jeudi 7 décembre 2023

Cent lumières pour Casale Monferrato - Lampes d’artistes pour Hanouca

 
Le musée d’art et d’histoire du Judaïsme (MAHJ) a présenté l’exposition "Cent lumières pour Casale Monferrato - Lampes d’artistes pour Hanoucamontrant 35 lampes de Hanouca (fête juive des lumières) conçues par des artistes, juifs et non juifs, à l’initiative d’Antonio Recalcati et rassemblées au Musée des lumières, dans la synagogue de Casale Monferrato (Italie). Pendant la fête de Hanoucca, les enfants juifs jouent avec des toupies à quatre faces (sevivon en hébreu et draydel en yiddish)Article republié à l'approche de la fête juive de Hanoucca 5784, de la veille du 25 Kislev à la veille du 3 Tévet ou tebeth dans le calendrier hébraïque (du 7 décembre au soir du 15 décembre 2023 dans le calendrier grégorien).

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A l’occasion de la fête juive de Hanouca (inauguration, dédicace en hébreu) - 1er décembre au soir au 9 décembre 2010 (25 kislev-2 tévet 5771) -, le MAHJ a présenté des œuvres d’art d’inspiration religieuse juive, des lampes de Hanouca (ou hanoukiot) dans le cadre d’une réalisée en partenariat avec la Fondazione Arte, Storia e Cultura Ebraica, à Casale Monferrato, petite ville du Piémont (Italie).

La fête juive rabbinique de Hanouca
Comme Pourim, Hanouca - orthographiée aussi Hanoucca, Hanouka, Hanoukka, Ḥānukkāh, Chanukah  - est une fête rabbinique qui rappelle le souvenir d’un événement historique jugé important par les rabbins qui ont voulu en perpétuer les enseignements.

Hanouca, fête des Lumières, commémore la victoire en l'an -165 avant l’ère commune des Hasmonéens, dirigés par Juda Macchabée – fils du grand prêtre Matatiahou -, sur la dynastie hellénistique séleucide qui dominait la Judée.

Le roi Antiochos IV voulait helléniser la Judée. Surnommé « épimane » (insensé), il persécutait les Juifs : il a placé l’auteur du dieu Baal Shamen dans le Temple de Jérusalem, a voulu offrir des porcs en holocauste (sacrifice religieux), a prohibé la brith mila (circoncision) et le chabbat, a tué des Juifs, etc.


Moins nombreux, les courageux Juifs révoltés parvinrent miraculeusement à vaincre les soldats Grecs aguerris d’Antiochos IV et à libérer Eretz Israël du joug grec.


Ils prièrent et allumèrent alors une ménora (chandelier à sept branches) avec une "petite fiole d’huile pure trouvée miraculeusement dans la poche du Cohen Gadol (grand-prêtre)" et consacrée dans le Temple de Jérusalem. Cette fiole contenait une quantité pouvant durer un jour, mais l’huile d'olive brûla miraculeusement pendant huit jours. "Le laps de temps nécessaire au voyage aller-retour jusqu’au domaine d’Acher, désigné « producteur officiel » des olives destinées à la confection de l’huile du Temple... Autre singularité du miracle de ‘Hanoucca, le fait qu’il constitue l’un des derniers miracles dévoilés de notre Histoire. Rappelons en effet que, peu après, le Temple fut détruit".

La fête de Hanouca « rappelle cette victoire spirituelle et militaire ainsi que le renouvellement de l'huile consacrée qui, selon la tradition, a accompagné la restauration du culte juif dans le Temple de Jérusalem ».


Les Juifs célèbrent cette fête en allumant à la tombée de la nuit, pendant huit jours - du 25 kislev au 2 tevet (mois de novembre ou décembre du calendrier grégorien) -, une lampe ou une bougie supplémentaire de la hanoukia (hanoukiot, pluriel en hébreu), candélabre à neuf branches placé près d’une fenêtre. Ils allument chacune des huit bougies par le chamach (serviteur), neuvième branche placée au centre de la hanoukia, et en disant des bénédictions et en lisant "le psaume 30 : Mizmor chir Hanoukat haBayite léDavid. (Psaume, Cantique de l'inauguration du temple, pour David)". La bougie doit être allumée au coucher du soleil et le rester au moins trente minutes après la tombée de la nuit. La première bougie allumée se trouve à l'extrémité droite de la Hanoukia. Le lendemain soir, on ajoute une deuxième bougie à gauche de cette première bougie, et on allume cette bougie, puis on allume la première bougie, donc de gauche à droite. Ainsi, le troisième soir, on place une troisième bougie à gauche de la deuxième bougie, puis on l'allume, et on allume les autres bougies de gauche à droite. Et cet ordre d'allumage se poursuit tout au long de la fête. On allume la hanoukia avant la bougie du chabbat.

Cet allumage symbolise la victoire de la lumière, 
de la Torah, sur l’obscurité.

Le 13 décembre 2022, "l'Autorité des antiquités d'Israël (IAA) a annoncé la découverte d'un trésor de pièces d'argent datant du règne du roi séleucide Antiochos IV dans une grotte. Il s'agirait de la première preuve archéologique de la Révolte des Maccabées dans le désert de Judée". Ces quinze pièces en argent se trouvaient dans une boite en bois enterrée dans une grotte voici 2200 ans près de la mer Morte. Elles seront montrées au Hasmonean Heritage Museum à Modiin, dans le centre d'Israël durant la Semaine du Patrimoine israélien, lors de la fête de Hanoucca. 

Dès « le Moyen-âge, différentes coutumes ont été établies, comme le chant de cantiques, la distribution d'argent ou de cadeaux, des jeux et la confection de pâtisseries à l'huile » : beignets frits (Soufganiot, en hébreu), etc.

Les enfants Juifs jouent avec des toupies à quatre faces (sevivon en hébreu et draydel en yiddish). Sur chaque face, est inscrite une lettre de l’alphabet hébraïque : noun, guimel, héi, chin (ou pe en Israël). Ces lettres forment l’acronyme de Nes gadol haya cham (נגהש), ou po, soit Un grand miracle eut lieu là-bas, en Eretz Israël (ou ici, pour les enfants vivant en Israël)

Le musée d’art et d’histoire du Judaïsme (MAHJ) proposa le 21 décembre 2014 deux ateliers-contes pour enfants, Histoire de Hanouca. "Au cœur de l’hiver, quand les nuits se font de plus en plus longues, les juifs allument huit petites lumières. Vient alors le temps des histoires. À chaque flamme, les enfants entendent un nouveau récit, illuminé par les lampes du musée.  Enfin, ils fabriquent une toupie, avec laquelle ils jouent".

Le rabbin Posner à Kiel
En 1932, à Kiel, ville située au nord de l'Allemagne et actuelle capitale de l'Etat de Schleswig-Holstein, l'épouse du rav Posner, un des rabbins de la communauté juive de la cité, a déposé sa hanoukia sur un rebord intérieur de fenêtre de leur appartement. En face : le siège du parti nazi sur la façade duquel a été fixée le drapeau nazi ornée de la croix gammée. 

Rachel Posner, épouse du rabbin Yaakov Barouh Posner a photographié son chandelier semblant défier le nazisme. Au dos de ce cliché, elle a écrit : 
"Juda verrecke"
die Fahne spricht
"Juda lebt ewig"
erwidert das Licht"
("Mort à Judah
dit le drapeau. 
Judah vivra toujours
répond la lumière")

Le rabbin Posner s'opposa aux pancartes ou affiches interdisant des lieux aux Juifs. Menacé, il a accédé à la demande de ses fidèles de fuir, avec son épouse et leurs trois enfants, l'Allemagne pour la Palestine mandataire où ils arrivèrent en 1934. Sur le quai de la gare, le rabbin exhorta en 1933 ses coreligionnaires à quitter l'Allemagne. Une partie s'est exilée. Ce rabbin avait emporté sa hanoukia. La famille Posner a confié à Yad Vashem sa Hanoukia et la reprend chaque année pour allumer les bougies durant la fête de Hanoucca et devant le drapeau d'Israël. 

La synagogue de Casale Monferrato

La « petite ville de Casale Monferrato, fief des Paléologues, souverains de Byzance jusqu’en 1559, passe sous le pouvoir des Gonzague de Mantoue, avant d’être rattachée au duché de Savoie en 1709 ».

« L'implantation d'une communauté juive à Casale Monferrato remonte aux années qui ont suivi l'expulsion d'Espagne en 1492 ». Le ghetto y est créé en 1723. Il a été détruit par l’occupation napoléonienne (1799-1814).


Cette communauté Juive a été florissante, et a connu une apogée en 1848, avec l’émancipation des Juifs en Italie. Environ 850 Juifs y vivaient alors du commerce de blé, riz, sel, bijoux, dentelles et d’épices, assuraient des prêts en argent.


En raison de l’urbanisation, de nombreux Juifs de Casale Monferrato se sont installés vers des villes industrielles, à Turin et à Milan. On dénombrait 112 Juifs en 1931, et dix de nos jours.


« Joyau du baroque tardif piémontais », la synagogue de la ville a été construite en 1595 « avant de connaître au cours des siècles plusieurs modifications architecturales » : édification de l’Arche sainte néoclassique (1762), travaux importants de 1853 à 1866... Ce bâtiment de forme rectangulaire « est insoupçonnable depuis la rue ». Pour pouvoir accueillir les réfugiés des localités avoisinantes, la synagogue a été agrandie en 1718. Le numéro 99 (juin 2015) de Los Muestros, la voz de los Sefardimrevue trilingue fondée et dirigée par Moïse Rahmani, présente notamment la synagogue de Casale Monferrato.

La « vaste salle de prières éclairée par 14 grandes fenêtres, est dotée d’un somptueux décor baroque, typique du style piémontais. L’adjonction d’une galerie pour les femmes ouverte sur la grande salle par des baies occultées par des panneaux ajourés en bois sculptés et dorés, par un décor de stucs, et l’alternance entre boiseries sculptées et dorées… confèrent au lieu grandeur, harmonie et intimité ».


A la fin de la Seconde Guerre mondiale, toute sa magnifique argenterie liturgique, qui lui avait valu l’appellation de sinagoga degli argenti, a été volée.


A partir de 1969, la synagogue a été restaurée par la région du Piémont et a été classée monument historique. La communauté juive de Casale Monferrato est membre de l’Unione delle Comunità Ebraiche Italiane (UCEI). Casale compte 39 000 habitants .


En plus de la salle de prière, la synagogue abrite le Museo d'arte e storia antica ebraica (Musée d'art et d'histoire juive antique) et le Museo dei Lumi (Musée des lumières) qui réunit une collection unique de lampes de Hanouca contemporaines réalisées par des artistes internationalement célèbres.

Antonio Recalcati
Antonio Recalcati est né en 1938 à Bresso (banlieue de Milan). Il est mort le 4 décembre 2022.


Ce peintre et sculpteur maîtrise plusieurs disciplines ; la peinture – une peinture d’un « vérisme halluciné » (Dino Buzzati), la sculpture et la céramique.

Il s'engage politiquement et socialement dans son oeuvre.

Ses œuvres ont été exposées à Milan, Rome, Bruxelles, Paris et New York. Citons en 1960 par le cycle Impronte (« Empreintes »), et le polyptyque Vivre et laisser mourir ou La fin tragique de Marcel Duchamp, réalisé avec Gilles Aillaud et Eduardo Arroyo pour l'exposition « La Figuration narrative dans l'art contemporain » à Paris en 1965.


La galerie Valtellinese a présenté en 2004, une rétrospective de son œuvre intitulée « La passion de la liberté ».


Art, lumière et religion
Antonio Recalcati a découvert avec émerveillement la synagogue baroque de Casale Monferrato.


Voici une vingtaine d’années, il a demandé à des amis artistes et designers, italiens ou français, juifs et non juifs, de concevoir des lampes de Hanouca qui sont exposées, de manière permanente, à la synagogue de Casale.


Pour la première fois, cette synagogue a prêté une partie de ses œuvres d’artistes « familiers ou étrangers à cette tradition ».


La « symbolique de la lumière qui est au cœur de la fête a donné, au fil des siècles, des déclinaisons superbes, modestes ou surprenantes. Ici démonstration est faite que la créativité artistique peut enrichir de sens nouveaux une tradition ancienne ».

Les « réponses, d’une diversité étonnante, ne visent pas toutes l’exécution d’un objet répondant à des contraintes rituelles. Elles mettent plutôt en avant une réflexion sur la lumière et sa démultiplication, le destin du peuple juif, les symboles et les formes. Elles sont le fruit de l’articulation d’une libre invention et d’une longue tradition formelle et ornementale ».

La variété  de cet art Judaïca tient autant aux matières - verre soufflé, plexiglas, céramique, laiton fondu, fer forgé, bronze patiné, miroirs, etc. - qu’au design.

Parmi ces oeuvres d'art Judaïca, citons la hanoukia sobre métallique d’Armando Riva (1993).


Celle évoquant un bouquet de fleurs de Valerio Anceschi (fer soudé, 2005).


Celle élégante d’Arman en forme de violons (1997).


Celle associant des polaroids de papillons imaginée par Stefania Ricci (2008)


Parmi les créateurs figurent Aldo Mondino, Antonio Recalcati, Arman, Roland Topor, Mimmo Paladino, Elio Carmi, Georges Jeanclos, Beatrice Caracciolo, Emanuele Luzzati, Claude Lalanne, Paolo Moroni...


On peut regretter que, par manque d’un espace d’exposition au MAHJ, ces œuvres soient dispersées parmi la collection permanente.


A noter, sur le site du peintre et sculpteur israélien David Gerstein, ses sculptures inspirées de Hanouca. Une Hanukkia représente un vol d'oiseaux séparés par des espaces évoquant des flammèches, une autre illustre un envol de papillons colorés, une autre loue la paix (chalom) en associant les symboles de la main de fatma et de l'oeil...

Peut-être que dans un proche avenir, le concours Judaïca 21 choisira-t-il comme thème d'inspiration suggérés aux artistes une hanoukia.

Le MAHJ a proposé le 21 décembre 2014 deux ateliers-contes pour enfants, Histoire de Hanouca

Le dessinateur William Laloum a créé une hanoukia particulière pour 5781.


Jusqu’au 16 janvier 2011
Au Musée d'art et d'histoire du Judaïsme
Hôtel de Saint-Aignan
Dans la collection permanente, au 1er étage
71, rue du Temple, 75003 Paris
Ouvert du lundi au vendredi de 11 h à 18 h et le dimanche de 10 h à 18

Visite guidée spéciale pendant Hanouca le dimanche 5 décembre 2010 à 14 h 30 et à 16 h

Atelier-conte pour les enfants le dimanche 5 décembre à 11 h, le dimanche 12 décembre à 14 h 30 et le mercredi 22 décembre 2010 à 14 h

Visuels des oeuvres d'art de haut en bas : © Fondazione Arte Storia e Cultura Ebraica a Casale Monferrato e nel Piemonte Orientale ONLUS

Roland Topor
1997

Roberto Barni
1997

Arman
1997

Animation allumage des bougies et toupies
© DR, Consistoire de Paris Ile-de-France

La synagogue de Casale Monferrato : vue de la porte d’entrée vers l’Arche de la Torah
Antonio Recalcati
1997

Emanuele Luzzati
2000

Stefano della Porta
1999

Paolo Moroni
2006

David Gerstein
Hanukkia Butterflies
2010
Métal, acier peint
Hauteur  : 37,5 cm. Largeur : 30,7 cm. Profondeur : 10,6 cm
© DR, David Gerstein.


Articles à lire sur ce blog concernant :
Affaire al-Dura/Israël
Chrétiens
Culture
France
Il ou elle a dit...
Judaïsme/Juifs
Shoah (Holocaust)

Cet article a été publié sur ce blog pour la première fois le 1er décembre 2010, puis le :
- 20 décembre 2011 à l'approche de la fête juive de Hanouca 5772 (20-27 décembre 2011), 
- 7 décembre 2012 à l'approche de la fête juive  de Hanouca 5773 (8-16 décembre 2012) ;
- 27 novembre 2013. Hanouca a débuté le 27 novembre 2013 au soir et s'est achevée le 5 décembre 2013 ;
- 16 décembre 2014, 6 décembre 2015. Article republié à l'approche de Hanouka ou Hanouca (16 décembre au soir-23 décembre 2014, 24 kislev-1er tevet 5775), 23 décembre 2016, 13 décembre 2017 (soir du 12 décembre au soir du 20 décembre 2017 dans le calendrier grégorien), 3 décembre 2018 (Hanoucca 5779, soir du 2 décembre au soir du 9 décembre 2018 dans le calendrier grégorien), 23 décembre 2019 (Hanoucca 5780, soir du 22 décembre au soir du 30 décembre 2019 dans le calendrier grégorien), 14 décembre 2020 à l'approche de la fête juive de Hanoucca 5781, de la veille du 25 Kislev à la veille du 3 Tévet ou tebeth dans le calendrier hébraïque (soir du 10 décembre au soir du 18 décembre 2020 dans le calendrier grégorien), 27 novembre 2021
 à l'approche de la fête juive de Hanoucca 5782, de la veille du 25 Kislev à la veille du 3 Tévet ou tebeth dans le calendrier hébraïque (soir du 28 novembre au soir du 6 décembre 2020 dans le calendrier grégorien), 17 décembre 2022.

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