16 langues.

« Le film explique bien qu'il a été plus lu qu'on ne le pensait jusqu'à maintenant. Il permet de distinguer entre lire et comprendre d'une part, et entre comprendre et être capable de prévoir ce qu'il allait se passer d'autre part », déclare Antoine Vitkine en avril 2008. Et de montrer un film de propagande, des annonces publicitaires promouvant ce livre édité aussi en... braille pour une diffusion la plus large possible.

Les passages sur la politique étrangère sont censurés par l’éditeur munichois négociant les traductions, dont celles en français (1934) et en arabe (1934).

Dès 1934, Fernand Sorlot, un éditeur farouchement anti-allemand et proche de l'extrême droite maurrassienne, publie une première traduction sans en avoir les droits », par les Nouvelles éditions latines. Son but : « alerter l'opinion française sur les visées revanchardes du nouveau chancelier allemand (son antisémitisme virulent ne suscitant, lui, aucun émoi particulier). Aussitôt, Hitler attaque l'éditeur pour violation du droit d'auteur et gagne son procès. Derrière cette bataille juridique se cache une réalité politique et militaire : l'Allemagne n'est pas encore prête à faire la guerre et il ne faut pas dresser trop tôt les Français contre elle. 

L'entreprise de séduction se poursuivra avec la publication, à la fin des années 1930, d'un "faux" Mein Kampf prônant la paix et totalement expurgé des passages antifrançais. Lorsque les véritables intentions d'Hitler se révéleront, en 1939, il sera trop tard ». 

Après les accords de Munich (30 septembre 1938), à l’initiative des milieux nazis français, Fayard édite une version sans les passages hostile aux Français dans une version intitulée Ma doctrine. La LICA (Ligue internationale contre l’antisémitisme) diffuse 5 000 exemplaires de Mon Combat, donc dans sa version intégrale (700 pages), notamment auprès des parlementaires français. Un livre inscrit sur la première liste Otto des ouvrages interdits à la vente.

Parmi les lecteurs de la version intégrale en anglais commercialisée en 1939 : Roosevelt, Staline, Churchill, Charles de Gaulle, Eugenio Pacelli, futur pape Pie XII, et David Ben Gourion.

Mein Kampf est évoqué dans la propagande des Alliés en faveur de l’effort de guerre, et présenté comme preuve à charge contre les Nazis par le tribunal de Nuremberg (1945-1946).

Le livre d’Antoine Vitkine est parcouru par deux questions : Mein Kampf aurait-il pu – dû – prévenir le monde de la menace qu’Hitler faisait courir à l’humanité ? Les idées du livre sont-elles encore vivantes ?

Mein Kampf, histoire d’un livre montre le rôle de cet ouvrage dans l’accès au pouvoir d’Hitler, pourquoi tout son programme annoncé n’a pas constitué l’avertissement empêchant toute l’horreur à venir, pourquoi Hitler a tenté de dissimuler son livre et fait publier un faux en France.

Antoine Vitkine en tire sept conclusions : ne pas « sous-estimer les projets politiques fanatiques et violents » ; ne pas voir la réalité contemporaine au travers du prisme des années 1930 ; l’inaction des autorités politiques ne tient pas à la méconnaissance du livre, mais au manque de volonté ; le nazisme a utilisé les failles et faiblesses de la démocratie ; ce livre est le « trait d’union entre Auschwitz et l’antisémitisme européen ». Mein Kampf nie la démocratie, les libertés et principes fondamentaux, et mieux vaut le décoder que l’interdire car il « contient en lui son antidote ».

Diffusion internationale
L’enquête d’Antoine Vitkine mène du Paris d’avant-guerre aux librairies turques modernes, via les milieux néo-nazis.  

Mein Kampf se vend dans le monde, notamment en France (jugement en 1979 imposant d’inclure un texte avertissant des crimes commis au nom du livre) et au Japon sous la forme d’un manga Waga Toso par East Press (2009), avec des résonances différentes (Inde), et est consultable sur Internet. En mars 2012, il a été publié pour la première fois en albanais par la maison d'édition Belina H, en « avertissement pour les générations futures, pour que de telles folies ne se répètent plus »A noter : ce pamphlet aurait été distribué en Corée du Nord à l'initiative du dictateur Kim Jong-un. 

Dédicacé par Hitler à Georg Maurer, un exemplaire d’une des premières éditions (1925) de Mein Kampf a été vendu, le 13 août 2009, à Ludlow, dans l'ouest de l'Angleterre, pour 21 000 livres (24 000 euros).

Mein Kampf a été en vente en 2013 à la Maison de la presse de Berck-sur-mer (Pas-de-Calais). Celle-ci a cessé de le vendre le 27 juin 2013 en raison de la campagne menée notamment par la Ligue des droits de l'homme.  

En août 2013, Facebook a listé Mein Kampf à un Internaute du Territoire de Belfort parmi les livres suggérés lors d'une recherche sur Philippe Kerr. Facebook a décidé de retirer ce livre de ses recommandations.

Selon Vocativ, ce livre remporterait un succès dans sa version e-book, sur Amazon et sur iTunes (12e et 15e rang). Selon une étude publiée en janvier 2014, les deux facteurs explicatifs de ce succès sont "la crise économique et le goût de l'interdit".

Le 27 février 2014, deux exemplaires de Mein Kampf, signés par l’auteur, dédicacés en 1925 et 1926 à Josef Bauer, qui avait participé à la tentative de putsch à Munich (1923) et estimés 25 000 dollars, ont été vendus  pour environ 65 000 dollars par la maison d’enchères Nate D. Sanders Auctions à Los Angeles (Etats-Unis).

Après l’indignation  du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) et du BNVCA  à la mi-avril 2014, et à l’initiative d’Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, et du Conseil des ventes volontaires (CVV), « établissement d’utilité publique créé en 2000, autorité de régulation du secteur des ventes publiques veillant au respect de la réglementation et doté d’un pouvoir disciplinaire sur les opérateurs  », la vente prévue le 26 avril 2014 à Paris d’une quarantaine d’objets nazis, dont certains revêtus de la croix gammée, ayant appartenu à Hitler et Goering avait été annulée

La maison d’enchères Pierre Bergé & associés  avait prévu de mettre en vente, le 16 mai 2014, à la salle Drouot, un exemplaire de Mein Kampf  daté de 1925, illustré par un portrait d’Hitler, appartenant à la collection de Philippe Zoummeroff, industriel retraité, et estimé entre 3 000 euros et 4 000 euros. 

Le 6 mai 2014, le BNVCA (Bureau national de vigilance contre l'antisémitisme) avait exhorté cette maison d’enchères à retirer cet exemplaire présenté dans le catalogue « comme s'il s'agissait d'un objet d'art, écrit par un poète ou un membre de l'Académie française », alors qu'« Hitler est avant tout un criminel contre l'humanité, un assassin ». 

Le 7 mai 2014, ce collectionneur et la maison d’enchères Pierre Bergé & associés ont renoncé  à vendre cet exemplaire. 

Le CVV a considéré que la vente aux enchères "ne serait pas le cadre approprié" de cet ouvrage « sensible ». "Ce n'est pas la même chose de vendre aux enchères publiques ou de gré à gré à un musée historique. Dans le premier cas, on ne sait pas si l'on vend à des historiens, des scientifiques ou des dingues », a déclaré Catherine Chadelat, présidente du CVV au Figaro

Âgé de 84 ans, « converti au catholicisme en 1940, Philippe Zoummeroff est né juif... d'un père tchétchène pêcheur de perles et d'une mère « fantastique ». Mécène, il est membre de l'Association française de criminologie et administrateur de la Bibliothèque nationale de France (BNF). Le 12 mai 2014, il a déclaré au Figaro : « On a tort d'interdire la vente aux enchères de Mein Kampf. Pierre Bergé a affirmé qu'il ne comprenait pas que ce livre mythique ait été retiré, étant donné que c'est une preuve de ce qu'était déjà Hitler en 1925 et, par conséquent, de tout ce qui pouvait advenir au peuple juif. Le maréchal Lyautey lui-même avait déclaré : “ Il faudrait que tous les Français lisent Mein Kampf, pour montrer l'horreur ! ” C'est un plaidoyer monstrueux que personne ne devrait ignorer. Cela appartient à l'histoire. Mais on trouve Mein Kampf partout! Il y en a dix éditions à la Fnac. Celui de ma collection est en allemand. On me dit que je cultive l'atroce. Mais je le fais pour le combattre! Vous ne pouvez pas combattre ce que vous ne connaissez pas ».

Vice-présidente de Sotheby's, Anne Heilbronn s'est indignée de la polémique qui entache la vente aux enchères du collectionneur Philippe Zoummeroff, " humaniste... dont l'honnêteté morale ne peut absolument pas être remise en cause. C'est dans cette démarche du souvenir et du témoignage qu'il a collectionné les pires traces de l'histoire, afin d'en comprendre ou d'en prévenir les répétitions. C'est dans cette optique que Mein Kampf figure dans sa collection comme le texte fondateur du plus grand crime contre l'humanité ».
     
Droits d'auteur
Diffusé ce 27 juin 2014 par Channel 5The Hunt for Hitler's Missing Millions, documentaire britannique de Virginia Quinn, évalue la fortune d'Hitler à plus de cinq milliards de dollars (environ 3,7 milliards d'euros). Un trésor secret amassé grâce aux revenus issus des droits d'auteur sur Mein Kampf - Hitler percevait des royalties sur chaque exemplaire du livre remis gratuitement aux couples venant de se marier - et sur son image imprimée par exemple sur les timbres allemands, ses apparitions et discours rémunérés et son refus bien avant son accession au pouvoir en janvier 1933 de payer les impôts. La documentariste a interviewé Herman Rothman, Juif allemand ayant servi lors de la Seconde Guerre mondiale dans les services de renseignements britannique. Après le suicide d'Hitler dans son bunker berlinois le 29 avril 1945, l'unité de contre-espionnage d'Herman Rothman a repéré un homme en vêtements civils qu'elle a suspecté être un Nazi en fuite tant il marchait rapidement. Un des collègues de Rothman, qui était tailleur dans la vie civile, a détecté une coupe inhabituelle dans la veste de cet individu et qui s'est avérée contenir un document de sept pages constituant le testament et les dernières volontés d'Hitler. Rothman put traduire immédiatement ce document composé de deux sections : la première était une diatribe contre les Juifs les rendant responsables du déclenchement du conflit, la seconde tentait vainement de dissimuler l'étendue de la richesse d'Hitler, investisseur cupide, avisé et bien conseillé
  
Le gouvernement de Bavière détient les droits d’auteur de Mein Kampf et avait interdit de nouvelles publications.  Les droits d’auteur tombant dans le domaine public en 2015, Mein Kampf pourra alors être librement réédité.

En 2009, une édition critique était prévue en Allemagne, avec l’accord du Conseil central des Juifs allemands (CCJA) et du Land de Bavière. Une édition qui a suscité une polémique.

« L’annonce d’une édition critique de l’unique livre publié par Hitler, à condition qu’elle soit établie par les meilleurs spécialistes internationaux de l’hitlérisme, doit être reçue comme une bonne nouvelle. Sur un épisode d’une telle importance dans l’histoire du XXe siècle, sur cette catastrophe sans précédent, on ne saurait plus longtemps considérer que l’ignorance est un argument, ni que le savoir approximatif est suffisant », a écrit l’historien Pierre-André Taguieff, en septembre 2009.

Le 25 janvier 2012, un tribunal de Munich a interdit la publication d’extraits du livre, assortis de commentaires et d’analyses scientifiques, par revue Zeitungszeugen [Journaux témoins] éditée par l’éditeur britannique Peter McGee. Une interdiction confirmée en appel en mars 2012 au motif que le « projet servirait les écrits du dictateur ».

« La presse s’est récemment faite l’écho de la possibilité que Mein Kampf se retrouve en libre-service dans les librairies romandes… Mein Kampf serait ainsi traité comme une banale production littéraire. Chacun s’accordera sur le fait que tel n’est pas le cas… Certains libraires opteraient aujourd’hui pour le mercantilisme, au détriment du sens de la responsabilité et de l’éthique. Interrogé par Le Matin, le Directeur d’une enseigne de librairies suisses déclare : « si le débit est important, j’incite à le vendre. Le livre est là en tant qu’objet commercial », estimant parallèlement que le lecteur est adulte. Contrairement à cette analyse quelque peu simpliste, il est bon de rappeler que tous les lecteurs ne sont pas adultes. Ainsi, confronter de jeunes enfants ou adolescents à un tel ouvrage sans accompagnement est parfaitement irresponsable », écrit le 17 avril 2012 la CICAD (Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation, inquiète de l’absence de « restriction » et « d’encadrement ».

Et de proposer « trois mesures d'accompagnement aux libraires qui désirent diffuser cet ouvrage :
-    ajouter une signalétique indiquant que le contenu de l’ouvrage incite à la haine, au crime et à la discrimination raciale.

-   indiquer une limite d’âge sur chaque exemplaire et contrôler l’âge des jeunes acquéreurs. Cette limite serait déterminée par la CDIP (Conférence des Directeurs Cantonaux de l’Instruction Publique), organe qui coordonne au plan national les actions des cantons dans les domaines de l’éducation et de la culture.

-  remettre systématiquement à chaque acquéreur un exemplaire de la brochure « Auschwitz », éditée par la CICAD en 2004 et dont la rédactrice, Sabine ZEITOUN, historienne spécialisée sur la Seconde guerre mondiale… La CICAD mettra gracieusement à disposition des libraires les exemplaires nécessaires ».

La CICAD conclut : « Ces recommandations [visent à] contribuer à la prévention du racisme et d’éviter de favoriser la diffusion de la haine. Le livre n'est pas une simple marchandise ni le libraire un simple marchand ! »

Le 24 avril 2012, l'Etat de Bavière a annoncé que Mein Kampf sera prochainement réédité en une version commentée

Les 15 et 18 décembre, 5 janvier, 3 et 12 mai 2016, Arte diffusa "Mein Kampf", manifeste de la haine ("Mein Kampf". Das Gefährliche Buch), documentaire biaisé de Manfred Oldenburg. Un documentaire qui débute par les migrants, l'hostilité qu'ils suscitent, puis cite Hitler sur la haine des étrangers. Aberrant. 

"Le 1er janvier 2016, près de soixante et onze ans après la mort d’Adolf Hitler, Mein Kampf tombera dans le domaine public. Faut-il pour autant republier ce "texte fondateur" du nazisme ? Rédigé en prison à la suite du putsch manqué de 1923, le "texte fondateur" du nazisme, à la fois autobiographie, manifeste et programme politique, expose sur plus de 700 pages l’esprit de revanche, la haine obsessionnelle des juifs et la volonté d’expansion de son auteur". 

"Depuis 1946, le ministère des Finances de Bavière, qui en détenait les droits d’auteur, avait empêché la publication du pamphlet. Dans une Europe où s’exacerbent les crispations identitaires et la xénophobie, le dilemme est réel : Mein Kampf demeure-t-il dangereux ? Faut-il interdire sa publication au motif d’incitation à la haine raciale, comme le voudraient certains représentants de la communauté juive, ou en diffuser une édition commentée, qui en déconstruirait l’idéologie mortifère ? À l’heure d’Internet, le texte est facilement accessible, et une interdiction pourrait avoir l’effet inverse de celui escompté. Depuis 2012, une équipe d’historiens allemands planche sur cette réédition hautement sensible. Ce documentaire explore l’histoire de la diffusion de l'ouvrage, en Allemagne comme en France, des questions que soulève ce pamphlet tristement célèbre, objet de controverses et de fantasmes, et se penche sur son contenu encore mal connu, pour dissiper certains des mythes et des tabous qui l’entourent".

L'École de droit de Sciences Po a organisé la conférence-débat "Mein Kampf, le droit d'auteur en moins : un dilemme de liberté d'expression", le 18 février 2014, de 19 h 15 à 20 h 30 à l'amphithéâtre A. Caquot en s'interrogeant : "Quelle(s) attitude(s) adopter face à des ouvrages antidémocratiques, racistes, incitant à la violence ? Quel droit d'auteur pour la haine ? Quelle liberté d'expression pour l'appel au crime ?" Il est curieux que soient absents du texte de présentation les termes "antisémitisme" et "génocide". 

En juillet 2014, The New York Times a publié des articles relatifs à cette republication.

Le 1er janvier 2016, Mein Kampf est entré dans le domaine public, et a été réédité en Allemagne. Le 30 janvier 1980, la Cour d'appel de Paris avait imposé que l'éditeur le publiant y intègre un avertissement sur les horreurs commises en application du livre. Le 7 mai 2015, Libération a publié une tribune sur la nécessité d'un tel avertissementLe Conseil central des Juifs allemands a donné son accord pour cette republication accompagnée de notes.

Les éditions Fayard envisagaient de publier une édition commentée. Le Conseil central des Juifs allemands a donné son accord.

Le 2 juin 2021, Fayard a publié une nouvelle traduction, par 
Olivier Mannoni, de ce livre sous le titre " "Historiciser le mal, une édition critique de "Mein Kampf", assorti de notes et de textes critiques l'éclairant et vendu par commande. Un ouvrage de 847 pages.

"Le premier tirage de l'édition critique de Mein Kampf, Historiciser le mal s'est immédiatement écoulé à 12 000 exemplaires (dont 1 000 réservés gratuitement aux bibliothèques demandeuses).

L'enjeu s'avère désormais la republication des œuvres antisémites de Céline.

Un succès dans des pays musulmans
Dans son essai, Antoine Vitkine évoque l’accueil de Mein Kampf dans le monde musulman dans les années 1930 et 1940, mais peu l’attrait pour l’antisémitisme de Mein Kampf et sa diffusion après guerre par les Nazis abrités par les pays arabes  ou/et musulmans.

Mein Kampf est un « bréviaire grand public » en Turquie. Ce bréviaire nazi rallie aussi les islamistes qui prisent son antisémitisme.

« Il faut comprendre ce qui se joue derrière le succès de Mein Kampf dans le monde Arabe. Dans le monde Arabe, c'est ancien, puisque c'est le Grand Mufti Husseini qui dans les années 1930 publie la première traduction d'extraits de Mein Kampf », a déclaré Antoine Vitkine en avril 2008.

Et d'expliquer : « Il y a deux raisons principales qui expliquent la présence de Mein Kampf dans le monde arabe. D'abord c'est un contre-symbole adressé à l'Occident, c'est le symbole de ce que l'Occident rejette et c'est donc un moyen de rejeter l'Occident. La deuxième raison c'est que c'est le symbole de l'extermination des Juifs par les nazis, et que de la part d'opinions publiques foncièrement hostiles à Israël, c'est une manière, sans doute provocatrice, de se situer par rapport à Israël. Mais je dois dire que j'ai été très surpris quand même. 

Je ne le raconte pas dans le film, mais je suis allé en Turquie cet été, et je me suis rendu compte que ceux qui achetaient Mein Kampf ne le faisaient pas uniquement par provocation. Dans de nombreux cas le livre était vraiment lu, peut-être pas intégralement, mais il était compris, son message était entendu. Une autre raison qui fait que Mein Kampf a du succès en Turquie, c'est que c'est un symbole ultra-nationaliste : « tout pour sa patrie, sa race ». Le message ultra-nationaliste très agressif qui fait qu'on se définit contre le reste du monde, cela peut séduire. Le monde musulman est aujourd'hui traversé par cette tentation de repli identitaire, et évidemment dans ce contexte là, Mein Kampf et l'idéologie national-socialiste constituent un modèle. Voilà, cela ne veut pas dire forcément qu'on adhère à tout et qu'on veut exterminer les Juifs, mais le modèle ultra-nationaliste existe toujours. En Russie, la logique est la même. L’idéologie contenue dans Mein Kampf a une part intemporelle, et c'est pour ça que s'intéresser à Mein Kampf aujourd'hui, c'est s'intéresser au monde actuel ».

En 2011, un megastore Virgin au Qatar l'a bien placé en tête de gondole comme livre recommandé par cette enseigne.

La même année, ce livre était aussi en vente au Bahreïn.

Le 30 août 2013, un exemplaire du livre traduit en arabe était posé dans la vitrine de la librairie en face de la Grande Poste d'Alger, au centre de la ville.

En novembre 2013, le Salon des livres à Sharjah (Emirats arabes unis), organisé par le Département de la Culture et de l'Information du gouvernement émirati, a proposé, du 6 au 16 novembre 2013, à la vente Mein Kampf, entre autres livres antisémites. Ce livre était classé dans la rubrique "Connaissance générale".

Le 24e Salon international du livre d'Abu Dhabi (30 avril-5 mai 2014), dont le "partenaire culturel" est le département d'Etat américain, a présenté notamment Mein Kampf.

Écrivain égypto-allemand, Hamed Abdel-Samad a déclaré le 21 mars 2016 : "Quand j'étudiais au Caire, deux des livres les plus populaires que je lisais dans les bibliothèques et dans les rues étaient Mein Kampf de Hitler, qui était interdit en Allemagne à cause de son racisme, et Les Protocoles des Sages de Sion, qui est un faux. Sans même vérifier, nous l'acceptons comme un fait historique. C'est l'un des premiers livres à avoir été traduit en arabe à l'époque moderne. Il est honteux qu'avant de traduire Kant, Spinoza, Descartes, Rousseau, John Locke, ou David Hume, les maîtres des Lumières, nous avons traduit le faux intitulé Les Protocoles des Sages de Sion, afin de l'utiliser comme carburant à notre haine des Juifs. Savez-vous quand Les Protocoles ont été traduits en arabe ? En 1929 - avant que l'Etat d’Israël a été créé et avant que quiconque ait pensé à cela... Cette haine [des Juifs] nous empoisonne".

Le 19 juin 2018, à 20 h 15, l'Institut d'Etudes du Judaïsme à Bruxelles (Belgique) proposa la conférence de clôture de l'année académique "Mein Kampf, une nouvelle édition critique", conférence de Florent Brayard, directeur de recherche au CNRS. "Responsable du projet français d'édition de Mein Kampf, Florent Brayard abordera l'épineuse question de savoir pour quelles raisons il conviendrait de rééditer ce texte".

Tatouage du chauffeur de Flixbus
Le 12 juillet 2019, un Internaute a twitté la photographie prise par un de ses amis, passager d'un bus de la société Flixbus. Ce cliché représentait l'avant-bras du chauffeur du véhicule. Y était tatoué en caractères gothiques "Mein Kampf". Ce twitt a suscité l'indignation. 

Les Internautes ont interrogé la société de bus : « Comment se fait-il qu’un de vos chauffeurs FlixBus puisse porter un tatouage pareil ? Est-ce compatible avec les valeurs de votre entreprise? » 

Dans un premier temps, l’opérateur de transport a twitté le 13 juillet 2019 : « Veuillez noter que FlixBus est fier d’être une multinationale dotée d’une équipe multinationale et que des chauffeurs de tous les secteurs culturels travaillent pour nous. Nous n’acceptons donc aucune discrimination d’origine ou de religion envers nos clients ou nos employés », expliquait vendredi la compagnie dans un tweet".

Contacté par Le Figaro, Flixbus a annoncé que le chauffeur en question avait été suspendu le 13 juillet 2019 : « FlixBus fait appel à des sous-traitants locaux pour l’ensemble de ses voyages et il s’avère que le chauffeur - qui porte en effet ce tatouage - était bien au volant d’un de nos autocars vendredi pour un trajet Toulouse-Milan. En ce sens, nous avons contacté notre partenaire et nous avons pris des mesures pour que cet autocariste soit suspendu et qu’il ne puisse plus rouler avec nous ». Le chauffeur "a été suspendu à son arrivée à Bergame. "L’Agence France Presse (AFP) précise que le chauffeur est d’orgine italienne et qu’il est employé par une entreprise italienne".

"L’entreprise allemande confirme au Figaro une « réponse maladroite ». « Nous avons mal communiqué et nous nous en excusons, nous voulions simplement rappeler que Flixbus était contre toutes formes de racisme ».
  
"Mein Kampf, une farce"
"Mein Kampf, une farce" est une pièce de théâtre écrite en 1987 à Vienne par le dramaturge, scénariste et metteur en scène George Tabori (1914-2007).

"Un théâtre de Constance (Allemagne) produisant Mein Kampf, une farce noire et grinçante du Hongrois George Tabori en référence au pamphlet  d'Adolf Hitler, a promis une entrée gratuite à qui porterait une croix gammée. A ceux qui achèteraient leur billet, "nous (...) proposons de porter une étoile de David dans l'enceinte du théâtre en signe de solidarité avec les victimes de la barbarie nationale-socialiste (nazie)", écrivent les responsables du théâtre sur leur site internet. lls affirment vouloir montrer ainsi à quel point l'homme est facile à corrompre. Mais la Société germano-israélienne dans la région du lac de Constance et la Société pour la coopération judéo-chrétienne ont appelé au boycott. Plusieurs plaintes ont été déposées en Allemagne, a indiqué un porte-parole du parquet, le 17 avril 2018. La justice examine ces plaintes, a ajouté le porte-parole. La justice doit toutefois examiner dans quelle mesure cela peut relever de la liberté de création artistique. Le port de la croix gammée, symbole du nazisme, est prohibé dans l'espace public en Allemagne."

"Né en Hongrie en 1914 dans une famille d’intellectuels juifs, György Tábori est envoyé par son père en apprentissage à Berlin en 1932 et 1933. Il émigre à Londres en 1935 pour rejoindre son frère aîné. Il adopte alors la nationalité britannique, devient journaliste à la BBC et traducteur ; d’abord correspondant de guerre en Bulgarie et en Turquie, il s’engage dans l’armée britannique en 1941 et est affecté au Proche-Orient, où il écrit son premier roman. En 1943, il rentre à Londres et travaille de nouveau à la BBC. Ses parents sont déportés, seule sa mère survit". 

"En 1945, il est invité à Hollywood, son roman ayant attiré l’attention des studios, et s’installe aux États- Unis. Il signe des scénarios de films, notamment pour Alfred Hitchcock (La Loi du silence), Anton Litvak (Le Voyage), Joseph Losey (Cérémonie secrète, seul script qu’il revendique). En dehors de son activité de scénariste qui ne le satisfait pas, point de vue littéraire, il publie des romans. Il fréquente les plus grandes stars hollywoodiennes (Charlie Chaplin, Greta Garbo…) et les intellectuels allemands en exil. Assistant de Charles Laughton en 1947, il fait la rencontre décisive de Bertolt Brecht qu’il traduit pour la scène américaine. "

"Ensuite, il s’installe à New York avec sa deuxième épouse, l’actrice Viveca Lindfors. Pendant plus de dix ans, il l’accompagne à ses cours de l’ « Actors Studio » et observe la méthode de travail de Lee Strasberg. De 1952 à 1966, ses premières pièces sont montées aux États-Unis et à Londres : « Flight to Egypt » (mise en scène Elia Kazan), « The Emperor’s Clothes » (Harold Cluman) « Brouhaha » (Peter Hall). Il passe à la mise en scène par hasard pour remplacer un metteur en scène malade, et monte Mademoiselle Julie de Strindberg. Puis, avec Gene Frankel, il monte « Brecht on Brecht », « The Nigger Lovers », et avec Martin Fried, « The Cannibals » (1968), Pinkville (1970), deux pièces qu’il est invité à présenter aussi à Berlin en1969 et 1971. Inscrit sur la liste noire du sénateur McCarthy, il continue ses activités de traducteur, traduisant notamment « Andorra », de Max Frisch. Il quitte définitivement les États-Unis pour l’Allemagne en 1971, où il travaille pour la télévision et la radio, tout en poursuivant ses activités d’auteur et de metteur en scène de théâtre (Clowns, Tübingen, 1972). En 1975, il fonde à Brême un laboratoire de théâtre alternatif, le « Bremer Theaterlabor », avec lequel il crée « Sigmunds Freude » (Les Joies de Sigmund, 1975), « Talkshow » (1976), « Hungerkünstler » (Artistes de la faim, 1977) d’après Kafka, un spectacle dans lequel les acteurs se livrent à un jeûne de quarante-deux jours et qui entraîne la fermeture du lieu par les autorités. Il continue ailleurs à mettre en scène ses propres pièces : « Mutters Courage » (Le Courage de ma mère, Munich, 1979, adapté au cinéma en 1995), « Der Voyeur » (Le Voyeur, Berlin, 1982), « Jubiläum » (Jubilé, Bochum, 1983), « Peepshow » (Bochum, 1984), ainsi que des oeuvres d’Euripide, Brecht, Beckett, Gertrude Stein, Harald Mueller, Herbert Achternusch et Shakespeare, en Allemagne puis en Autriche. Il s’installe à Vienne en 1986 et dirige jusqu’en 1990 le « Theater Der Kreis ». Il crée « Mein Kampf » (Farce) (1987, adapté au cinéma en 2009), « Masada » (Graz, 1988), « Weisman und Rotgesicht » (Ein Jüdischer Western), « Weisman et Copperface » (Un western yiddish, 1990). Claus Peymann l’appelle alors à mettre en scène régulièrement au « Burgtheater » de Vienne : « Die Goldberg- Variationen » (Les Variations Goldberg, Vienne, 1991), « Nathans Tod » (La Mort de Nathan, 1991), « Babylon Blues » (Vienne, 1991), « Requiem für einen Spion » (Requiem pour un espion, Vienne, 1993), « Die Ballade vom Wiener Schnitzel » (La Ballade de l’escalope viennoise, Vienne, 1996). "

"En 2000, il le suit à Berlin pour intégrer la nouvelle équipe du « Berliner ». Ensemble qui présente, à l’occasion de sa réouverture, « Die Brecht Akte » (Les Dossiers Brecht), de et par Tabori (inspiré de Brecht on Brecht). Il continue à mettre en scène d’autres auteurs (En attendant Godot, 2006). Sa dernière pièce, « Gesegnete Mahlzeit » (Bon appétit), y est créée en 2007, quelques semaines avant sa mort.  En France, ont été montées « Brouhaha » par Jacques Fabbri, au Théâtre de la Renaissance (1961), « L’Ami des nègres » par Antoine Bourseiller, au Théâtre du Poche-Montparnasse (1965), « Mein Kampf » par Jorge Lavelli, au Théâtre national de la Colline (1993), puis par Agathe Alexis, au Festival d’Avignon (2002), « Weisman et Copperface » par Jacques Connort, au Studio de la Comédie- Française (1995), « Les Variations Goldberg » par Daniel Benoin, au Théâtre national de Chaillot (1998) et « Le Courage de ma mère » par Claude Yersin, au Nouveau Théâtre d’Angers (2000). En Belgique, ont été montées « Mein Kampf » par Henri Ronse (1993) et par David Strosberg (au Théâtre Varia, 2009), « Le Courage de ma mère » (1995) et « Weisman et Copperface » (1996) par Philippe van Kessel au Théâtre National de la Communauté française de Belgique. En Suisse, Frédéric Polier a monté « Mein Kampf » (2007). George Tabori a obtenu de nombreux prix, dont, en 1992, le prix Georg Büchner de l’Académie allemande. À côté de ses activités théâtrales, il a continué à écrire des récits, des nouvelles, des romans, et a travaillé régulièrement pour les radios et les télévisions allemandes jusqu’à la fin de sa vie. Mélange de comique féroce et de dénonciation de tous les faux-semblants de la bonne conscience, son oeuvre théâtrale explore la question de l’autre." 

"George Tabori, comme beaucoup d'auteurs, glisse des souvenirs, des anecdotes personnelles dans ses récits. Tabori incère également pas mal de références, d'allégories à d'autres auteurs et à leurs oeuvres dans ses textes. Le but premier est d'aider le comédien dans sa composition de personnage. Prenons un exemple concret, le personnage de « Gretchen », jeune fille orpheline issue de la haute bourgeoisie qui, pour survivre, se prostitue. C’est en réalité une référence au personnage de « Else » du roman « Mademoiselle Else » d'Arthur Schnitzle. La comédienne interprétant « Gretchen » a d'ailleurs lu ce roman en préambule à sa composition de personnage. Vient ensuite un autre élément auquel Tabori aime souvent faire appel, il s'agit de l'histoire avec un grand H. Dans toutes ses pièces, il glisse régulièrement des références historiques afin de guider le spectateur dans le temps ou alors de le perdre volontairement. Dans notre cas, il s'agit de le guider à travers cette période trouble et chargées de crises que sont les années 1920. Dans une autre de ses pièces, sur laquelle nous travaillons actuellement, les repères historiques se succèdent anachroniquement dans le but de perdre le spectateur dans un dédale d'idées et d'illustrer ainsi la folie des personnages. Enfin, Tabori aime faire appel aux stéréotypes que la propagande nazie a largement diffusés à l'encontre des juifs. Ces derniers sont exacerbés, poussés à l'extrême, ils en deviennent totalement risibles et sont détruits par les rires du public. Ces ersatz venus du passés perdent leur sens péjoratif et ne deviennent plus qu'une raison de rire dans cette farce générale. L'analyse du texte est un élément très important quand on s'attaque à une pièce de Tabori. Cette dernière permet de mieux comprendre les idées de l'auteur, les messages à transmettre au public et les intentions vraies des personnages. Ces textes, bien qu’empreints d'humour, sont de véritables témoignages du passé et de ce que peut être la nature humaine dans ce qu'elle est de meilleure comme de pire."

"Il traite l'histoire avec une dose d'humour féroce. Pour lui, rire ne veut pas dire oublier, rire pour l'auteur c'est exorciser l'horreur et renouer avec le monde. Le rire chez Tabori est une réponse à la question « comment parler d’événement si terrible ? » Pour cela, il fait de l'histoire une fable, une fable cruelle où des hommes préfèrent désespérément la vie (même si cela implique le pire) à la mort. Dans cette fable cruelle, via des chemins plus drôles et plus fallacieux les uns que les autres, il veut démontrer que l'amour est le chemin à suivre, si dur soit-il à arpenter. Nous avons toujours besoin de rire, si tragique soit notre destinée. Cette conception de l'humour qui tire son fondement dans l'humour juif et la culture Yddish ou le rire, l'autodérision et la farce, occupe une place très importante. Tout ce qui est proposé peut être illustré par une seule phrase de la pièce que voici, en guise de conclusion : « Puisque ça finit mal qu'au moins ça soit drôle » Schlomo Herzl Acte V 6".

Le Festival off d'Avignon 2019 (5-28 juillet 2019) proposa "Mein Kampf, une farce", écrite en 1987 à Vienne par le dramaturge George Tabori (1914-2007), dans une mise en scène de Kim Langlois et Dominique Jacques. Création Festival 2018. « Mein Kampf, une farce » est "un spectacle drôle et déroutant. Utopique et cruellement réaliste, cette fable dépeint le jeune Hitler comme un clown, un enfant gâté qui est encore dans les jupes de sa mère. Mais c'est surtout l’histoire d’un juif qui aurait rêvé changer le destin de l’humanité, c’est l’histoire d’un juif qui voulait croire que l’amour pouvait tout sauver...Il ne s'agît donc pas de faire l'apologie de l'idéologie nazie mais de la détruire avec amour et humour."

"Cette pièce relate l'expérience vécue par le jeune Adolf Hitler dans un asile de nuit pour sans-abri. Moustachu tel un tartare et colérique tel un enfant gâté, il débarque à Vienne avec son carton à dessin sous le bras. Tout ce qui l'obsède est d'entrer à l'Académie des Beaux-Arts. Mais en attendant, il faut bien se loger... Et le voilà descendu dans un asile pour clochards dans lequel il va devoir cohabiter avec deux Juifs. C'est dans ce bouge que réside Schlomo Hertzl, colporteur de bibles et de kamasutras. Le brave Schlomo va prendre Hitler sous son aile protectrice, va se mêler de son éducation et finira même par l'aimer, oui ! Jusqu'à l'arracher des griffes de la mort ! Aimer son ennemi ? Comme soi-même ? Vous plaisantez !?"

"Cette brillante pièce met en exergue l'amour plutôt que la haine dans laquelle il est si facile de tomber et démontre qu'il n'est pas plus difficile "de s'aimer les uns les autres comme je vous aime".

"Il ne s'agît donc pas de faire l'apologie de l'idéologie nazie mais de la détruire avec amour et humour. Ici, le jeune Hitler est dépeint comme un clown, un enfant qui est encore dans les jupes de sa mère et à qui l'on doit encore torcher le cul. De cette façon, nous discréditons toute forme d'extrémisme. Un humour parfois grinçant, certes, mais un scénario rempli de poésie." 

"Cette pièce pourrait éveiller (ou réveiller) les consciences et mettre en garde tout en apportant au public un moment de franche rigolade." (Citations du dossier de presse)


Du 17 au 27 juillet 2019 à 22 h 45. Relâche le 28 juillet 2019
Au Verbe fou
"Mein Kampf, une farce", de George Tabori
95, rue des infirmières. 84000 Avignon
Tél. : 00 33 (0)490 85 29 90
1 h 15
Metteuse en scène : Kim Langlois
Metteur en scène : Dominique Jacques
Distribution: Kim Langlois, Dominique Jacques, Guillaume Martin et Benoît Servotte.
Interprètes : Kim Langlois, Guillaume Martin, Dominique Jacques, Benoît Servotte
Régisseur : Dominique Leruth


Antoine Vitkine, Mein Kampf, histoire d’un livre. Ed. Flammarion Lettres, coll. EnQête, 2009. 350 pages. 21 euros. ISBN : 978-2081210516

Mein Kampf, c’était écrit d’Antoine Vitkine
France, 2008, 56 minutes, Arte F
Diffusions le :
-  3 avril 2012 à 23 h 40 par Arte ;
- 23 janvier 2014 à 15 h 20 et 26 janvier 2014 à 12 h 45 par Toute l'Histoire

Visuels de haut en bas : © DR

La prison de Landsberg hier et aujourd’hui
Mein Kampf de Hitler
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Articles sur ce blog concernant :
Cet article est la version détaillée d'un article commandé par L'ArcheIl a été modifié le 6 mai 2016.
Il a été republié le :
- 17 avril 2012 et le 25 août 2012 à l'approche de la diffusion par Arte, les 27 et 29 août 2012, de Mein Kampf-George Tabori d'Urs Odermatt, le 27 août 2013, le 24 novembre 2013 et les :
- 12 janvier, 15 février, 8 mai et 27 juin 2014, 14 mai et 4 novembre 2015, 3 mai 2016, 19 juin 2018, 25 juillet 2019.

1 commentaire:

  1. Merci beaucoup pour votre article.

    Nous nous permettons néanmoins d'ajouter que notre association, l'Initiative de Prévention de la Haine (dont Monsieur Vitkine est d'ailleurs signataire), a entamé depuis plusieurs années une réflexion précisément sur le même sujet, et notamment relativement à la tombée de Mein Kampf dans le domaine public en 2016.

    A cet égard, nous proposons en particulier l'adoption généralisée d'un dispositif similaire à celui actuellement en vigueur s'agissant de l'édition française de Mein Kampf.

    Nous sommes également à l'origine d'une proposition de résolution parlementaire, articulée autour de cinq propositions principales, à savoir :

    - encourager les éditeurs à offrir un appareil critique et pédagogique au devant de textes incitatifs aux crimes tels que Mein Kampf ;
    - encourager les opérateurs et éditeurs à utiliser une signalétique (logo) indiquant que le contenu d'un ouvrage qu'ils proposent au public comprend un discours de haine incitant au crime et à la discrimination raciale ;
    - encourager les opérateurs et éditeurs à apposer une signalétique (logo) pour garantir que leur site, édition, plateforme sont dépourvus de contenu haineux et incitatif au crime et à toute forme de discrimination raciale ;
    - encourager les éditeurs de contenus haineux dotés d'un appareil critique à s'abstenir de tirer profit de l'édition de tels contenus ;
    - créer un Observatoire de prévention de la haine (réseau informel d'experts) afin de réfléchir en toute indépendance aux questions relatives à la diffusion de la haine, et en premier chef sur Internet.

    Nous avons d'ailleurs contribué, il y a trois semaines, à un colloque à ce sujet sous l'égide du Conseil de l'Europe à Strasbourg.

    Pour retrouver davantage d'informations sur nos propositions et réflexions, nous vous invitons à consulter notre site Internet : http://hateprevention.org (et espérons vous compter prochainement parmi nos signataires).

    Bien à vous,

    David Alexandre
    Délégué Général - Initiative de Prévention de la Haine

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