Citations

« Le goût de la vérité n’empêche pas la prise de parti. » (Albert Camus)
« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
« Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. » (Vladimir Jankélévitch)
« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

dimanche 18 septembre 2011

Le sculpteur Edmond Uzan


A Paris, Evi Gougenheim/Artplace présente l’exposition collective Murmure dans le cadre des Journées européennes de la Culture et du patrimoine Juifs. Eminent physicien et mathématicien, Edmond Uzan y présente ses sculptures, dont l’une « illustre la suite mathématique de Fibonacci. La rigueur de sa démarche s’adoucit aux confins d’un silence habité ».

« Papa pique et maman coud », chantait Charles Trénet. Dans la famille Uzan, le père a été physicien, et la mère professeur de mathématiques. Les velléités artistiques d'Edmond Uzan se sont exprimées vraiment lors de la retraite et par la sculpture. Par contre, c’est par hasard, après avoir appris la dorure, le vitrail et la laque que Liliane Enriquez Uzan, douée pour la technique, trouve dans la sculpture son moyen d’expression idéal.

Nulle rivalité dans ce couple. Au terme de leurs travaux, chacun porte un regard légèrement critique et très bienveillant sur la création de l’autre. Une connivence : la « Tendresse » est illustrée, en petits formats aux formes adoucies, par Edmond Uzan en un être protégeant l’autre et, par Liliane Uzan, en un couple mobile immense.

Depuis plusieurs années, ce couple participe aux mêmes expositions. Edmond Uzan a gagné le Premier prix du Lions Club en novembre 2001 et son épouse a remporté en 2002 celui de la Fédération de la Mutualité.

L’ancien chercheur au CNRS est habitué à travailler directement la matière. Aussi, il maîtrise tout le processus de création d’une sculpture. Il est parfois aidé par son épouse qui, mue par un « souci minutieux des finitions », applique les feuilles d’or (« Odalisques ») ou cisèle. Tous deux proposent des pièces à deux, voire trois faces (« Le pêcheur et sa proie »).

Sensible au temps, doté d’un style « figuratif poétique », Edmond Uzan crée un bestiaire - une magnifique « Tortue », un « Scargot mutin » et des « Oiseaux de Paradis », i.e. « des coqs sans plumes comme dans le Jardin d’Eden » -, un univers animalier parfois étrange et fantastique – Hommage à Jérôme Bosch -, des « Chandeliers » mariant symbolique spirituelle et mathématiques ou soulignant l’interdépendance (« Arbre de vie » aux branches entremêlées), et un « Tsadik ». Dans la « Confusion des matières », l’Humain constitue le lien entre les mondes minéral et végétal... Ce sculpteur évolue aussi dans l’abstraction.

« Révoltée par l’injustice », Liliane Enriquez Uzan s’attache au personnage de Cervantès. Qu’elle décline Sur un cheval efflanqué, un Don Quichotte veut continuer à se battre, protégé par un sombrero ! Les premières sculptures révèlent l’influence de Giacometti. « La balançoire » fait songer à un tableau impressionniste. Aux extrêmes de la pièce à la Mairie du Ve arrondissement de Paris en 2002 : une « Vache rousse » et un merveilleux « Papillon » noir.

Jusqu’au 27 septembre 2011
14, rue Coëtlogon (angle 5, rue d’Assas), 75006 Paris
Tél. : 01 45 48 66 91
Du lundi au vendredi de 14 h à 19 h et sur rendez-vous



Visuels d’Edmond Uzan : © DR
Affiche
Oiseaux de Paradis
Hauteur : 76 cm, largeur : 45 cm, profondeur : 25cm
Tendresse
Statue en bronze patiné
Hauteur : 49,5 cm, largeur : 24 cm et profondeur : 23 cm
La vie ou rupture dans la continuité
Arbre de vie 02
Hauteur : 50 cm, largeur : 40 cm et profondeur : 25cm

Articles sur ce blog concernant :
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France

dimanche 4 septembre 2011

Boris Zaborov, peintre et sculpteur


Le musée d'art et d'histoire du Judaïsme (MAHJ) présente Un couple (2009), tableau - acrylique et crayon sur toile - de Boris Zaborov, dans le cadre de l'exposition collective La collection contemporaine du MAHJ : un parcours. « Face aux images d'un monde ashkénaze qui n'est plus, la peinture de la disparition » de Boris Zaborov. Une exposition inscrite dans le programme des Journées européennes de la culture et du patrimoine Juifs, avec des activités le 4 septembre 2011.



Boris Zaborov est né en 1935, dans une famille juive de Minsk (Biélorussie).

Il étudie dans les Académies des Beaux-Arts de Saint-Pétersbourg et de Moscou.

Membre de l’Union des Peintres de l’URSS, il peint, réalise des gravures, crée des décors et costumes pour le théâtre et illustre des livres.

Pour des raisons personnelles sur lesquelles il reste discret, il quitte l’URSS en 1980 pour la France.

Il peint, collabore à des spectacles théâtraux, et expose à Amsterdam, New-York, Montréal, Moscou, Bologne, Darmstadt, Tokyo, etc.

Les Offices de Florence ont acquis en 2007 son autoportrait Le peintre et son modèle (1998). Une œuvre qui est entrée dans la collection fameuse d’autoportraits initiés par les Médicis au XVIe siècle et montrés dans le « Corridoio Vasariano » (Corridor de Vasari).

Boris Zaborov sculpte depuis 1995.

La Galerie Vallois lui consacre en 2010 sa première exposition individuelle depuis celle de 2002, alors que Minsk lui a dédié cette année « une première rétrospective nationale ».

Dans le cadre de l’année de la Russie en France, la Galerie Vallois Sculptures présente fin 2010 une vingtaine de bronze, sculptures livres ou livres sculptures, réalisées entre 1996 et 2006 et quelques tableaux (Fille au chien, 2010) par Boris Zaborov. Des œuvres à l’hyperréalisme nostalgique célèbrent le livre, symbole de savoir et moyen d’expression, de communication, de transmission. Elles révèlent ou exhument une mémoire évanescente


En 2011, le MAHJ présente Un couple, oeuvre donnée par l'association One for All Artists. « Mon regard s’était arrêté et, traversant le plan de l’image, il était sorti par le cadre du vieux cliché, comme par une fenêtre grande ouverte, pour gagner les espaces infinis du souvenir. Avec une soudaineté comme seul en est capable un éclair de mémoire, je vis le vaste panorama des jours heureux de ma vie passée. La mémoire avait rejeté toutes les gammes des noirs pour ne garder que les seules couleurs de l’arc-en-ciel », explique Boris Zaborov. Voyant par hasard une photographie ancienne, Boris Zaborov développe « une nouvelle pratique, une vision nouvelle, le « regard vers l’intérieur ». Il aborde le monde du souvenir, ouvre une fenêtre sur le passé, emprunte, selon son expression, une « porte dérobée », indique le MAHJ.


Vestiges des temps
Odes au livre, les sculptures en bronze patiné en gris bleuté ou argenté semblent avoir été découvertes par un archéologue.

Ces sculptures symbolisent deux inventions cruciales menacées par la civilisation de l’image : l’écriture et le livre.

Grand ou petit, souvent seul, ouvert ou fermé, le livre usagé semble tiré de l’oubli, exhumé de ce qui l’avait enseveli avec des objets divers liés à lui : lunettes, poupées démembrées, besicles, ciseaux, masque ou des montres anciennes.

Ces vieux livres témoignent d’un savoir divers - histoire romaine, médecine, etc.-, parfois clos, et d’une transmission essentielle.

Hardies, les lettres escaladent le livre (« Composition avec des lettres ») ou servent aux typographes (« Composition n°1).

Incrustées dans les sculptures, des photos ont capté un moment, mais pas pour l’éternité. Car tout s’évanouit, s’estompe, est voué à la disparition, à devenir des vestiges. C’est une course contre le temps pour préserver ces témoins d’un passé touchant...

Dans « Comédie Française », à laquelle cet artiste-costumier a collaboré en concevant les costumes de pièces de Hugo et Tourgueniev, il a posé délicatement un pinceau et un masque sur un immense registre. « Un livre ouvert et un masque » cèle un visage.

Les peintures ressemblent à des films qui, trempées dans un bain spécial, laissent apparaître progressivement une image. Parfois on ne sait si le souvenir émerge ou s’évanouit (« Double portrait ») et si le visage se décompose.

Les couleurs sont discrètes, « passées », comme tamisées par une mélancolie paradoxalement brumeuse et précise. Le filtre du regard estompe, mais la mémoire témoigne (« Patriotes» américains)...

Paradoxalement forts et fragiles, ce sont des témoins ou vestiges des temps qui perdurent et symbolisent la puissance du savoir, la vulnérabilité et la sensibilité humaine…

Ces œuvres sont parties intégrantes de la « bibliothèque des vestiges » crées par Boris Zaborov au fil des années.

Jusqu'au 11 septembre 2011
Au MAHJ
Hôtel de Saint-Aignan,
71, rue du Temple, 75003 Paris
Tél. : (33) 1 53 01 86 53
Lundi, mardi, jeudi et vendredi de 11 h à 18 h, mercredi de 11 h à 19 h 30, dimanche de 10 h à 18 h. Fermé le samedi.

Jusqu’au 29 décembre 2010
A la galerie Vallois Sculptures
35, rue de Seine, 75006 Paris
Tél. : 01 43 25 17 34
Du mardi au samedi de 10 h à 13 h et de 14 h à 19 h

A lire :
Boris Zaborov. Galerie Visconti, 2002
Boris Zaborov, Le livre. Galerie Vallois, 2002

Visuels de haut en bas :
Fille au chien
2010, acrylique sur toile, 116 x 99 cm

Composition n° 1
1996, bronze, Fonderie Punto Arte, 18,5 x 12 x 11 cm

Un livre ouvert et un masque
1995, bronze, Fonderie Punto Arte, 16 x 16,5 x 13 cm

Quatre livres et une montre
1996, bronze, Fonderie Punto Arte, 15 x 15 x 10 cm

Composition avec des lettres
1995, bonze, Fonderie Punto Arte, 37 x 28 x 15 cm

Grand livre ouvert et une poupée
1995, bronze, Fonderie Punto Arte, 31,5 x 46 x 36 cm


Articles sur ce blog concernant :
- Culture, notamment
Hommage à Chana Orloff (1888-1968)
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Cent lumières pour Casale Monferrato - Lampes d’artistes pour Hanouca
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La Splendeur des Camondo de Constantinople à Paris (1806-1945)
France


Cet article a été publié pour la première fois sur ce blog le 26 décembre 2010 et modifié le 4 septembre 2011